Dans les années 90, il existait une série néo-zélandaise dont l'ambition première était de narrer les aventures du demi-dieu Hercule avec un second degré et un goût très prononcé pour le kitsch. Le héros, incarné par l'acteur Kevin Sorbo, et ses extravagantes divagations télévisuelles ne faisaient certes pas honneur à la mythologie grecque, mais disposaient en revanche d'un humour de bas étage susceptible de capter l'attention des «grands enfants». Même si cette production n'est pas restée dans les mémoires, Hercules : The Legendary Journeys (c'est son nom) bénéficia malgré tout d'une adaptation vidéoludique sur la Nintendo 64. Comme il est logique de s'y attendre, celle-ci s'inspire directement de la série en question et permet non seulement d'incarner le musculeux et non moins réfléchi Hercule, mais également Iolas et Serena, autres «stars» de la fameuse licence.
Trimbaler une œuvre d'un domaine, qu'il soit littéraire, télévisuel ou cinématographique, à un autre est un exercice particulièrement périlleux. La remarque est encore plus fondée lorsqu'on entre dans la catégorie du jeu vidéo. En effet, si quelques productions ont réussi leur reconversion, comme par exemple GoldenEye, force est de constater que l'échec en matière d'adaptation vidéoludique est une constante pour le moins regrettable. Que penser alors d'Hercule et de ses aventures mythologico-carton-pâte sur console ? L'ambiance sonore, révélée dès les toutes premières minutes de jeu, est bonne. Les thèmes musicaux et les bruits de la nature empruntent de façon très large au répertoire d'une référence en matière de divertissement sur Nintendo 64, à savoir l'excellent Ocarina of Time. Malheureusement, cette flatteuse comparaison ne cache pas bien longtemps les défauts du titre. En effet, Hercule : The Legendary Journeys, non content de s'inspirer grandement de Zelda au niveau sonore, lorgne également du côté de sa mise en scène. Ainsi, on aura droit à une petite séquence de didacticiel durant laquelle le maître du héros lui apprendra les rudiments (peu variés) du gameplay. Soulever des rochers et donner quelques coups, voilà en peu de mots à quoi s'attendre.
Pour ce qui est du scénario, celui-ci reprend assez fidèlement l'univers qui compose la série, si bien que les fans de la première heure ne verront pas le moindre inconvénient à s'immerger dans l'histoire. Tout comme dans la production télévisée, le monde de The Legendary Journeys renvoie à une sorte de mythologie grecque alternative et un peu édulcorée, dans laquelle on retrouve les dieux et les personnages célèbres de l'antiquité. Avant de juger hâtivement ce cadre un peu particulier, il faut donc comprendre que le second degré y est totalement assumé. Hercule, érigé comme à l'accoutumée en sauveur de l'humanité, devra protéger le monde de la cruauté des dieux, car Héra, sa belle-mère, a empoisonné Zeus, son père. Une belle histoire de famille qui ne sert que de prétexte pour arpenter gaiement les vastes environnements un peu vides dont est composé le jeu. Globalement, si l'idée est là, la réalisation s'avère assez chaotique. En effet, bien que le soft se positionne sans complexes du côté de l'action / aventure, le résultat n'est peut-être pas de la meilleure facture. Par exemple, les combats sont bel et bien présents, mais les commandes sont beaucoup trop rigides. Affronter un soldat devient ainsi une véritable corvée tant les déplacements et les coups sont mal exploités. Le plaisir de jouer est sur ce plan tout simplement absent.
Visuellement, Hercules : The Legendary Journeys se montre très inégal, puisque s'il propose des paysages assez variés, il n'est pas toujours possible d'en saluer la beauté. Concrètement, les environnements sont plutôt jolis, mais un défaut majeur vient entacher ce point positif : l'ensemble manque cruellement de détails, même pour la N64, ce qui fait de ce divertissement un produit totalement dénué de charme. Bien sûr, on reconnaîtra sans difficulté le héros et ses compagnons, puisque ceux-ci ne sont pas trop mal modélisés, mais en ce qui concerne l'animation, les choses sont radicalement différentes. Les déplacements des personnages sont en effet tout simplement ridicules. Pire encore, lorsque le héros se met à nager, on entre littéralement dans la cinquième dimension en voyant les mouvements grotesques de ses bras le faire avancer péniblement à la verticale, droit comme un «i» au milieu de l'eau. Bref, pour faire court, c'est non seulement laid à regarder, mais également aussi maniable qu'un kart que l'on conduirait avec des gants de boxe... Parmi les bons points, le soft permet malgré tout d'incarner trois aventuriers différents, dont les capacités sont assez diversifiées, Hercule restant le plus puissant de tous.
La durée de vie est tout à fait correcte, voire plutôt conséquente, en dépit du peu d'intérêt de la plupart des énigmes à résoudre : trouver la clef d'un coffre pour l'ouvrir et récupérer un objet qui, lui-même, servira de monnaie d'échange pour obtenir l'item que l'on convoite... tout est dit! Si le jeu s'inspire encore une fois d'Ocarina of Time, même jusque dans les menus de jeu, il faut bien convenir que n'est pas Zelda qui veut, car le rendu final se révèle presque soporifique en raison d'une totale absence de cohérence. Le titre manque donc cruellement de souffle à bien des égards et la richesse de l'univers sur lequel il s'appuie n'y fait strictement rien. Trop lent et trop difficile, Hercules devient vite lassant, ses quêtes et ses énigmes étant redondantes et sans relief. Restent malgré tout quelques bons passages et le plaisir de découvrir les héros bien connus des amoureux de la série et du kitsch. A réserver aux fans...
- Graphismes13/20
Un jeu vidéo à licence qui ne s'en tire pas trop mal sur l'aspect graphique. Bien qu'un peu cubiques, les personnages sont correctement reproduits et les environnements assez grands et plutôt jolis. Malheureusement, les décors sont tout simplement vides et les rares ennemis qui se dressent sur le chemin du héros n'ont aucun charisme.
- Jouabilité11/20
Les contrôles sont trop rigides et le système de combat est totalement à la ramasse. On ne peut pas retenir grand-chose de positif, car le plaisir de jeu n'est pas au rendez-vous. Les quelques énigmes qui jalonnent l'aventure sont très inégales en termes de qualité : le constat est bien mitigé.
- Durée de vie13/20
On peut compter sur un minimum de quinze heures de jeu, ce qui est déjà bien long pour un jeu souvent ennuyeux. Le problème étant principalement que les quêtes et les boss ne varient pas beaucoup. Ça tient la route oui, mais ne soyons pas trop regardants.
- Bande son14/20
Les thèmes musicaux qui accompagnent le joueur sont variés, très inspirés, et rappellent beaucoup Ocarina of Time : du bon travail qui s'appuie sur la réussite d'un titre archi connu. En ce qui concerne les bruitages, le bilan est en revanche beaucoup moins positif, car Hercules : The Legendary Journey n'assure vraiment que le minimum avec des cris d'ennemis répétitifs à souhait ou encore des effets de saut ou de chute peu convaincants.
- Scénario8/20
Le soft part déjà avec un sérieux handicap si l'on considère qu'il puise directement sa source dans le scénario alambiqué d'une série télévisée connue pour son côté kitsch. Ici, l'histoire ne sert que de prétexte à mettre en scène Hercule aux prises avec différents ennemis. Rien d'original.
Cette adaptation vidéoludique n'est pas dénuée de qualités, mais l'ensemble peine quand même à capter pleinement l'attention du joueur. L'univers du jeu ne fait également pas honneur à celui de la série dont il emboîte le pas. Les fans y trouveront certainement leur compte, les autres, en revanche, risquent de trouver le temps long...