Dans la lignée de Braid ou autres Journey, Papo & Yo prétend jouer sur les émotions en plongeant le joueur dans un univers à la fois envoûtant et intriguant. Centré sur les relations d'un enfant avec son père alcoolique, celui-ci a la mérite d'aborder un sujet trop souvent tabou. Cela sera-t-il suffisant pour faire de ce petit jeu de plates-formes / réflexion un incontournable ?
Quasiment une œuvre autobiographique, Papo & Yo s'inspire de la jeunesse tourmentée de son directeur créatif : Vander Caballero. Celui-ci est représenté in-game sous les traits de Quico, un petit garçon terrorisé par les accès de violence de son père, un peu trop porté sur la boisson. Dans ces moments sordides, celui-ci se réfugie alors dans un conduit d'aération et s'évade dans un monde imaginaire. Tout n'y est alors que métaphores, à commencer par un monstre tantôt taquin, tantôt cruel et agressif. De même, les favelas brésiliens y sont dépeints comme un univers interactif et malléable dans lequel les maisons peuvent marcher ou voler et les murs bouger. Le but est alors de profiter de ces anomalies afin de progresser de ruelle en ruelle et ainsi atteindre un mystérieux chaman capable de soigner le monstre et ainsi résoudre (plus ou moins) les problèmes de Quico. Sachez simplement que cette introspection dans l'esprit d'un enfant perturbé n'entend pas apporter des solutions, mais a principalement pour but de soulever des questions.
Au début de l'aventure, l'objectif est souvent de trouver un interrupteur ou de tirer sur une corde afin de faire apparaître un escalier ou une plate-forme. Les énigmes évoluent cependant rapidement et on pourra être amené à modifier complètement l'environnement en bougeant simplement quelques cubes. Trouver la personnification du jouet de Quico (nommé Lula) permettra ensuite de planer quelques instants ou d'activer des mécanismes à distance, mais c'est seulement à partir de la rencontre avec Monstre que le jeu prendra son envol. Cela offre en effet une multitude de possibilités, à commencer par le fait de pouvoir sauter plus haut grâce au ventre rebondi de la bête. Sachez par ailleurs que cette dernière est particulièrement friande de noix de coco, ce qui pourra être utile pour la contrôler ou la diriger (par exemple sur un interrupteur). Mais attention, Monstre préfère par dessus tout les grenouilles (comprenez ici, l'alcool), en sachant qu'après consommation, celui-ci s'enflamme et attaque violemment le pauvre Quico. Cette fureur ne peut être calmée qu'avec un fruit pourri et ajoute une touche d'adrénaline appréciable au soft. Les possibilités sont donc au final plutôt nombreuses et la répétitivité est limitée. Cela est d'autant plus vrai que l'aventure proposée n'est pas spécialement longue et peut être bouclée en seulement 3 à 4 heures, notamment par manque de difficulté.
Cela fait-il pour autant de Papo & Yo un bon jeu vidéo ? Pas forcément... En effet, la réalisation est d'un autre âge et les bugs beaucoup trop nombreux. Il ne sera ainsi pas rare de se retrouver bloqué contre un mur invisible, et d'être ainsi contraint de regagner le menu. Des freezes peuvent également survenir de temps à autre, ce qui n'est jamais appréciable venant d'un titre vendu quasiment 15 €. Du côté du gameplay, le constat n'est guère plus reluisant, tant les animations de Quico sont lourdes et imprécises. Cela complique grandement les phases de plates-formes et pourra donc ternir quelque peu l'expérience. Néanmoins, il nous en faudra plus pour vous déconseiller un achat. En effet, Papo & Yo est avant tout une ambiance magnifique, mise en valeur par une bande-son tout simplement somptueuse. Les airs typés sud-américains proposés sont ainsi tantôt oppressants, tantôt enjoués, mais dans tous les cas, la qualité est là ! La musique renforce un scénario lourd et profond, ponctué par une fin qui devrait rester dans les annales. Bref, si l'expérience est pour vous plus importante que le gameplay ou la technique, nous ne pouvons que vous conseiller de vous ruer sur ce Papo & Yo, qui, sans être de la trempe d'un Journey, devrait vous proposer quelques heures fort agréables.
- Graphismes11/20
Papo & Yo est techniquement dépassé et affiche notamment des textures catastrophiques. Les bugs de collision et d'affichage sont en outre très nombreux, tout comme les freezes. La réalisation artistique est toutefois plutôt soignée.
- Jouabilité14/20
Si les phases de plates-formes sont laborieuses, les énigmes proposées sont plutôt variées et assez intelligentes. La difficulté n'est pas franchement au rendez-vous et les bugs ternissent l'expérience, mais l'ensemble reste assez agréable à jouer.
- Durée de vie13/20
3 à 4 heures suffisent pour boucler l'aventure, ce qui semble un peu court pour un titre proposé à 15 €. L'ennui ne pointe toutefois jamais le bout de son nez et on ne pose la manette qu'une fois l'aventure terminée. Il n'y a donc pas de quoi être scandalisé.
- Bande son17/20
Papo & Yo est porté par des airs sud-américains tout simplement magnifiques. Tantôt envoûtante, tantôt effrayante, l'ambiance sonore est une franche réussite.
- Scénario16/20
Si à première vue, Papo & Yo ne semble pas proposer de réel scénario, il faut savoir que chaque geste, chaque action, est en fait une métaphore lourde de sens. Le contexte se dévoile ainsi au fur et à mesure jusqu'à une conclusion mémorable.
Certains l'adoreront, d'autres le détesteront, mais une chose est sûre, Papo & Yo ne laissera personne indifférent. D'aucuns apprécieront ainsi l'ambiance exceptionnelle proposée et le thème traité quand d'autres pesteront contre des bugs plus ou moins gênants, un gameplay parfois défaillant et un prix excessif. Cela ne sera toutefois pas suffisant pour que nous vous déconseillions ce voyage à la fois envoûtant et troublant dans l'imaginaire d'un enfant maltraité.