Avec Wargame : European Escalation, Eugen Systems a une nouvelle fois démontré en début d'année toute l'étendue de son savoir-faire lorsqu'il s'agit de concevoir des jeux de stratégie en temps réel. Pour le coup, le dernier-né du studio français s'est avéré être particulièrement pointu et donc, plus difficile d'accès que la moyenne des RTS. Malgré cela, le jeu a visiblement rencontré un certain succès. La cible visée, bien que restreinte, a été touchée. Et c'est tant mieux car cela a permis aux développeurs de Eugen de se mettre au travail pour livrer une suite. Une nouvelle fois éditée par Focus, cette dernière se nomme Wargame : AirLand Battle et est prévue pour le printemps prochain.
Avant d'aborder AirLand Battle, un petit rappel des faits s'impose. A travers European Escalation, Eugen Systems avait affirmé son goût pour l'uchronie en imaginant ce qu'il se serait passé si la guerre froide avait dégénéré en conflit ouvert. On pouvait alors choisir son camp, celui de l'OTAN ou du Pacte de Varsovie. Deux visions fondamentalement opposées du monde. Dans AirLand Battle, cet affrontement se poursuit mais on est cette fois invité à se battre sur le front scandinave, entre 1975 et 1985. Le studio français a en effet imaginé une offensive massive de l'Union Soviétique sur les ports norvégiens. La campagne principale prend donc place au nord de l'Europe, dans une région à la topographie singulière. L'occasion pour les développeurs de corriger l'un des défauts du premier Wargame. A savoir le manque de variété au niveau des décors et l'absence de reliefs. Ce nouvel épisode offre des maps toutes en nuances, beaucoup plus diversifiées. Soucieux de rester réaliste en respectant les particularités de la région, Eugen propose des environnements au sein desquels fjords et massifs montagneux se côtoient. Le rendu visuel est d'ailleurs exceptionnel, que l'on soit éloigné ou au plus près du champ de bataille. Les améliorations apportées au moteur Iriszoom portent clairement leurs fruits. Le réalisme de l'ensemble est impressionnant et l'immersion s'en trouve donc renforcée. Il s'agit là de l'un des plus beaux RTS du marché.
Autre gros bouleversement, Eugen a décidé de changer le principe de la campagne solo. Les missions scénarisées cèdent leur place à un concept plus proche de ce que propose la saga Total War. On se retrouve ainsi devant une grande carte sur laquelle figurent le Danemark, la Norvège et la Suède. L'objectif est de déplacer ses divisions comportant différents types d'unités en essayant de protéger des points clés comme ces fameux ports, cibles de l'armée soviétique. Il s'agit là d'une guerre de territoire qu'il va falloir gagner sur le long terme. Lorsque les deux camps se rencontrent au même endroit sur la carte, une résolution en temps réel s'engage. On bascule alors en « mode RTS » avec les combats tels qu'on les connaît. Pour corser le tout, des événements extérieurs pourront intervenir et chambouler le déroulement de l'affrontement. Sachez par ailleurs que chaque zone de la carte n'aura pas la même importance. Ainsi, la lutte autour des capitales des pays scandinaves s'annonce particulièrement intense car la capture de ces villes a des répercussions importantes sur le déroulement du conflit.
Côté gameplay, Eugen Systems a apporté pas mal de retouches qui justifient clairement l'existence de cette extension. A commencer par l'arrivée en force des avions. On en dénombre pas moins de 150 dans le jeu. Chaque carte dispose de couloirs aériens qui permettent d'avoir recours à ces renforts. Vous pouvez donc faire appel à ces nouvelles unités à partir du moment où vous disposez de ces dernières dans votre armée, ce qui n'est pas une évidence étant donné l'importance de leur coût. Il faut par ailleurs être très attentif au stock d'essence car ces appareils ne peuvent pas voler à l'infini. Une fois en piste, les avions sont toutefois de redoutables ennemis, qui tournoient autour de la cible désignée tout en l'attaquant sans relâche, jusqu'à ce que le carburant vienne à manquer. Evidemment, si leur puissance de feu est grande, ils restent des proies vulnérables si l'opposant possède une défense antiaérienne solide. Comme d'habitude, Eugen a veillé au moindre détail pour coller à la réalité. Modélisé avec un soin maniaque, chaque modèle adopte un comportement différent. Tous ne volent pas de la même manière. Ils effectuent par exemple des virages plus ou moins serrés. Les avions disposent aussi d'un armement propre et peuvent embarquer différents types de munitions permettant d'envisager l'affrontement de diverses façons. Lâcher une bombe au napalm n'aura bien entendu pas le même effet que mitrailler une cible. A vous de voir.
La gestion de l'infanterie a également été améliorée. Les quartiers résidentiels ou industriels au sein desquels ces unités peuvent se planquer sont dorénavant découpés en zones. Plus besoin de placer un à un vos hommes dans les bâtiments. Ces derniers se répartissent automatiquement pour exploiter au mieux la configuration des lieux. Ce qui facilite grandement votre tâche et rend ce petit jeu de cache-cache beaucoup plus aisé à appréhender. Du coup, l'infanterie gagne encore en importance avec cet épisode. D'autant plus qu'il ne suffit pas de tout raser avec un char pour régler le compte de ces soldats. Les débris ralentissent, voire même bloquent la progression de ces véhicules. Les ruines empêchent en prime de faire feu à cause du manque de visibilité. Chaque bâtiment peut donc s'avérer être un obstacle potentiel. Gare aux choix tactiques hasardeux car cela pourrait se retourner contre vous. D'un point de vue plus général, Eugen Systems poursuit sa quête d'exhaustivité. Grosso modo, on passe de 350 unités jouables dans European Escalation à plus de 700 pour AirLand Battle. Par ailleurs, quatre nouvelles nations participent à ce conflit en Scandinavie. Un travail a en plus été fourni au niveau de l'interface pour essayer de rendre l'ensemble plus lisible. Une manière d'adresser un message aux joueurs qui ont peur de se lancer dans l'aventure Wargame. Oui, le jeu reste pointu mais il est aussi suffisamment bien conçu pour rester accessible à tous les amateurs de RTS.
Il convient de reconnaître une qualité essentielle à Eugen Systems. Le studio français respecte son public. Ainsi, les joueurs d'European Escalation ont eu droit à pas moins de 4 DLC gratuits et 25 mises à jour. Et lorsque le studio français décide de sortir une suite, celle-ci apporte de réelles nouveautés. C'est clairement le cas d'AirLand Battle. A quelques mois de sa sortie, le jeu se montre d'ores et déjà beaucoup plus abouti visuellement que son prédécesseur. Il propose de surcroît une vraie refonte de la campagne solo ainsi qu'une pelletée de nouvelles unités et d'améliorations diverses. Pour ceux qui apprécient les simulations réalistes et exigeantes, ce nouveau Wargame a donc toutes les chances de s'imposer comme un indispensable.