Vous avez aimé Flashback pour ses phases de plates-formes périlleuses et ses énigmes redoutables ? Bermuda Syndrome risque alors de vous plaire grâce à une expérience tout aussi corsée mais qui cette fois-ci vous fait voyager dans un monde peuplé de dinosaures et de bêtes étranges. Si l'idée de devoir traverser une jungle hostile et des temples souterrains gorgés de pièges ne vous fait pas peur, tenez-vous prêt à entrer dans cette dimension parallèle.
Bermuda Syndrome vit le jour seulement quelques années après les illustres Flashback et Another World dont l'influence s'en ressent fortement. Le joueur y incarne un pilote de chasse de l'armée américaine, un dénommé Jack Thompson, combattant lors de la Seconde Guerre mondiale au-dessus des terres allemandes. A l'image de Lester Chaykin, le héros se retrouve subitement transporté dans une dimension parallèle inspirée cette fois-ci par l'œuvre d'Arthur Conan Doyle, Le Monde perdu.
L'aventure prend vie dans des écrans de jeu fixes, illustrés par de magnifiques fresques aux tons pastel donnant l'impression d'évoluer au sein d'un tableau que l'on contemplerait. Bien que globalement fixes, les paysages sont ponctués de quelques animations discrètes, ce qui contribue à les rendre plus vivants. Mais la véritable force du moteur graphique est de parvenir à doter chaque personnage et autres sauriens, représentés par de grand sprites, d'une animation vraiment convaincante offrant des mouvements souples et réalistes. Tout ce petit monde évolue dans un environnement 2D avec quelques éléments en pseudo 3D dont les fameux dinosaures.
Cependant, Bermuda Syndrome n'est pas un point'n'click mais bel et bien un jeu de plates-formes et d'aventure où le joueur contrôle pleinement les mouvements de son personnages à l'aide du clavier et de la souris, à l'instar de Flashback. Le soft est pourvu d'une interface particulièrement minimaliste. En effet, seul un petit carré trône sur le côté gauche en haut de l'écran. Ce dernier informe le joueur sur l'action ou l'objet actuellement actif. Mais son utilisation n'est possible que lorsque notre personnage est proche ou en contact avec un élément du décor avec lequel il peut interagir. Dès lors, un second carré apparaît, cette fois-ci sur le côté droit, illustrant l'élément concerné. Il faut alors trouver la bonne action ou objet à combiner pour pouvoir provoquer une réaction.
Pour cela, le joueur passe alors par un menu contextuel divisé en trois parties. A gauche vous informe sur l'arme actuellement portée par Jack ; au centre, une série d'icônes d'action ; à droite, votre inventaire où sont stockés les différents objets récoltés. Cette fenêtre intègre également votre jauge de vie. Par défaut, celle-ci n'est pas affichée dans l'écran de jeu mais peut l'être en appuyant simplement sur la touche «Alt». Ce choix fait par les développeurs permet de n'avoir qu'un minimum d'éléments à l'écran afin de scruter chaque détail du décor qui peut servir à la résolution d'une énigme.
Au début de son périple, Jack ne dispose que d'un couteau mais son arsenal s'étoffe au fur et à mesure en restant néanmoins assez succinct. Notre héros est en outre particulièrement agile puisqu'il peut sauter, rouler-bouler, s'accrocher à des corniches ou à des lianes augurant des phases de plates-formes de haute volée. La principale nouveauté réside dans le fait que notre personnage principal n'est plus condamné à errer seul puisqu'une charmante compagne de route le suivra dans ses pérégrinations. Cette dernière n'est qu'autre que la fille du roi dont sa destinée, réduite à sacrifier sa vie pour satisfaire les divinités locales, se voit briser par le crash de Jack qui avorte le rite sordide.
A travers des dialogues à choix multiples, matérialisés par des voix digitalisées de très bonne qualité, Jack doit convaincre la belle princesse de l'aider à s'échapper de cette jungle étrange et par la même occasion de lui offrir un destin plus radieux. Si vous y parvenez, la demoiselle vous suivra de façon automatique et vous distillera en temps voulu quelques précieux renseignements pour résoudre certaines énigmes. Egalement, elle vous aidera autant qu'elle le pourra pour passer certains passages basés sur la collaboration des deux protagonistes. Cependant, la princesse ne peut ni se battre à vos côtés ni être contrôlée directement avec les croix directionnelles.
L'objectif est donc d'évoluer d'écran en écran jusqu'au territoire final de l'épopée avec parfois quelques allers-retours nécessaires. Le soft propose deux grands types de zones : la majorité sont en extérieur, là où la résolution d'énigmes et les affrontements contre la faune locale occupent la plupart de votre temps. Les autres zones se déroulent dans des souterrains uniquement accessibles via téléporteurs et permettant de franchir certains passages bloqués autrement. Ces zones se caractérisent par des phases de plates-formes qui mettent votre dextérité et votre sens de l'orientation à rude épreuve. Pensez Prince of Persia.
Bien qu'accessible dans sa prise en main, Bermuda Syndrome n'en demeure pas moins un jeu plutôt difficile tant dans les énigmes particulièrement originales qu'il propose que dans ses phases de plates-formes où les sauts et autres accrochages aux corniches sont millimétrés. De plus, l'aventure est assez longue puisqu'elle s'étale sur une centaine d'écrans qui ne pourront être franchis qu'à travers une redoutable progression par l'échec. Fort heureusement, il est possible de sauvegarder sa partie à tout moment et de façon très rapide, et cela évite de devoir refaire des passages déjà résolus.
Au final la seule chose qu'on peut reprocher à Bermuda Syndrome, c'est son scénario un tantinet simpliste : certains évènements ne sont justifiés par aucune trame et on a du mal à éprouver de l'empathie pour les personnages principaux. En effet, Jack est affublé d'un caractère machiste vraiment trop caricatural alors que la princesse se voit réduite à une pauvre femme écervelée dont la seule vocation est de se faire dévorer par un T-rex. L'ensemble est heureusement rehaussé par une ambiance vraiment forte qui permet d'oublier ces quelques errements scénaristiques. Bermuda Syndrome s'inscrit donc dans le sillage de Flashback en offrant un gameplay au moins aussi exigeant mais des graphismes clairement supérieurs et une bande-son particulièrement réussie. Les amateurs du genre en auront donc pour leur argent. Dommage que le scénario peine à réellement nous immerger dans l'aventure comme l'était parvenu Another World.
- Graphismes19/20
En prenant le pari d'utiliser des dessins typés «fait main» aux tons pastel, Bermuda Syndrome se distingue clairement de ses aînés et s'offre sa propre identité visuelle. Le résultat ? Juste bluffant. En effet, avec ses paysages fourmillant de détails et de couleurs, saupoudrés de quelques animations discrètes, le joueur est pleinement immergé dans ce monde parallèle aux accents préhistoriques. Quant aux personnages et autres sauriens, ils ne sont pas en reste puisqu'ils profitent d'une animation de haut vol les parant de mouvements souples et réalistes.
- Jouabilité16/20
Lors des premières minutes de jeu, le joueur sera certainement un peu perdu devant cette interface minimaliste qui laisse place à chaque détail du décor. Mais une fois le fonctionnement compris, la prise en main devient vraiment intuitive et fluide. La possibilité d'afficher ou de cacher certains éléments d'interface est une bonne idée et permet à tout un chacun de choisir l'affichage qu'il préfère. Les énigmes et les phases de plates-formes sont vraiment de qualité même si parfois le personnage a du mal à déclencher un mécanisme ou à effectuer un saut quand on lui demande. Heureusement ces quelques bugs sont assez rares.
- Durée de vie15/20
Comptez 5 à 10 heures de jeu pour atteindre la fin de l'aventure qui s'étend sur une centaine d'écrans. Néanmoins, l'inévitable progression par l'échec cumulée à une difficulté vraiment marquée pourra en démotiver certains. Cela est néanmoins compensé par l'excellent système de sauvegarde qui permet d'enregistrer sa progression à tout moment et de reprendre son aventure là où on l'avait arrêtée.
- Bande son17/20
Les musiques de Bermuda Syndrome ont fait l'objet d'une attention toute particulière et on ne peut que saluer la qualité des différents thèmes qui nous accompagnent lors de nos pérégrinations. Collant toujours à l'ambiance que le joueur est en train de vivre, les mélodies sont tantôt entraînantes tantôt énigmatiques. Enfin, les mélomanes apprécieront le fait qu'en plus du CD du jeu, les développeurs ont eu la brillante idée d'adjoindre un second CD audio contenant toutes les musiques du soft et ce pour le même prix qu'un jeu classique. Saluons aussi au passage l'excellence des voix digitalisées des deux protagonistes. Seul petit regret, une certaine redondance dans les thèmes proposés mais rien de bien méchant.
- Scénario12/20
Malgré une atmosphère vraiment bien rendue, la trame en elle-même souffre de quelques blancs scénaristiques et demeure assez basique au final. Cela est bien dommage car il y avait matière à doter le jeu d'un scénario robuste mais en l'état, une impression d'inachevée reste prégnante. De plus, difficile de réellement s'attacher à un héros bien trop machiste et à une princesse qui, au contraire, manque de caractère et dont l'idylle avec Jack est peu convaincante.
Digne héritier de Flashback, Bermuda Syndrome émerveille d'emblée grâce à sa superbe plastique qui retranscrit un monde parallèle inspiré de l'œuvre d'Arthur Conan Doyle. Et le soft ne se contente pas de ravir nos mirettes puisque les énigmes particulièrement originales et variées ainsi que les phases de plates-formes aussi exigeantes que celles de Prince of Persia ne tardent pas à nous faire prendre conscience de son énorme potentiel. Dommage toutefois que la trame soit peu passionnante et parfois émaillée de quelques errements scénaristiques. Cela est néanmoins compensé par une atmosphère vraiment prenante. En somme, une aventure qui ravira autant les fans de mondes perdus que ceux qui cherchent un jeu offrant un gameplay exigeant mais accessible.