Après avoir fait sensation lors de son annonce à la gamescom 2012, Remember Me arrive enfin sur nos consoles et PC. Prenons donc la direction de Paris en 2084 pour une aventure dystopique qui s'annonce à la fois originale et lourde de sens, mais également extrêmement linéaire. Voyons sans plus attendre si cette formule fonctionne.
Avec Remember Me, le studio français DONTNOD a créé un univers complexe et original tournant principalement autour d'une société nommée Memorize. Son pouvoir vient d'un dispositif nommé Sensen (Sensation Engine) capable de numériser et de partager les sensations ou autres souvenirs en temps réel. Avec le temps, il est même devenu possible de modifier la mémoire, de l'effacer, de la voler et inévitablement de la revendre. Si l'idée de départ était de rendre les gens heureux, en effaçant les moments trop douloureux de leur esprit, certains sont rapidement devenus accros aux souvenirs heureux, perdant de ce fait leur personnalité et leur identité. Bien que passés sous silence à coups de millions d'euros, certains dégâts psychiques sont inévitablement engendrés, et les rues de Neo-Paris en 2084 sont jonchées de drogués en manque, de personnes ayant fait des overdoses ou carrément de Leapers, sortes de créatures agressives qui n'ont plus rien d'humain. Bref, c'est un avenir à la fois passionnant et dérangeant qui est dépeint ici, offrant une ambiance assez exceptionnelle au joueur, et ce dès les premières minutes de jeu.
Erroriste, un métier difficile
Au début de l'aventure, on se retrouve donc derrière une certaine Nilin, voleuse de souvenirs émérite devenue erroriste, ou plus simplement activiste anti-Memorize. Emprisonnée dans une version futuriste de la bastille dans laquelle sa mémoire a été effacée, celle-ci va tout d'abord devoir s'enfuir puis reconstituer son passé en suivant les conseils du mystérieux Edge. On en vient toutefois rapidement à douter de tout de ce que l'on sait ou de tout ce que l'on fait, chaque acte d'apparence bien-fondé étant contrebalancé par la peur d'avoir été manipulé. Dans une société où les souvenirs et par conséquent les opinions sont contrôlés, on ne peut ainsi qu'hésiter avant d'effectuer des actions moralement discutables mais décrites comme nécessaires par Edge. On ignore d'ailleurs quelles sont les intentions de ce dernier, si bien qu'on finit par ne plus savoir qui est réellement l'ennemi. Le résultat est sans appel : on prend un plaisir immense à suivre ce scénario et à découvrir ses nombreux rebondissements. Certains passages précis font tache, comme le prétexte invoqué pour justifier le combat final, mais on ne se résout à arrêter de jouer qu'à l'arrivée du générique (comptez d'ailleurs entre 10 à 12 heures pour l'atteindre), ce qui est extrêmement positif.
Un titre linéaire
Au niveau du gameplay, on nous propose un enchaînement de combats, d'énigmes et de phases de plates-formes à la Tomb Raider ou Prince of Persia par exemple. Le level design lors de ces dernières est généralement correct sans être exceptionnel, notamment car on impose systématiquement un chemin prédéfini au joueur. Il peut dès lors arriver qu'on meurt en empruntant un chemin d'apparence praticable simplement car les développeurs n'ont pas prévu qu'on passe par là. Cette linéarité est d'ailleurs extrêmement marquée durant toute l'aventure puisqu'on évolue en permanence dans des couloirs de 1 mètre de large. Quelques passages secrets permettent de découvrir des boosts de santé, des informations sur l'univers ou autres objets cachés, mais cela n'atténue en rien cette sensation clairement voulue par un développeur cherchant à plonger le joueur au maximum dans l'histoire, mais assez frustrante à la longue. Cela est d'autant plus vrai qu'on aimerait pouvoir explorer librement des environnements souvent magnifiques. Ainsi, si techniquement Remember Me est très limité et comprend quelques bugs plus ou moins gênants inhérents à l'Unreal Engine 3, celui-ci se rattrape grâce à une direction artistique remarquable. Les différents lieux visités sont à la fois variés et jolis, ce qui contribue à améliorer encore un peu plus une ambiance déjà exceptionnelle servie par une bande-son non moins excellente. Qu'on parle des musiques d'ambiance ou des mélodies dynamiques qui rythment les combats, tout est absolument génial à ce niveau.
Des combats dynamiques
Et puisque nous parlons des combats, sachez que ceux-ci s'avèrent également plutôt réussis, notamment grâce à leur dynamisme. Tout est basé ici sur l'esquive et sur l'enchaînement de coups de poing et de pied en combos paramétrables à sa guise. Ainsi, s'il est impossible de changer l'ordre des coups, on peut leur attribuer un effet donné afin de maximiser les dégâts, récupérer de la santé ou raccourcir le cooldown suivant l'utilisation d'un pouvoir actif (permettant de pirater un ennemi robotique, d'assommer tous les ennemis, de devenir invisible l'espace d'un instant, de poser une bombe ou de devenir plus rapide). Dès lors, on peut choisir de mixer tous les effets au sein d'un même combo ou bien de se spécialiser et de profiter d'effets de chaîne qui maximisent la puissance. Une certaine stratégie s'installe donc et chacun doit trouver le bon compromis selon son style de jeu. Les animations de Nilin ne sont franchement pas terribles, certains QTE lors des combats de boss agacent un peu et un léger côté répétitif peut ressortir en fin d'aventure, et ce malgré la présence de 14 ennemis différents et l'arrivée progressive de nouveaux combos, mais l'ensemble n'en reste pas moins plaisant à l'usage.
Les Memory Remix, ou l'âme de Remember Me
Ces phases de plates-formes et combat laissent de temps à autre place à quatre énigmes très sympathiques : les Memory Remix. Le but est ici de modifier le souvenir d'une personne afin de changer son attitude et ainsi arriver à nos fins. On commence donc par visualiser le souvenir tel qu'il s'est vraiment déroulé avant de parcourir la séquence librement en tournant son stick ou sa souris dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Le but est de trouver des points susceptibles d'être modifiés puis de laisser l'action suivre son cours jusqu'au résultat escompté. Ceci étant, il faut expérimenter et tâtonner pour trouver la seule solution viable. De nombreux échecs sont à prévoir avec ce que cela comprend de résultats inattendus. Il s'agit donc là de séquences à la fois originales et agréables à jouer tout en étant parfaitement intégrées au scénario (à l'exception peut-être de la seconde). Bref, on en redemande, et malgré ses défauts Remember Me s'avère être un excellent titre qui devrait sans peine séduire les joueurs amateurs de belles histoires et d'ambiances travaillées.
Points forts
- Scénario très prenant aux nombreux rebondissements
- Un univers riche
- Ambiance exceptionnelle
- Réalisation artistique soignée
- Système de combat bien pensé
- Bande-son dynamique
- Très original
Points faibles
- Trop linéaire
- Animations datées
- Techniquement limité
- Peut-être un peu court (entre 10 et 12 heures)
Certes Remember Me est trop linéaire. Certes son gameplay est un poil rigide et un peu répétitif. Mais on ne peut se résoudre à le sanctionner trop lourdement tant l'expérience proposée est prenante. Fort d'un scénario passionnant, d'un univers riche et perturbant, de combats dynamiques et bien pensés, d'une réalisation artistique exemplaire et d'une bande-son inoubliable, celui-ci a tout pour s'imposer comme un des jeux les plus attrayants et originaux de l'année. Bref, à ne pas manquer !