En développement depuis déjà un bon moment, nous n'avions plus de nouvelles du prochain opus de la saga Thief, saga à l'origine, rappelons-le, du jeu d'infiltration à la première personne sur PC en 1998. Un coup de fil et quelques courriels du service de presse de Square Enix et nous sommes partis à Montréal pour assister à une présentation du jeu en bonne et due forme.
Il est des jeux qui marquent les joueurs de par l'originalité de l'expérience qu'ils leur font vivre. Thief : The Dark Project est définitivement de ceux-là. Avec lui, les plus vieux d'entre vous ont appris à rester dans l'ombre pour mener à bien des missions d'assassinat dans une époque moyenâgeusement steampunk emplie d'imposantes bâtisses, de gardes suspicieux et de butins précieux à dérober scandaleusement. Comme toutes les légendes, Thief cristallise bon nombre de souvenirs qui subjuguent encore aujourd'hui les joueurs ayant succombé à ses charmes vers la fin des années 90. A l'instar d'un Deus Ex, le studio de Eidos Montréal s'est donné pour défi de ramener à la vie cette licence chère au cœur des gamers. Et une fois encore (après Tomb Raider et le sus-cité Deus Ex), l'éditeur Square Enix a opté pour une refonte au goût du jour du titre afin de correspondre aux aspirations actuelles des joueurs. Difficile de leur donner tort tant il est évident de constater que le public comme notre façon de jouer a grandement évolué en une petite décennie.
En préambule, et avant d'assister à une session de gameplay d'une demi-heure, l'équipe nous a présenté le concept du jeu et mis au parfum du processus de conception des fondements du titre. Cette vision d'ensemble est souvent bien utile pour approcher la boucle primaire des actions qu'entreprendra le joueur au cours de son aventure. Pour Thief, elle comporte trois phases distinctes. La première n'est autre que l'infiltration, rien de surprenant jusque-là. La deuxième met en évidence toutes les actions relatives au vol sous toutes ses formes. Une fois encore, rien de plus naturel pour un maître voleur que de s'adonner à son gagne-pain. En revanche le troisième pilier est un peu plus original pour la série, il s'agit de la fuite. Et l'on parle ici de s'échapper façon parkour, comme le prince de Perse ou les meurtriers de la saga à succès d'Ubisoft Assassin's Creed. D'ailleurs, l'équipe en charge du projet s'est longtemps sérieusement posé la question de faire un jeu entièrement en vue à la troisième personne. Même si cela tient de l'hérésie pour quelques joueurs, des traces de cette option subsistent même dans la version qui nous a été présentée. En effet, lors de certaines phases de déplacements, le personnage de Garrett est vu de dos pour profiter au mieux de l'action.
Place à l'action justement. La démo voyait Garrett suivre un noble jusque dans un club privé à tendance maison de joie pour lui dérober son précieux collier en or. Après une phase de déplacement sur les toits qui n'était pas sans rappeler le Mirror's Edge d'Electronic Arts, notre maître voleur arrivait à ladite bâtisse avec style en utilisant son grappin pour passer ni vu ni connu dans le dos d'un garde en faction. Malin comme un singe, le personnage de Thief a plus d'un tour dans son sac pour s'infiltrer dans les lieux sous étroite surveillance. Dans la pièce suivante, après avoir assommé un autre quidam à l'aide de son arme fétiche, la matraque « Blackjack », c'est à l'aide d'une flèche bien placée qu'il détourna l'attention du dernier garde qui lui barrait la route. La pénombre étant le meilleur allié de notre héros, ou antihéros, c'est selon, c'est à pas de loup en éteignant les bougies qu'il se faufile d'ombre en ombre (à l'aide d'un mouvement de dash fort pratique) dans les pièces enfumées de ce temple de la luxure. Au passage, Garrett ramasse ci et là quelques babioles en matériaux précieux. On ne se refait pas et puis le jeu disposant d'un système économique offrant au joueur l'occasion d'améliorer son équipement entre deux missions (flèches de différents types, Blackjack...), on aurait tort de se priver.
Une fois sa cible principale retrouvée, il était temps de découvrir un élément central du jeu à savoir la force de concentration du personnage. En tout temps, et pour peu que sa jauge de concentration le lui permette, Garrett peut activer son « focus », lui octroyant un avantage considérable dans n'importe quelle situation. Il peut par exemple l'activer alors qu'il observe son environnement. Il découvrira en surbrillance des indices comme des empreintes digitales, particulièrement utiles pour déceler l'entrée d'un passage secret. En combat au corps-à-corps, tout comme au tir à l'arc ou lors des tentatives de pickpocket, le temps ralentit pour permettre au voleur de viser avec précision les éléments spécifiques qu'il veut atteindre. Dans le contexte, les développeurs expliquent volontiers qu'il s'agit de capacités que Garrett a acquises à travers sa grande expérience, à l'instar du personnage de Sherlock Holmes dans les derniers longs métrages incarnés par Robert Downey Jr.
Enfin, le crochetage des serrures semble aussi être grandement facilité par l'emploi de la concentration, ce qui devrait aider notre Arsène Lupin à rester le plus invisible possible aux yeux de ses contemporains. Dès son activation du pouvoir, l'écran de jeu montrera l'intérieur du barillet, rendant l'exercice d'autant plus aisée. Lors de l'entretien que le producteur du jeu nous a accordé, ce dernier a insisté sur le fait que l'emploi du focus était optionnel. Les joueurs voulant vivre une expérience plus proche du jeu original ayant le choix d'utiliser ce pouvoir avec parcimonie, voire pas du tout. Côté scénario, même si l'on en sait peu pour le moment, sachez que notre personnage devrait se retrouver au beau milieu d'un conflit aux enjeux d'importance. Le théâtre du jeu prend la forme d'une ville d'envergure, partagée entre la tradition Victorienne et la modernité industrielle, et découpée en quartiers que le joueur aura l'occasion de visiter à loisir pour découvrir les tensions entre les classes sociales et les différentes factions. Ce cocktail à la mode n'étant pas sans rappeler Dishonored, on imagine sans mal l'immersion profonde que ce titre pourrait proposer aux joueurs avides d'univers envoûtants.
Issu d'un temps de gestation inhabituel, le projet Thief semble désormais sur la bonne voie. Le personnage, l'univers et la jouabilité s’imbriquent de manière cohérente et il nous tarde d'en voir plus. Prévu pour l'année 2014, le prochain rejeton du studio d'Eidos Montréal s'annonce comme un projet à surveiller de près pour la prochaine génération de machines de salon et PC bien boostés. D'autant que lors de notre visite au studio montréalais, nous avons pu voir une démo technique des plus réjouissantes en termes d'effets de ruissellement d'eau sur les textures représentant les murs de pierres...