Parmi les titres les plus attendus d'une fin d'année qui s'annonce une nouvelle fois très chargée, figure en bonne place Hitman : Absolution. Loin d'être rouillé malgré une période d'inactivité longue de plus de six ans, l'Agent 47 prépare tranquillement son retour aux affaires du côté du Danemark, au sein de IO Interactive. Après avoir présenté le gameplay du jeu à plusieurs reprises en essayant d'expliquer en quoi celui-ci est à la fois respectueux de l'ADN de la série et plus accessible que par le passé, le studio a enfin décidé de nous laisser la manette. Le tout, dans un nouveau niveau prenant place au sein du quartier chinois de Chicago.
Il ne plane aucun doute sur le fait que le très solitaire Agent 47 se serait bien passé d'un bain de foule. Qui plus est en plein jour, dans le quartier de Chinatown, au cœur de Chicago. Oui mais voilà, le dénommé « Birdie » possède cette information cruciale dont il a besoin. Et ce petit malin a décidé de profiter de la situation. Il a ainsi passé un marché avec 47 : la tête du « Roi de Chinatown » contre le renseignement. Voilà donc comment le tueur à gages se voit contraint de pousser les portes de ce quartier densément peuplé. La cible, un homme d'une quarantaine d'années habillé en costard, se trouve au centre d'une sorte de place à ciel ouvert délimitée par de nombreux immeubles délabrés. Y circuler demeure une tâche compliquée. Près de cinq cents personnes sont massées au centre de ce lieu oh combien anarchique. L'atmosphère est moite, presque tendue. La fumée s'échappant des restaurants ambulants vient imprégner les vêtements étendus entre deux bâtiments. Des voix alternant l'anglais et le chinois s'élèvent dans la foule, tant et si bien que l'on finit par perdre la notion du lieu dans lequel on évolue.
Concrètement, cette place se trouve être un lieu clos. Sa taille toute relative offre tout de même suffisamment d'espace pour aborder l'assassinat de différentes manières. Et des façons de tuer le « Roi de Chinatown », il en existe un paquet. Après avoir repéré votre proie à l'aide du fameux instinct (surnaturel) de 47, qui permet de l'afficher en rouge - LA nouvelle feature qui fait tant jaser -, plusieurs chemins s'offrent à vous pour accomplir votre mission. Le plus direct reste de dégainer son arme et de shooter la cible. Cash ! Une option très efficace dans un premier temps mais qui possède un inconvénient majeur. Vous êtes immédiatement repéré. Les hommes de main de votre victime, ainsi que les flics qui la protègent, vous tombent alors dessus et la situation se complique soudainement. D'autant que les mouvements de la foule, apeurée par les événements, ne vous aident pas franchement dans votre fuite. Pour boucler la mission, il faut en effet rallier la sortie du niveau. Dans le cas présent, y parvenir passe par l'élimination de tous les ennemis. Si réaliser un tel carnage aurait été impossible dans les précédents volets, ce n'est plus le cas dans Hitman : Absolution.
En revanche, la bonne surprise, c'est que tuer une multitude d'opposants n'est à l'évidence pas aussi facile que ce que les trailers laissent entendre. Alors certes, l'Agent 47 peut se servir du fameux Point Shooting. Il s'agit de ce système, façon Splinter Cell Conviction, permettant de marquer ses cibles puis de les éliminer en une fraction de seconde. Mais celui-ci reste limité dans son utilisation. Et il se trouve que 47 est beaucoup moins à l'aise dès lors qu'il faut se mouvoir rapidement. Cela n'a plus rien à voir avec les épisodes précédents mais ce n'est quand même pas une partie de plaisir. Il va vraiment falloir apprendre à utiliser toutes les nouvelles aptitudes du personnage pour ne pas mourir lorsque l'action s'emballe. A commencer par se planquer à bon escient derrière les éléments du décor et miser sur les capacités hors normes de 47 au corps-à-corps.
Après des heures passées sur le jeu, on se doute que la donne ne sera plus la même. Une meilleure maîtrise de la palette de mouvements aidera à se sortir de situations critiques. Pour autant, on l'a évoqué plus haut, rien ne vous oblige à opter pour cette voie. Bien au contraire ! Les multiples autres manières d'éliminer la cible sont infiniment plus gratifiantes, en plus d'être plus « respectueuses » de l'esprit de la série. Elles donnent aussi beaucoup plus de points que les assassinats brutaux. C'est important car le jeu présente une partie scoring réellement intéressante. Un tableau rempli de statistiques résume votre performance après chaque mission. En observant les allées et venues du « Roi de Chinatown », on remarque rapidement que plusieurs occasions de l'éliminer se présentent à nous. L'homme fait une pause dans l'un des restaurants de la place pour se ravitailler. Voilà une occasion idéale de l'empoisonner. Il s'arrête pour soulager sa vessie dans un coin sombre. Cela tombe bien, une plate-forme maintenue en l'air par des chaînes pour le moins fragiles menace de tomber. Le « Roi de Chinatown » se dirige près d'une voiture qu'il semble vouloir prendre pour quitter les lieux. Parfait, vous pouvez récupérer des explosifs non loin du véhicule afin de le piéger.
Plus complexe, si vous êtes suffisamment patient, vous pourrez surprendre votre cible en train de s'adresser et de donner un ordre à un dealer. Une proie idéale pour l'impitoyable Agent 47. En suivant cet homme de main, vous pourrez le coincer dans un lieu isolé. Tout en discrétion, à l'aide de la corde à piano, l'assassinat est vite réglé. Après avoir revêtu les habits du dealer – béret, marcel, ensemble de jogging de mauvais goût et lunettes de soleil kitsh – et pris soin de planquer son corps dans une benne à ordures, de nouvelles possibilités s'offrent à vous. Vous pouvez notamment vous rendre dans l'appartement du dealer. Celui-ci donne directement sur la place. Grâce à l'instinct permettant de localiser sa cible facilement et à un fusil de sniper présent sur les lieux, le compte de votre cible peut vite être réglé. Mais vous pouvez aussi empoisonner la drogue stockée dans l'appartement si le cœur vous en dit.
Vous l'avez compris, la vie du « Roi de Chinatown » ne tient qu'à un fil. Le côté infiltration nécessite en revanche un peu de doigté. Il faut faire preuve de patience, d'observation, chercher dans le décor ce qui pourrait vous être utile et utiliser l'instinct de 47 à bon escient. Comme prévu, celui-ci se révèle particulièrement efficace. Trop ? Peut-être, même si c'est encore trop tôt pour l'affirmer. On peut en effet entendre des conversations au loin, voir à travers les murs, repérer sa cible facilement puisque celle-ci est mise en surbrillance mais aussi observer le chemin qu'elle va prendre grâce à une traînée de flammes indiquant son futur parcours. Ce dont on est sûr en revanche, c'est que le jeu comptera pas moins de cinq modes de difficulté : facile, normal, dur, expert et puriste. Plus vous choisirez un challenge élevé, moins il vous sera possible de vous reposer sur l'instinct de 47. Les ennemis seront a priori beaucoup plus vigilants quant à vos faits et gestes alors que les cibles auront des comportements plus complexes à décrypter.
Pour le moment, les seuls vrais problèmes que l'on a notés pendant notre session de jeu tiennent aux réactions de l'IA. Parfois, sortir la corde de piano de votre poche pendant deux secondes, par erreur, suffira à rendre la foule hystérique... Alors qu'à d'autres moments, trimballer un cadavre sur vingt mètres au milieu de tout le monde ne provoquera aucune réaction. Ces soucis de cohérence apparaissent aussi dans d'autres circonstances. Lorsque vous vous déguisez par exemple. Votre cible est incapable de reconnaître que quelque chose cloche chez vous en dépit du fait que vous n'avez ni la même carrure, ni les mêmes traits de visage que la personne pour qui vous essayez de vous faire passer. Un point qui brise malheureusement l'immersion du joueur et qui, on l'espère, sera réglé d'ici la sortie du jeu. Visuellement, si l'on met de côté des cinématiques absolument sublimes, Hitman : Absolution se montre vraiment convaincant sans être non plus une immense claque. Quelques textures imparfaites et animations peu naturelles, notamment lorsque 47 croise des personnes dans une foule compacte, nous rappellent d'ailleurs que le jeu ne sort qu'en novembre. D'ici là, IO Interactive aura le temps de peaufiner son jeu.
IO Interactive a fourni un énorme travail pour essayer de contenter tout le monde. Une démarche que certains jugent critiquable. Et ils n'ont pas tort sur le fond car la série perd, avec cet épisode, un peu de son âme. Mais elle gagne en échange une certaine souplesse. Le studio danois semble en plus avoir trouvé le juste équilibre. Malgré quelques incohérences, la partie infiltration se montre vraiment convaincante avec la possibilité de trouver de multiples manières (ludiques) d'assassiner sa cible. Côté action, le challenge s'avère plus corsé qu'on ne le croit, même si les nouvelles aptitudes de 47 lui permettent désormais de survivre face à une horde d'ennemis. Si les missions s'avèrent suffisamment variées et intéressantes, le jeu possède le potentiel pour réussir son pari, toucher un public massif. Pour les amoureux de longue de date du tueur à gages, le salut pourrait passer par les modes de difficulté les plus élevés, que l'on nous promet très pimentés.