Plouf ! Une ride vient innocemment faire onduler la surface du lac alors que la grenouille de plastique s’enfonce dans les eaux limpides. Entre deux algues, le principal intéressé n’a rien raté de la scène. Ouïes entrouvertes, le black bass s’extirpe de sa cachette vaseuse pour venir à la rencontre de cette étrange chose colorée. D’habitude méfiant, son estomac l’emporte cette fois sur la prudence et alors qu’il referme sa gueule sur sa proie, une douleur subite prend la perche à la joue. Quelques secondes plus tard, il est sorti de l’eau et s’agite sous le regard ravi du pêcheur. Des sensations pareilles, certains ne pensent en trouver qu’au bout d’une canne. A présent, votre Vita peut également faire de même, et ce grâce à Let’s Fish : Hooked on ! Préparez les appâts et les hameçons, il s’agit de ne pas revenir bredouille !
Taquiner le goujon frais comme un gardon, c’est tout un art !
Il est de plus en plus commun de voir des modes scénarisés faire irruption dans des titres où on les attend le moins, et Let’s Fish : Hooked on ! ne fait pas exception à la règle. Vous voilà donc propulsé au centre d’une compétition mondiale de renom, la WBFA, soit World Bass Fishing Alliance (l’Alliance mondiale de pêche à la perche, oui c’est étrange). Alors que les préparatifs vont bon train, vous êtes mis en condition en présence d’une poignée de personnages au design typiquement japonais (traduisez que les demoiselles ont des « appâts » attirant autre chose que les poissons). Peines de cœur, piques bien choisies et romances à l’eau de rose viennent donc s’immiscer dans la compétition, et ce au grand dam des joueurs venus uniquement pour les poissons. Il vous faudra donc ramener le plus de prises possible pour tenter de remporter le championnat qui s’étale sur plusieurs mois, et espérer ferrer ainsi l’élu(e) de votre cœur en le consolant de sa seconde place.
Le jeu se découpe donc en différents modes : le mode Tournoi, qui fait office de mode Histoire, où différentes épreuves vous sont assignées au fil du temps (attraper une prise de telle taille, tant de poissons…), et le mode Défi, où vous vous transformez plus ou moins en chalutier norvégien pour sortir un maximum de poissons du lac en un temps record. Au joueur d’apprendre à mouliner comme un dieu à travers les différentes cartes disponibles, pour devenir le meilleur dresseur… ou pêcheur, c’est selon.
Mon signe astrologique ? Poissons, ascendant mayonnaise.
Vous vous en doutez sûrement : les prises potentielles sont le cœur de Let’s Fish : Hooked on ! Lors de vos balades en bateau sur les cartes, il s’agira de repérer les poissons (facile, leurs nageoires émergent tels des ailerons de requin, quand ce n’est pas la moitié de leur corps) et de leur donner envie de mordre. Truites, achigans, perches noires et autres viendront ainsi s’approcher de votre leurre avant parfois de n’en faire qu’une bouchée. A vous de remonter votre prise sans casser la ligne, ménageant la bête à grands renforts de tripatouillage d’écran tactile. Une fois le monstre sorti des eaux, la pesée viendra refroidir vos ardeurs de vainqueur. Heureusement pour vous, le poisson est un animal à la croissance exponentielle entre l’instant où vous le tirez du lac, et celui où vous racontez l’exploit à vos amis.
Si les cartes n’apportent au jeu qu’un aspect visuel différent de l’une à l’autre, et une présence plus ou moins accrue de certaines espèces, les leurres en revanche détermineront vos résultats finals. Plutôt fidèles à leurs homologues de caoutchouc, les différents appâts synthétiques n’agissent pas de la même manière, certains flottant en surface là où d’autres couleront pour attirer les prédateurs de fond. Une fois encore, au joueur de trouver le leurre idéal pour chaque lieu et poisson et espérer rentrer avec une besace bien pleine. Pour lui faciliter la tâche, il pourra aussi compter sur les capacités uniques des quatre personnages jouables, capables tantôt d’une remontée éclair de leurs poissons, de rendre la ligne brièvement incassable ou encore de rendre leurs appâts irrésistibles pour nos amis à branchies. Reste à savoir si cela suffira pour gagner le trophée ultime !
Tout est bien qui finit en queue de poisson
Les plus perspicaces auront précédé les prochaines lignes. Pour les autres, c’est le temps du constat, et il n’est pas des plus joyeux. Commençons d’abord par la répétitivité du jeu, insupportable même pour les 30 secondes de mémoire supposée d’un poisson rouge. Chaque remontée est similaire, et d’une facilité déconcertante puisqu’il suffit d’un seul mouvement du doigt sur l’écran tactile pour prévenir toute cassure de la ligne. Pour continuer dans les déceptions, le scénario inutile et épuisant viendra aussi vous taper sur les nerfs entre deux prises. Côté poissons, on ne pourra que blâmer la présence de 9 espèces seulement, toutes très semblables, là où certains titres comme Rapala nous proposaient plus d’une soixantaine de poissons. Les animations et la bêtise de ces ostéichtyens sont d’autant plus navrantes qu’il n’est pas rare de voir un poisson trembloter face à l’appât, comme en proie à un bug, ou encore filer vers la berge pour finir le nez hors de l’eau. Il suffira d’ailleurs parfois de continuer d’envoyer un appât au même endroit sans bouger pour ramener successivement une dizaine de poissons, illustrant bien une IA poissonesque des plus basiques. Pour finir, il est triste de noter que la réalisation globale est aussi minimaliste que dépassée, les décors s’arrêtant à quelques arbres ou joncs par-delà les deux ou trois bâtiments présentés, à peine dignes d’une PS2 en début de carrière.
Vous l’aurez compris, Let’s Fish : Hooked on ! n’est pas un bon jeu. Et encore moins un bon jeu de pêche. Simulation tout sauf réaliste, elle pèche (ironiquement) par une flopée de défauts qui sont autant d’arêtes dans la bouillabaisse. Répétitif, graphiquement dépassé et capable de faire perdre patience au pêcheur le plus tenace, ce titre n’est assurément pas à conseiller. Les amateurs du genre lui préféreront les deux opus Reel Fishing présents sur le PS Store, bien plus à même de satisfaire un public certes restreint mais exigeant.
Points forts
- Seul jeu de pêche sur Vita n’étant pas un portage
- Réalisation correcte des poissons et des leurres
- Quelques musiques sympathiques
Points faibles
- Répétitif à l’extrême
- Contexte inutile et risible
- IA des poissons pitoyable
- Graphiquement dépassé
- Truffé de bugs
Pêcheur "no kill" depuis mon plus jeune âge, j’ai eu la chance de savourer bien des instants mémorables canne à la main, mais aussi parfois avec une manette au bout des doigts. Pour autant, aucun de ces instants n’a eu de rapport avec Let’s Fish : Hooked on ! A croire que les développeurs n’ont pas su prendre exemple sur d’autres titres du genre, qui remplissent pourtant bien leur rôle en général. Voilà donc un titre face auquel le joueur se doit de faire comme le poisson devant le pêcheur, à savoir prendre la mouche.