Deux années après la claque visuelle et technologique infligée par Battlefield 3 et son très impressionnant FrostBite 2, les Suédois de DICE offrent un nouvel opus à la saga jadis uniquement multijoueur. On nous a promis monts et merveilles pour cet épisode, tant en solo qu'en ligne : Qu'en est-il vraiment ?
Battlefield 4 introduit le tout nouveau FrostBite 3 qui sera utilisé par la suite sur bon nombre de franchises EA. Ce dernier est d'ailleurs accompagné par la technologie Destruction 4.0, censée embellir un peu plus les environnements destructibles peuplant le jeu, un atout maintes fois salué sur la mouture précédente et qui devrait nous en mettre plein la vue sur ce 4ème épisode. DICE nous offre également dans cette catégorie une nouvelle feature incarnée par le procédé Levolution qui permet à la map de se modifier avec le temps ou sous l'influence des joueurs, les combattants pouvant par exemple exploser une digue pour inonder la zone de combat sur la map Flood Zone, ou encore faire dériver une épave pour qu'elle s’incruste sur la carte tropicale de Paracel Storm pendant que cette dernière se transforme peu à peu, de l'Archipel tropical du début de partie à l'amas d’îlots dévastés par un typhon, théâtre des affrontements de fin de partie. Vous l'aurez compris, l'accent est mis sur l'évolution climatique et topographique, sur une campagne solo théoriquement mieux ficelée que la précédente, et sur le retour du mode Commandant, dont l'absence avait fait grincer un paquet de dents dans Battlefield 3. La question est : Ces nouveautés justifient-elles l'achat du titre ?
Un solo qui commençait pourtant sur du Bonnie Tyler...
Commençons par les choses qui fâchent. Le solo de Battlefield 4, plutôt bien mis en avant par EA ces derniers mois, est assez décevant. On est encore loin de ce que l'on était en droit d'attendre d'un ténor comme DICE qui avait pourtant su montrer son savoir-faire sur des campagnes sympathiques comme celles des Bad Company. L'aventure nous place ici dans la peau du muet mais téméraire Recker au sein de l'escouade Tombstone, un petit groupe de soldats américains qui se retrouve au cœur d'une crise politico-militaire chinoise. Evidemment, vos différentes missions (qui assureront entre 4 et 6 heures de durée de vie), vous emmèneront dans différents environnements en majorité chinois ou russes qui seront plus tard théâtre d'affrontements multijoueurs. On salue au passage le travail effectué sur la modélisation de Shanghai, assez fidèle et relativement impressionnante, même s'il s'agit plus là d'un tableau du quartier de Pudong au loin que d'une véritable visite guidée dans les rues de la ville.
Si le scénario de la campagne reste correct tout en étant assez léger et parfois farfelu (voir la fin du jeu), le solo offre tout de même un avant-goût du cœur du titre : le multijoueur. Conditions climatiques, éclairages bluffants, destructions en pagaille, gameplay maritime amélioré et gestion des vagues, tout y est... enfin presque, et c'est bien là ce que l'on peut reprocher à la campagne en plus de ses nombreux bugs et défauts de conception : elle est plutôt fade, déjà vue, et n'exploite surtout que 10% du potentiel de Battlefield 4. Pourquoi ne nous propose-t-on pas des séquences en véhicules aériens ou des séquences de qualité en véhicule au sol ou sur l'eau ? Nous sommes condamnés à errer la plupart du temps en infanterie, parcourant une succession d'arènes peuplées d'ennemis et de scripts. Certes, il y a quelques passages impressionnants, mais dans sa globalité, ce solo est tristounet. Quant à la mise en avant de choix tactiques et de décisions prises par le joueur, il n'en est rien, et c'est avec un petit rictus nerveux que l'on découvre ces fameuses possibilités.
Côté nouveautés de gameplay pour le solo, on peut citer l'incorporation du lean & peek qui vous permet de bondir d'une couverture ou de vous pencher sur le côté pour neutraliser vos ennemis en restant à l'abri, mais aussi le ciblage d'ennemis, hérité du multijoueur, qui encourage ici vos alliés à se concentrer sur une vague de soldats en particulier. Néanmoins cet ajout n'enlève pas l'amère sensation de jouer seul, assisté par une IA alliée à la visée douteuse, face à une armée d'adversaires plutôt stupides. On s'amuse parfois de voir un allié à couvert à 10 centimètres d'un ennemi, sans pour autant réussir à le tuer. Comportement tout aussi dérangeant : vos adversaires auront une fâcheuse tendance à courir se mettre à couvert n’importe où, même si ça les force à traverser l'arène, dos à vous pendant que vous les canardez. Il est possible que ces comportements soient eux aussi patchés peu après la sortie, mais ils gâchent à l'heure actuelle inévitablement l'immersion, déjà entamée par les soucis techniques et autres imperfections (murs invisibles, textures parfois très peu travaillées, scripts et situations absurdes). Notez par ailleurs que les versions 360 et PS3 offrent un rendu visuel logiquement en deçà de ce qui se fait sur les autres supports, et souffrent de quelques chutes de framerate et de textures plutôt moches.
Finalement, ce solo s'impose plus comme un tutoriel du multijoueur qui aurait pu être très bon plutôt qu'en véritable campagne de qualité. Une chose est sûre, si vous comptez acheter BF4 pour son solo, vous serez déçu. Par contre, si c'est le jeu en ligne qui vous intéresse, il y a des chances pour que vous soyez comblé !
La guerre, ça se fait à plusieurs !
Battlefield 4 propose la même philosophie que son aîné, incarnée par le Battlelog, le hub social, solo et multijoueur du titre. DICE abandonne d'ailleurs pour l'occasion les missions en coopération proposées pour BF3 et se concentre sur la campagne (avec leaderboards pour chaque parcelle du solo), et sur le multijoueur avec 7 modes de jeu et 10 nouvelles maps, qui seront évidemment enrichis par la suite via DLC. Il est désormais possible de donner des « missions » à un groupe de 4 joueurs, sur une map multi en particulier, afin de voir, sur 48 heures, qui est le meilleur sniper ou le meilleur pilote d'hélicoptère avec 18 missions au total basées sur le nombre de kills réalisés ou sur le score maximum obtenu. On retrouve donc cette vision centralisée du jeu en ligne permettant directement sur consoles de sélectionner et de rejoindre rapidement un serveur, avec ou sans ses amis, afin de démarrer la bataille.
10 maps et des modes qui satisferont chaque profil de joueur
Outre les classiques Conquête, dont la version Small à 24 joueurs est imposée sur consoles current-gen, et sa variante close-quarter en infanterie nommée Domination, on retrouve le mode Ruée hérité de BF3 qui oppose des défenseurs protégeant deux points sensibles successifs face à une armada d'attaquants ayant pour but de progresser le plus possible en fomentant des attaques sur les deux points susmentionnés. Viennent ensuite les Team Deathmatch et Squad Deathmatch, opposant deux équipes ou 4 escouades de 5 (les escouades ayant été agrandies de 4 à 5 joueurs pour cet opus). On explore au final deux nouveaux modes, nommés Anéantissement, Obliteration dans la langue de Shakespeare, et Désamorçage. Le premier repose sur la capture puis l'acheminement d'une bombe commune sur des objectifs ennemis, et vous offrira de belles sensations, surtout si c'est vous qui récupérez la bombe et devez rejoindre l'objectif militaire ennemi avec vos alliés. Quant au second, il fonctionne comme une partie de Counter Strike : un groupe dispose d'une bombe et doit la poser dans un des deux sites prévus, l'autre groupe doit les arrêter ou désamorcer la bombe, sachant qu'une mort vous place directement en mode Spectateur jusqu'à la fin du round. Comme d'habitude le gain de points et le scoring sont variables suivant les modes joués, un adepte du Team Deathmatch gravira donc nettement plus vite les échelons qu'un joueur de Désamorçage ou de Conquête. Les versions current-gen proposent donc des parties plus petites en termes de taille de cartes et de slots joueurs. On passe de 64 à 24 joueurs sur le mode Conquête, de 32 à 24 sur Rush et Obliteration et de 32 à 20 sur Domination, les autres modes restant intacts.
Pour ce qui est des maps et de leurs évolutions, on retrouve 10 nouvelles maps dont une bonne partie est empruntée du solo. Elles sont variées, plus compactes que les précédentes (comprenez que vous n'aurez pas forcément à courir loin de toute civilisation pendant de longues minutes avant de trouver du monde ou un véhicule), et bénéficient toutes du procédé Levolution, à une échelle variable. Il y en a d'ailleurs pour tous les goûts, avec notamment une map assez sombre, labyrinthique et étriquée appelée Opération Locker, théâtre d'affrontements constants et féroces qui plaira sans doute aux amateurs de la carte Metro de BF3. Il y a également de la place pour les véhicules comme d'habitude, qu'ils soient terrestres, aériens ou maritimes, et si ces derniers obtiennent un vrai gain au niveau du gameplay du fait de la gestion des vagues et de la houle, les avions quant à eux sont désormais privés de phase de décollage et se prennent directement en vol depuis l’interface de déploiement, ce qui évite en partie le baseraping et le vol d’avions adverses.
Pour en revenir aux maps, et plus précisément au Levolution, sachez que le procédé demande tout de même l'action de joueurs pour faire exploser une digue, ouvrir plusieurs vannes ou déclencher des mécanismes sur la map. On vous laisse découvrir par vous-même le reste des déclencheurs, néanmoins,on peut se demander si cette fonctionnalité, en dépit du plaisir visuel qu'elle procure, servira au gameplay sur le long terme puisque la plupart des changements induits par Levolution n'offrent que peu d'avantages (un canon AA fixe par-ci, un système IED par-là) à l'équipe qui le déclenche et requiert tout de même de la part des joueurs une certaine attention, moment pendant lequel ils sont vulnérables et doivent utiliser leurs explosifs ou missiles pour déclencher le trigger en question. Reste à savoir donc si les joueurs se prendront au jeu.
Et les classes dans tout ça ?
Comme sur Battlefield 3, Battlefield 4 propose 4 classes customisables. Il y a l'Assaut, terriblement efficace en infanterie, qui dispose de compétences de médecins lui permettant de soigner ou ranimer ses camarades tombés au combat. Il est accompagné du Soutien, véritable magasin à munitions qui s'offre une puissance de tir dévastatrice, de l'Ingénieur, sacrée plaie pour les joueurs en véhicule, et de l'Eclaireur, sniper dans l’âme qui n'hésitera pas à vous avoir depuis sa planque à 1,5 kilomètre, et qui dispose d'une flopée de gadgets. Les classes ont été pour l'occasion légèrement remaniées afin qu'elles aient accès à de l'équipement plus polyvalent, on pense par exemple à ce bon vieux sniper qui peut désormais trimbaler du C4, et donc se rendre efficace face aux véhicules terrestres.
On remarque également la présence de « field upgrades » (des arbres de 4 spécialisations accessibles sur chaque partie) vous octroyant des capacités spéciales au fur et à mesure de votre progression et de vos accomplissements en escouade. Deux de ces « améliorations terrain » sont communes à toutes les classes et deux diffèrent, vous permettant par exemple de vous spécialiser dans une partie en Soutien Médical si vous souhaitez débloquer le soin dans les véhicules occupés ou une recharge deux fois plus rapide pour votre défibrillateur en tant qu'Assaut. L'évolution du joueur est donc toujours un point central puisque ce dernier pourra monter en grade, déverrouiller de l'équipement et des améliorations pour les armes et les véhicules et pourra, au niveau 10, prétendre au grade de Commandant.
Commander is back in business
Le Mode Commandant, une des spécificités de Battlefield 2 et 2142, absente du 3ème épisode, est de retour dans ce 4ème opus sur certains modes de jeu (Conquest, Rush et le nouveau Obliteration). Pour ceux n'ayant pas fait leurs armes sur BF2, un petit rappel s’impose. Le Commandant est un poste qu'occupe un joueur de chaque camp durant la bataille, il dispose d'une carte stratégique dynamique sur laquelle il suit les combats et aide sa faction en plaçant des drones, des EMP ou en larguant des munitions, véhicules et autres joyeusetés. Cette fonction est donc de nouveau opérationnelle dans BF4 et a été légèrement corrigée pour rendre l'expérience plus agréable et plus stratégique qu'auparavant. Désormais, chaque escouade de joueurs complétant les objectifs donnés par le commandant participe à la réussite de l'équipe mais donne aussi des possibilités d'action plus grandes pour le grand manitou des opérations. On peut citer par exemple le Gunship, la forteresse volante permettant de neutraliser efficacement les snipers sur les toits ou encore le missile de croisière aussi impressionnant que dévastateur. Globalement, le retour du mode Commandant est une bonne chose, et vous proposera de gérer vos escouades au mieux pour faire la différence sur le champ de bataille face au commandant ennemi, depuis votre console.
Après le contre-kem’s, le contre-cut !
Si par rapport à BF3 le gameplay reste globalement le même en multijoueur, on note tout de même quelques ajouts plutôt appréciables, comme la possibilité de plonger sous l'eau pour échapper aux balles d'un ennemi, puis celle de resurgir et de prendre son arme de poing à la surface dans le but de le neutraliser. Dans le même esprit, on remarque la possibilité de « contre-poignarder » un joueur qui a souhaité vous écorcher de face, ce qui force désormais les assassins perfides à attaquer systématiquement de dos, sans quoi ils risqueraient de se faire poignarder en retour si l’adversaire déclenche le coup de couteau avec le bon timing. Niveau stratégique, en plus de l’interaction avec le commandant, le squad leader dispose d'ordres rapides à l'attention de ses camarades ce qui pousse un peu plus la vision stratégique du titre et promet de belles parties sur la sphère e-sport. Côté interactivité, en plus du mode Commandant accessible sur tablettes, on remarque la présence d'une application iOS / Androïd pour le Battlelog proposant de préparer au mieux ses parties ou de suivre la progression d'un ami, ses derniers rubans ou ses derniers scores sur une mission du solo.
Battlefield 3.5 ?
Si la claque graphique est assez hétérogène avec des environnements parfois somptueux exploitant au mieux les capacités du Frostbite 3 ou du Destruction 4.0 et d’autres plus ternes ou moins mouvementés, rappelant forcément le rendu offert deux années plus tôt par Battlefield 3, on est au final assez emballés par la copie rendue par DICE. Certes BF4 n’est pas la claque qu’a été BF3, mais il est plus abouti, plus varié et propose une vaste expérience qui saura plaire à un public plus large que celui de son aîné. Le Levolution impressionne par sa plastique et par sa dynamique mais n’apparaît pas essentiel au gameplay, au contraire du Commandant dont l’efficacité détermine souvent l’issue d’une partie. La flopée de détails améliorant le gameplay, l’esthétique et l’aspect communautaire du titre assurent un second souffle à la progression des joueurs, même les plus blasés, mais peut s’avérer insuffisante pour renouveler l’entrain suscité par l’épisode précédent. Le cocktail plaira inévitablement aux nouveaux venus, quant aux vieux de la vieille, la recette pourra parfois avoir un goût de déjà-vu…
Points forts
- Le retour du mode Commandant
- L’upgrade next-gen pour 9,99 dollars de plus
- Le Levolution, très impressionnant
- La variété des modes et des maps
- La customisation plus vaste qu’auparavant
- « Battlefield 3 en mieux »
Points faibles
- Une réalisation qui fait un peu tache face aux autres versions (effets en moins, textures grossières, ralentissements…)
- Peut-être pas assez innovant pour les joueurs de BF3
- Limites de joueurs et de taille de map sur current-gen (pas plus de 24 en Conquête contre 64 sur PC et next-gen)
- Une campagne solo pas terrible
- Le Levolution, impressionnant mais souvent accessoire
- Le rendu de l’eau…
Battlefield 4 amorce l’entrée en course de DICE dans la catégorie des FPS qui se mettent à jour plus qu’ils ne se renouvellent. Le titre offre un solo rythmé mais perfectible servant à introduire un multijoueur aux bases solides, améliorant la recette de son grand frère. Le résultat, loin d’être au top graphiquement, est plutôt fluide, agréable, et propose un panel de modes de jeu et de possibilités de gameplay très appréciables si toutefois vous n’êtes pas frustré de vivre des affrontements limités à 24 joueurs alors que les versions next-gen et PC proposent 40 joueurs de plus en Conquête. Si vous cherchez un FPS multijoueur abouti avec un accent mis sur le teamplay et sur les combats à échelle modérée, c’est actuellement celui-là qu’il vous faut !