Après avoir rendu les musulmans jouables dans The Sword of Islam, les développeurs de Crusader Kings 2 s'attaquent à une nouvelle catégorie de personnages jusqu'alors encore injouables : les païens. Les petits farceurs de chez Paradox Interactive avaient déjà annoncé un DLC impliquant les païens, malheureusement ce fameux DLC Sunset Invasion mettait en scène une invasion aztèque de l'Europe. Cette fois-ci, trêve de plaisanteries, les païens sont bien jouables en échange de 15 €.
Fan de Genghis Khan ou de Ragnar Lodbrok, l'heure est venue de prendre les armes et de partir conquérir vos voisins. Crusader Kings 2 : The Old Gods met en valeur les personnages qui ne sont ni chrétiens, ni musulmans. En effet, le terme de « païen » désigne ici plusieurs peuples bien distincts ayant leurs propres mythologies indépendantes les unes des autres. Cependant, durant la période prise en compte par le jeu (1066-1453), les païens sont extrêmement faibles et divisés et, mis à part les Mongols (un nouveau scénario permet désormais d'incarner Genghis Khan), aucun n'est en mesure d'affronter les royaumes chrétiens et musulmans. Paradox Interactive a heureusement pensé à ce détail.
Thor, Tengri, Ahura Mazda, Ukko et les autres...
Le DLC permet de commencer une partie en 867, soit près de deux siècles avant le départ classique. The Old Gods offre du contenu aux souverains chrétiens et musulmans sur une carte totalement modifiée où certains royaumes inédits apparaissent alors que d'autres n'existent pas et sont à former. Le travail des équipes est énorme pour reconstituer l'état du monde médiéval au IXème siècle et malgré quelques erreurs mineures comme l'Islande déjà colonisée, on peut féliciter le studio suédois. Après cette entrée en matière appétissante, il ne faut pas oublier que ce sont les païens qui forment le cœur du DLC : le paganisme nordique, celui des Baltes, les croyances des Finnois, la religion slave, le tengrisme, le zoroastrisme ou encore l'animisme africain sont désormais jouables. Chacune de ces croyances possède ses mécanismes particuliers : pour les nordiques et leur religion guerrière, lever des troupes ne donnera pas de malus avec les vassaux, au contraire ils commenceront à protester en cas de temps de paix trop long. Les zoroastriens, eux, auront la particularité de pouvoir se marier avec de proches parents : un mariage entre un dirigeant et sa sœur sera très bien vu par les vassaux. Bien évidemment, il faudra compter sur les concubines pour éviter qu'une dynastie soit rongée par la consanguinité.
Mis à part ces fameux zoroastriens, les autres croyances sont considérées comme « non réformées ». Ce statut permet aux seigneurs chrétiens et musulmans d'envoyer des missionnaires dans les terres infidèles. En cas d'arrivée d'un missionnaire, le dirigeant visé pourra soit accepter la présence du nouvel arrivant, soit l'envoyer directement en prison. Outre ce léger détail, les païens non reformés ont des handicaps : l'impossibilité de déclarer des guerres saintes, l'obligation d'avoir le partage salique comme règle de succession, l'absence de possibilité de contraindre un vassal à changer de religion ou encore l'incapacité de faire progresser l'autorité de la couronne au-delà du niveau « faible ». Chaque religion possède cinq lieux saints. Afin de reformer une religion, un dirigeant doit en posséder trois dans son domaine et l'autorité morale de la religion doit être au minimum de 50. Cette autorité fluctue en fonction de plusieurs critères comme par exemple le nombre de lieux saints contrôlés par les adeptes de la religion ou encore les conquêtes réussies ou échouées. Une fois ces conditions réunies il faudra dépenser 750 points de piété pour réformer la religion. Cependant, la réforme ne sera pas obligatoirement suivie par tout le monde. Ceux qui resteront attachés aux anciennes coutumes seront vus comme hérétiques par les membres de la religion réformée. De plus, la religion réformée se voit dotée d'un chef qui pourra lancer des « grandes guerres saintes » équivalentes aux croisades et aux djihads.
Les zoroastriens auront un challenge tout autre. Bien qu'ils aient une religion réformée, ils ne possèdent à la base pas de grand prêtre. Pour restaurer l'autorité du Moabadan-Moabad, il faudra d'abord avoir refondé l'empire perse, ce qui peut être accompli en contrôlant 80 % de ses territoires de jure. De plus, si un zoroastrien contrôle l'intégralité de cet empire, il pourra s'autoproclamer Saoshyant («l'élu »). Ce statut accorde un bonus de + 20 avec tous les zoroastriens – ses descendants profitent d'un bonus moindre mais toujours appréciable. Voilà la situation sur le papier : en pratique il faudra réussir à se débarrasser de puissants ennemis. Ce challenge sera complexifié par le fait que les zoroastriens sont très peu nombreux et seuls contre tous car que ce soit les musulmans ou les adeptes du tengrisme, tous seront hostiles.
Suivez la voie d'Odin : pillages, rapts et autres carnages !
Le DLC The Old Gods apporte également son lot de nouveautés dans le domaine militaire, la principale étant le système de pillage. Il est possible de lever des troupes, de sélectionner le mode pilleur et de les envoyer dans un comté qui ne partage pas la même religion. Les troupes pilleront alors le comté et assiégeront les villes. A leur retour, les pillards se verront couverts de gloire, d'or et de prisonniers arrachés durant les raids contre les ennemis. Il sera d'ailleurs possible de vendre ou de sacrifier les hommes ou de prendre de force les femmes comme concubines. Pour ces pillages, les nordiques ont une capacité exclusive, ils peuvent utiliser leurs bateaux pour remonter les fleuves et s'enfoncer dans les terres. Multiplier les pillages permettra à un personnage nordique d'acquérir le statut de Viking donnant un bonus de relation avec les vassaux.
Les païens disposent aussi de casus belli exclusifs : l'assujettissement qui permet à un païen de soumettre un autre païen. Cependant, ce casus belli ne peut être utilisé qu'une fois par personnage, sauf si ce personnage a l'ambition de former un royaume. Dans ce cas, il sera possible d'utiliser ce casus belli sur tous les dirigeants possédant des terres sur le territoire de jure du royaume sélectionné. La conquête de titres introduite pour les musulmans dans Sword of Islam est également présente, elle permet de conquérir tout territoire frontalier. Contrairement aux musulmans, les païens n'ont pas besoin de débourser de la piété pour lancer la conquête. Néanmoins, il n'est pas possible de la lancer contre quelqu'un de même religion.
Les nordiques possèdent également la possibilité de conquérir tout territoire côtier appartenant à un chrétien ou à un musulman. Ils peuvent de même préparer une invasion. Il suffit pour cela de sélectionner le royaume visé (qui doit avoir une certaine taille) et ainsi lancer un appel. Des aventuriers viendront alors s'ajouter aux troupes conventionnelles pour renforcer les rangs du conquérant. Attention, il faut que cet appel soit suivi dans les deux ans d'une vraie déclaration de guerre sinon l'armée sera démantelée et les vassaux seront furieux. Les disciples du tengrisme peuvent directement lancer des invasions et envahir un royaume entier permettant une expansion très rapide car, en plus du royaume visé, tous les territoires occupés lors de la signature du traité de paix seront vassalisés. Bien sûr les chrétiens et les musulmans ne se laisseront pas faire. Comme évoqué plus haut, il est possible d'envoyer le chapelain ou l'imam de la cour diffuser la bonne parole dans les terres barbares. Cependant, le missionnaire risque de ne faire qu'un aller simple. Si la conversion échoue, ils pourront passer à la manière forte et déclarer des guerres saintes. Bien que les païens possèdent une protection contre les gros royaumes consistant en une limite d'attrition très faible, cette barrière disparaît à partir d'un certain niveau de technologie (Organisation Militaire IV). En cas de guerre sainte lancée contre lui, un seigneur païen peut toutefois adopter la religion de l'agresseur et stopper l'attaque. Il est également possible de prendre la religion de sa femme ou d'une concubine.
Les rebelles se voient également améliorés, et il y aura désormais trois types de rébellions : les classiques rebellions paysannes, les révoltes religieuses et les insurrections « nationalistes ». Désormais, chaque rébellion se voit dotée d'un leader ayant un but, généralement la libération d'un comté ou d'un royaume occupé par un dirigeant ayant une culture ou une religion différente de la populace. Comme pour les guerres classiques, chaque révolte aura un pourcentage évoluant au fil des batailles et des sièges. Toujours dans le domaine des nuisances, des personnages sans fiefs peuvent désormais réunir des aventuriers pour aller envahir des terres. Un message avertira la cible que quelqu'un cherche à l'envahir et il sera possible de tuer l'apprenti conquérant pour éviter une invasion. Ce mécanisme peut aboutir à des situations bizarres comme par exemple une implantation de Vikings dans le Sinaï.
Loki a la traduction, Gríðr pour les DLC.
Comme d'habitude, chaque DLC de Crusader Kings 2 se voit accompagné d'une horde d'ajouts « cosmétiques », ici un morceau de musique (Hymns of the Old Gods), des skins de personnages (Norse Portraits) et de troupes (Norse Unit Pack). Il faudra chaque fois débourser 2 euros supplémentaires en plus des 15 déjà demandés pour The Old Gods lui-même. Il est toujours assez révoltant de devoir payer des éléments qui devraient être compris de base. En contrepartie, le patch qui a accompagné le DLC a totalement modifié le système de technologie : fini l'aléatoire, il est désormais possible d'accumuler et de dépenser ses points de technologie dans les branches souhaitées. Encore une fois, Paradox souffle le chaud et le froid dans sa politique de contenu additionnel… Restons dans les éléments qui fâchent avec la traduction qui frise parfois le ridicule. Les petty kingdoms deviennent des « Mesquins Royaumes » tandis qu'un petty king devient un Mesquin Roi plutôt qu'un Roitelet. C'est un exemple parmi d'autres alors que les traditionnels textes coupés au beau milieu d'une phrase sont toujours de la partie. Il faudra s'orienter vers la communauté pour obtenir une traduction fiable.
Points forts
- Le monde de 867
- Les nordiques et les zoroastriens bien travaillés...
- Les chrétiens et les musulmans ont aussi du nouveau contenu
- Le système de pillage
- Les rebelles avec une cause
Points faibles
- Traduction étrange
- … mais les autres croyances païennes sont un peu délaissées
- Les DLC annexes
The Old Gods est un DLC quasiment indispensable : sa nouvelle date de départ propose du contenu non seulement aux païens mais également de nouveaux challenges pour les chrétiens et les musulmans. Piller l'Europe à la tête d'une armée de Vikings assoiffés le sang et de gloire, tenter d'évangéliser les hordes mongoles ou ressusciter le culte zoroastrien sont autant de défis qui prendront des dizaines d'heures. Les petits défauts habituels sont toujours là, mais ils sembleront bien mineurs en comparaison du nouveau contenu.