Cela faisait désormais deux ans que Quantic Dream nous tenait en haleine au sujet de son nouveau projet. Entre la démo technique Kara, les rumeurs d'un titre nommé Horizon et le développement d'un nouveau moteur 3D, les joueurs y voyaient plus flou qu'autre chose. Mais le studio à l'origine d'Heavy Rain est enfin prêt à nous en dire davantage et a choisi l'E3 pour officialiser le bébé de David Cage...
Et son nom est Beyond : Two Souls. Celui-ci nous a dans un premier temps été révélé durant la conférence Sony avant qu'une présentation plus intime ne nous soit faite dans la foulée. Pour l'occasion, David Cage a tenu un discours cohérent avec ses aspirations. Son objectif et celui du studio français de Quantic Dream est de donner un maximum d'émotions au joueur, l'incitant à se poser des questions existentielles dont les réponses se trouvent potentiellement dans Beyond. Une fois de plus, l'accent a été mis sur la maturité de l'histoire qui nous est contée et pour conférer un maximum de crédibilité aux protagonistes du jeu, Quantic Dream s'est assuré le concours de pointures. Ainsi, l'actrice Ellen Page (Hard Candy, Juno, Bliss, Inception) incarnera Jodie Holmes, le personnage central de Beyond. "Incarner" est un mot d'autant plus fort que la motion capture utilisée par les développeurs présente une importance de premier plan. Non seulement les visages exprimeront toutes les émotions humaines mais les dialogues enregistrés en même temps que leur capture permettront aux cinématiques d'être extrêmement cohérentes.
La mission séduction de la première cinématique en temps réel qui nous a été dévoilée est remplie haut la main. Sans même donner la parole à Jodie, Quantic Dream est parvenu à nous transmettre ses émotions, entre terreur et inquiétude. La scène, qui se déroule dans un commissariat rural, lors d'une nuit pluvieuse, est assez éloquente sur la capacité du studio à donner vie à des personnages aussi troublants que mystérieux. On découvre donc l'héroïne assise devant le bureau du lieutenant Sherman, qui l'interroge sur sa présence suspecte au milieu de nulle part, en pleine nuit. La jeune femme, visiblement absente et torturée, ne donne aucune réponse mais trahit, via son regard, une évidente anxiété. Le shérif, patient et diplomate, insiste modérément, souhaitant apporter l'aide dont Jodie semble avoir manifestement besoin. Le silence est pesant et chaque question rebondit sur Jodie, enfermée dans un profond mutisme. Le crâne presque rasé, les traits lisses, presque juvénile, l'héroïne semble tout droit sortie d'une autre planète, malgré sa tenue tout à fait classique.
Les questions du lieutenant se font toujours plus nombreuses et l'agacement de Jodie finit par se traduire de façon étonnante, lorsque la tasse de café posée sur le bureau commence à trembler... Il ne fait guère de doute que la jeune femme et ce phénomène paranormal ont un lien. Celui-ci est confirmé dans la foulée lorsqu'une dernière question sur la cicatrice qu'elle porte à l'arrière du crâne est balayée par l'envol soudain de la tasse, s'écrasant contre le mur. En diffusant cette scène, Quantic Dream donne le ton : Beyond abordera le thème du paranormal. David Cage nous l'avait à moitié avoué en préambule, en posant la problématique suivante : Qu'y-a-t-il après la mort ? Jodie semble détenir la réponse et posséder la capacité de communiquer avec les esprits. Une aptitude suffisamment étrange pour qu'une équipe toute entière de SWAT pénètre dans le commissariat, à la recherche de la jeune femme. Le lieutenant pointe la salle d'interrogatoire puis ouvre la porte, laissant alors pénétrer les pointeurs rouges des soldats, visiblement au courant d'un danger que ne semblait pourtant pas représenter Jodie. Le mystère est total, l'envie d'en savoir davantage omniprésente.
Et celle-ci a été assouvie lorsque nous sommes passés à la vitesse supérieure en voyant le jeu tourner. Premiers constats : David Cage fait du David Cage et recycle nombre d'éléments d'Heavy Rain. Même prise en main au Move et au Sixaxis, même ambiance musicale avec des thèmes à peine différents, "gameplay" majoritairement basé sur des QTE, rythme très similaire... Bref, l'idée est manifestement d'imposer par la force une vision du jeu vidéo déjà prônée dans Heavy Rain. Ceux qui ont apprécié ce titre ne s'en plaindront pas ! Mais outre ces quelques petits soucis de renouvellement, il faut bien avouer que la phase de gameplay qui nous a été présentée fut étonnante à bien des égards. Celle-ci se déroule à un tout autre moment de la vie de Jodie et nous permet d'en savoir beaucoup plus sur ses pouvoirs surnaturels. Ainsi, on constate très vite qu'elle possède la capacité d'investir n'importe quel corps par la simple force de la pensée. Un sympathique effet visuel accompagne le déplacement de son esprit vers sa cible, déterminée après avoir survolé la scène, un peu comme le shift de Driver San Francisco. Dès lors qu'elle incarne l'un de ses assaillants, la fugitive peut lui faire faire n'importe quoi : la délivrer d'une cellule en lui donnant la clé, balancer une grenade destinée à faire exploser un barrage de police, sniper tout ce qui bouge, bref, débloquer n'importe quelle situation. Nous ne nous attendions pas à cela mais le papa de Beyond nous avait prévenus : il va y avoir de l'action !
Avec Beyond, David Cage et ses équipes ne remettent aucunement en question leur envie obsessionnelle de casser les codes du jeu vidéo. Provoquer l'émotion, poser des problématiques, inciter le joueur à établir ses propres théories... Autant de missions que Beyond semble être tout à fait capable de remplir, bien aidé par une réalisation et une motion capture maîtrisées. Mais ce n'est pas tout puisque le gameplay, malgré d'imposantes similitudes avec Heavy Rain, utilisera massivement les compétences psychiques de l’héroïne, au point de faire de Beyond un titre rappelant vaguement Psi-Ops ou Second Sight.