Paru en 2004, le premier épisode de la série Fable nous invitait à participer à une aventure épique et enchanteresse, en nous permettant d'incarner un héros pour lequel on ressentait de l'empathie. Lionhead Studios nous fournit ensuite deux autres opus de qualité, s'éloignant encore du jeu de rôle et épousant pleinement le genre aventure / action. Mais pour Fable : The Journey, le changement de cap est total : on se trouve face à un épisode bien différent prenant la forme d'un rail-shooter ayant vocation à utiliser pleinement les fonctionnalités de Kinect.
Précisons-le dès le début : les comparaisons avec les trois épisodes déjà connus de Fable n'ont pas vraiment lieu d'être. En effet, Fable : The Journey est un opus bien distinct, n'ayant à peu près rien à voir avec ses aînés, si ce n'est qu'il se déroule également dans l'univers d'Albion, et que le joueur y retrouvera donc les mêmes références et le même background. Il ne faut donc pas l'appréhender comme un Fable IV, mais comme un épisode à part, offrant une aventure intimement liée au fameux Kinect, appareil à reconnaissance de mouvements cher à Microsoft. On nous y offre un héros malgré lui typique, ressemblant... à tous les adolescents turbulents de bon nombre de films, de séries ou de romans, sur lesquels le destin semble s'acharner. Celui de Fable : The Journey, nommé Gabriel, fait partie d'une caravane de travailleurs, et se trouve coupé de son groupe lorsqu'un pont s'écroule alors qu'il avait pris un peu de retard, avec sa carriole et sa jument Seren. Il devra alors tenter de rejoindre ses congénères en prenant un autre chemin, ce qui le mènera à rencontrer une certaine prophétesse nommée Thérésa, personnage bien connu des joueurs ayant joué aux épisodes plus classiques de la série. Cette dernière guidera alors ses pas, et lui fera bien vite comprendre qu'il va falloir qu'il endosse un rôle de véritable héros pour sauver Albion d'un nouveau fléau... Ca tombe bien, il sera bientôt doté de gantelets magiques, vous permettant, à vous joueur, de faire de jolis moulinets avec vos bras pour lancer une série de sorts sur de nombreux ennemis...
Car sachez-le, Fable est l'un de ces rares titres Kinect à se jouer confortablement assis. C'est donc uniquement le haut de votre corps qu'il va falloir bouger, pour participer aux diverses activités proposées. Comme le jeu se consacre au voyage, d'après son titre, on passera une bonne partie de l'aventure à conduire notre carriole en faisant semblant de manœuvrer les rênes de notre cheval. Le capteur retranscrit plutôt bien nos mouvements lors de ces phases, durant lesquelles il est possible d'accélérer la cadence ou de ralentir, et aussi de se déplacer latéralement sur la route en tendant un bras devant nous et en repliant le bras opposé au niveau du buste. Le système est bien pensé, et efficace. Ces phases donnent aussi la possibilité de ramasser des gemmes faisant office de points d'expériences, à échanger dans un menu contre des compétences supplémentaires influant sur la résistance du cheval, la santé de Gabriel ou l'efficacité de ses sorts. Ses nombreuses séquences de voyage nous permettent également de voir du pays et de profiter de décors vraiment réussis. En effet, Lionhead est parvenu à créer une ambiance proche des jeux d'origine suppléée par des graphismes à la hauteur. La réalisation est donc artistiquement vraiment bluffante, et la bande-son est elle aussi de grande qualité. Mais nos moments passés en carriole servent aussi et surtout à nous mener vers d'autres contrées qui feront progresser notre quête...
En effet, Gabriel passera également quelques temps sur la terre ferme et sur ses deux pieds, en arpentant le terrain parfois accidenté de quelques lieux peu recommandables. Thérésa l'enjoindra par exemple à se rendre dans trois temples surveillés par des gardiens, et dans lesquels il pourra récupérer des pouvoirs supplémentaires grâce à des pierres de volonté. C'est lors de ces phases à pied qu'il vous sera enfin possible de guerroyer (même si quelques bastons ont également parfois lieu depuis la carriole). Comme on le prédisait en utilisant le terme de rail-shooter, les déplacements de Gabriel se font de manière automatique, ce qui nous arrange au final très bien, puisque cela nous donne la possibilité d'être assis, et que l'on sera déjà bien occupé à bouger nos mains pour attaquer. Lorsque le personnage obtient ses pouvoirs, une phase de calibrage de Kinect vous est proposée. Elle est cruciale, et permet ensuite de limiter les errances, hélas quand même toujours présentes, du capteur. Avec le bras droit, vous pouvez utilisez une sorte de lasso permettant d'assommer et de manipuler les ennemis, ou de bouger des objets. Pour actionner le pouvoir, il suffit de mettre sa main droite à hauteur d'épaule, puis de tendre le bras dans la direction visée. Il est aussi possible de donner de l'effet à n'importe quel sort en le balançant avant de le plaquer sur l'ennemi (par exemple placé à couvert) d'un mouvement de bras. La main gauche est quant à elle associée aux sorts de feu, de l'électricité et de lancer de javelot magique. Le système est bien pensé, et le joueur s'amusera vite à combiner diverses possibilités pour occire des ennemis peu résistants, le jeu se faisant particulièrement accessible, et également (ou surtout?) destiné aux enfants. Malheureusement, Kinect plombe souvent ces phases de gameplay, et ce malgré le calibrage que l'on vous conseille tout de même d'effectuer régulièrement depuis le menu. On se retrouve donc souvent à être émerveillé par la précision du gameplay, avant de pester, 30 secondes plus tard, face à une boule de feu allant à droite de l'écran alors qu'on avait visé un ennemi (Hobbe, Balverine, homme-tronc...) situé à gauche. Ces problèmes se révèlent donc assez frustrants, et le joueur aura du mal à comprendre ce qui, dans son mouvement, a vraiment pu fausser la commande donnée au jeu. Le pauvre testeur ayant dû jouer sept heures d'affilée se trouva donc bien vite tout courbaturé...
Pourtant, l'aventure proposée est menée de main de maître et les développeurs sont parvenus à placer Kinect en son cœur. On se penche d'un côté pour éviter un projectile, on se protège instinctivement du bras droit pour contrer les attaques ennemies, on résout quelques très légères énigmes pour ouvrir une porte... l'aventure ne manque pas de petits rebondissements sympathiques, et sa mise en scène parvient à nous intéresser, même si le scénario et les situations rencontrées restent classiques. Et c'est surtout cette impression parfaitement retranscrite de participer à un long voyage initiatique qui charme et parle au joueur de tout âge, qu'il soit fan de l'univers de Fable ou non.
- Graphismes16/20
Lionhead Studios est parvenu à retranscrire l'univers tout en nuances et en couleurs de Fable, en nous offrant un jeu à l'ambiance réussie et aux décors de toute beauté, que ce soit en plein air ou en intérieur, dans des grottes et des donjons parsemés d'effets de lumière les magnifiant.
- Jouabilité10/20
Le système adopté pour Fable : The Journey aurait pu faire aimer Kinect à n'importe quel joueur, même le plus réfractaire. Ce dernier est actif sans trop gesticuler, les commandes à effectuer sont intuitives, on a vraiment l'impression de toucher nos sorts du bout des doigts... les enfants et leurs parents pourraient être charmés. Hélas, la technique s'en mêle, et vient perturber ce bel équilibre. Parfois, les mouvements ne sont plus vraiment reconnus et il devient impossible de viser, alors que le joueur effectue exactement la même action qu'auparavant. Le jeu devient donc inutilement frustrant. A noter, Fable : The Journey est particulièrement accessible, et les joueurs à la recherche de challenge devraient passer leur chemin.
- Durée de vie13/20
Pour un jeu d'aventure de type rail-shooter, Fable : The Journey bénéficie d'une bonne durée de vie de plus de 10 heures, et parvient même à se renouveler malgré la répétition un peu lourde des phases de combat et des séquences de conduite de calèche.
- Bande son16/20
Le titre bénéficie d'une bande-son de grande qualité, grâce à des musiques réussies, mais aussi à de nombreux bruitages et éléments sonores renforçant l'ambiance prenante du jeu. Les voix françaises sont aussi de qualité, malgré leur côté un peu cliché, semblant cependant tout à fait assumé.
- Scénario14/20
Le jeune Gabriel part pour un long voyage initiatique durant lequel il tentera rien de moins que de sauver le monde d'Albion... les développeurs sont parvenus à captiver le joueur en lui offrant une aventure classique et prenante, prenant paradoxalement son temps en s'attardant parfois sur certains personnages secondaires, dont le portrait est brossé de manière plutôt habile.
Fable : The Journey surprend finalement le joueur de manière plutôt positive, en lui donnant la possibilité de participer à un voyage initiatique rondement mené, adapté à la maniabilité avec Kinect. Les développeurs nous ont en effet concocté un gameplay réjouissant et réactif, hélas plombé par des problèmes techniques bien frustrants. On recommandera quand même ce titre un tout petit peu trop répétitif aux possesseurs de Kinect, puisqu'il nous délivre une aventure efficace et accessible à tous.