Très populaires il y a quelques années, les jeux d'infiltration ont aujourd'hui le séant entre deux chaises. Exigeants de nature, ces derniers ont bien du mal à séduire le large public qui permettrait à leurs concepteurs d'être rentables. Peu de studios ont d'ailleurs réussi à trouver une réponse à cette problématique. Trop d'accessibilité fait fuir les vieux routards alors qu'à l'inverse, l'intransigeance réduit la cible visée. Reste que certains préfèrent trancher dans le vif plutôt que de nager éternellement dans des eaux troubles. C'est le cas de Cyanide qui joue la carte du jeu d’infiltration punitif avec Styx : Master of Shadows.
Ceux qui ont joué à Of Orcs and Men le savent, Styx est le nom de l'un des deux héros, en l’occurrence le gobelin. Pour tout dire, il est même le tout premier représentant de sa race. Et visiblement, cela ne l'empêche pas de se poser quelques questions sur ses origines. Pour répondre à ces dernières, il se lance au cœur d'Akenash, une citadelle occupée par les Hommes et les Elfes, construite autour d'un veil arbre qui n'est autre que la principale source d'ambre du monde. L'ambre, clé de toute l'histoire, elle qui confère d'immenses pouvoirs à ceux qui la contrôlent. Styx le sait, c'est dans les profondeurs de la citadelle, au cœur de ce lieu majestueux qu'il trouvera des réponses aux questions relatives à son identité. Avide de pouvoir et d'argent, il ne se fera pas non plus prier pour s'enrichir tout au long de son périple.
Thief, la référence
Cyanide ne le cache pas, la série ayant servi de référence lors du développement de Styx : Master of Shadows, c'est Thief. Comme son modèle, le jeu ne fait aucune concession. Le studio français a souhaité que la difficulté soit particulièrement relevée. Une erreur et la punition est immédiate. Inutile de jouer la carte de la brutalité ou de filer tout droit en regardant les ennemis dans les yeux. Ici, être repéré signifie mourir. Neuf fois sur dix. D'une part parce que les adversaires sont souvent en nombre et d'autre part parce que vous n'avez nullement les moyens de résister, ne serait-ce qu'à un seul homme. Aussi, il va vous falloir veiller à une foultitude de détails : ne pas renverser des objets sous peine d'alerter les gardes aux alentours, courir uniquement sur une surface étouffant les bruits ou encore jouer avec les sources de lumière. Dans ce dernier cas, la mécanique est binaire. Soit on est invisible parce qu'une ombre nous recouvre entièrement, soit on est au contraire sous le feu des projecteurs. Pour être sûr de son coup, il suffit de jeter un œil au tatouage de Styx qui scintille lorsque celui-ci peut être repéré. Sachez tout de même qu'un ennemi qui vous repère ne lâche généralement pas l'affaire avant de vous avoir retrouvé. Il cherche partout, ouvre chaque placard, examine chaque coffre pour être certain de mettre la main sur vous. En fait, l'état d'alerte ne retombe jamais vraiment. Il faut changer de lieu pour repartir sur de nouvelles bases. A moins que vous ne rusiez en envoyant par exemple un clone de Styx se faire violenter à votre place. On retrouve aussi dans le jeu de Cyanide des mécaniques vieilles comme le monde. On peut ainsi regarder à travers les trous de serrure pour préparer un plan d'attaque ou encore profiter de l'agilité du gobelin pour se glisser dans le moindre interstice.
Agir avant d'être vu
Il existe de nombreux moyens d'aborder un même objectif dans le jeu. Déjà parce que Cyanide a veillé à ce que chaque niveau propose plusieurs embranchements. Ensuite parce que l'on peut réaliser diverses actions ouvrant la voie à différentes manières de progresser. La première d'entre elles consiste évidemment à exécuter froidement un ennemi d'un seul coup. Se faufiler dans le dos de celui-ci est la condition sine qua non pour que l'opération réussisse. Styx dispose également de trois pouvoirs d'ambre qui doivent être utilisés avec intelligence pour être efficaces. L'ami gobelin peut devenir invisible un court instant, révéler les interactions possibles avec l'environnement ou créer un clone de lui-même. Cette dernière capacité reste certainement la plus importante de toutes. D'une part parce qu'elle est très utile pour faire diversion, et d'autre part parce qu'elle est nécessaire durant certaines énigmes. L'exemple le plus évident est le suivant : on envoie son double actionner un mécanisme qui ouvre une porte que l'on franchit avec Styx. L'utilisation de ces pouvoirs est évidemment limitée par une jauge qui se recharge uniquement grâce à des fioles. Cependant, il reste toujours au moins de quoi créer un clone, celui-ci pouvant donc être nécessaire à la poursuite de l'aventure.
Missions à tiroirs
Comme souvent avec ce type de jeux, il existe plusieurs objectifs à remplir pour chaque mission. Un tableau récapitule votre performance à la fin de chaque niveau. La production de Cyanide offre toujours au minimum 70% de l'expérience que l'on peut gagner sur un même niveau aux joueurs qui se contentent du minimum. De quoi progresser en débloquant et en améliorant des compétences. Les récompenses ultimes reviendront toutefois à ceux qui atteindront tous les objectifs, cruciaux et facultatifs en étant le plus discret possible. Prendre son temps, fouiller de fond en comble chaque salle donne accès à des trésors cachés. Un butin grâce auquel vous pourrez ensuite améliorer l'équipement de Styx. Sachez enfin qu'un mode Challenge allongera la durée de vie du jeu en vous permettant de refaire l'ensemble des tableaux. Des défis vous seront lancés comme réussir à terminer tel chapitre dans un laps de temps limité.
Pas nécessairement impressionnant sur le plan visuel, Styx : Master of Shadows se présente comme un jeu d'infiltration au gameplay ciselé. En soi, il s'agit déjà d'une nouvelle qui risque de donner le sourire à certains. En remettant l’exigence au cœur des débats, Cyanide a tout compris. L'ensemble des mécaniques partagées par de nombreux titres prennent ici un tout autre sens. Pour le moment, rien n'apparaît superflu et on se plaît à penser que l'on va en baver pour échapper aux terribles Elfes qui gardent la citadelle. Peu attendu jusqu'ici, le jeu mérite clairement que l'on garde un œil attentif sur lui.