Bien que vous ayez quitté le village depuis une bonne heure, le bruit sourd de ses tambours parvient encore jusqu’à vos oreilles. Autour de vous, la végétation suintante de rosée étouffe tous les sons. Ceux de vos pas comme ceux de votre proie. Le fusil en mains, vous vous arrêtez une seconde pour reprendre votre souffle, impulsant un air surchauffé dans vos poumons mis à mal par l’humidité ambiante : il est ici. Vous l’avez senti. Dans l’arbre qui vous surplombe, un mouvement suspect vous fait relever la tête. Juste à temps pour voir le jaguar bondir toutes griffes dehors, dans un feulement assourdissant. L’instant reste figé dans le temps, duel entre la proie et le prédateur, moment où les rôles s’inversent… Pour en connaître l’issue, une seule solution : Cabela’s Dangerous Hunts 2009.
On ne change pas les rayures du tigre
La lignée Cabela’s, aujourd’hui encore très prolifique, n’en était qu’à ses débuts à la sortie de Dangerous Hunts 2009. Après un opus PS2 et PSP intitulé Dangerous Hunts ayant trouvé son public, une suite était plus qu’évidente. Et les consoles de nouvelle génération apportaient alors le parfait matériel pour offrir au joueur une expérience de jeu plus ouverte. Plus détaillée également. Pour autant, pas question de changer l’ADN de la série, encore à ses débuts. Les piliers allaient rester les mêmes tout au long de la genèse d’un prédateur qui comptait bien parvenir un jour à se tailler la part du lion sur le marché de la chasse vidéoludique.
Comme toujours, Dangerous Hunts est avant tout une question de traques et de voyages, ces derniers formant la jeunesse aussi bien que le chasseur semble-t-il. Pour autant, l’opus 2009 se démarque par plusieurs choix, abandonnés par la suite pour des raisons inconnues. Il offre ainsi la possibilité aux joueurs de visiter bien entendu l’éternelle Afrique et l’Alaska, mais également la Russie, l’Amérique du Sud ou encore l’Inde, le tout à la recherche des prédateurs les plus dangereux que la nature ait bien voulu enfanter. Et bien entendu, il est de votre devoir de les abattre pour prouver au monde que c’est vous qui avez la plus grosse… soif de sang bien entendu…
Mieux vaut hurler avec les loups
Ne soyez pas surpris si soudainement la première créature virtuelle croisée cherche à vous égorger. Cabela’s a toujours cherché à enseigner que, dans le Livre de la Jungle, Baloo et Bagheraa se seraient disputés la carcasse de Mowgli plutôt que de l’aider. Et pour ce qui est des ours et des panthères, vous en aurez à foison. Le jeu se basant sur un système de petits scénarios, chaque mission vous enverra patauger dans les recoins d’un marais quelconque, ou traîner vos bottes dans la terre rêche d’une savane ou la neige durcie d’une montagne pour traquer une bête. Pour autant, l’objectif sera toujours scénarisé : « un avion s’est écrasé dans la jungle, allez sauver les occupants » ou « des lions se rassemblent près du village : aidez les villageois ». La chasse se retrouve alors transformée en self-défense, peut-être pour justifier la mise à mort d’animaux menacés de disparition. Par la suite, la série prendra moins de pincettes avec cet aspect particulier, mais ici il s’agit de ne pas déplaire au potentiel écologiste qui relègue ses bas instincts dans le monde du jeu vidéo.
Le bestiaire est la base de tout jeu Cabela’s, et celui de Dangerous Hunts 2009 ne déçoit pas. De par ses destinations plus variées, il sera possible de croiser des fauves d’un peu partout. Au menu : félins furieux (lions, tigres, couguars, léopards, jaguars…), canidés carnassiers (loups, plusieurs races de hyènes…), plantigrades affamés (grizzlys, ours noirs…) mais également bon nombre d’herbivores pas si placides (rhinocéros, éléphants, buffles, sangliers…). Autant de dizaines de kilos de muscles et d’os qu’il vous faudra mettre à terre, et ce grâce à un arsenal adapté. Fusil de précision, pistolet, fusil de chasse, fusil à pompe… Un fusil tranquillisant est même de la partie, certains animaux devant être capturés vivants (tigres échappés de la réserve par exemple), mais gare à vous : contrairement à une balle, le sédatif met du temps à agir. Trop de tranquillisant tuera l’animal, pas assez vous tuera vous !
Le léopard hérite de ses taches
Encore à ses débuts, la série Cabela’s expérimente pour trouver le mélange idéal entre action et chasse, et Dangerous Hunts 2009 s'avère être un cobaye sous bien des aspects. S’il reprend les mécaniques de gameplay de l’opus précédent, il souffre pourtant de bon nombre de défauts. En effet, si les zones à la disposition du joueur sont moins linéaires qu’elles ne le deviendront dans les opus futurs, elles sont tantôt vivantes et dynamiques (l’Inde), tantôt mortellement inertes (la Russie). Et même si des missions bonus viendront se débloquer au fur et à mesure que vous progressez dans le jeu, il ne faut pas s’attendre à une durée de vie dépassant les 8 heures de jeu. L’I.A. animale est parfois également des plus énigmatiques, le fauve que vous avez dans le viseur tournant désespérément en rond autour de vous, comme cherchant à vous hypnotiser. Et même si ce détail est rare, il peut parfois ruiner un passage où le fameux boss de zone se retrouve complètement inoffensif.
Pour autant, au lion qui a perdu ses dents, il lui reste encore ses griffes. Même s’il est moins abouti que ses prédécesseurs, Dangerous Hunts 2009 n’a pas à rougir face à son contenu, qui apporte d’ailleurs bien plus de variété que les opus suivants, tant au niveau des environnements, des animaux et du gameplay lui-même. Très joli pour l’époque, les créatures sont matérialisées de façon réaliste, et il n’est pas rare de sursauter alors qu’un prédateur fond sur vous au détour d’un buisson, lançant un grondement des plus crédibles. Le côté "scénarios multiples" est également une bonne trouvaille, justifiant à la fois les partis pris (changer de zone à chaque mission) et les besoins de bestiaire. Une bonne pioche donc, pour tout joueur désireux de se faire la main sur autre chose que des nazis de la Seconde Guerre mondiale ou une quelconque puissance futuriste. Loin d’être parfait, Cabela’s Dangerous Hunts n’en reste pas moins un jeu d’action-aventure-chasse qui a su trouver son public, et qui a su glisser un tigre dans le moteur de sa descendance, toujours florissante.
Points forts
- La variété des environnements (5 continents)
- Le bestiaire (plus de 25 animaux dangereux)
- L’arsenal à disposition
- A chaque mission son scénario et son lieu
- Les missions de capture, parfois surprenantes
Points faibles
- L’absence des galeries, marque de la série
- Assez court
- L’I.A. au comportement parfois étrange
- Les doublages, quelquefois risibles (mention spéciale au chef de la réserve indienne)
Très agréable à l’œil à une époque où la série en était encore à ses débuts, Cabela’s Dangerous Hunts 2009 sait encore aujourd’hui se distinguer du reste de la portée par son contenu unique. S’il manque les traditionnelles galeries, alors encore en gestation, le titre propose un contenu conséquent et varié. Il met aussi et surtout en avant des idées par la suite abandonnées (mini-scénarios, capture plutôt que chasse, exploration de l’Amérique du Sud et de l’Europe de l’Est…) qui parviennent à atténuer des défauts qui, eux, se retrouveront jusque dans les opus les plus récents. Et même si quand le lion faiblit, les hyènes reprennent courage, malheureusement pour elles le futur est bien assuré !