Et après, on va dire que les petits Français d'Arkedo versent dans la psychopathie. En même temps, ça peut paraître normal lorsqu'on voit que le studio a troqué ses shoot'em up et autres casse-briques colorés pour Ash, un lapin totalement barré ayant une scie circulaire comme seule copine. Et autant dire que ce n'est pas pour couper du jambon en fines tranches.
Quelle réaction auriez-vous en découvrant que votre pire ennemi a posté sur le net des photos de vous en train de jouer comme un gosse dans votre bain avec un canard en plastique? Enervé sur le moment, vous auriez certainement tenté de les faire retirer en dialoguant avec votre interlocuteur. Ash, lui, ne fait pas preuve de la même diplomatie, ne se posant même pas la question. Ce lapin, prince des enfers, n'a qu'un seul mot à la bouche : la vengeance. Manger des pissenlits par la racine, voilà le seul menu qu'il réserve à Fat Rabbit, auteur de ces clichés compromettants. Mais avant d'en arriver là, le mammifère enragé devra dézinguer la horde de créatures se dressant devant sa chignole.
Nous n'avons pu jouer qu'au premier niveau, mais cela s'est révélé suffisant pour comprendre que l'on se trouvait devant un jeu totalement barré. Certes, Hell Yeah! n'est qu'un jeu d'action/plates-formes 2D, mais le style graphique choisi et le design du héros laissent déjà présager de futurs bons moments. Proche du genre BD, le titre d'Arkedo verse carrément dans l'overdose de couleurs flashy et des pancartes clignotantes genre fête foraine. Quant à Ash, il est évident qu'il n'a absolument rien à voir avec celui des chansons de Chantal Goya. Immenses yeux jaunes, flingue à la main, il est clair que ce dernier n'a pas vraiment peur des chasseurs et de leurs pétoires.
A pied avec son flingue ou dans sa scie circulaire qui lui sert de foreuse et de découpeuse, Ash va ainsi traverser des niveaux, déchiquetant ennemis en tout genre dans un bain d'hémoglobine frôlant à chaque fois la surenchère. Mais c'est bien le délire de ce jeu. On ne se prend pas au sérieux et ça marche. Comment penser autrement lorsque les bumpers classiques sont ici représentés par une paire de fesses bien dodues ? Comment s'imaginer être dans une création banale, lorsque qu'on croise une cyclope infirmière vêtue d'une tenue sexy, prête à vous regonfler votre barre de vie ? Enfin, comment ne pas voir les inspirations très "Wario Ware" lorsque Ash affronte des mini-boss peu retors. Car on le comprend vite, la difficulté n'est pas le cœur de ces combats-là. Passer deux heures à taillader un boss n'est pas le but du délire. En deux secondes c'est plié sauf...qu'il faut l'achever. et c'est là que le challenge arrive, se traduisant aussi bien par un défi de timing qu'une question-réponse bien loin de celle de Jean-Pierre Foucault. Et dans le genre débile, on a été obligé de répondre à cette question loufoque : "quelle est la durée de vie d'un lapin mort ? "... 1, 5, 10 ans ? et non la réponse est "WTF"... traduisez "on en a rien à faire"...
C'est donc acté, Hell Yeah! c'est du grand n'importe quoi parfaitement maîtrisé... ou presque. Côté direction artistique, rien à dire. Fortement inspiré par le style gore d'Itchy et Scratchy (série TV préférée de Bart Simpson dans laquelle un chat et une souris tentent de trouver le meilleur moyen de se mutiler), tout est œuvré pour plonger le joueur dans un monde totalement déjanté où le sang est monnaie courante. Dans le même temps, le niveau volcanique auquel nous avons joué, abat parfaitement la carte de la simplicité bourrée de détails "politiquement incorrects". On peut également relever l'absurdité des objets à débloquer, entre casque de foot US et la fameuse bouée en forme de canard... aussi inutiles que marrants. En revanche, là où le bât blesse, c'est l'inertie de Ash et du manque de contrôle que l'on peut parfois ressentir lors d'un saut. Emporté par son élan, Ash n'atterrit pas systématiquement là où on le voudrait. Une gêne certes qui n'altère pas ces moments passés à découper des monstres à la chaîne. Pas de quoi nous refroidir donc et dire "oui je le veux" lorsque les membres d'Arkedo demandent si on est prêt à passer une grosse dizaine d'heures en compagnie d'un lapin "plus que crétin".
Un petit défaut d'inertie ne saurait découper en rondelles le formidable travail artistique d' Arkedo. Le parti pris du gore et du délire à outrance fonctionne à merveille. Et on n'a vu que le premier niveau ! Une production française de qualité qui ne demande aucune qualité de gamers mais plutôt celle de joueurs à l'humour décalé, pour qui découper des monstres à la scie paraît tout à fait normal. La formation en boucherie n'étant pas recommandée, le poste est à pourvoir pour tous.