Prendre le contre-pied, sortir du consensuel. En hissant aux rôles de héros un duo formé d'un orc et d'un gobelin, Cyanide affiche clairement ses intentions : Of Orcs and Men sentira bon les dessous de bras et l'haleine fétide. Fini le temps des humains guerriers dans leurs belles armures en plaques, au pilori ces paladins au physique de "gendre idéal", le joueur sera bel et bien parachuté dans la peau rugueuse d'êtres aussi sexy que répugnants.

Car ici, ce ne sont ni les orcs ni les gobelins qui tiennent le mauvais rôle, mais bien les humains. Ces derniers ont purement et simplement voté une loi de solution finale pour toutes les races existantes sur la planète. Arkail et Styx réchappant au génocide, ils vont unir leurs talents et compétences afin de retourner une situation compromise. Orcs and Men n'étant pas un hack'n slash, le but du jeu ne se limite pas au dézinguage à tour de bras, mais consiste plutôt à taper là où ça fait mal. Si tu veux tuer une crevette arrache la tête, sous-entendu, tue l'Empereur pour porter un coup fatal au Royaume. Evidemment certains ricaneront en arguant à juste titre que les humains s'empresseront d'en nommer un autre rapidement. "Oui mais non... voire peut-être"... chez Cyanide, pas de doute, on sait maintenir le suspense. Toujours est-il, notre couple s'envole vers une aventure découpée en cinq chapitres, qui les fera voyager dans un univers médiéval-fantastique assez joli au demeurant.

Rapidement les premiers obstacles commencent... l'occasion pour nous d'en découvrir un peu plus sur le gameplay. Tout d'abord sachez que le titre, malgré les possibilités apparentes, ne propose pas de jeu en coopération, optant pour une expérience solo dans laquelle le joueur contrôle les deux persos simultanément. Il pourra, comme dans la série des Lego, switcher entre le gobelin et l'orc dès qu'il le souhaite. Pour maîtriser le mécanisme classique, mais bien fichu, il faut déjà bien connaître les caractéristiques et personnalités des deux héros. Alors qu'Arkail se fiera plus à sa force pure et son asociabilité affichée, Styx lui, s'appuiera sur une technique située entre un voleur et un chasseur. Habile dans ses déplacements furtifs, bon négociateur et diplomate, armé de redoutables dagues de lancé, le gobelin est la "tête" du duo. Ce mariage de la force et la sagesse aura des répercussions notamment lors des dialogues à choix multiples proposés à chaque rencontre avec des quidams. Pour obtenir un bon compromis ou un indice, Styx fera l'affaire. Pour ce qui est d'intimider son interlocuteur, Arkail s'en chargera volontiers.

Jongler entre ces deux énergumènes n'est pas une mince affaire. Gérer l'aggro ou la rage d'Arkail (qui l'affaiblit vitesse grand V), garder un œil sur la santé du perso non contrôlé, apprivoiser le menu radial de chaque personnage (la possibilité de créer des raccourcis clavier est implémentée)... c'est un vrai numéro d'équilibriste auquel on participe. Pour éviter que le joueur ne panique et se mélange les pinceaux, Cyanide a mis en place un système assez pratique : le ralenti. Couper l'action sans l'interrompre laissera ainsi le temps de changer la tactique d'attaque, de réfléchir à la meilleure option à prendre, plutôt que foncer dans le tas tête baissée et d'en ressortir les pieds devant. Une bonne initiative "totalement optionnelle mais diablement efficace quand la situation se complique" dixit les développeurs.

En plus d'être un bon jeu d'action au gameplay varié, Of Orcs and Men s'emploie aussi à développer un petit côté RPG. Sans commune mesure avec les grands pontes du genre, le titre se contente d'offrir à Arkail et Styx une ribambelle de quêtes, mais aussi l'opportunité d'améliorer leurs aptitudes de combat. Le cousin éloigné de Hulk se concentrera sur sa puissance "Offensive" et "Défensive", pendant que le demi-frère maigrelet de Shrek s'efforcera de trouver le bon compromis entre "Mêlée" et "Attaque à distance". Du classique on vous dit. Même le loot d'objets ne sera pas aléatoire puisque le nombre, et la nature, d'objets à récolter est limité, réduisant ainsi la possibilité de se créer pléthore de sets d'armures différents. Mais ne soyons pas trop exigeants car Of Orcs and Men apporte beaucoup de satisfaction, notamment par son histoire s'appuyant sur le mariage d'un duo improbable mais finalement attachant. Les affrontements demeurent dynamiques et les environnements travaillés restent une belle invitation au voyage. Une épopée à vivre seul, certes, mais suffisamment séduisante pour que l'on accepte nous aussi de sentir mauvais pendant une vingtaine d'heures.