Les avancées scientifiques, c’est le progrès. Et rien n’arrête le progrès. Pas même les lois ou la morale, pour peu que l’invention soit révolutionnaire. Tout bon amateur de films d’horreur ou de comics Marvel vous le dira : jouer les apprentis sorciers avec des bébêtes à pattes multiples n’est pourtant jamais sans conséquences. Ce n’est qu’une fois la gaffe commise et que l'on se balade entre les gravats, qu’on se rend compte de l’erreur qui aurait pu être évitée. Cela dit, il se peut que la chance vous sourie malgré tout, même dans ces moments d’infortune. Pour nettoyer votre capharnaüm par exemple, vous auriez bien besoin d’un coup de main. Ca tombe bien : maintenant, vous en avez huit…
Ghost in the shell
Pour le Dr Kelly, la vie est belle. En plus d’être une sommité scientifique de renommée mondiale, le bougre est parvenu à achever sa dernière expérience la plus folle, celle de pouvoir transférer son esprit dans un corps autre que le sien, pourvu que ce dernier ne soit pas doté d’une intelligence très développée. Alors qu’il finalise de nuit les tests de son ultime prototype sur l’un de ses cobayes favoris, le bon docteur ne peut se douter qu’il est secrètement épié. En effet, les dirigeants de Microtech, société rivale, cherchent à s’accaparer cette technologie révolutionnaire. Quitte à se salir les mains. Ce n’est qu’une question d’heures avant que des mercenaires fassent irruption dans le bureau de Kelly pour lui voler ses travaux, et s’assurer de son silence. En pleine session de test, le doc se voit donc recevoir non pas un prix Nobel mais une rafale de plombs, l’envoyant ad patres tandis que ses adversaires de toujours s’enfuient avec son corps et ses données. Hélas pour eux, ils ont commis une erreur : ils ont abattu une coquille vide. Engoncé dans une carapace de chitine, Kelly n’a rien raté de son propre meurtre. Doté d’autant d’yeux que de pattes, il est piégé dans le corps de son cobaye favori : une tarentule modifiée génétiquement. Pour éviter d’avoir à gober des mouches pour le reste de sa vie, une solution : se lancer dans une quête folle pour récupérer son corps !
Vous l’aurez compris, Spider commence fort. Pour autant, après une introduction de qualité vous présentant l’étendue des dégâts, pas question de se faire une toile. Le jeu vous invite à poursuivre les sbires de Microtech jusque dans leur antre à travers une galerie de niveaux (29 au total), allant de votre propre labo jusqu’au cœur de la forteresse ennemie, tout en passant par un musée, un jardin, voire même un ordinateur ! Autant vous dire que vos huit pattes ne vont pas chômer… Pour survivre, il vous faudra faire face aux éléments, aux objets du quotidien devenus mortels faute de taille adaptée ainsi qu’aux autres engeances nées d’expériences interdites. Comme quoi, à défaut de tisser il vous faudra filer.
Mille et une pattes
Au cours de ses pérégrinations pour retrouver ses véritables gambettes (qu’on espère moins velues), votre avatar arachnéen devra affronter les autres cobayes de Kelly, ayant profité du chaos général pour se faire la malle. Autant de bestioles bioniques bien décidées à vous faire la peau (tout du moins la carapace) alors que vous vadrouillez dans les différents environnements du jeu. Guêpes armées de roquettes, sauterelles-ninjas, scorpions assassins, bon nombre de vos congénères à huit pattes chercheront à vous barrer la route, tout comme le feront les éprouvettes remplies d’acide, les fourneaux restés allumés, les câbles électriques endommagés et bien d’autres. Le tout saupoudré bien sûr de quelques boss, tels qu’un bras mécanique psychotique ou un adversaire final qui n’aurait rien à envier au Némésis de Samus Aran. Heureusement, pour faire face à pareille menace, vous avez de quoi occuper vos pattes, aussi nombreuses soient-elles.
Le bon Dr Kelly ne faisant pas les choses à moitié, son cobaye préféré peut voir certains de ses membres s’amputer (jusqu’à quatre simultanément) pour être remplacés par des prothèses mortelles. Une patte pourra donc servir de lance-flammes là où une autre sert de lame, un bon nombre de combinaisons s’avérant possibles. Poison, boomerang, roquettes… Jamais une araignée n’aura été aussi dangereuse ! Bien entendu, il faut également composer avec l’agilité de la bestiole, par ailleurs remarquablement animée, et avec ses capacités intrinsèques, telles que l’adhérence aux parois. De quoi convaincre le plus atteint des arachnophobes que cette bête-là mérite mieux qu’un simple coup de savate !
L’homme araignée, on connaît ça Parker…
Au terme de notre quête, le constat pourrait bel et bien réserver quelques surprises… étonnamment bonnes. En effet, si l’on pourra reprocher au jeu une difficulté moyenne et des boss que l’on aurait appréciés plus nombreux et coriaces, Spider nous offre néanmoins une aventure bourrée de qualités indéniables. Graphiquement très agréable à l’œil pour l’époque, les déplacements et animations des différentes bestioles se déplaçant à l’écran sont aussi réussis que fluides. Les niveaux ont beau se limiter à une progression 2D, ils ont été conçus totalement en 3D et offrent donc un point de vue intéressant dans la mesure où l’impression de suivre une araignée en train de se promener est totale. La bande sonore du titre est également très réussie, chaque niveau offrant un thème à la fois entraînant et adapté à la situation, évitant l’écueil général de faire couiner nos amis arthropodes quant ces derniers s’entre-tuent.
Au-delà du protagoniste qu’il propose d’incarner, Spider s’avère donc une belle surprise, offrant une expérience de jeu pour le moins unique. Si bien qu’une fois l’aventure terminée, on en viendra sûrement à regretter qu’elle n’ait pas duré davantage. Un bon exemple de jeu où le plaisir ne s’arrête pas forcément à l’aspect visuel du titre, Spider s’avérant tout aussi jouissif à jouer que lors de sa sortie, il y a bientôt vingt ans. Comme quoi, il n’y a pas que les jeux AAA qui sont appelés à régner. Et si vous avez raté le jeu de mots précédent, ne vous en voulez pas. Avec Spider, il est toujours bon d’avoir une araignée au plafond…
Points forts
- Jouer une araignée (pas si commun mine de rien)
- Fluidité et qualité graphique des plus honnêtes pour l’époque
- Une bande-son réussie
- Les différentes possibilités de membres interchangeables
Points faibles
- Une progression en 3D aurait pu être possible
- Peu de boss
- Niveau final bien trop facile
Parti d’une idée pour le moins saugrenue (jouer une araignée), Spider propose pourtant un gameplay et une expérience de jeu rendus uniques sur bien des points. Bercé en permanence par une bande-son des plus agréables, le joueur peut savourer sa chance d’être aux commandes d’une tarentule cyborg n’ayant rien à envier à Robocop. Fun, fluide et atypique, Spider est assurément un titre auquel il faut avoir touché dans sa vie de gamer. Si bien sûr la phobie des bébêtes à huit pattes ne vous rattrape pas avant !