Il y a longtemps, bien longtemps avant notre ère, a existé une époque sombre où seuls les réflexes et les instincts les plus primaires permettaient de rester en vie. C’était un âge primitif, où les formes en étaient encore à leurs balbutiements. Certains appellent cela le Pixelithique, d’autres préfèrent nommer cette période "le temps des bornes d’arcade". Sous ces mots oubliés se cache un contexte d’autant plus étrange, régi par des "crédits" et des "continues" bien loin de notre modernité actuelle. Comble d’ironie, l'un de ces fossiles vivants mettait en scène des créatures contemporaines : des dinosaures. Si le nom scientifique de ce spécimen reste un mystère, les novices l’appellent Prehistoric Isle in 1930. Sur ce, ouvrez vos manuels de paléontologie et préparez-vous à un voyage dans le temps que vos rétines ne sont pas près d’oublier.
Dino soar
Développé par SNK Playmore, Prehistoric Isle reprend le même concept que Metal Slug des mêmes créateurs : on avance et on explose tout ce qui bouge à l’écran dans l’espoir de ne pas perdre une précieuse vie. Cela dit, ici pas de soldats ou de tanks bipèdes. En effet, nos héros anonymes tous deux pilotes s’interrogent sur d’étranges disparitions dans le triangle des Bermudes, et plus particulièrement aux abords d’un îlot nommé "Greenhell Island" (la classe…). Persuadés que leurs adversaires sont des créatures préhistoriques, ils filent vers l’archipel à bord de la meilleure arme disponible contre ce genre d’adversaires : des biplans de 1930 (les mêmes qui régleront son compte à King Kong). Une fois arrivés sur place, ils constatent qu’ils avaient bel et bien raison. Commence ainsi un massacre au-delà de toutes proportions imaginables...
Le scénario s’avérant des plus simplets, il ne faudra pas s’attendre à des subtilités lors de notre progression à travers les différents environnements du jeu, tantôt à bord de notre fidèle avion, tantôt dans le ventre d’un sous-marin militaire. Jungles, cieux nuageux, cavernes et volcans en pleine éruption sont autant de milieux idéals pour réaliser la parfaite carte postale et affronter bon nombre d’adversaires tous aussi titanesques les uns que les autres.
La folie des grandeurs
Qui dit shoot'em up dit ennemis à foison, et Prehistoric Isle in 1930 ne déroge pas à la règle. Préparez-vous donc à voir votre écran perpétuellement couvert de myriades d’ennemis souvent trop nombreux pour être comptés, chaque pixel du titre voulant votre peau. Ptéranodons, insectes monstrueux, ichtyosaures, poissons cuirassés, dinosaures en tous genres mais aussi Cro-Magnons pilotes de chauve-souris géantes chercheront à vous détruire, dans un cocktail de boules de feu, jets d’eau et éructations diverses qui atteindront facilement leur cible… A moins bien sûr que vous n’ayez des réflexes de tigre à dents de sabre sous caféine. Pour vous en défaire, une seule solution : tirer dans le tas pour dégager le passager et récupérer des points par dizaines, ou bien ramasser un item qui vous accordera une puissance de feu accrue durant quelques secondes. Enfin, à condition de rester entier !
Pivots de ce type de jeux et cauchemars du fan d’arcade aux poches vides, les boss sont bien entendu légion et tous plus retors les uns que les autres. Ces créatures titanesques occupent bien souvent une bonne moitié de l’écran quand ce n’est pas plus, limitant d’autant mieux vos déplacements que le moindre contact est mortel. Dotés d’une barre de vie qu’on aurait aimé moins importante, ces monstres constitueront des étapes à même de dérouter le joueur lambda de par leur difficulté souvent extrême, certains ne disposant que d’un seul point faible peu exposé mais étant capable de vous enchaîner simultanément plusieurs attaques (mention spéciale à l’ammonite géante). Pour adoucir notre souffrance, les développeurs ont jugé bon de présenter avant chaque combat la taille et le poids de la bête, la première pesant la bagatelle fictive de 158 tonnes. Un gros bébé qui, comme les autres, nous arrachera un soupir jouissif une fois réduit à l’état de côtelettes dans une explosion visuellement délicieuse et moralement salvatrice.
L’enfer vert était un euphémisme…
Passons aux choses fâcheuses mais nécessaires : la pesée du pour et du contre. Concernant les aspects négatifs, la difficulté extrême du titre peut être considérée selon deux angles différents. En effet, si le joueur en mal de challenge y trouvera un défi à sa mesure, le joueur lambda sera sans doute lassé de mourir toutes les 6 secondes et douze centièmes. Et si les crédits ne sont pas un problème ici, on ne peut qu’avoir de la peine en s’imaginant les malheureux ayant juré de finir le titre sur une borne d’arcade, actuellement sûrement endettés à vie. Autre point négatif : le design pour le moins inégal des ennemis puisque certains bénéficient d’une réalisation admirable là où d’autres font désespérément cheap, même pour le genre. Le manque de variété dans les bonus peut aussi décevoir, Metal Slug nous ayant parallèlement prouvé qu’un arsenal diversifié était possible dans ce genre de jeux. Enfin, ne comptez pas passer vos vacances sur ce titre relégué au rang de mini : vous aurez fait le tour de cette expédition préhisto-génocidaire en moins d’une heure. Ce qui, concernant votre santé mentale, vaut sans doute mieux.
Les côtés positifs à présent. Certes le jeu est difficile, mais comme expliqué précédemment, certains y trouveront leur compte et leur dose d’adrénaline. La réalisation globale est également très agréable et réussie artistiquement parlant. De plus, le design impressionnant des boss ne fait souvent qu’ajouter au sentiment d’impuissance qui s’empare de vous au moment de les combattre. Enfin les adeptes du scoring verront sans nul doute en Prehistoric Isle in 1930 un énième titre sur lequel tenter d’atteindre le score ultime pour pouvoir inscrire trois lettres dans un classement éphémère, et prouver que, comme toujours, même la plus grande des victoires n’est que temporaire. Sur ces envolées lyriques, il serait bon de conclure que Prehistoric Isle in 1930 est un shoot'em up dans les règles de l’art doté d’un contexte atypique qui change de l’habituel conflit politique / idéologique / interplanétaire prisé par le genre, et qui satisfera les habitués n’ayant pas peur de voir souffrir leur (st)ego(saure) face à une difficulté tyrannique. Tyrannique rex, même.
Points forts
- L’exemple type du jeu d’arcade
- Difficulté relevée…
- Un contexte original
- Boss impressionnants
- Plutôt joli dans l’ensemble
- Le prix
Points faibles
- Très court
- … qui ne manquera pas d’en dérouter certains
- Peu de bonus
Si sa difficulté, par moments extrême, ne vous fait pas fuir dès les premières secondes, vous pourriez bien être amené à jouer à Prehistoric Isle in 1930 plus longtemps que vous ne l’auriez escompté. Fort de ses environnements et ennemis variés, de boss colossaux et d’explosions à foison, ce titre saura faire vibrer la corde sensible chez les joueurs de la première heure tant il caractérise à lui seul l’esprit du jeu d’arcade, notre préhistoire vidéoludique à nous.