L’ours se redresse sur ses pattes arrière, le mufle humide alors que ses yeux croisent les vôtres. Tandis qu’il entrouvre la gueule, vous réalisez que votre fusil n’est peut-être au fond qu’une maigre protection face au plantigrade de près de cinq cents kilos. Le canon de votre arme tremble alors que le géant vous charge… jusqu’à entendre cette petite voix qui vous dit dans l’oreille : « Visez un peu plus à gauche. Voilà, c’est bien ». Il existe des experts en tout, et bien entendu la chasse n’échappe pas à la règle. Vous avez toujours eu envie de suivre un serial killer lors de sa besogne, au fond d’une forêt bien sombre ? C’est chose faite avec Cabela's Big Game Hunter : Pro Hunts !
Le chasseur qui ne savait pas chasser seul
On serait tenté de se dire que, vu le nombre d’aficionados du genre FPS, tenir un fusil virtuel serait presque devenu automatique pour nombre d’entre nous. Cela dit, ici il n’est pas question de descendre des astronefs alien, faire exploser des tanks nazis ou renverser un tyran futuriste. Ici, votre cible est ce petit cerf qui vous regarde de ces yeux de biche, la queue dressée. A vos côtés, Wade Middleton ou Jake Shockey vous conseillent sur le meilleur angle de tir, inconscients du fait que Bambi viendra bientôt hanter chacun de vos cauchemars…
Les habitués ne seront pas forcément secoués par cette entrée en matière, si ce n’est que, pour la première fois, vous n’êtes plus seul dans la nature, avec pour unique compagnon votre bonne vieille pétoire. Cette fois-ci, des « experts » vous accompagnent tout au long de votre périple, des bois denses du nord des USA aux prairies du sud, à la recherche du gibier suprême. Si vous survivez à leurs conseils harassants (typiquement que vous ne faites pas comme Michel Blanc et son « planté de bâton » dans les Bronzés font du ski…), vous aurez peut-être l’occasion de profiter un temps soit peu des paysages lors du mode Histoire… à moins de passer directement en chasse libre et savourer enfin le silence !
Sniper Elite : Bear simulator
On ne change pas une recette qui marche, et Cabela le sait bien. Pourtant, avec des itérations comme African Adventures, la série semble avoir pris goût aux grands espaces et aux illusions de monde ouvert, et c’est donc dans de vastes environnements que le joueur se retrouvera plongé. Plutôt jolis, même si pas forcément aussi variés que dans certains épisodes (le terrain de chasse se limitant ici aux Etats-Unis), ils constitueront la base de vos traques si vous savez les analyser correctement lors de chasses totalement libres. Empreintes, chemins, traces de sang sont autant d’indices vous permettant de repérer votre gibier, allant du placide pronghorn au téméraire sanglier, tout en passant par l’élan, le cerf, le coyote ou encore le grizzly. Toute cette portion de l’arche de Noé est donc livrée à votre instinct de prédateur, et il faudra parfois compter sur vos talents de tireur pour ne pas finir du mauvais côté de la chaîne alimentaire.
Nouveauté ou plutôt affinement d’une feature déjà présente dans la série, la killcam est désormais plus détaillée et plus immersive (littéralement parlant), dans la mesure où il sera possible de voir la pénétration des projectiles dans les différents organes de vos cibles. Les statistiques de vos tirs seront également affichées en permanence alors que la scène se déroule au ralenti, pour rendre la mise à mort des plus filmiques… Côté IA, les animaux sont légèrement plus malins que dans certains épisodes, gérant de façon plus spontanée leur réponse à votre approche (fuite ou attaque), vous repérant plus facilement. Un plus non négligeable là où certains opus voyaient vos cibles continuer à brouter après s’être pris une balle dans l’arrière-train. C’est quand même beau, la nature…
Les Pros and Cons
Si vous avez lu ce sous-titre « à la française », il se peut que vous ayez déjà fait un rapprochement linguistique des plus intéressants. Cela dit, concernant cet opus Pro Hunts, un premier aspect notable est la volonté d’accorder au joueur une certaine liberté, tant d’approche qu’au niveau de l’espace qui lui est accordé. Là où les passages couloirs étaient légion dans les premiers épisodes, l’habitué de la série sera sans doute ravi de pouvoir approcher chaque cible à sa manière lors du mode Libre. Visuellement parlant, le jeu est aussi très réussi. On pourra grogner sur le fait que beaucoup d’animaux soient directement repris des derniers épisodes, notamment certains boss de la série Dangerous Hunts faisant ici office de gibier générique, mais la relative diversité du bestiaire reste satisfaisante, tout comme les améliorations de la killcam pour un rendu toujours plus spectaculaire. On en viendra au final à ne regretter qu’une chose : les pros.
Si le jeu est une simulation de chasse en fin de compte assez irréaliste, la présence de ces « experts » est plus rébarbative qu’autre chose. En effet, beaucoup de missions passent pour un véritable tutoriel géant, où le joueur se doit d’attendre patiemment la fin du laïus du grand maître pour reprendre les commandes. Bien que chacun ait son domaine d’aptitude (fusil, arbalète, appeaux, etc.), aucun n’influence réellement la partie puisqu'ils ne participent pas directement à la chasse : ils ne sont en effet là que pour vous observer presser la gâchette, et véhiculer l’image du héros américain fier et sauvage. Un casting dispensable donc, d’autant qu’on lui aurait préféré un simili scénario comme la série Big Game Hunter avait déjà réussi à le faire. Dommage ! Au final, si Pro Hunts tire son épingle du jeu grâce à un monde semi-ouvert et à des nouveautés bienvenues, cet épisode rate son coup en nous imposant la présence inutile de ces experts de la chasse, qui plus est complètement inconnus de ce côté-ci de l’Atlantique.
Points forts
- Grands espaces ouverts, laissant une certaine liberté d’approche
- Killcam affinée, pour un rendu très cinématographique
- Bestiaire pas aussi varié qu’à l’accoutumée mais sympathique
- Plutôt joli
- Customisation de l’équipement et des armes
Points faibles
- Les « pros », qui font plus coups de pub que réels éléments de jeu
- Certains animaux "uniques" des opus antérieurs repris ici comme gibier générique
- Assez répétitif passé quelques heures de jeu
Au-delà de l’aspect « placement de produit » exacerbé qui vise bien entendu à attirer les joueurs américains grâce à des visages familiers de la chaîne "Chasse et pêche", cet opus de la lignée Cabela’s semble avoir un peu perdu de vue une partie de son public. Où sont donc les galeries nerveuses et complètement surréalistes, véritables marques de fabrique de la série ? Où est le niveau de difficulté parfois corsé de certains épisodes ? A vouloir donner une certaine impression de réalisme, le titre perd de son côté « arcade mais fun » sans pour autant clairement s’affirmer comme une simulation de chasse réaliste. Dommage, quand on sait que la série y était parvenue par le passé.