Un seul point noir, c'est tout ce qu'il faut parfois pour flinguer un titre qui ne manque pourtant pas d'atouts. Il suffit que le point noir en question concerne l'aspect le plus crucial d'un jeu : sa fichue prise en main !
Steel Battalion, voilà un nom qui résonne aux oreilles des joueurs, même ceux qui n'ont pas eu l'occasion d'y toucher : ce véritable, au sens strict, simulateur de Mech vendu avec son incroyable contrôleur géant et sa difficulté phénoménale. Sur le papier, remplacer cet imposant et coûteux système par un contrôleur virtuel à l'écran est fatalement assez enthousiasmant, mais dans la pratique, c'est l'enfer qui s'abat sur le joueur. Si on a souvent pris Kinect en défaut sur des titres nécessitant précision et rapidité, sa très mauvaise gestion par les équipes de From Software et son implantation dans un jeu hardcore ne font qu'exacerber le problème. Dans Steel Battalion, on prend donc le contrôle d'un VT, un vertical tank dans un conflit durant lequel toute technologie informatique a été mise à mal par un seul virus surnommé l'infocide. Du coup, c'est retour aux bonnes vieilles méthodes. Un pitch qui confère au jeu une ambiance bien à lui, une atmosphère qui oscille entre les films traitant de la Seconde Guerre mondiale et le Vietnam. Les équipiers présents dans votre Mech étant là pour commenter l'action et interagir avec vous, histoire d'assurer une bonne partie de l'immersion. On leur pardonnerait presque les répliques bien cliché.
A bord de votre VT, vous faites face à un gros tableau de bord sur lequel tout se contrôle à l'aide de Kinect : une poignée de démarrage vous attend en bas à droite, un panneau situé au-dessus, qu'il faut d'abord ramener à soi, se présente avec l'interrupteur des phares et surtout un levier permettant d'évacuer la fumée toxique en cas d'explosion. A gauche, vous trouverez entre autres choses un écran affichant l'image des caméras latérales et arrière ou une carte. On peut encore citer le périscope situé tout en haut ou la sélection du type de munitions, anti-blindé ou anti-infanterie, placée devant vous, sous la fenêtre de tir. Une fenêtre vers laquelle on se dirige en plongeant ses deux mains vers l'avant et qu'il faudra penser à refermer si jamais la vitre de protection venait à céder. Bref, un cockpit virtuel rempli à ras bord et qui vous obéit au doigt et... ben au doigt. Le pad n'est pour autant pas prêt à être jeté. La direction et le tir restent assignés aux contrôles physiques, les deux sticks et les gâchettes fonctionnant comme dans n'importe quel jeu d'action. Et c'est malheureusement la seule chose qui tourne rond dans Steel Battalion : Heavy Armor.
Si le périphérique de Microsoft peut avoir des ratés, il est loin d'être seul en cause et c'est sans aucun doute la calibration effectuée par From Software qui est dans les choux. D'ailleurs, une fenêtre permet de constater que les mouvements sont correctement captés par Kinect mais mal interprétés par le jeu. Un mouvement à deux mains pour aller vers l'avant est perçu comme un geste à un seul bras et se solde par l'ouverture ou la fermeture du volet, ou l'inverse (ce qui est certainement causé par le fait que l'on soit obligé de garder le pad en mains). Une tentative d'accès à un panneau latéral vous expédie vers un de vos équipiers et on pourrait citer des exemples de ce genre à la pelle. En outre, le fait que pour "simplifier" les choses, chaque élément interactif soit magnétique et s'auto sélectionne quand on passe à proximité n'arrange en fait rien à l'affaire. Avec autant de leviers et boutons à l'écran, cela ne fait qu'accroître le risque d'aller activer le mauvais bidule, généralement au plus mauvais moment. Car la difficulté de Steel Battalion n'est plus à présenter. La moindre erreur peut vite être fatale, or, des erreurs, on en commet fatalement un paquet quand le jeu refuse de faire ce qu'on lui demande. Mourir parce que le jeu est hardcore et peut vous envoyer ad patres d'un seul obus mal placé, c'est une chose, mourir parce qu'on n'a jamais réussi à accéder au périscope pour faire feu après l'explosion de la vitre du hublot, c'est juste impardonnable. Et, chose absolument incroyable, le programme trouve le moyen d'enregistrer des mouvements même quand on se tient immobile, les mains et le pad gentiment posés sur les genoux.
Pour rendre justice au titre, il est vrai que par moments, on arrive à se dépatouiller et à profiter du jeu pendant une courte période. Est-ce que c'est la lumière qui a changé dans la pièce ? Est-ce que nos gestes sont subitement devenus parfaits ? Le jeu semble (semble !) mieux percevoir les mouvements rapides et francs pourtant pas particulièrement naturels. Mais constater que plus rien ne répond dans la minute qui suit en devient d'autant plus frustrant, voire simplement décourageant. De toute façon, on voit mal comment accepter que les commandes d'un jeu ne fonctionnent que quand bon leur semble. En outre, Steel Battalion est truffé d'erreurs de game design. Pourquoi ne pas avoir intégré au moins deux ou trois raccourcis sur le pad, histoire de ne pas avoir à systématiquement quitter le poste de tir pour effectuer certaines actions mineures ? Ou des commandes vocales ? Et pourquoi, en dehors d'un souci de réalisme sans doute, éjecter le joueur au fond de son fauteuil à chaque tir d'obus encaissé et l'obliger alors à se repositionner ? Surtout quand on sait le mal qu'on peut avoir à se replacer avec cette reconnaissance chaotique des mouvements. En outre, Steel Battalion souffre aussi d'une architecture de missions assez délirante. Une des plus emblématiques étant celle qui vous laisse observer le terrain à la jumelle pendant plus de trois minutes (et donc rester debout sans rien faire) pour prendre un groupe en embuscade, séance qui est suivie par une petite minute de combat et... fin. Et bien sûr, si vous prenez un tir en pleine face ou que la détection de mouvements se met à patiner, il faudra tout refaire. En cause également, les objectifs manquant très souvent de clarté ou les commentaires parfaitement ineptes des équipiers qui balancent des infos scriptées, vous demandent de tirer alors même que personne n'est en vue. De plus, l'action est plutôt nerveuse, bruyante, chaotique, bref, c'est la guerre, plutôt bien retranscrite. Alors forcément, entendre le peu d'informations transmises par la radio et faire le point sur sa situation est passablement délicat. On pourrait très bien y arriver... si on n'était pas déjà en train de se battre avec les commandes. Alors certes, l'idée a un potentiel très immersif, l'ambiance, malgré ses airs hyper convenus pleins de clichés, est solide mais non, non, non et non.
- Graphismes12/20
En dépit d'un moteur daté et d'un aliasing qui pique les yeux dans les espaces les plus ouverts, Steel Battalion profite d'une direction artistique qui colle parfaitement à son background. Toute considération de "réalisme" mise à part, la visibilité de l'action est toutefois trop réduite, sans parler de l'animation des soldats d'infanterie qui est plus que sommaire.
- Jouabilité8/20
Le concept est excellent, le gameplay plein de richesse et bien hardcore et on pourrait pardonner l'architecture bancale des missions si... on pouvait jouer, et jouer sans batailler comme un âne en espérant qu'on est dans un de ces rares moments où les choses fonctionnent sans que l'on comprenne vraiment pourquoi.
- Durée de vie4/20
En théorie, avec son gameplay exigeant et sa liste de missions assez dense, Steel Battlaion a de quoi tenir la distance. Un titre avec lequel on doit littéralement se battre pour jouer sans avoir l'impression d'être totalement saoul fait rapidement fuir à toutes jambes avant qu'un malheur ne survienne.
- Bande son13/20
Intégralement en VO sous-titrée (pas évident les sous-titres du coup), le jeu de From Software ne va éblouir personne par la qualité de ses dialogues bien stéréotypés. Au moins, les effets réussis contribuent grandement à l'ambiance guerrière.
- Scénario13/20
Le bon vieux coups des gentils américains contre le vil envahisseur coréen sent un peu le pâté, mais on apprécie néanmoins l'idée de la destruction du matériel high-tech qui pousse à un retour aux armes conventionnelles et au combat à l'obus. Cela donne un certain cachet au jeu.
Substituer Kinect au gargantuesque pad original de Steel Battalion semble être, à n'en pas douter, une excellente idée. Semble seulement, car en pratique, From Software a littéralement saboté le travail avec une reconnaissance des mouvements catastrophique, parfois plus ou moins efficace sans raison apparente, d'autres fois totalement et irrémédiablement à la ramasse. Dommage, l'idée avait du bon et l'immersion qui se dégage des rares séquences jouables donne envie. Mais on ne peut absolument pas cautionner un jeu dont les commandes fonctionnent quand elles en ont envie sous prétexte que l'idée est audacieuse. Maîtriser une interface complexe et se battre avec sont deux choses différentes.