S'étant taillé une réputation en béton avec The Walking Dead, Telltale s'attaque à une nouvelle adaptation de comics avec The Wolf Among Us. Attendu au tournant, le studio frappe fort et ne déçoit pas avec ce premier épisode de The Wolf Among Us, loin de là.
Inspiré par l'univers du comics Fables et co-écrit avec son auteur qui considère le jeu comme canonique de son petit monde, The Wolf Among Us fait office de préquelle à l'oeuvre originale. Premier point, si vous n'avez pas lu les comics, pas de panique, le jeu ne vous semblera absolument pas hermétique et constitue même un très bon point d'entrée à ce dernier. Fables se déroule à Fabletown, une communauté composée de personnages de contes ayant fui leur monde d'origine pour s'installer parmi les humains, leur apparence masquée par un charme. Du bûcheron au Chaperon Rouge en passant par les Trois Petits Cochons ou même Ichabod Crane (protagoniste de la nouvelle Sleepy Hollow), on croise quantité de têtes plus ou moins connues dans les rues de Fabletown. Une communauté hétéroclite qui a son maire, ses bons moments et surtout ses mauvais. Et quand il y a du grabuge, on fait appel au shérif, alias Bigby Wolf, également connu sous le nom du Grand Méchant Loup, carnivore repenti mais à qui on peine encore à donner sa confiance. Et devinez qui joue le rôle de ce shérif au passé trouble qui tente de se racheter une conduite ? Bingo.
Je vais m'enfler et souffler et t'emmener en taule
Si The Walking Dead fondait son scénario sur la survie, la protection de Clémentine et les relations avec les autres personnages, The Wolf Among Us opte pour l'enquête. Après avoir pris connaissance du monde qui vous entoure, vous serez rapidement plongé dans l'intrigue et l'enquête qui vous conduira sur les traces d'un meurtrier, du genre sanglant. Car tout n'est pas rose à Fabletown, loin de là. La vie d'exilé n'est pas simple et certains transfuges des contes ont la vie dure. L’ambiance de The Wolf Among Us est sombre, violente, proche d'un polar noir et dans le rôle de Bigby, on ne manquera pas de vous faire comprendre que personne n'a oublié votre passé et que le shérif n'est pas toujours le bienvenu. Le Grand Méchant Loup, qui fait ce qu'il peut pour ne pas toujours l'être, est un solitaire dont la vraie nature n'est jamais bien loin d'éclater au grand jour quand on le cherche un peu trop. On le sent dans de nombreux dialogues, même quand on opte pour les réponses les plus diplomates : Bigby n'est pas quelqu'un à qui il faut trop chercher les embrouilles. Personnage charismatique, Wolf n'est pas Lee Everett de The Walking Dead et même si on suit une histoire, on a moins le sentiment de subir les événements du monde extérieur pour tenter de s'en accommoder, mais plutôt l'impression d'avoir une certaine prise sur ce qui se passe. Une approche différente donc, pour un personnage bien plus rentre-dedans, soutenue par des moments décisifs déjà importants dès le premier épisode et dont l'un au moins aura des conséquences sur le second chapitre.
Ne pas le cogner, ne pas le cogner, ne pas...
Dialogues, moments décisifs, on ne s'y trompe pas, Telltale a conservé la formule adoptée par The Walking Dead, à commencer par les dialogues en temps limité qui contraignent le joueur à réagir instinctivement et naturellement et pas à calculer la meilleure réponse possible. Un système qui sied parfaitement à Bigby qui fait tout pour éviter de passer pour le perpétuel mangeur de cochons et de petites filles qu'il fut. Il suffit de donner une réponse un peu sèche durant un interrogatoire pour le regretter immédiatement tant on redoute que cette démonstration d’agressivité nous retombe sur le dos et ne renforce encore cette image dont on tente désespérément de se débarrasser. Telltale sait particulièrement bien jouer de cet état de fait, mettant le joueur dans une situation où son premier réflexe serait de proprement cogner son interlocuteur exaspérant, mais exactement comme Wolf, on se retient. Et si la chose nous tient à cœur, c'est parce qu'une fois de plus, le studio a réussi son coup en créant un attachement et une identification presque immédiats au héros et un intérêt pour les personnages, dont Blanche Neige. En un épisode faisant office de prologue, Telltale est déjà parvenu à jouer avec les nerfs et les émotions du public.
Outre les dialogues, Telltale a mis le paquet sur les choix, on l'a dit, mais également sur les QTE qui se montrent nettement plus dynamiques que dans leur précédent opus. En combat ou lors d'une poursuite, les actions contextuelles sont plus fluides, plus nerveuses et surtout plus naturelles. Cette amélioration n'est d'ailleurs pas la seule, le studio ayant peaufiné sa technique pour servir un rendu graphique à tomber par terre, profitant de plus de finitions que The Walking Dead et d'un travail artistique sans commune mesure. Si certaines animations sont encore un peu raides, The Wolf Among Us n'en est pas moins magnifique, un véritable comics prenant vie, servi par un doublage impeccable et une bande originale aux petits oignons. Malgré tout, Telltale n'échappe pas à son plus vieux démon : l'absence de localisation. Si on la pardonnait à l'époque de Sam & Max et même à la rigueur dans The Walking Dead, mettant ça sur le compte de petits moyens, on en vient à se dire que vu la stature que commence à prendre le studio, il serait temps d'envisager d'intégrer au moins des sous-titres localisés dans les principales langues. D'autant que si l'anglais peut déjà être un frein en soi, il sera en plus difficile pour certains de reconnaître les personnages fictifs dans la langue de Shakespeare. Autre mauvaise habitude : il n'est toujours pas possible de reconfigurer les touches sur un clavier, il est donc vivement conseillé de basculer ce dernier en QWERTY sous Windows pour ne pas être perturbé durant les QTE. Allez Telltale, on se réveille. Au-delà de ça, on ne peut dire qu'une chose : The Wolf Among Us démarre avec brio et pourrait même se montrer meilleur que son prédécesseur.
Points forts
- Ambiance et direction artistique maîtrisées
- Le rendu technique fluide
- Doublages et musiques impeccables
- Le scénario accroche directement
- L'identification à Bigby et l'intérêt pour les personnages déjà présents
- Colin le cochon
Points faibles
- Les animations parfois peu naturelles
- Une VO intégrale qui en rebutera certains
- Toujours cette obligation de basculer le clavier en QWERTY sur PC
Un seul épisode d'introduction de deux heures et on est déjà complètement charmés par The Wolf Among Us. Direction artistique, rendu visuel, ambiance, doublages, scénario, personnages, implication, tout est déjà en place pour le démarrage de cette saison. On attend la suite en se rongeant les ongles jusqu'aux coudes.