Le beat'em all indé Foul Play nous avait plutôt tapé dans l'œil lors de la gamescom, entre deux blockbusters et trois saucisses. Une courte séance d'essai laissait entrevoir un titre bourré d'humour et de personnalité. Restait alors à juger de la profondeur du gameplay, chose que nous nous sommes empressés de faire sur la version finale.
Foul Play repose sur un ressort narratif original : le baron Dashforth, célèbre démonologue anglais, raconte ses aventures au tournant du XXème siècle sur la scène d'un théâtre londonien. Le joueur incarne son personnage, ou celui de son acolyte Scampwick Steerpike dans le cadre d'une partie en coopération. Ce duo composé d'un aristocrate et d'un prolétaire n'est pas sans rappeler le couple formé par Phileas Fogg et Passepartout dans Le Tour du Monde en 80 jours. Et comme dans le roman de Jules Verne, les héros de Foul Play vont voir du pays, de l'Egypte à la campagne anglaise en passant par l'Atlantide, chaque destination constituant une pièce différente.
Les trois coups de bâton
Au début de chaque acte, Mr. Dashforth s'adresse au public pour lui rappeler le contexte de l'aventure. Puis le décor se met en place, et l'action peut commencer. Dans ces conditions théâtrales, il est impossible de mourir : c'est du chiqué. La traditionnelle jauge de vie est ici remplacée par un applaudimètre. Ce qui compte, c'est de satisfaire l'audience en lui offrant un beau spectacle. En enchaînant les combos, la foule commencera à pousser des vivats, avant de lancer ses chapeaux en l'air ! Si vous êtes mauvais, au contraire, des huées se feront entendre, jusqu'au bide synonyme de game over. Cet enrobage théâtral ne change pas grand-chose du point de vue du gameplay, sur lequel nous reviendrons plus loin. En revanche, cela confère à Foul Play une ambiance unique. Les ennemis « tués » rampent hors du champ, les décors changent à la volée, les gargouilles sont suspendues par des fils, etc. Il n'est pas rare d'apercevoir le balayeur finir de nettoyer la scène, ou un garçonnet du public prendre à partie les comédiens. Bref, Foul Play multiplie les petits moments cocasses ou saugrenus. Ainsi, quand nos héros arrivent dans un lieu hanté où des fantômes font voler le mobilier, on peut en fait deviner les figurants en costume noir qui se chargent de faire « flotter » les chaises... Le tout est servi par une direction artistique soignée, qui n'est pas sans rappeler le design de South Park. La musique est à l'avenant. Au final, Foul Play est donc une réussite sur le plan formel.
Les mille coups de canne
Les choses sont en revanche moins roses du côté du fond, autrement dit du gameplay. Le baron se bat à l'aide d'une canne, tandis que Scampwick utilise un balai, mais au final les deux protagonistes disposent du même éventail de coups, hélas peu fourni. Le constat est similaire pour les ennemis : bien qu'il en existe de nombreuses déclinaisons selon le contexte géographique, on se rend rapidement compte qu'il ne s'agit que de skins. Leur apparence physique change, mais leurs attaques restent les mêmes à quelques nuances près. Le plus gros problème ne vient toutefois pas de ce manque de variété. Le souci de Foul Play, c'est que les ennemis sont beaucoup trop résistants, ou que les héros sont trop faibles, au choix, mais le résultat est le même : il faut des dizaines de coups pour se débarrasser du moindre monstre. On a l'impression de taper avec une arme en mousse. Le jeu ne procure donc aucune sensation de puissance, ce qui est ennuyeux pour un beat'em all... Mais n'allez pas croire qu'il est dur pour autant : sans être un grand spécialiste de la castagne, je l'ai fini sans mourir une seule fois en quatre heures ! En l'absence de modes de difficulté, on enchaîne de longues séquences de « button mashing », sans sensation de puissance, mais sans se sentir menacé. Finalement, heureusement que l'enrobage est réussi ! En dépit des errements du gameplay, on a quand même envie d'avancer pour voir ce que nous réserve la scène suivante. Mais il y avait tellement mieux à faire...
Points forts
- La narration théâtrale, un concept original
- L'humour
- Une direction artistique maîtrisée
Points faibles
- Aucune sensation de puissance Des ennemis trop similaires
- Trop facile
- En bref, un gameplay poussif
Cette note moyenne vient sanctionner le gameplay de Foul Play autant qu'elle vient saluer son enrobage. Ce dernier est incontestablement réussi : les joueurs en quête d'originalité seront séduits par le design, l'humour et diverses trouvailles, qui confèrent au jeu une personnalité unique. Mais quel dommage que le gameplay ne suive pas ! Les amateurs de beat'em all, eux, risquent bien d'être déçus par des mécanismes mal pensés. Les développeurs de Foul Play ont clairement privilégié la forme au fond ; à vous de voir de quel côté vous vous situez.