La pauvre petite PS4 n'a pas énormément de titres à mettre en avant à l'occasion de son lancement. Heureusement, quantité et qualité ne sont pas synonymes. C'est un titre en particulier qui cristallise les différentes attentes autour de la machine, il s'agit bien entendu de Killzone : Shadow Fall. Le dernier bébé du studio Guerrilla a-t-il la carrure pour porter un tel fardeau ? Il ne sauvera peut-être pas le line-up de lancement à lui tout seul mais il aura au moins le mérite de nous donner foi en l'avenir de la console.
C'est devenu traditionnel, la fin de l'année est toujours riche en FPS grand spectacle. Malheureusement, la cuvée automne 2013 ne restera pas forcément dans les mémoires des amateurs du genre. Entre un Call of Duty en demi-teinte et un Battlefield qui peine à renouveler la formule, les blockbusters ne sont pas forcément à la fête. Finalement, la bonne surprise nous vient d'une exclusivité Sony, et plus précisément du jeu phare du line-up de lancement de la PS4, Killzone : Shadow Fall. Avec cette série, le studio Guerrilla nous a habitués à des titres toujours plus spectaculaires qui exploitaient au mieux les machines de Sony. On s'attendait donc logiquement à une démonstration des capacités techniques de la PS4, mais force est de constater que Killzone : Shadow Fall est bien plus que cela, c'est tout simplement un bon FPS.
Bien loin du manichéisme habituel
Toi qui entres ici sans avoir terminé Killzone 3, abandonne tout espoir de ne pas te faire spoiler. En effet la fin du précédent opus était particulièrement radicale : on assistait purement et simplement à la destruction d'Helghan. Trente années se sont écoulées entre cette catastrophe planétaire et l'action de ce Killzone : Shadow Fall. Les Vektans ont été obligés d’accueillir les réfugiés survivants et la planète Vekta est désormais divisée en deux par un immense mur : d'un côté une pseudo démocratie qui se veut propre sous tous rapports, de l'autre une dictature militaire qui gère tant bien que mal la misère de son peuple. Dans ce contexte qui s'inspire ouvertement de la guerre froide, vous incarnez un Shadow Marshall chargé de maintenir la paix précaire entre les deux camps. Ce rôle très particulier vous permettra de constater que la réalité est loin d'être aussi simple qu'il n'y paraît, il n'y a pas des gentils d'un côté et des méchant de l'autre. Alors que la plupart des FPS actuels se contentent de nous balancer dans un conflit manichéen en nous demandant tout simplement de dégommer consciencieusement les soldats ennemis, Killzone : Shadow Fall nous offre une vision du monde plus complexe et plus grise. Les différents éléments à collectionner tout au long des niveaux vont dans ce sens-là et vous permettront de constater que la propagande sévit des deux côtés du mur. Bref, le personnage qu'on incarne, et par extension le joueur lui-même, est amené à se poser des questions, à réfléchir pour comprendre le monde qui l'entoure dans sa complexité.
Comme un air de bon Crysis
Cette volonté de faire appel aux capacités de réflexion du joueur se traduit aussi au niveau du gameplay. Alors que les précédents Killzone mettaient plutôt l'accent sur une action intense dans le cadre de niveaux très linéaires, cet épisode élargit notre horizon et nous donne davantage le choix de notre approche. Vous êtes une vraie brute et vous aimez vous lancer à corps perdu dans la bataille ? Libre à vous de foncer la tête la première mais méfiez-vous, vous risquez de mourir rapidement... Si vous prenez le temps de réfléchir à la situation, vous pouvez plutôt vous la jouer plus ou moins furtif. En ouvrant un peu les yeux, vous découvrirez que les environnements sont loin de se limiter à de simples couloirs, vous trouverez très souvent des chemins détournés pour prendre les ennemis de revers. Il s'agit parfois d'un conduit d'aération, parfois d'un petit détour dans le décor, dans tous les cas c'est aussi l'occasion de mettre la main sur des armes variées ou sur des objets à collectionner. Le level design est touffu, intelligent et truffé de surprises. Le gameplay est pensé pour vous aider à explorer ces environnements. On pense notamment à l'écho tactique qui, d'une simple pression sur la croix directionnelle, vous dévoile les ennemis et les objets environnants. N'allez pas penser que ce radar simplifie trop la tâche, il vous permettra juste de mettre une stratégie au point avant d'attaquer. Au final, on se retrouve avec un jeu dont le rythme est très différent de celui de ses aînés et qui se rapproche davantage de ce que l'on aurait aimé retrouver dans les derniers Crysis. Exit l'action non-stop dans un couloir scripté et bienvenue à une aventure équilibrée qui vous tiendra en haleine plus de dix heures en variant les plaisirs.
Il n'est pas chouette mon drone ?
Le principal gadget qui vous changera la vie est bien entendu le drone qui vous accompagne tout au long de la campagne. Cet animal de compagnie next-gen a différentes fonctions toujours associées à la gâchette L1. Pour commencer, il peut vous réanimer quand vous tombez au combat, à condition bien entendu d'avoir encore une poche d'adrénaline en stock. Ce retour de la dernière minute vous permet même d'activer un petit bullet time lorsque vous visez. Le drone, que vous pouvez appeler par le petit nom de OWL, est aussi capable de hacker les terminaux ennemis pour désactiver par exemple les alarmes et éviter que les renforts ne rappliquent. Ce fameux OWL est aussi directement lié à la surface tactile de la manette PS4 : vous pouvez en effet choisir rapidement l'une de ces quatre dernières fonctionnalités en glissant rapidement le doigt sur le pavé de la DualShock 4. Le drone est ainsi capable de déployer une tyrolienne, de se transformer en véritable tourelle automatique volante, d'étourdir un groupe d'ennemis ou encore de mettre en place un bouclier énergétique. Les différentes capacités du OWL vous permettent surtout d'avoir le choix de la tactique adoptée : certains vont par exemple chercher le meilleur coin dans la map qui leur permettra de rester à l'abri derrière leur bouclier tandis que d'autres préféreront se la jouer mobile en envoyant le drone créer un contre-feu et focaliser l'attention pour ensuite prendre les ennemis par derrière. Bien plus qu'un simple gadget, le OWL s'impose comme une véritable trouvaille qui apporte encore plus de diversité dans le gameplay.
Une réussite technique
Si Killzone : Shadow Fall est une réussite en termes d'ambiance et de jouabilité, il ne faut pas non plus être hypocrite, c'est avant tout une claque graphique qui s'impose au joueur. Remettons les choses dans leur contexte, les possesseurs de PC disposant d'une très très grosse config ne seront pas époustouflés, par contre, lorsqu'on compare le titre aux autres jeux sur consoles, on se rend compte qu'il s'agit-là d'un véritable bond en avant. Entre les fumées volumétriques réalistes, les effets de lumière somptueux (mais parfois un peu trop appuyés), les reflets dynamiques dans les moindres flaques d'eau, l’incroyable profondeur de champs de certains décors ou la gestion des particules, vous aurez vraiment du mal à détacher les yeux de ce spectacle somptueux. Notez aussi que le jeu tourne environ à 30 fps dans le solo mais qu'il monte à 60 fps constant dans le multi histoire de s'adapter un peu mieux à la nervosité des parties en ligne. En un mot, Killzone : Shadow Fall nous prouve bel et bien que la PS4 en a sous le capot. Si vos rétines seront à la fête, on peut en dire autant de vos petites oreilles : les bruitages ont été travaillés pour s'adapter de manière dynamique aux différents environnements et les musiques sont un véritable régal. Deux compositeurs ont été mobilisés pour l'occasion : Tyler Bates s'est chargé de l'ambiance futuriste du côté des Vektans, tandis que Lorn nous propose un son plus industriel pour coller aux Helghasts. D'un bout à l'autre du jeu, la réalisation est une vraie réussite, tout juste avons-nous pu noter un petit bug de progression qui nous a demandé de relancer le jeu au dernier point de sauvegarde. On mettra ce petit désagrément sur le compte du fait que nous avons réalisé le test sur une version non finale du jeu, il est fort à parier que le problème sera résolu lorsque le jeu arrivera dans vos mains.
Pimp my Warzone !
Vous l'aurez compris, Killzone : Shadow Fall peut compter sur un solo ébouriffant, mais ça ne lui empêche pas de proposer aussi un multijoueur solide. 24 joueurs peuvent ainsi se retrouver sur une dizaine de maps plutôt bien conçues pour se mettre joyeusement sur le coin de la figure. Le drone est de la partie mais il sera alors assigné à une fonction bien particulière suivant la classe choisie. Chacune des trois classes dispose d'ailleurs de compétences qui lui sont propres et parmi lesquelles il vous faudra en choisir deux. Le scout pourra par exemple se rendre invisible, tandis que le support est capable de réanimer ses petits potes. Autant vous prévenir, ce multijoueur ne révolutionne pas totalement les recettes habituelles du genre, la seule véritable originalité tient à la possibilité de customiser ses modes de jeu. En effet les fameuses Zones de Guerre qui permettent d'enchaîner différents objectifs sont de retour mais il est désormais possible de paramétrer ces fameuses missions. Vous avez le choix entre 8 types de missions relativement classiques allant du CTF à la capture de territoire en passant par le team deathmatch. Là où ça se corse, c'est qu'il est aussi possible de définir de manière plus fine les règles du jeu en excluant par exemple certaines armes ou certains équipements. Vous voulez lancer un mode où seuls les couteaux et les grenades seraient autorisés ? Killzone : Shadow Fall est fait pour vous... On apprécie enfin le fait que toutes les armes soient disponibles dès le départ, et on se contente de débloquer des accessoires en réalisant des défis. Rassurez-vous, vous n'êtes pas près d'en voir le bout puisque ce sont pas moins de 1.500 petits challenges qui vous attendent si vous comptez faire le multi à fond. Vous avez peur de faire rapidement le tour des 10 maps proposées ? Guerrilla nous annonce déjà que d'autres environnements arriveront en DLC gratuits. Si ce multijoueur n'est pas d'une originalité folle, il s'avère tout de même suffisamment prenant pour vous assurer de rester scotché de longues heures durant devant ce Killzone : Shadow Fall.
Les images qui accompagnent cet article nous ont été fournies par Sony.
Points forts
- Une claque graphique
- Une bande-son magistrale
- La possibilité d'aborder les objectifs comme on l'entend
- Le scénario bien loin du manichéisme habituel
Points faibles
- La VF inégale
- Une difficulté parfois étrangement dosée
Il n'y a pas de doute, Killzone : Shadow Fall est bel et bien le jeu le plus attrayant du line-up de lancement de la PS4 : non seulement c'est un succès technique, mais c'est aussi une belle leçon de level design réussi et de scénario intelligent. Si le solo est flamboyant, le multijoueur est un peu plus classique mais il n'en demeure pas moins de très bonne facture. Bref, Guerrilla met la barre très haut dès le lancement de la PS4 et on espère retrouver bien vite d'autres titres de cette trempe sur la console de Sony.