Après deux épisodes drastiquement différents, la saga Lost Planet revient, plus glaciale que jamais. Au programme : un TPS classique par bien des aspects mais qui mise, avant tout, sur une trame et une ambiance qui parviendront à séduire par leur originalité. Préquelle de la série, ce 3ème opus propose de revenir aux sources de la saga, une recette qui risque bien de faire mouche auprès des fans et des curieux, mais qui par ses travers laissera de marbre les puristes du TPS en quête de nouveauté. Habillez-vous chaudement, nous partons pour E.D.N III !
Décidément, 2013 est propice aux « retours aux sources » chez Capcom. En effet, l’éditeur nippon avait déjà, au mois de janvier, laissé les clés d’une de ses licences à un studio occidental pour le développement du très sympathique DMC : Devil May Cry. La firme réitère sa démarche et propose aujourd’hui le « renouveau » de la licence Lost Planet, plus de trois années après le dernier épisode en date. On retrouve aux commandes le studio Spark Unlimited, connu pour ses quelques titres plus ou moins savoureux, mais surtout attendu au tournant pour le codéveloppement de Yaiba : Ninja Gaiden Z. Si l’équipe américaine touche pour la première fois à la saga, on peut tout de même être rassuré en retrouvant Kenji Oguro, cocréateur de la série, fidèle au rendez-vous en tant que creative director. Un gage de qualité et de cohérence qui assure un certain respect du titre vis-à-vis de ses aînés. La question est : Spark Unlimited arrivera-t-il à être à Lost Planet ce que Ninja Theory fut à Devil May Cry ?
C’est l’histoire d’un type qui s’écrase dans la neige…
L'aventure vous met aux commandes de Jim Peyton, jeune père de famille ayant décidé de partir sur la planète glacée E.D.N. III pour le compte de l'entreprise NEVEC (Neo Venus Construction). Souhaitant mettre sa famille à l’écart du besoin sur Terre, notre héros des temps modernes va donc se proposer comme homme à tout faire auprès de l’expédition scientifique polyglotte en place sur le caillou gelé, seule présence humaine sur la planète. La base scientifique de cette expédition, appelée Coronis, a pour but final de trouver un moyen visant à régler la crise énergétique terrienne, en utilisant notamment la fameuse thermo-énergie, ou « th’en ». Cette ressource est partout et en grande quantité, à défaut d’être d’une pureté suffisante pour être exploitée sans être raffinée : elle est l’essence de l’astre et coule dans l’écorce planétaire comme dans les veines des Akrids. Ces créatures, n’appréciant visiblement pas votre présence sur leur territoire, se divisent en plusieurs sous-espèces, mais n’auront au final qu’un but : vous zigouiller.
Les journées de Jim se ressemblent toutes un peu au fil de son aventure sur E.D.N. III : traînailler sur Coronis, passer du temps avec ses collègues d’infortune, entretenir et améliorer son équipement, puis décrocher quelques contrats juteux et les honorer en se rendant « dehors », dans un environnement aussi glacial qu'hostile. A pied ou à bord de son mecha, notre bon vieux Peyton va explorer le no man’s land entourant la base, afin de réparer et récupérer toutes sortes de dispositifs de communication, de forage ou de recherche. A cette routine de mercenaire au service de la science s'ajouteront vite des missions plus mystérieuses, vous offrant l'opportunité d'enquêter sur d'étranges sabotages d'installations ou encore sur la présence de laboratoires enfouis dont l'existence même contredit les dires de vos commanditaires. Une chose est sûre : votre expédition n’est pas la première… et vous n’êtes pas seul.
Une ambiance lourde mais efficace
Rentrons désormais dans le vif du sujet : Lost Planet 3 n’est pas un excellent jeu. Cela dit, s’il y a bien un domaine dans lequel il se démarque, c’est dans l’ambiance qu’il instaure au fil des heures. La solitude des longues missions en extérieur, entrecoupées de séquences centrées sur le moral de Peyton, sur ses rapports avec sa femme ou sur le froid harassant, ne donnent qu’une envie au joueur : continuer la mission et rentrer sain et sauf à la base.Il est d’ailleurs assez bluffant de se rendre compte à quel point l’atmosphère est plaisante même si l’on se coltine, du moins lors de la première partie de l’aventure, des missions relativement ennuyeuses pour Peyton comme pour le joueur : « va là, répare ceci, récupère cela, et évidemment : nettoie la zone ».
Cette ambiance savoureuse repose souvent sur de petits détails qui captent et absorbent l’attention du joueur. On peut citer par exemple l’intérieur de notre mecha, personnalisé par le héros afin que ce dernier se sente un peu chez lui, ou encore la possibilité d’écouter de la musique (et ses propres MP3 sur PC) dans l’habitacle du robot comme à l'extérieur, en restant à proximité de celui-ci. Toujours dans le rapport entre Peyton et son mecha, on saluera la présence du radar, imposant au joueur de ne pas sortir d’un certain périmètre autour du robot s’il souhaite bénéficier de données topographiques et donc de la mini-map, fort utile lorsqu’on est entouré d’Akrids. Toujours au rang des détails renforçant l’immersion, on remarquera la construction plutôt lente des missions (presque aussi lentes que la démarche de notre mecha) qui rend leur dénouement plus marquant. Quel soulagement d’apercevoir le ciel et un soleil à la cime d’une montagne après avoir galéré durant une demi-heure pour activer successivement de simples postes de contrôle. Les missions et leur déroulement sont ici généralement critiquables et plutôt laborieux, mais le ressenti final une fois arrivé au sommet de la montagne vaut tout de même son pesant de pistaches.
Un gameplay ultra classique qui ne prend pas souvent.
Si l’ambiance est par moments excellente, elle est toutefois légèrement sabotée par un game design quelque peu poussif et souvent dénué d’originalité. Les missions principales s’enchaînent et sont marquées des mêmes procédés, n’étonnant que très peu le joueur au fil des heures, ce qui est extrêmement dommage au vu du potentiel immersif du titre. La progression perd d’ailleurs en saveur si l’on décide de ne pas prendre le temps d’effectuer quelques quêtes annexes, venant ici briser un modèle répétitif sans pour autant être elles-mêmes exceptionnelles. Les gunfights, base du TPS, sont plutôt banals et entachés par un feeling des armes peu satisfaisant, malheureusement pas compensé par le système d’upgrades plutôt limité, voire anecdotique.
Le maître-mot est ici « classique » : du système de vie à régénération progressive aux longs combats de boss basés sur des QTE et des patterns simplistes, en passant par les scripts de combat de l’IA et ses comportements cycliques rapidement identifiés. Les développeurs ont malgré tout pensé à quelques bonnes idées, comme par exemple l’ajout d’une certaine verticalité induite par l’usage du grappin, qui permet d’accéder à des plates-formes prévues à cet effet, ou par l’ajout de messages audio et écrits parsemant les niveaux, et renforçant un peu plus le background ainsi que l’ambiance du titre. Enfin, les puristes de la saga seront déçus d’apprendre que la collecte de thermo-énergie n’est plus essentielle à la survie du héros et ne sert désormais qu’à s’acheter de l’équipement ou des améliorations pour les armes et pour le mecha , améliorations qui, dans les deux cas, ne vont pas bien loin.
Le constat est donc partagé à propos de ce Lost Planet 3. Le titre revient sur les bases du premier épisode et élude le parti pris du online / coop mis en avant par le second opus. L’accent est ici renforcé sur l’ambiance et sur la trame, si bien que le gameplay visiblement traité en second plan se révèle plutôt fade et peu jouissif, tout en étant accessible au plus grand nombre. On note la présence de quelques modes multijoueurs, eux aussi très classiques et proposant du 3 contre 3 et du 5 contre 5, ce qui est au final assez peu et n’efface malheureusement pas le manque de punch et de subtilité dans les gunfights. Saluons tout de même le mode « Survie Akrid » basé sur la coopération de deux équipes de 3 face aux vilains autochtones, qui vire par la suite à l’affrontement entre joueurs.
Points forts
- L’ambiance et le dépaysement
- Le scénario et la mise en scène
- L’accessibilité du titre
- Un contenu correct et plutôt varié
Points faibles
- Gameplay générique et souvent fade
- Les longueurs volontaires de certaines phases
- Manque de peaufinage au niveau du game design
Lost Planet 3 laisse un arrière-goût de titre manquant de finition et de profondeur de jeu. Son ambiance, servie par une réalisation graphique légèrement datée, marque les esprits par le dépaysement procuré, tandis que le gameplay global du titre peine à se renouveler et à sortir des sentiers battus. Il reste néanmoins une bonne expérience pour les joueurs pas trop regardants sur la qualité du game design, et saura distraire durant la quinzaine d’heure que compte sa campagne solo. Doté d’un contenu correct, avec notamment des quêtes annexes et une certaine rejouabilité des zones explorées, le titre propose au final un panel d’expériences de jeu le rendant plaisant à parcourir.