Après avoir marqué l'ère PS One avec les Spyro, l'ère PS2 avec les Ratchet & Clank et, plus moindrement, l'ère PS3 avec les Resistance, l'équipe d'Insomniac Games revient à la charge avec un TPS Coopératif : Fuse (anciennement nommé Overstrike). Sous les belles promesses se cache malheureusement un constat bien faible pour un tarif de sortie le plaçant forcément sur un pied d'égalité avec les ténors du genre, sans toutefois leur arriver à la cheville.
Jouer à Fuse, c'est un peu comme aller au restaurant et commander un plat réchauffé au micro-ondes. Ici, bien que l'enseigne en question ait l'étoffe d'un grand chef, on en vient très vite à se demander en quoi ce titre si faiblement aguicheur, tant par sa réalisation que par son background ou son gameplay générique, pourrait s'attirer les faveurs d'une communauté de joueurs réguliers. La réponse tient évidemment dans le principe de coopération, ici alimenté par de bonnes idées qui, malheureusement, ne sauvent pas le retard évident sur les différents aspects du jeu.
Un casting et une réalisation de sitcom SF
Les choses commencent mal pour le jeu, car si les deux derniers tiers du jeu se veulent un brin exotiques et faussement ouverts, la première partie de l'aventure a vraiment un goût de série SF au rabais. Par où commencer ? Peut-être par le character design, qui nous affuble ici de 4 « héros » nous mettant la puce à l'oreille quant au ton donné, délibérément ou non, par les développeurs. La belle équipe de bras cassés, on ne peut plus cliché et respectueuse des quotas comble son manque de charisme par l'utilité relative de chacun de ses membres. Deux hommes, deux femmes, un tank, un sniper, un médecin, une furtive : telle est votre équipe. Cette Team Overstrike 9, dont les dialogues vous feront d'abord rire avant de vous affliger, va donc évoluer dans quelques environnements scriptés et très segmentés tout le long de l'aventure.
Si vous souhaitez voir du pays, vous serez assez déçu vu qu'on a ici un choix très restreint de destinations, même si les niveaux sont plutôt vastes et longs. On explore entre autres une base sous-marine, un avant-poste en mer de chine, un centre dans les montagnes pakistanaises, bref, assez pour égayer la progression mais pas assez pour surprendre. La patte graphique est d'ailleurs correcte sans être originale, quant au moteur graphique du titre : l'insomniac engine 4.0 (développé spécifiquement pour le titre), il fait globalement bien son travail même si l'affichage de hordes d'ennemis et d'explosions fait parfois baisser le framerate et le constat est évidemment un peu plus prononcé en split-screen (surtout sur PS3). Techniquement, le jeu affiche tout de même un retard assez prononcé, sans doute à cause de sa gestation plutôt longue, le soft étant développé depuis plus de 3 ans. Pour ce qui est de l'ambiance sonore, si les voix sont potables et très "série Z", les musiques ne marqueront pas par leur intensité et c'est fort dommage. On aurait aimé qu'elles couvrent plus efficacement le brouhaha des gunfights longs et répétitifs, mais nous verrons cela plus tard.
Un principe de complémentarité qu'on oublie bien vite
Fuse est un jeu faisant la part belle à la coop, c'est son concept et, pour ainsi dire, sa seule qualité relativement bien retranscrite. Cette coopération est introduite par le fait que chacun de vos combattants se voit bénéficier d'une arme outrageusement efficace appelée arme Xenotech, lui accordant un avantage certain sur le champ de bataille. Ainsi, Dalton, le gros baraqué archétype du tank hérite du Mag Shield, un bouclier énergétique protégeant des tirs et émettant une onde de choc. Pendant ce temps, Jacob, le sniper, obtient une arbalète redoutable à distance, la médic reçoit un cristaliseur d'ennemis, et la furtive Naya se paye une mitrailleuse à singularité permettant de tuer à la chaîne et avec classe. C'est la combinaison efficace de ces 4 styles de jeu qui conditionnera (sur le papier encore une fois) votre réussite lors des quelques missions qui composent la campagne solo.
En réalité, le jeu est très bourrin et répétitif, et si une combinaison habile des capacités de votre personnage fera augmenter votre XP, il faudra malheureusement privilégier cet aspect stratégie pour la coopération entre joueurs étant donné que l'IA n'est pas vraiment un exemple d'efficacité tactique. Certes cette dernière viendra, par exemple, vous remettre sur pied une fois à terre, mais elle le fera trop souvent au péril de sa vie et sans faire attention, précipitant encore plus la mission vers l'échec. En effet, vu que la mort d'un seul membre de l'équipe est ici synonyme de game over, vous devrez garder un œil sur vos coéquipiers et ne pas trop vous aventurer sur le front sans précaution. C'est donc par l'intermédiaire d'une coopération entre humains, avec un peu de communication, que le titre se montre le plus fun. On arrive même à prendre plaisir à mettre au point des stratégies à l'efficacité discutable pour, par exemple, liquider la majorité des ennemis furtivement avant d'être repéré. Notez également que l'on peut incarner au choix l'un des 4 membres de l'équipe par une sélection rapide via le bouton Select.
Apprendre sur le champ de bataille : Fuse + Armes = Victoire
Les ennemis, quant à eux, combleront leur manque de variété par leur nombre, vous acculant parfois par dizaines et vous forçant à mettre à profit un système de cover efficace. La construction de l'action est on ne peut plus répétitive : progresser dans les environnements en se délectant des dialogues niais au possible, enchaîner quelque phases de pseudo plates-formes avant de rentrer dans une phase de combat à 4 contre tous, parfois couronnée par l'arrivée d'un mid-boss. Chaque chapitre de l'histoire se termine par l'arrivée d'un boss, dont le combat se déroule de manière assez classique, par phases successives souvent coordonnées avec l'arrivée de renforts armés.
La présence d'un skill tree pour chacun des personnages jouables est un plus, mais s'avère au final décevant car ces derniers sont très similaires d'un héros à l'autre. Outre les habituelles améliorations de tirs, de santé, et de grenades, on salue la possibilité d'améliorer un chouia nos armes Xenotech. Jacob pourra enflammer ses carreaux d’arbalètes après impact et Naya peut devenir invisible pour éliminer ses ennemis discrètement ou réanimer ses collègues sans être vue. Dalton peut déployer un bouclier fixe et Izzy peut poser une balise de soin. Encore une fois, on aurait aimé avoir plus d'évolution dans les compétences des personnages, notamment une seconde amélioration clé pour les armes Xenotech. Ces dernières fonctionnent d'ailleurs au Fuse tout comme vos compétences spéciales, et s'avèrent être au final le seul moyen efficace de venir à bout des vagues d'ennemis. Mais d'ailleurs, le Fuse, qu'est-ce que c'est ?
Le concept magnifié du "scenar' post-it"
Nous vous le disions plus haut, le background de Fuse est plutôt léger pour ne pas dire risible. Pour faire simple, le fameux Fuse est une substance instable, résultat fantasmé des recherches sur l'antimatière et l'atome : une véritable arme à ne pas mettre entre toutes les mains. C'est dans ce cadre que votre joyeuse compagnie parcourt le monde afin d'anéantir la milice Raven, qui comme tout méchant standard, ne veut que semer la destruction par cupidité, et ça passe évidemment par le vol puis l'usage du Fuse. On en vient donc à affronter des vagues successives d'ennemis plus ou moins évolués, allant du simple troufion au mécha, en passant par les soldats modifiés avec la précieuse matière, les hélicoptères, et les boss, aussi anecdotiques que caricaturaux. Serez-vous de taille à trucider le vilain savant russe s'injectant, tel un William Birkin en herbe, la substance miracle et destructrice ? Oserez-vous défier la militaire chinoise, ancienne patronne d'un des héros ?
C'est typiquement le genre de scénario que l'on se plaît à tourner en ridicule entre amis, c'est d'ailleurs semble-t-il ce que voulaient les développeurs, car certains éléments ne trompent pas. A titre d'exemple, Dalton (la grosse brute) a peur des chats, et l'équipe y fera souvent référence durant l'aventure : "drôle et très vite affligeant". Pour vous montrer à quel point les dialogues sont riches et bien écrits, je citerai un des héros qui, après avoir exploré la moitié d'un laboratoire militaire top-secret, nous sort : "C'est pas des ampoules qu'ils développent ici ! C'est des armes !". Pour conclure sur le background, on remarque tout de même la présence de rapports, audio et écrits, servant à approfondir tant bien que mal l'histoire du jeu.
Une rejouabilité pas folichonne
Le challenge en solo pur n'étant ni d'une qualité exemplaire, ni d'une originalité folle, on se rabat très vite sur la coopération, à deux en écran splitté local ou en online, jusqu'à 4 joueurs. Cela a le mérite de rallonger une durée de vie allant de 6 à 8 heures suivant le mode de difficulté et votre propension à vouloir faire le jeu à 100% (XP, argent, capacités de l'équipe, mémos, défis, trophées). Et si les quelques très longs chapitres de la campagne jouable en coopération ne vous suffisent pas, sachez qu'il y a un mode Echelon (solo et coop) permettant de faire du scoring en affrontant des salves d'ennemis toujours plus redoutables. De quoi vous occuper si vous souhaitez figurer aux leaderboards mondiaux et briller en société par ce haut fait d'arme.
Points forts
- Amusant entre amis
- Gameplay fluide
- La armes Xenotech
- Le côté "série Z" presque assumé
Points faibles
- Réalisation et technique en retard
- Plutôt léger sur le contenu
- L'aspect coopération vite limité
- La complémentarité de l'équipe est sous-exploitée
- Un framerate instable
Fuse partait pourtant d'un bon principe : proposer un TPS résolument tourné vers le multijoueur où chacun incarne un talentueux espion ayant une capacité maîtresse. Malheureusement, le titre vire très vite à la surenchère d'action peu subtile, et la supposée complémentarité entre chaque héros n'est au final ni essentielle ni flagrante. Fuse est un jeu agréable entre amis, un peu moins tout seul, et même s'il ne se révèle pas désagréable à jouer, on est en droit pour ce prix-là de demander une qualité bien supérieure. Les lacunes au niveau du contenu, de la réalisation, et des innovations présentes entachent clairement l’intérêt du titre.