En 2011, le studio Somethin' Else s'était fait un petit nom sur iOS avec Papa Sangre, un titre ayant la particularité de nous faire jouer sans l'image, juste avec le son. Le résultat s'était montré aussi étonnant que convaincant. Encouragé par les retours positifs, Somethin' Else poursuit dans son créneau et sort The Nighjar. Le concept est exactement le même : ce sont vos oreilles qui vous guident dans un univers horrifique plongé dans le noir.
The Nightjar n'est pas spécialement nouveau sur l'App Store. En fait, il est sorti en 2011 dans une version gratuite sponsorisée par une marque de chewing-gum. En 2013, le partenariat s'arrête, le jeu devient alors payant et supprime toute trace de publicité. La question se pose alors : The Nightjar justifie-t-il les cinq euros désormais requis pour jouer ? Pour les joueurs qui apprécient les expériences inédites (ou presque, puisque Papa Sangre est déjà passé par là), la réponse est bien sûr oui. Pour les autres, mieux vaut continuer de lire pour se faire un avis plus éclairé.
Vos oreilles sont vos yeux
Le jeu Papa Sangre bousculait nos habitudes de joueur en coupant la lumière pour nous faire jouer avec nos oreilles. Grâce à une interface dépouillée, le but était d'avancer dans un environnement en se repérant uniquement aux sons. Le principe de The Nightjar est identique, seul l'univers change puisque le pays des morts mexicain laisse sa place à une aventure spatiale. Ou plutôt à une mésaventure spatiale car le personnage que vous incarnez se retrouve seul survivant dans un vaisseau en péril, abordé par des formes de vie inconnue. Vous serez guidé à l'oreillette par une voix amicale, interprétée par l'acteur Benedict Cumberbatch (Sherlock, Star Trek 2), vous indiquant l'objectif à accomplir dans les 14 très courts niveaux. Dans les grandes lignes, il s'agit généralement d'ouvrir puis d'atteindre une porte, tout en slalomant entre des monstres présents dans la salle. Quelques subtilités interviennent de temps à autre, comme des matières toxiques à soigneusement contourner par exemple.
Pour agir, le jeu met à disposition deux touches correspondant à nos deux pieds, qu'il faut donc presser en alternance pour avancer, mais pas trop vite, sous peine de tomber et d'attirer l'attention des créatures. Il y a aussi une sorte de boussole pour contrôler la direction, toujours en se basant à ce que vos oreilles vous disent. Le boulot fait sur le son est bien sûr crucial dans un jeu comme The Nightjar. Difficile de reprocher quoi que ce soit aux développeurs. La localisation dans l'espace fonctionne bien, on arrive à percevoir d'où vient tel ou tel bruit, et donc à se repérer plus ou moins aisément. Cela n'empêche pas de pester assez régulièrement contre le jeu. Si tout est au point pour le son, The Nightjar n'en reste pas moins très frustrant lorsqu'on recommence pour la vingtième fois un niveau parce qu'un monstre surgit brutalement sans nous laisser le temps de réagir. Le fait de devoir obligatoirement maîtriser l'anglais est également un élément à prendre en considération avant de se lancer dans l'aventure puisque le jeu ne dispose d'aucun sous-titre. Mieux vaut donc être à l'aise avec l'accent british de Cumberbatch pour comprendre ce qu'il attend de nous.
Nous en revenons donc à la question initiale : The Nightjar justifie-t-il son prix ? Pour être franc, je serais tenté de dire non. Pas entièrement en tout cas. Sans remettre en question le travail abattu par les développeurs, le gameplay n'est pas encore totalement au point. Si l'histoire veut jouer avec des effets de surprise, qu'elle donne alors les moyens aux joueurs de pouvoir réagir. Ce n'est pas forcément le cas ici, au point que l'on a bien souvent l'impression de subir les échecs sans vraiment savoir comment les éviter, ni même d'apprendre de ses erreurs. La formule n'est toutefois pas à jeter, loin de là. Somethin' Else est sur un filon que nous espérons voir s'affiner à l'avenir avec, pourquoi pas, d'autres éléments de gameplay que le simple fait de marcher. Finalement, si le prix de The Nightjar semble excessif, on peut le voir comme un soutien financier pour encourager le studio à creuser son idée. Ca passe déjà beaucoup mieux.
Points forts
- Un concept de jeu encore surprenant
- Benedict Cumberbatch au creux de l'oreille
Points faibles
- Une durée de vie qui dépasse péniblement l'heure de jeu
- Trop punitif
- Sensation d'un copier-coller spatial de Papa Sangre
C'est bon de se dire que Papa Sangre n'était pas un coup dans l'eau et que le studio Somethin'Else compte bien explorer ce concept de jeu sonore. On aurait toutefois espéré voir plus de nouveautés dans cette nouvelle expérience et peut-être aussi voir les développeurs tenter de nouvelles idées plutôt que de simplement modifier l'histoire et l'univers. Espérons qu'un prochain titre se montrera plus ambitieux à ce niveau.