Occidentaliser la licence afin de séduire un peu plus le marché européen et nord-américain, voilà le but avoué de Capcom, justifiant ainsi la nouvelle orientation prise par Resident Evil 6. Et c'est là que commence le plus dur pour cette saga légendaire : parvenir à augmenter le côté action de l'aventure tout en revenant à ce qui a contribué à son succès : le côté flippant. Une alchimie pas si évidente à trouver.
Peut-on décemment privilégier l'appel du profit au détriment de l'attente de fans qui vous suivent depuis de longues années ? Capcom va-t-il dénaturer son Resident Evil, prétextant que les ventes outre-Atlantique ne sont pas satisfaisantes ? Si cette question a pu être posée, provoquant un certain scepticisme, la présentation faite lors du Captivate à Rome, nous a partiellement rassurés. Oui, Resident Evil 6 sera encore une fois tourné vers l'action avec l'apparition de nouvelles features mais tout le côté horreur lui aussi, a subi quelques arrangements. Nos craintes fondées ont finalement fini par fondre au fil de la demi-heure passée à découvrir cet opus tout frais.
Adieu l'Afrique et son soleil harassant, RE6 change de continent pour atterrir en Asie, quelques années après les événements du cinquième volet. Pour l'heure, pas de détails sur l'environnement extérieur, la démo se déroulant entièrement dans un campus universitaire. Mais déjà, quelques infos sur le déroulement du scénario se dévoilent. Capcom, très attaché à ne pas laisser le joueur officier seul dans les méandres de l'horreur, reconduit le principe de l'aventure à deux. Ainsi, trois duos constitués de personnages illustres de la saga sont proposés : Chris Redfield - Pier Nivans ; Leon S. Kennedy - Helena Harper ; Jake Muller - Sherry Birkin. Si, pour diversifier un peu l'expérience, chaque équipe partira de points différents, on peut légitimement se poser deux questions : pour un opus qui se fend de proposer plus d'action et d'horreur, jouer seul n'aurait-il pas été préférable ? La présence d'un coéquipier, aussi sympathique soit-il, sera-t-elle plus efficace et moins pénalisante que dans RE5 ? Car, on s'en souvient tous, la belle Sheva arborait certes une plastique de rêve... Mais aussi, un bon vieux QI de haricot. Combien de fois cette imbécile s'est amusée à ramasser les pièges que vous veniez de poser consciencieusement! Un vrai boulet qui a considérablement altéré le plaisir de ce voyage en Afrique. Alors, pour cette escapade en Chine, nous n'avons plus qu'à prier que les autres n'aient pas été atteints par le syndrome de la bêtise.
Qu'il en soit ainsi, les duos se reforment, délaissant encore une fois le côté "seul contre tous" si stressant, mais tellement adapté au genre. Et finalement, si l'on espère que ces équipes déboucheront sur une bonne complicité au fil du temps, on est vite rattrapé par la réalité d'un univers qui laisse penser que deux, c'est bien mieux qu'un. Car, Capcom a bien tenu sa promesse, si RE6 optera pour plus de phases de combats, le côté horreur ne sera pas pour autant mis de côté. La preuve tient en un seul mot : J'avo. Si les zombies traînant la patte seront toujours de la partie, une nouvelle race fait son apparition. Comprenant le langage humain, étant capables de s'organiser en bande, les J'avo sont dotés d'une intelligence et de capacités physiques impressionnantes. Courir, sauter, se soigner, utiliser des armes... Oui, le macchabée s'humanise tout en gardant en lui son irrépressible désir de chair fraîche. Qu'est-ce que cela implique ? Forcément une technique de combat bien plus dynamique et des mouvements plus variés, comme la possibilité de se coucher et tirer, pour éviter jusqu'au bout un corps à corps sanglant. Ne vous inquiétez pas, si Capcom a légèrement revu son gameplay pour anticiper un danger plus oppressant, il n'a pas dénaturé pour autant le style Resident. Il ne sera pas question, par exemple, de glisser sur les tables dans le style Stranglehold ou réaliser des plongeons en bullet time comme Max Payne. Par petites retouches, les développeurs sont parvenus à faire monter crescendo et de consorts l'horreur et l'action, même si l'on peut reprocher que certaines séquences soient toujours trop prévisibles. Cette lumière qui s'éteint dans l'ascenseur alors que Chris est en compagnie d'une fille ayant été mordue.... Personne ne s'étonnera de se faire attaquer une fois le courant revenu. Une absence de surprise visible quelques secondes plus tard lorsque les portes s'ouvriront sur une horde de zombies certainement pressés d'aller boire un coup au lounge bar du 5ème étage.
On a eu peur mais finalement, ces quelques minutes passées avec Resident Evil 6 nous ont rassuré. Certes, le jeu se concentre plus vers les affrontements avec des séquences de combats plus rapprochées que dans le 5, mais l'horreur redevient palpable. Dans ces endroits clos jonglant entre ombre et lumière, ces grognements au loin, les sensations de stress perdues dans les précédents volets reviennent au galop. Tout cela débouche sur un mix concluant ne dénaturant pas la licence, parvenant à l'occidentaliser par petites touches bienvenues. Cette prise de risques ne devrait cependant pas offusquer les fans de la première heure et certainement séduire ce public que Capcom cherche à attraper dans ses filets.
Resident Evil avait, semble-t-il, oublié d'où il venait. Préférant l'action à l'horreur qui l'a rendue célèbre, la licence s'était écartée de sa mission première : nous faire peur. A défaut de retrouver les sensations de stress des premiers épisodes, RE6 manipule assez efficacement les ficelles des deux genres. Capcom fignole son jeu par petites touches, le rendant ainsi plus rythmé et immersif, même s'il ne parvient plus à nous faire sauter de notre chaise comme peut le faire aujourd'hui Dead Space.