Qui ne connaît pas Bob l’Eponge ? Ce petit être jaune vivant dans un ananas au fond de l’océan à Bikini Bottom a hanté vos nuits – pour de bonnes ou de mauvaises raisons – voire celles de vos enfants. Peut-être vous souvenez-vous avoir acquis ce jeu Game Boy Color dans votre prime jeunesse alors que vous n’aviez encore qu’une maigre expérience des jeux vidéo, et en retombant par hasard dessus, les souvenirs ont surgi avec une telle fougue qu’ils vous ont presque arraché une larme. "Larme de quoi ?" demandez-vous déjà.
Vous vous attendiez à quoi ?
Qui vit dans un ananas dans la mer ? Bob, l’éponge carrée. Ça va, on le sait tous. Pour ceux qui ne connaissent pas, et qui vivent par déduction dans un abri anti-atomique depuis quinze ans, Bob est une éponge vivant dans la ville aquatique de Bikini Bottom, et qui rêve de devenir le meilleur cuisinier de pâtés de crabe. Employé par monsieur Krabs, dans son restaurant le Crabe Croustillant, Bob nourrit une certaine dévotion pour les spatules. Aussi, quelle ne fut pas sa surprise en découvrant, lors de ses pérégrinations, une statue d’un homme debout sur une cuisinière, enfouie dans les champs d’algues près du village. Questionnant son patron, il apprend qu’une légende parle d’une spatule bien meilleure que toutes les autres vulgaires spatules, inestimable héritage du maléfique Hollandais Volant, et Bob décide de la retrouver. A la lecture de ces quelques lignes de script, difficile de sentir l’excitation frénétique du joueur enthousiaste, mais n’oublions pas que ce jeu est fait pour les enfants. Notre rigolo héros se met donc en quête du saint ustensile.
This is Spatula !
De par le public visé, vous l’aurez compris, le scénario est éminemment simple, loufoque et amusant. Bob traversera les différents quartiers de Bikini Bottom et rencontrera tous ses amis, pour mener à bien sa quête. Il faut avouer que les graphismes sont plutôt réussis pour une Game Boy Color. Colorés, parfaitement fidèles au dessin animé, tous les personnages sont présents, de Carlos le voisin misanthrope à Sandy l’écureuil en scaphandre, en passant par Boule de Gras, l’ennemi obèse et moqueur de Bob. Les plus jeunes fans seront donc charmés par cet aspect. Les plates-formes sont bien délimitées et visibles, et rien ne vient gêner la progression. Les animations de Bob sont excellentes, fluides et claires, et les développeurs en ont ajoutées partout comme effet comique : quand il se baisse et s’aplatit, lorsqu’il fait la vague avec ses bras si vous restez trop longtemps sans rien faire, etc. Oui, n’ayons pas peur de le dire, côté graphismes, c’est une assez franche réussite. Côté musique aussi, la surprise est plutôt agréable. Les capacités de la GBC sont pleinement exploitées, et l’aventure est parsemée de morceaux plutôt sympathiques, voire même parfois entraînants. Malheureusement, si l’on peine à sortir d’une zone, la bande-son devient agaçante et reste gravée dans votre mémoire, ce qui fait que vous ne pourrez vous empêcher de la fredonner jusqu’à la fin de la journée. Cela dit, ici aussi, les fans auront plaisir à composer avec une OST de qualité, parfaitement en phase avec l’univers et le côté fun général du soft. Les quelques bruitages sont également sympathiques.
Manque d’originalité
C’est lorsqu’on commence à s’intéresser au gameplay que malheureusement le jeu perd les points qu’il avait gagnés avec un rendu artistique soigné. En effet, cette adaptation prend l’apparence d’un jeu de plates-formes on ne peut plus classique. Vous évoluez à travers des niveaux de plus en plus complexes, et récupérez plusieurs armes, telles que l’épuisette, le pistolet à filets, mais également des objets, comme les bottes à ressorts, pour sauter plus haut. Les niveaux sont labyrinthiques, de plus en plus grands au fil de la progression, ce qui est d’autant plus confus que les objectifs se multiplient. Quitte à faire de la plate-forme brute et classique, pourquoi ne pas se contenter de rejoindre la fin du niveau ? Eh non, ici vous devrez encore faire des allers-retours pour délivrer certains objets afin d’obtenir des clés. Le level design reste encore une fois coloré et simple, mais ne suffit à donner une impression de clarté. Le gameplay est relativement pauvre, l’inventaire peu fourni, il suffit de trouver quelle arme utiliser selon l’ennemi (sur les trois disponibles) et d’avancer en sautant un peu partout. Les niveaux, finalement, ne se renouvellent guère et manquent de variété.
De la plate-forme hasardeuse
Et voilà qu’on rentre dans le gros problème du jeu : sa mauvaise exécution. Tout d’abord, il faut rappeler que le jeu est sorti en 2001, et est destiné, en toute logique, aux fans de la série, à savoir les enfants. Et alors, on est en droit de se demander, non sans une pointe d’incrédulité, pourquoi avoir fait un jeu aussi difficile ? Pourquoi proposer à nos charmantes têtes blondes des niveaux pollués d’ennemis en tous genres, qui vous agressent lors de votre saut alors que vous ne pouviez pas les voir lorsque vous aviez les pieds au sol, où les sauts de l’ange sont monnaie courante lorsqu’on s’approche de la fin du jeu, et des dialogues non traduits en français, qui plus est ? Certes le jeu propose peu de textes, mais c’est justement pour ça que les studios auraient pu faire l’effort minime d’une traduction. Peu sont les moins de quinze ans à être à l’aise avec la langue de Shakespeare. Pour noircir davantage le tableau, le contrôle de l’inventaire est chaotique, on ne peut équiper qu’un objet à la fois, et il faut constamment naviguer dans le menu pour changer d’item. Pire encore, les sauvegardes se font au moyen de mots de passe. Sur une GBC, on pouvait très franchement rêver mieux.
Epongeons nos larmes
Ainsi, beaucoup seront les enfants qui n’auront ni la technique ni la patience pour atteindre la fin du jeu, la faute à une difficulté mal adaptée au public visé, et à une mauvaise réalisation en général. Et pourtant, le jeu est très loin d’être long. Trois heures seront un maximum pour boucler l’histoire, il n’y a aucun mode de jeu supplémentaire, pas de new game +, pas de quêtes annexes, la rejouabilité du titre est donc vraiment très faible, à moins d’être un véritable fan et d’avoir été enchanté par l’univers. Cependant, l’ardeur de la tâche pourra gonfler cette durée pour les moins expérimentés. En effet, il en faut peu à Bob pour le freiner dans ses aventures. Se faire toucher une fois lui enlève son pantalon, se faire toucher une deuxième fois le met tout nu, et vous force à recommencer au début de l’écran. Heureusement, on peut trouver des pantalons dans certains coffres.
Points forts
- Les graphismes et les animations très réussis
- Les musiques entraînantes
Points faibles
- La difficulté mal dosée
- La pauvreté de gameplay
- La faible durée de vie
- L’absence de traduction
Pour résumer, Legend of the Lost Spatula est parfaitement adapté du dessin animé Bob l'Eponge, et les graphismes flattent la rétine. Mais l’absence de traduction, la difficulté mal adaptée aux jeunes joueurs, le gameplay pauvre et la durée de vie ridicule ternissent grandement l’image du soft. Si les très grands fans pourront éventuellement y trouver quelques heures d’amusement, au prix de plusieurs soupirs d’agacement tout de même, les autres n’y verront sans doute qu’une énième adaptation à la réalisation bancale.