Entamée en 2010, la saga Final Fantasy XIII dévoile enfin son grand final avec Lightning Returns, qui conclut une trilogie qui aura divisé la communauté. Qu'en est-il de cet ultime épisode sur consoles de septième génération ? Voici notre réponse.
C'est un tout nouveau cadre dramatique que Lightning Returns nous dévoile dès son introduction. Après avoir sommeillé pendant 500 ans, l'héroïne se réveille affublée d'un nouveau rôle, celui de Libératrice. En effet, un dieu nommé Bhunivelze passe un pacte avec elle : si elle sauve le monde condamné à l'Armaggedon dans à peine une semaine, sa sœur Serah, morte à la fin de Final Fantasy XIII-2, sera réanimée. Pour ce faire, il vous faudra réaliser des quêtes pour sauver un maximum d'âmes et ainsi prolonger de plusieurs jours votre périple en faisant fleurir l'Yggdrasil. Si vous atteignez le 13ème jour, la vraie fin se dévoilera à vous. Sinon, le monde disparaîtra.
Contre-la-montre
Voilà un pitch plutôt étonnant qui n'est pas sans conséquences, loin de là, car chaque action que vous entreprenez dans le jeu doit l'être avec une seule chose en tête : combien de temps ça va prendre ? Les minutes défilent à une vitesse plutôt hallucinante : trois secondes pour une minute, ce qui fait 1h12 pour une journée. Oui, c'est très rapide. En fait, passé l'intro, la première mission vous met tout de suite dans le bain. Dans la ville de Luxerion, une jeune fille aux cheveux roses (comme Lightning) a été assassinée, prise pour la Libératrice. Vous devez aider l'enquêteur principal à trouver des indices pour savoir qui est le coupable (ce qui consiste à parler aux gens et à fouiller la zone). Ici déjà, cette quête peut être ratée si vous ne réussissez pas à résoudre l'énigme dans les temps, menant à une autre victime. Et ceci est valable pour toutes les quêtes, les principales (au nombre de cinq) et les secondaires (au nombre de 66) : vous pouvez très bien ne rien réussir avant la fin du temps escompté, que ce soit un timer spécial pour la quête en question ou tout simplement le défilement général du temps.
Courir aussi vite que l'éclair
C'est ici que réside l'élément de gameplay qui est sans doute le plus controversé : les indications sont minimales et on vous demande souvent de trouver quelqu'un ou quelque chose sans plus de détails que cela. Vous ne savez donc pas où vous rendre, ni même, pire encore, à quelle heure. Il n'est pas rare d'être passé au bon endroit mais de ne pas avoir vu ce que vous y cherchiez parce que cette chose n'y est présente qu'à une heure précise qui ne vous a jamais été indiquée (ou très mal). Alors certes, ces phases de recherche pourraient être agréables pour les fans d'exploration qui aiment fouiner. Mais voilà, la recherche et l'exploration ne sont-elles pas incompatibles avec une telle contrainte de temps ? A chaque fois que vous vous baladez à la recherche de votre Saint-Graal du moment, vous voyez les secondes s'égrainer inlassablement et ressentez bien trop souvent la frustration, là où jouer est censé être un plaisir. Vous promener pour tester vos nouveaux équipements, étrenner vos nouvelles compétences sur les ennemis, fouiller une zone pour chercher des trésors, sont des actes que vous ne ferez qu'après une grande réflexion, la boule au ventre. Voire que vous ne ferez pas, faute de temps. C'est quelque chose de bien dommage pour un titre qui a pourtant tant à offrir.
Des affrontements complexes et techniques
Car Lightning Returns est bien évidemment un titre de grande qualité qui a bénéficié du savoir-faire des équipes de Square Enix. Le système de tenues, par exemple, est bien plus complexe qu'il n'y paraît à la base. Chaque tenue possède ses caractéristiques qui la prédisposent à l'utilisation de tel ou tel type de compétences. Sans les nommer, on retrouve un petit peu les rôles des deux autres épisodes (Saboteur, Ravageur, Attaquant, etc.). Cela dit, puisque chaque pièce d'équipement peut apporter des bonus et que vous choisissez vous-même les compétences pour chacun de vos trois styles, ce système est beaucoup plus permissif, et donc difficile à appréhender. D'autant que l'impact en combat est primordial : trouver et exploiter le point faible d'un ennemi peut faire d'un affrontement ardu une véritable promenade de santé. On retrouve bien sûr le système de choc, avec un aspect tactique un peu plus prononcé. Pour certains ennemis par exemple, il faut envoyer une attaque d'un certain élément pile quand il prépare une certaine attaque pour avoir un vrai impact sur sa ligne de choc. De plus, chacune de vos compétences (de la magie aux attaques physiques en passant par les altérations d'état) possède ses propres propriétés pour atteindre le choc, ou pour prolonger les oscillations de la ligne.
La meilleure attaque, c'est la défense
Mais outre l'attaque, la défense se doit d'être maîtrisée si vous ne voulez pas vous faire one-shot par le premier zomok venu. Si les différentes gardes sont aussi des capacités à placer (ou non) dans le style de votre choix, il existe deux réelles façons de vous défendre. Soit vous laissez votre doigt appuyé sur le bouton (baissant drastiquement votre barre ATB) et bloquerez partiellement les dégâts, soit vous appuyez avec le parfait timing pour réaliser une garde parfaite, bloquant bien plus efficacement les attaques et amenant parfois à choquer certains ennemis. Bien plus dangereux, mais diablement gratifiant, en plus d'être nécessaire à haut niveau. Ainsi, les combats demandent une grande concentration, surtout lorsque plusieurs ennemis vous encerclent. A noter que s'il existe une caméra dynamique proche de Lightning, il est largement préférable de prendre la caméra éloignée pour une meilleure lisibilité.
Une évolution originale
Nous l'évoquions précédemment, mais le système d'évolution s'avère très éloigné de ce que proposait auparavant la saga (même si c'est dans la continuité des FFXIII-2). Première chose : Lightning ne gagne pas des niveaux. Seules les quêtes réussies boostent directement ses stats. Toutefois, cela ne veut pas dire qu'il ne va pas falloir faire du « level-up ». En effet, ce sont ici vos capacités qui peuvent gagner en puissance en deux phases. La première, c'est de fusionner des capacités identiques (trouvées sur les ennemis ou dans des sphères) afin d'en améliorer les capacités. Par exemple, deux magies Feu N1 ensemble. Après un certain nombre de fois, votre magie Feu N1 ne peut plus être améliorée via fusion. Il faut alors passer par l'élévation, qui consiste à utiliser un orbe pour passer votre magie Feu N1 en magie Feu N2, gagnant ainsi en puissance tout en gardant les bonus engrangés. Un système très intéressant qui nous donne constamment l'impression d'évoluer, car pratiquement chaque ennemi a quelque chose de potentiellement intéressant à lâcher, surtout après le 6ème jour.
De l'art ou du cochon ?
Avec son système de combat enivrant, Lightning Returns fait aussi l'effort de proposer les environnements qui vont avec. D'une cité vétuste et rurale à la ville festive de bord de mer, des Terres Sauvages aux Dunes de la Mort, ce sont quatre zones bien distinctes, accessibles dès le début du jeu, qui s'offrent à vos guibolles. Même si certains panoramas sont magnifiques (notamment grâce à de grandes étendues), le résultat visuel n'est pas toujours aussi satisfaisant, surtout dans les zones un peu moins théâtrales. Luxerion, par exemple, si on excepte la cathédrale et les gares, s'avère plutôt pauvre d'un point de vue architectural et la plupart des donjons ne resteront pas dans les mémoires. En règle générale, on est tout de même très au-dessus du lot. Mais l'aspect artistique, c'est aussi les musiques, qui sont quant à elles de grande qualité tout au long de l'aventure grâce au trio Masashi Hamauzu, Mitsuto Suzuki et Naoshi Mizuta, trois artistes qui ont déjà travaillé avec Nobuo Uematsu sur de précédents épisodes de la série. Que ce soit dans les combats ou pendant les balades à dos de chocobo, les différents thèmes qui nous accompagnent font l'effort d'être à la fois appropriés et éclectiques, ce qui n'était pas une mince affaire. Une note spéciale pour les quelques morceaux interprétés par des artistes de rue dans certains endroits, reprenant des thèmes bien connus de la série à la guitare sèche ou avec d'autres instruments.
Foutu sablier...
Un contenu très honnête, une réalisation artistique de haut niveau et un système de combat et d'évolution grisant et attrayant, que manque-t-il vraiment à ce Lightning Returns ? Réponse : le temps d'en profiter. Tout au long de l'aventure, j'ai personnellement eu ce terrible mal-être, l'impression d'avoir un magnifique jeu devant moi mais l'interdiction d'en jouir. Un peu comme si, petit, on vous offrait une toute nouvelle console de jeu mais qu'on vous disait que vous ne pouviez y jouer qu'une heure. On est constamment poursuivi par l'aiguille du temps, perdu dans un univers attirant, profond, complexe et jouissif, mais malheureusement inadapté au concept. Alors certes, chacun aura un avis différent sur la question, et le principe d'un test n'est que de donner le mien. Mais un élément me fait dire que même les créateurs ont été bloqués par cette contrainte de temps : le scénario principal. Il est compliqué de faire du story-telling dans un système aussi peu permissif, sans compter la présence d'un monde ouvert, ironiquement contraignant dans ce cas précis. Résultat, on suit avec peine les états d'âme de la dépressive Lightning, pratiquement incapable de provoquer une émotion chez le joueur, et on est aspergé d'inutiles élucubrations philosophiques alors que la véritable trame est extrêmement basique et surtout cousue de fil blanc. Pour tout vous dire, je me suis fait une idée de ce qui allait se passer dans le scénario dès la première heure du jeu. Et le pire, c'est que j'avais raison...
Un éternel recommencement
Enfin, finissons par la question du New Game +, qui tient une part plus importante dans Lightning Returns que dans de nombreux J-RPG. Soyons clairs : sans guide, il est quasiment inévitable que votre première partie se solde par un échec. Cela ne serait pas un problème si le New Game + était totalement prévu dans le concept, et sur le papier, il l'est. On reprend le jeu avec tout son argent, les tenues, les équipements, les compétences, les statistiques et les objets accumulés. Du coup, on est prêt pour effectuer toutes les quêtes qu'on n'a pas eu le temps de faire dans la partie précédente... Sauf qu'il faut aussi se refaire tout le scénario ! Alors que la scène finale en cas d'échec (qui arrive brutalement et qui aurait d'ailleurs dû être plus travaillée) laisse présager que Lightning revient dans le passé et va se rappeler des événements qu'elle vient d'endurer, on apprend finalement qu'elle perd la mémoire et tout recommence comme si de rien n'était. Faut-il vraiment suivre un fil rouge sur une page Internet pour profiter de Lightning Returns en une seule fois ? Peut-on alors vraiment dire que l'expérience est agréable ? Au final, Lightning Returns est un épisode qui divisera. S'il ne fait nul doute qu'il est à essayer, au moins pour les risques pris, et si peu de gens pourront nier qu'il s'agit d'un grand jeu, l'impression finale laissera tout de même un goût amer à de nombreux joueurs, fatigués de courir contre la montre sans pouvoir jouir du contenu à leur guise.
Points forts
- Un monde ouvert, dès le début
- Des quêtes secondaires scénarisées qui demandent d'être organisé
- Un système de combat particulièrement grisant
- L'évolution des compétences
- Le système de tenues qui demande réflexion et stratégie
- Visuellement réussi
- Une sacrée difficulté
- Des musiques de grande classe
Points faibles
- Une sensation affreusement désagréable de ne pas pouvoir profiter du jeu comme on le veut
- Sans guide, on est presque forcé de passer par un New Game +
- Le scénario faussement complexe qui en fait trop
- Un bestiaire pas assez diversifié, même si c'est en partie justifié par l'obligation d'apprendre les particularités de chaque monstre
- Le manque d'émotions de Lightning. Certes, c'est le personnage, mais c'est dur de s'y attacher
Cette note peut faire peur. Ceux d'entre vous qui ne prendront pas la peine de lire le test pourraient penser que Lightning Returns n'a pas les atouts d'un grand jeu. Ils auraient tort. Lightning Returns est définitivement un grand jeu. Des combats dynamiques et techniques, une difficulté accrue, une grande liberté, un système de tenues et d'évolution bien fichu et une patte artistique (notamment musicale) indéniable le placent d'office dans la catégorie des blockbusters qui ont été soignés dans les moindres détails par les développeurs. Oui mais voilà, alors qu'il s'agit d'un choix audacieux qu'on ne peut qu'applaudir, la contrainte de temps imposée, qui aurait pu être formidable en elle-même, semble totalement inadaptée au genre que le reste du gameplay de ce Lightning Returns représente. Tellement de choses à faire, tellement de choses à voir, et trop peu de temps pour en profiter, voilà ce qui risquera de marquer votre aventure. Une sensation d'échec constant et de frustration. Quoi qu'il en soit, la conclusion de la trilogie Final Fantasy XIII vaut largement la peine d'être vécue, au moins pour l'expérience inédite qu'elle vous apportera.