Lancée par MicroProse en 1994, la série des XCOM a marqué nombre de joueurs au fer rouge avant de sombrer peu à peu dans l'oubli à force de volets un peu faiblards et / ou trop opportunistes. Fort heureusement, les choses sont sur le point de changer grâce aux efforts du studio Firaxis. Amoureux inconditionnels d'UFO : Enemy Unknown, l'épisode par lequel tout a commencé, les petits gars de Jack Solomon ont tout fait pour redonner son lustre au subtil mélange de combats tactiques au tour par tour, de stratégie et de gestion qui avait jadis ravi nos cœurs de gamers. Chronique d'un délicieux retour aux sources.
Alors comme ça, on se délecte de magazines faisant écho aux théories de complots les plus farfelues ? On aime à croire que la Zone 51 renferme une tripotée d'engins et de spécimens issus d'autres galaxies ? On apprécie les vieux romans de SF remplis d'extraterrestres maigrichons aux yeux globuleux ? On ne se couche pas sans avoir préalablement embrassé son poster de Fox Mulder ? Si vous faites partie de cette gentille secte d'illuminés, alors vous avez toutes les chances d'entrer en transe au contact de ce remake du mythique UFO : Enemy Unknown ! Vibrant hommage à tous les fantasmes, toutes les visions et toutes les fictions de l'humanité concernant un potentiel envahisseur alien, XCOM nous entraîne au beau milieu d'une guerre secrète, vaguement désuète dans sa présentation, mais toujours aussi incroyablement passionnante.
Dans XCOM, le joueur se retrouve à la tête d'une organisation internationale dont la fonction est de protéger la Terre contre la menace alien, un peu comme la PETA et Familles de France. En tant que commandant, vous vous devez d'organiser la défense de la planète en établissant un réseau de surveillance satellite efficace et en développent une base remplie de matos, de soldats surentraînés et suréquipés que vous dirigerez d'ailleurs directement sur le terrain. Vous devez également vous efforcer d'exploiter au mieux vos contacts avec les aliens en étudiant puis en adaptant leur technologie à vos besoins (et donc en évitant de les pulvériser à coup de roquettes). Ne disposant pas de moyens illimités, surtout au début, vous serez contraint de faire des choix cornéliens, comme privilégier la défense d'une nation par rapport à une autre en cas d'attaques simultanées. Il vous faut par ailleurs garder à l'esprit que votre budget et les éventuels soutiens matériels dont vous bénéficierez dépendent en grande partie du degré de satisfaction des nations membres de votre conseil d'administration. Négligez trop longtemps la Russie et la bougresse retirera logiquement ses billes. Le degré de confiance des nations est d'ailleurs matérialisé par une jauge de panique qui augmente en cas de mission ratée ou ignorée, à vous donc de bien doser vos interventions pour éviter la débandade (de morue). Alors, vous êtes toujours d'attaque ?
En jeu, tout ce fatras se trouve en fait décomposé en deux phases bien distinctes. La gestion d'une part et les combats d'autre part. Comme dans les premiers épisodes, vous devez en effet administrer votre base entre chaque mission (on ne pourra d'ailleurs en posséder qu'une seule). Celle-ci apparaît sur un plan de coupe en deux dimensions, à la manière d'un terrarium à fourmis, et vous laisse observer à loisir les différents étages souterrains qui la compose. Ce sera d'ailleurs à vous de creuser la roche pour débloquer les 24 emplacements disponibles avant d'y placer vos installations avec soin : académie qui confère des bonus globaux à vos troupes, casernes, laboratoires scientifiques, cellule d'isolement pour d'éventuels prisonniers, fonderie pour produire du matériel, salles de contrôle de satellites, générateurs pour alimenter le tout, etc. . Il vous faudra par exemple sélectionner le laboratoire pour effectuer de nouvelles recherches, disséquer de l'alien, analyser du matos trouvé sur le terrain et débloquer de nouvelles technologies comme des lasers ou, sait-on jamais, des implants psyoniques. Dans le même ordre d'idées, les ingénieurs fabriqueront l'équipement dérivé des technologies acquises. Il s'agit d'ailleurs là d'une obligation absolue car les ennemis se montreront de plus en plus résistants à chaque nouveau palier de la campagne, comme la destruction d'une base ou la capture d'un leader ennemi. Bref, on n'a certes qu'une seule base, mais elle s'avère tout de même bien plus sympa à gérer que dans les précédents opus de la série.
Cela dit, vous finirez toujours par revenir au point névralgique de votre installation, le Geoscape, une vue globale de la planète Terre à partir de laquelle il faudra guetter la menace extraterrestre et, le cas échéant, répliquer en envoyant vos troupes sur les lieux de l'agression. Bien sûr, il faudra également gérer la composition de ses groupes d'intervention mais aussi la progression de chacun des soldats. Ces derniers gagneront en expérience à mesure qu'ils se battront. Tous ces troufions correspondent en outre à une classe précise (qu'on ne découvrira que lorsqu'ils passeront au niveau 2) : Commando, Soutien, Sniper ou Grenadier. A chaque classe correspond un arbre de compétences spécifique permettant de spécialiser son soldat au fil des batailles. Entièrement configurable, de la trogne en passant par le nom, chaque soldat est par ailleurs unique, aussi, si d'aventure il se faisait trucider, vous n'auriez plus qu'à pleurer ou recharger lâchement votre dernière sauvegarde. On vous recommande chaudement de ne pas avoir recours à cette artifice de noob afin de profiter de purs moments de tension dramatique. De même, nous vous invitons à sélectionner au minimum le troisième niveau de difficulté, afin de vous rapprocher de la véritable expérience XCOM.
Du coup, pour mieux ménager ses troupes, il est conseillé de faire évoluer les nouvelles recrues aux côtés des vétérans, histoire de ne pas se retrouver avec une tripotée de bleus et quatre roxxors dont la perte pourrait signer votre arrêt de mort. A noter que dans cet épisode, les escouades ne peuvent comporter que six membres maximum contre une quinzaine dans UFO : Enemy Unknown. Si on pourra regretter cette décision, on s'apercevra bien vite que le jeu en sort en fait plus nerveux, moins haché tout en restant tout aussi tactique, d'autant que le taille des cartes a également été réduite. Bref, vous l'avez compris, dans XCOM, tout doit être géré, mais rassurez-vous l'ensemble s'avère en fait moins complexe que cette description bien incomplète le laisse entendre. Le but était surtout de vous faire comprendre que le bébé de Firaxis est un titre extrêmement riche et prenant.
Venons-en maintenant à la plus grosse partie du titre : ses combats. Et là, sachez que dès le premier coup d'œil, celui qui a pratiqué XCOM dans les années 90 se retrouvera forcément en terrain connu. La perspective isométrique nous indique d'emblée que l'on se trouve dans un jeu tactique et permet d'avoir un aperçu global du champ de bataille. Notons toutefois que les cases qui permettaient d'estimer les déplacements ne sont plus et que la caméra n'est pas fixe. Elle peut notamment suivre chaque personnage lors de certaines actions (un tir, un sprint, la destruction d'une porte ou d'une fenêtre) pour une immersion plus grande. Que les vieux briscards ne partent pas en courant tout de suite, car les développeurs ont laissé la possibilité de désactiver ces petits effets. Comme nous l'évoquions plus haut, chaque soldat occupe désormais un rôle bien précis sur le champ de bataille. Pour peu que vous l'ayez orienté en ce sens, le grenadier peut par exemple utiliser la capacité suppression afin d'empêcher l'opposant de viser correctement et de sortir de sa cachette. Ce soldat lourdement armé peut aussi se servir d'un lance-roquettes pour provoquer de lourds dégâts, notamment matériels. Le sniper a lui un grappin pour trouver des spots de tir intéressants alors que le Commando dispose de la capacité " Run and Gun " qui permet de se ruer sur une cible pour lui vider son chargeur dans la chitine.
Que l'on soit sur PC ou sur consoles, les combats se déroulent donc au tour par tour. On avance ses unités une à une, on décide à chaque fois de l'action à effectuer et c'est ensuite aux aliens de faire de même. L'interface est assez solide et la jouabilité très semblable à celle du jeu d'origine, ce qui n'est pas plus mal. On devra donc gérer le " brouillard de guerre ", tenir compte des angles de vue, estimer si tel ou tel tir vaut le coup en fonction des probabilités de toucher affichées à l'écran et enfin veiller à s'approprier les couvertures les plus solides, ces dernières étant habilement indiquées par des petits boucliers dès lors que l'on programme un déplacement. L'impression de retrouver le tout premier XCOM dans une version modernisée est saisissante. D'ailleurs, comme dans l'original, on n'échappera pas à quelques rares bugs et maladresses : un troufion qui parvient on ne sait comment à tirer à travers un mur et quelques moments de solitude lorsqu'il s'agit de quitter le niveau du sol pour monter sur un toit.
Firaxis a toutefois retouché pas mal d'autres petits éléments de gameplay, toujours avec beaucoup de respect. La modification la plus notable est sans conteste la destruction du décor. Les environnements peuvent en effet voler en éclats dans leur quasi-intégralité (et pas seulement à cause des explosifs), ce qui offre des possibilités tactiques infinies. Une roquette dans un mur et c'est une ouverture inattendue pour un sniper positionné en retrait. Une rafale sur la palissade derrière laquelle un petit gris a trouvé refuge et hop, le voilà en slip. Gaffe toutefois, car en face, les extraterrestres peuvent bien sûr faire de même, et ils ne s'en privent pas. De ce côté, le studio a d'ailleurs fait un effort pour varier le type d'ennemis rencontrés et modifier leur comportement. Les Sectoïdes peuvent ainsi se concentrer pour offrir plus de résistance à l'un des leurs. Mais trucider l'alien boosté marquera la mort de ceux qui le soutiennent. On aura aussi droit aux Alumettes (des faux humains capables d'empoisonner leur victime), aux Berserkers, aux Chrysalides qui zombifient leur victimes et font des petits dans leur corps ou à ces cochonneries dotées de jetpacks qui se feront une joie d'atterrir dans le dos de votre sniper. On rencontrera d'ailleurs tout ce beau monde dans le cadre de missions d'extermination de base, lors d'extraction de VIP, lors d'attaques de bases extraterrestres ou même pendant ces fameuses terreurs, lors desquelles on affrontera un grand nombre d'ennemis très puissants bien déterminés à violenter les civils présents sur place.
La campagne, assez longue et plutôt bien scénarisée en dépit de ses cinématiques bien cheap, est donc un régal à traverser et constitue le coeur de l'expérience XCOM version 2012. Firaxis a toutefois cédé à la mode actuelle en proposant un mode multijoueur. Le soft vous propose ainsi d'affronter un autre commandant en herbe en match à mort, sur le terrain, par escouades interposées. Avant l'affrontement, vous devrez sélectionner des soldats, des extraterrestres ou même un mix des deux en sachant qu'à chaque soldat et à chaque équipement correspond un nombre de points bien précis, un peu comme dans un Warhammer. Calqué sur les combats du mode solo, le gameplay ne se trouve pas franchement modifié, en dehors du fait qu'il sera nécessaire de poireauter pendant que l'adversaire déplacera les troupes situées hors de vue de vos propres combattants. On pourra toutefois régler le temps alloué à chaque tour pour limiter la casse. Le tout est donc bien ficelé mais paraît tout de même un peu anecdotique après la gentille claque infligée par le solo. Dans tous les cas, une chose est sûre, que vous soyez fan de la première heure ou néophyte avide de stratégie dans un univers particulièrement sexy, vous ne devez pas passer à côté de cet XCOM. Merci Firaxis !
- Graphismes14/20
Voilà probablement le seul aspect un peu rebutant de cet XCOM version 2012, même si l'on arguera avec raison que les graphismes sont secondaires dans un jeu de ce type. Le soft présente tout de même bien, avec un design volontairement désuet, des décors variés et plutôt soignés et des aliens joliment remaniés que les fans reconnaîtront pourtant au premier coup d'oeil.
- Jouabilité17/20
En dehors de quelques rares soucis de caméra et d'occasionnels angles de tir bien bizarroïdes, le soft renoue avec brio avec l'incroyable gameplay de son modèle tout en modernisant un peu le tout. Le mélange de gestion et de combats tactiques au tour par tour en ressort donc grandi et procure énormément de plaisir.
- Durée de vie16/20
Avec sa campagne bien copieuse, ses maps sur lesquelles les ennemis n’apparaissent pas forcément toujours aux mêmes endroits, ses quatre niveaux difficultés (évitez les deux premiers tout de même) et son multi bonus, le jeu dispose d'une excellente durée de vie. En ce qui nous concerne, nous ne sommes pas prêts de lâcher ce nouvel XCOM.
- Bande son15/20
Des bruitages de bonne facture qui ne sont pas sans rappeler le soft original et des musiques dynamiques forment la bande-son du titre. On regrettera peut-être la retenue et le minimalisme de jadis, mais dans l'ensemble, la dimension sonore du jeu permet de bien se mettre dans l'ambiance. C'est sans conteste le principal.
- Scénario15/20
Le titre fait là encore un excellent boulot pour nous plonger dans l'ambiance. La campagne est habilement scénarisée et introduit régulièrement des objectifs clés qu'il faudra impérativement accomplir pour progresser. Le tout s'articule autour de cinématiques et des dialogues bien kitchounes mais qui de fait, participent largement à l'immersion.
Retour gagnant pour XCOM qui parvient à se moderniser sans pour autant trahir l'esprit de son mythique modèle. L'aspect gestion évite l'écueil de la complexité artificielle et les combats ont pour leur part conservé l'éclat de ceux d'UFO : Enemy Unknown tout en se dynamisant sensiblement. Le mélange de ces deux éléments s'avère délicieusement plaisant. Souhaitons donc un beau succès à ce titre qui mérite franchement d'être essayé, puis adopté.