Jusqu'alors plutôt discret, Total War : Rome II s'est enfin laissé approcher à l'occasion d'une courte présentation ayant pour cadre la bataille de Teutobourg. L'occasion pour nous d'en apprendre davantage, en attendant un prochain contact un peu plus consistant.
Total War est entré dans un nouveau cycle. Après avoir exploré diverses périodes historiques allant de l'Antiquité au XIXème siècle, Creative Assembly est revenu à ses premières amours avec Shogun II, qui nous ramenait en plein Japon féodal dix ans après l'épisode fondateur de la série. En toute logique, le studio s'attache maintenant à créer un nouveau jeu ayant pour cadre la Rome antique. D'aucuns pourraient penser que le développeur manque d'imagination à tourner ainsi dans la même boucle d'époques, alors que tant d'autres demeurent inexploitées. Ce serait toutefois oublier deux choses : un, la série a considérablement évolué depuis la sortie du premier Rome en 2004, tant sur le plan technique que sur celui du gameplay. Deux, ce sont les fans de la série eux-mêmes qui appellent cette suite de leurs vœux. Rome Total War reste l'épisode préféré d'une bonne partie de la communauté ; grâce aux nombreux mods, il a connu – et connaît encore aujourd'hui – un grand engouement. Il était donc normal de revenir sur les champs de bataille de la Rome antique.
La présentation à laquelle nous avons assisté avait pour cadre l'un de ces champs de bataille : la forêt de Teutobourg. C'est dans cette zone boisée, située au nord de l'Allemagne, que le chef tribal germanique Arminius détruisit trois légions romaines dirigées par Varus en l'an 9. Comment a-t-il réussi un tel exploit ? Plusieurs raisons à cela. Tout d'abord, la configuration du terrain se prêtait particulièrement bien à une embuscade. Le relief escarpé et la couverture végétale offraient une position idéale aux assaillants, tandis que l'étroitesse du chemin obligeait les soldats romains à s'étirer en une longue colonne. De plus, la présence de marécages les empêchait de manœuvrer correctement. Enfin, Arminius avait été élevé à Rome avant de fomenter sa rébellion contre ses anciens maîtres. Il connaissait donc parfaitement les forces et les faiblesses de son ennemi. Dans ces conditions, une victoire romaine était fortement improbable. Dans le jeu, il est d'ailleurs impossible de gagner cette bataille, proposée comme un challenge optionnel indépendamment de la campagne. Le but du joueur, placé dans la peau de Varus, est seulement de sauvegarder le plus de troupes possible – il doit sauver les trois aigles d'or, emblèmes des légions.
La tâche est ardue : en fonçant tête baissée vers la sortie de la forêt, les soldats romains se trouveraient beaucoup trop exposés ; en campant sur place, ils finiraient par se faire massacrer jusqu'au dernier. Il faut donc tout à la fois avancer et se défendre, sacrifier des unités sur les flancs pour protéger l'avancée de la colonne principale... Tout ça pendant que l'assaillant multiplie les attaques : des boules enflammées viennent balayer les légionnaires comme de vulgaires quilles, des grêles de flèches s'abattent sur les survivants, tandis que des hordes de guerriers germaniques chargent torse nu, vague après vague. Autant dire que le joueur a fort à faire ! Il doit adopter des formations défensives comme la tortue pour se protéger des tirs, utiliser sa cavalerie pour tenter d'ouvrir une brèche dans les lignes ennemies, et toujours progresser, quoi qu'il en coûte, ou attendre une mort certaine.
Si la tâche est ardue, elle n'est toutefois pas insurmontable. Dans Rome II, un outil inédit vient aider le joueur : la carte tactique. Elle offre une vision globale du champ de bataille, où les unités sont représentées par des rectangles colorés, façon wargame. Cette nouvelle vue a l'air très pratique pour donner des ordres de mouvement ; en revanche, il n'est pas possible de l'utiliser pour donner des ordres d'attaque. Interrogé à ce sujet, le lead battle designer Jamie Ferguson nous a indiqué ne pas vouloir transformer le jeu en wargame. Si toute la partie pouvait être contrôlée depuis cette lointaine vue aérienne, la série Total War perdrait grandement de son intérêt, qui reste de plonger le joueur au cœur de la furie des combats. On le comprend : avec ses milliers de soldats qui s'étripent dans un concert de hurlements du plus bel effet, la bataille de Teutobourg est avant tout un grand spectacle. Au bout d'une vingtaine d'intenses minutes, c'est un développeur exsangue mais souriant qui faisait face à son audience ; à la tête d'une poignée de survivants, il avait réussi à sauver deux aigles sur trois.
A l'issue de cette présentation, nous avons pu poser quelques questions supplémentaires sur les batailles à Jamie Ferguson. En vrac, il nous a confirmé l'importance accrue du relief, notamment sur les lignes de vue. Un constat aussi valable dans les villes, dont les murs bloquent désormais la visée. Des villes qui contiendront d'ailleurs plusieurs points de capture au lieu d'un seul. Le jeu devrait en outre mélanger batailles navales et terrestres : il sera ainsi possible de commencer un combat en mer, puis de débarquer ses troupes pour continuer le conflit sur le plancher des vaches. Enfin, Total War : Rome II proposera des environnements encore plus variés qu'à l'accoutumée, même si Creative Assembly reste discret sur ce sujet – comme sur beaucoup d'autres. Le studio conserve le secret sur plusieurs choses, comme les deux dernières factions jouables ou l'étendue de la zone de jeu. C'est compréhensible : le titre n'étant pas prévu avant octobre, les développeurs préfèrent garder des annonces sous le coude. Il n'empêche, ce mutisme était parfois frustrant...
De la même manière, il ne nous a pas été permis de voir la phase de jeu en tour par tour. Nous avons néanmoins pu avoir un petit entretien à ce sujet avec Janos Gaspar, le lead campaign designer. Il en est ressorti plusieurs choses. D'abord, la campagne s'étalera de la première guerre punique au début de l'empire, soit environ trois siècles d'histoire. Ensuite, Rome II reposera sur un nouveau système de provinces. Fini l'hégémonie : vous pourrez très bien contrôler la capitale d'une province mais pas ses éléments secondaires (villes, mines, fermes, ports...). Il faudra aussi les capturer pour bénéficier de leurs apports en ressources. Les nations tribales, comme les Gaulois, pourront facilement être unies dans une confédération du fait de leur culture similaire. Enfin, Janos nous a promis une amélioration de l'IA diplomatique, avec des répercussions en cascade de chaque évènement sur les relations entre factions. Malheureusement, tout cela manquait singulièrement de concret ; nous aurions bien aimé l'essayer, ou au moins le voir. Souhaitons donc qu'un prochain contact avec le jeu nous permette de mieux appréhender ces nouveautés !
Ne vous méprenez pas sur le sens de cette appréciation : nul doute que Total War : Rome II sera mieux que « bon » ; on peut en tout cas faire confiance à Creative Assembly pour cela, le studio ayant déjà amplement démontré son savoir-faire par le passé. Si nous préférons rester un tantinet prudents, c'est uniquement parce que cette présentation manquait de concret, notamment pour tout ce qui concerne l'aspect wargame du jeu. Nous espérons donc voir – voire essayer – le jeu plus longuement pour nous faire une opinion plus tranchée ; en attendant, le peu que nous avons pu admirer donne déjà diablement envie.