Qu'on aime ou qu'on déteste la série, il faut bien reconnaître que la sortie d'un nouveau Call of Duty est toujours un petit événement. La licence s'est en effet imposée comme la référence du FPS grand public et fait toujours un carton incroyable en termes de ventes. Faut-il pour autant en déduire que la qualité est forcément au rendez-vous ? La sortie de Call of Duty : Ghosts nous donne justement l'occasion de nous demander si la série parvient encore à évoluer avec son temps.
N'y allons pas par quatre chemins, Call of Duty : Ghosts marque forcément un tournant dans l'histoire de la licence. Non seulement c'est le premier épisode à faire son arrivée sur PS4 et Xbox One, mais il est surtout développé par un studio amputé d'une bonne partie de ses têtes pensantes. Les fondateurs d'Infinity Ward se sont fait la malle dans des conditions houleuses en 2010 et ils ont mis sur pied une nouvelle structure, Respawn Entertainment, qui se charge du développement du très prometteur Titanfall. Ce Ghosts est donc particulièrement attendu au tournant, tant d'un point de vue technique qu'au niveau de son contenu. Pas de chance, la campagne solo de cet opus n'est certainement pas la plus épique...
C'était pas ma guerre...
Call of Duty : Ghosts nous entraîne dans un futur proche pas franchement idyllique. Les états d'Amérique Latine se sont regroupés dans une fédération qui mène une guerre féroce contre les Etats-Unis. Ils ont même détourné un satellite militaire pour anéantir purement et simplement différentes villes nord-américaines. Pourquoi tant de haine ? Ne cherchez pas à vous creuser la tête, les méchants sont les méchants et vous ne saurez jamais vraiment pourquoi ils vous en veulent... Bref, le jeu se déroule en majeure partie 10 ans après cette catastrophe. Vous suivez deux frères, de jeunes soldats qui devront faire leurs preuves dans une unité d'élite mystérieusement nommée Ghosts. Les membres de ce groupe sont dans le collimateur des forces ennemies, un mec patibulaire et increvable paraît d'ailleurs bien décidé à tous les chasser un à un. Non seulement on ne sait pas vraiment pourquoi on se bat, mais on a aussi généralement bien du mal à comprendre de quelle manière on se retrouve dans les différentes situations exposées. La campagne est courte (comptez un peu plus de 5 heures) mais elle n'en est pas forcément intense pour autant : certes vous aurez des démolitions à gogo, mais l'aspect éculé des ficelles employées risque de vous lasser.
Les vieilles recettes ne sont pas toujours les meilleures
Il n'est pas question de tout rejeter en bloc, certains aspects de la campagne sont vraiment rafraîchissants et on a même droit à quelques mises en scène originales. On pense par exemple aux niveaux dans l'espace ou dans les fonds marins qui ne sont pas nécessairement les plus nerveux, mais qui se montrent vraiment dépaysants. On ne rechignera pas non plus devant la scène façon rail-shooter sur la glace, certes on a une impression de déjà-vu mais l'ensemble est assez bien rythmé pour nous faire passer un bon moment. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant des séquences d'infiltration. Le fait de se cacher dans l'herbe au pied des soldats ennemis passait déjà assez mal dans le premier Modern Warfare, c'est devenu un artifice de gameplay franchement risible six ans plus tard. De manière générale, les réactions des ennemis sont rarement crédibles et les ficelles vraiment trop grosses pour que l'on se laisse prendre au jeu. On sent pourtant une certaine volonté d'innover en matière de mécanique de jeu. Vous serez par exemple souvent accompagné par votre chien, un compagnon à qui vous donnez des ordres et que vous pouvez même diriger directement pendant l'une des missions. Mais finalement, ce pauvre toutou se transforme bien vite en boulet et on est content de s'en être débarrassé dans les derniers niveaux.
C'est une autre chanson en matière de prise en main : on garde bien entendu l'ADN de la série mais de petites améliorations notables ont été apportées ici ou là. Si l'ajout des glissades paraît davantage esthétique que fonctionnelle, on ne peut pas en dire autant pour le lean. Certes, cette fonctionnalité est loin d'être une grande nouveauté dans le petit monde des FPS, mais son intégration à Call of Duty : Ghosts est plutôt réussie. C'est tout simple, il suffit de viser près du bord d'une couverture pour jeter un petit coup d’œil sur le côté. On aurait par contre préféré profiter d'un peu plus d'améliorations purement techniques : il faut être honnête, il ne faut pas compter sur cet épisode pour nous en mettre plein les rétines. On n'est jamais très loin du rendu des précédents volets et il faut bien avouer que cette version Wii U semble moins détaillée que ses consœurs. L'aliasing est omniprésent, les textures pas franchement folichonnes, bref le lifting graphique n'est pas à la hauteur de ce que l'on espérait.
Un multi qui sauve la mise
Vous l'aurez compris, Call of Duty : Ghosts ne restera pas dans les mémoires pour son solo, heureusement le multijoueur est bel et bien là pour nous faire frémir sur le long terme. On passera rapidement sur les modes de jeu habituels pour s'intéresser aux nouveautés de cet opus qui nous ont tapé dans l’œil. Certains modes sont ainsi clairement taillés pour le teamplay. On pense par exemple au Recherche & Sauvetage qui se présente comme un Recherche & Destruction dans lequel on peut réanimer ses coéquipiers à condition que l'ennemi n'ait pas récupéré leurs tags. C'est aussi le cas de Dépôt, un Elimination Confirmée dans lequel il faut apporter les tags à un but pour marquer des points, mais aussi d'Eclair, un CTF sans le drapeau. On apprécie aussi le mode Enragé, un Team Deathmatch dans lequel il faut enchaîner les frags toutes les 30 secondes sous peine d'exploser. Les recettes ne sont pas d'une originalité folle, mais elles fonctionnent et on se prend vite au jeu à condition bien entendu de trouver suffisamment de monde en ligne. Notez que les 14 maps proposées font aussi dans la diversité. L'aspect destructible mis en avant pendant la promotion du jeu fait plutôt gadget, mais Infinity Ward s'est évertué à nous proposer des environnements très variés, non seulement par leur ambiance, mais aussi par leur taille. On peut même parfois se demander si certaines maps ne sont pas un poil trop grandes pour s'adapter au gameplay de CoD. C'est le cas par exemple de Stonehaven, un environnement qui fleure bon les ruines écossaises mais qui ne plaira pas aux amateurs de lieux clos. Mais c'est une question de goût et finalement le seul véritable défaut de ce multijoueur demeure une gestion parfois un peu étrange des points de spawn : on rage parfois en apparaissant directement sous le nez de ses ennemis.
La gestion de l'équipement ressemble un peu à un mix entre celui de Modern Warfare 3 et celui de Black Ops 2. Comprenez par là que l'on retrouve à la fois les trois types de killstreaks du premier et la customisation poussée du second. Vous voulez vous passer de votre arme secondaire et de vos accessoires pour utiliser un maximum d'atouts ? Vous êtes tout à fait libre de concevoir le soldat dont vous rêvez... à condition bien entendu d'avoir emmagasiné suffisamment de points pour débloquer l'ensemble. Les premières parties nous laissaient l'impression que les killstreaks axés Assaut étaient peut-être un brin abusés. Le chien par exemple se déclenche assez vite et il s'agit tout de même d'un compagnon qui reste sur la map même lorsque vous passez l'arme à gauche. C'est certain, il faut un petit temps pour s'habituer à ces présences canines, mais, tout compte fait, il s'agit d'un killstreak bien stratégique qui apportera certainement de nouvelles façons de jouer. L'autre petite nouveauté c'est la possibilité d'accéder à des petits défis au beau milieu de la partie. Il suffit de prendre une mallette fantomatique sur un ennemi mort pour les déclencher et il vous sera accordé un colis stratégique si vous les réussissez.
Une escouade à son service
La véritable nouveauté en termes de personnalisation dans le multijoueur est la possibilité de créer plusieurs soldats et de choisir leur apparence. C'est l'occasion par exemple d'incarner les avatars féminins, mais aussi et surtout de se créer une véritable petite unité d'élite. Le mode Escouade est d'ailleurs là pour mettre votre petite équipe à rude épreuve. Il vous permettra en effet de vous exercer en compagnie de vos gaillard(e)s contre des équipes créées par d'autres joueurs. Chaque membre va réagir en fonction de l'équipement que vous leur avez confié : un soldat avec un fusil de sniper restera à l'écart, tandis qu'un collègue muni d'un fusil à pompe ira davantage au contact. Ces comportements sont plutôt bien retranscrits mais des bots restent des bots et vous aurez tout de même parfois l'impression de jouer avec une équipe incapable de jouer en équipe. Au final, ce mode Escouade doit être vu comme un entraînement au multijoueur et sans véritable fin en soi. On regrette enfin que le système de clans et son aspect communautaire passent totalement à la trappe sur cette version Wii U.
Un invité surprise qui vient de loin
Les équipes d'Activision nous avaient réservé une belle surprise en attendant le dernier moment pour révéler l'existence du mode Extinction. Il s'agit bien entendu d'un moyen de surfer sur la popularité du mode Zombies des épisodes Treyarch en remplaçant les morts-vivants par des aliens, mais cette description simpliste ne colle pas tout à fait au résultat. Le but ici est simple, vous et trois de vos potes êtes chargés de transporter et de protéger une foreuse pour détruire un à un les nids d'aliens qui ravagent une vaste map. Les créatures venues d'ailleurs sont rapides, agiles et furieusement mal lunées. Elles sautent sur les toits, vous mordent les mollets et n'hésitent pas à débarquer en nombre pour submerger votre petite équipe. Mention spéciale aux vilains petits hargneux qui balancent des flaques d'acide pour vous compliquer la tâche. On amasse de l'argent en faisant des cartons, et il faut bien entendu fouiller l'environnement pour trouver des armes et des améliorations... Là où le mode Extinction se démarque du mode Zombies, c'est qu'il vous donne la possibilité de personnaliser votre combattant : assignez-lui une classe et choisissez minutieusement les compétences que vous pourrez utiliser moyennant quelques dollars. Pensez à être complémentaire avec le reste de votre équipe, il est bon d'avoir au moins un docteur et quelqu'un capable de ravitailler en munitions dans le lot... Ajoutez à cela des défis qui vous permettront de débloquer plus rapidement les points de compétences nécessaires à l'amélioration des capacités, et vous obtenez un mode nerveux et furieusement addictif qui mérite vraiment le détour. Seul petit regret, il n'y a pour l'instant qu'une seule map sur laquelle défourailler de l'alien, mais on peut d'ores et déjà parier que du contenu supplémentaire arrivera en DLC.
Points forts
- Le mode Extinction bien nerveux
- Le multijoueur toujours aussi efficace (quand on trouve des joueurs)
- Les phases spatiales et aquatiques
Points faibles
- Un scénario catastrophique
- Un mode multijoueur déserté
- Les phases d'infiltration qui sonnent faux
- Une réalisation datée
- Une campagne qui ne vous tiendra occupé qu'un peu plus de 5 heures
Call of Duty : Ghosts n'est certainement pas à mettre entre toutes les mains. Ceux qui y cherchent une expérience solo décoiffante peuvent passer leur chemin, mais ceux qui rêvent de parties multijoueurs intenses y trouveront davantage leur bonheur. La campagne pèche par de nombreux points, mais le multi propose des modes bien pensés qui tiennent en haleine. On apprécie particulièrement le mode Extinction qui propose de massacrer de l'alien en coopération avec trois autres potes. Notez toutefois que cette version Wii U n'est pas forcément très peuplée en ligne et que vous aurez parfois du mal à trouver des parties multijoueur.