Noël 2007... Comme chaque année, la période des fêtes est le moment idéal pour Namco Bandai de sortir son dernier bébé fébrilement attendu par un public japonais toujours très friand de la série Tales of. C'est une nouvelle fois à la Nintendo DS de servir de support, et on espère bien que cette fois, le cadeau sera de taille !
En effet, nombreux sont ceux qui se souviennent de l'entrée plutôt ratée faite par la série de jeux de rôle sur la console portable une année auparavant avec Tales of the Tempest. Court, simpliste et pas vraiment convaincant, ce dernier n'avait pas tardé à être relégué au rang d'escort title. C'est donc avec la volonté de redresser le niveau que Tales of Innocence est annoncé, décrit comme un membre à part entière de la lignée Tales of avec tout ce que cela implique de qualités et de contenu. Occupé à travailler de son côté sur le premier opus HD de la série, Namco Bandai confie le développement de Tales of Innocence à Alfa System, studio aux origines des opus Tales of the World dont le récent Radiant Mythology, sorti intégralement en 3D sur PlayStation Portable, a particulièrement ravi l'archipel nippon. Que les plus pessimistes se rassurent, cet épisode a bénéficié de tous les soins habituels réservés à la série Tales of, comme le character design assuré par l'illustratrice Mutsumi Inomata qui a encore une fois su concocter une palette de personnages à la personnalité totalement inédite... Car cette fois, l'histoire qui vous est contée a des allures d'épopée hispanique !
Bercée par des thèmes lyriques dont les trompettes et les castagnettes rappellent beaucoup l'univers de Zorro, Tales of Innocence narre la rencontre entre Ruca Milda, Iria Animi et Spada Belforma, trois jeunes adolescents dont les destins semblent intimement liés. En effet, tous trois rêvent d'un monde ancien, d'une époque ancestrale dans laquelle ils incarnent une autre personne, respectivement un grand roi, une belle princesse et une épée vivante. Rapidement, ils se rendent compte que ces pensées oniriques sont en réalité des souvenirs et qu'ils sont en quelque sorte la réincarnation des êtres de cette civilisation perdue. Commence alors un passionnant voyage en quête de mémoire, de réponses, mais aussi de rencontre des éventuelles autres réincarnations disséminées de par le monde. Rapidement, les ennuis les rattraperont, les forçant à endosser la responsabilité de ce qu'ils étaient autrefois, aux dépens de leur âme d'enfant, de leur «innocence». Cette palette de personnages variée et très intéressante oppose fortes têtes et personnalités timides, l'occasion idéale d'assaisonner chaque scène d'un humour tout à fait délicieux.
L'aventure se déroule de manière traditionnelle à partir d'une carte du monde à échelle réduite pas franchement jolie, au moyen de laquelle on accède aux différentes villes à visiter, possédant chacune une identité architecturale propre. De nombreux donjons sont également à explorer, mais ils peinent à proposer des expériences passionnantes, se présentant essentiellement comme un dédale de couloirs sur un seul et même étage dans lequel il ne faut qu'avancer, battre des ennemis et ouvrir quelques coffres sans avoir à résoudre la moindre énigme. Adieu les rencontres aléatoires de Tales of the Tempest : cette fois, les ennemis sont directement modélisés dans les environnements, donnant lieu à des affrontements en cas de contact avec le héros. Les moins belliqueux tenteront donc de les éviter au maximum, non sans peine puisque ces petites créatures ont la fâcheuse habitude d'apparaître en un instant juste devant le joueur. Quoi qu'il en soit, il faut reconnaître que la modélisation 3D mise en avant par Tales of Innocence est d'une très grande qualité, qu'il s'agisse de la fluidité des mouvements, de la complexité des structures ou bien de la beauté des textures.
Ce constat est d'autant plus valable pour les phases de combats qui sont une véritable claque sur Nintendo DS. Reprenant fidèlement la recette instaurée par la série, le système intitulé DS-LMBS s'inspire de ce qui avait fait la réussite de Tales of the Abyss : des affrontements intégralement en 3D dans une zone circulaire à l'intérieur de laquelle chaque personnage peut se déplacer librement grâce à la fameuse technique du free run. Ici, les différents protagonistes combattent ensemble au nombre maximum de trois, devant s'organiser stratégiquement selon la spécialité de chacun, à savoir le corps-à-corps, les attaques magiques à distance ou encore le soutien des alliés via des sorts de soin. Des petites nouveautés sont à l'ordre du jour, comme une «jauge d'éveil» qui, une fois remplie, permet de rentrer dans une frénésie destructrice disponible aussi longtemps que le personnage parvient à garder le rythme d'attaque. En outre, la collecte des objets et pièces relatifs à chaque ennemi tué se fait directement en combat, puisqu'ils s'éparpillent au sol au moment du trépas. Une idée vraiment sympathique qui témoigne du soin avec lequel ont été concoctés ces affrontements.
Par ailleurs, l'évolution des personnages bénéficie également de quelques nouveautés intéressantes, car cette fois-ci, les capacités récurrentes aux Tales of s'apprennent d'une manière particulière. Chaque personnage doit choisir son style d'évolution parmi plusieurs (advance, wisdom, guardian, technical...), qui permet au fil des niveaux gagnés d'apprendre des capacités spécifiques. Ainsi, si l'on souhaite se spécialiser dans l'attaque au corps-à-corps, il est judicieux de choisir le style advance, alors qu'au contraire, si l'on préfère la magie à distance, c'est le style wisdom qui devra être privilégié. Comme d'habitude, c'est via ces capacités apprises au fil de l'aventure que les héros pourront atteindre l'éveil ultime et déclencher leur hiougi, dans lequel ils se transforment momentanément en ce personnage antique dont ils sont la réincarnation. En outre, chaque arme peut être personnalisée selon la volonté du joueur puisqu'il est possible d'y apporter un nombre maximum de trois améliorations, parmi lesquelles l'association d'un élément d'attaque (feu, eau, terre), ou encore des compétences de soutien, comme l'ajout d'un coup supplémentaire pour chaque combo.
Pour finir, le système de quêtes qui faisait la force de Tales of the World Radiant Mythology a été réimplanté dans Tales of Innocence pour offrir un contenu annexe de qualité. Ainsi, le groupe des héros constitue une véritable guilde pouvant, si elle le souhaite, répondre aux diverses requêtes proposées dans chaque ville. Classées selon plusieurs niveaux de difficulté, elles imposent des buts variés, comme la chasse de certains monstres précis, ou l'exploration de donjons secondaires exclusivement créés pour ces quêtes et sans lien direct avec l'histoire principale. Autre contenu annexe, les saynètes, ces conversations où l'on voit le visage animé des interlocuteurs, qui ne se débloquent uniquement lorsque l'affinité entre les protagonistes est assez élevée. Même quand on sauve le monde, il est toujours important de garder des relations amicales avec ses compagnons ! En conclusion, Tales of Innocence est à la Nintendo DS ce que les aînés de la série ont toujours su être sur consoles de salon : un grand jeu de rôle japonais. Complet à tous les niveaux et techniquement grandiose, c'est un véritable petit lingot d'or... un lingot d'or aux parfums d'Espagne !
- Graphismes18/20
Indéniablement, on assiste là à ce qui se fait de plus beau sur Nintendo DS, qu'il s'agisse de l'architecture des décors, de la modélisation des personnages, du dynamisme et de la fluidité des combats ou encore des effets spéciaux qui sans cesse les embellissent. Rien à dire sur la qualité des cinématiques en manga animé, Namco Bandai n'ayant jamais déçu à ce niveau-là.
- Jouabilité18/20
C'est le deuxième grand atout de Tales of Innocence. Si les déplacements dans les différents environnements restent basiques, ce sont bien les affrontements qui exploitent à fond les capacités de la console portable, tant ils sont agréables à manier et proposent des scènes spectaculaires. Les menus profitent par ailleurs de l'écran tactile pour offrir une navigation tout à fait bien pensée.
- Durée de vie15/20
S'il faut trouver un principal défaut à cet opus, c'est bien sa durée de vie qui est à pointer du doigt, puisque l'aventure se termine en une grosse vingtaine d'heures si l'on choisit de tracer en ligne droite. Cependant, il est possible de laisser à tout moment la trame principale de côté pour s'occuper de sa petite guilde et des nombreuses quêtes annexes qui lui sont proposées.
- Bande son18/20
Seules les conversations les plus importantes comportent des doublages, ce qui est suffisant pour attester de leur excellente qualité, notamment celui d'Hermana qui dévoile toute la sensibilité et la douceur de cette gamine sans foyer vivant dans des égouts. Pour le reste, fermez les yeux, et dégustez ces musiques hispaniques signées Kazuhiro Nakamura toutes plus épiques les unes que les autres.
- Scénario16/20
A l'origine du scénario, cette idée assez étonnante qui fait de chaque héros la réincarnation d'une figure ancestrale, héritage d'une époque oubliée mais pourtant liée à ce monde présent et aux évènements qui vont le secouer. Malgré cela, la narration est légèrement redondante et manque parfois de vivacité, ce qui est en partie dû à une mise en scène bridée par les capacités de la petite DS.
Réellement épatant, Tales of Innocence ne se satisfait pas seulement de corriger tous les défauts reprochés à son prédécesseur Tales of the Tempest, mais réussit également à exploiter au maximum tout ce que la console portable de Nintendo peut offrir en matière de 3D et de dynamisme. Beau, riche en contenu et paré d'une ambiance exotique absolument exquise, il est digne de porter le nom Tales of et permet aux fans de satisfaire leur passion en attendant le prochain grand opus prévu sur Xbox 360, un certain Tales of Vesperia...