O toi, joueur inhumain que rien ne peut effrayer. O toi, masochiste dans l'âme qu'aucun challenge ne peut affecter. Tu as soif de leveling intensif et de morts intempestives ? Alors un nouveau défi t'attend de pied ferme ! Seras-tu capable de venir à bout de The 7th Saga, l'un des jeux de rôle les plus difficiles de sa génération ?
Il faut bien reconnaître qu'au fil des années, les jeux vidéo ont nettement perdu de leur difficulté. Dans les années 90, il n'était pas rare de tomber sur des jeux vraiment éprouvants, voire carrément inhumains pour un joueur d'aujourd'hui. The 7th Saga (également connu sous le nom de Elnard) est le parfait exemple du jeu hardcore par excellence, un condensé de tout ce qui peut rendre fou le premier mortel qui aurait l'audace de s'atteler à un tel jeu de rôle. Mais avant de voir ça de plus près, passons tout d'abord par la case scénario. The 7th Saga vous propose d'incarner un personnage parmi une liste de sept, avec chacun une race et un style de combat particulier. On mentionnera pêle-mêle le soldat humain, le guerrier nain, l'elfe magicienne ou encore un alien. Quoi qu'il advienne, ces sept protagonistes font partie intégrante de l'histoire et vous êtes amené durant le jeu à vous croiser régulièrement. Car tous ont finalement un but commun. Le roi Lemele a en effet formé chacun d'eux dans le but de récupérer sept runes magiques dispersées dans le monde. Une fois réunies, il est dit que ces runes octroient à leur possesseur une puissance démesurée. Autrement dit, vous devez partir en chasse à travers le royaume afin de débusquer ces fameuses runes... avant les autres.
L'histoire est assez bateau, les différents personnages sont dénués de personnalité spécifique (comme dans beaucoup de production d'Enix) et vous vous doutez bien qu'au final un vilain Boss vous attendra au tournant. Cependant, bien que votre voyage s'annonce extrêmement classique, le jeu a le mérite de proposer un univers médiéval extrêmement bien ficelé et cohérent. D'habitude, les villes sont de vulgaires points de passage que l'on oublie ensuite complètement. Ici au contraire, chaque ville possède un rôle plus ou moins utile tout au long du parcours. Elles sont pour ainsi dire connectées entre elles. Il n'est pas rare de croiser par exemple un habitant qui vous parle de son fils exerçant tel métier dans telle ville. Puis de retrouver en effet ce fils dans ladite ville, qui parlera à son tour de son père ou donnera des infos en tout genre. Ces différents liens familiaux ont donc un rôle intéressant en termes d'immersion, ce qui rend tout de suite le royaume à la fois plus vivant et surtout homogène. De plus, la trame scénaristique semble très convenue mais n'est pas exempte de rebondissements divers. Et autant dire que c'est parfois un pur régal de subir ce genre de retournement de situation vu que le jeu reste très répétitif et classique la plupart du temps.
Mais il y a un point encore plus important et qui joue un rôle vraiment prédominant dans l'intérêt du jeu, ce sont les six autres aventuriers que vous croiserez tout au long de votre périple. Ne perdez pas de vue que votre quête est censée vous mener au pouvoir ultime, en conséquence tout le monde essaye de se tirer dans les pattes pour parvenir à ses fins. Ou du moins, une bonne partie d'entre eux car ces aventuriers ne sont pas tous à loger à la même enseigne. Il y a ceux qui peinent à avancer et qui ne demandent qu'à vous rejoindre pour effectuer cette quête à deux – vous contrôlez par la suite cet aventurier en plus du vôtre durant les combats. Il y a aussi ceux qui trouvent que vous avez un niveau trop bas pour se soucier de vous. Ou à l'inverse ceux qui vous jugent trop puissant et finissent par vous craindre et vous respecter. Et puis dernière catégorie, il y a ceux qui vous combattent sans crier gare. Cela débouche alors par un face-à-face très difficile, et dont l'issue influe sur la suite de l'aventure. Non pas sur le scénario même, mais plutôt sur votre avancée puisque vous perdez toutes les runes collectées en cas d'échec. Pour les récupérer, vous devez combattre de nouveau l'aventurier en question et le vaincre. Bien sûr, il est aussi tout à fait possible de ne pas se soucier des autres aventuriers. Mais sincèrement, on ne peut pas résister à l'envie de leur parler lorsqu'on les croise en cours d'aventure. Et encore moins lorsque ces derniers veulent avoir leur revanche sur un duel passé. De plus, à un moment ou à un autre certains posséderont eux aussi l'une des sept runes, synonyme donc de combats obligatoires. En outre, sachez qu'en fonction du personnage choisi au départ, les aventuriers qui souhaitent vous rejoindre ou vous attaquer ne sont pas les mêmes. On notera également certains dialogues qui diffèrent légèrement avec les PNJ.
Ces sept runes sont donc au cœur de l'intrigue. Afin de varier les plaisirs, il existe trois méthodes principales pour les récupérer. La plus basique consiste à traverser un donjon et terrasser le maître des lieux. La seconde a été mentionnée plus haut, il faut vaincre un autre aventurier. En ce qui concerne la troisième et dernière voie, il suffit simplement de rendre service à un PNJ important. Et pour être certain de ne pas louper ces runes, leur position est indiquée sur votre mini-carte par un cercle clignotant. D'ailleurs, cette carte est assez originale puisqu'elle fait surtout office de radar. Elle détecte en effet les ennemis à proximité, vous permettant ainsi d'anticiper les rencontres aléatoires sur la mappemonde ou les donjons. En retour, vous vous faites attaquer même quand vous êtes immobile. Notez que l'expérience acquise après un combat est divisée par deux si vous voyagez en compagnie d'un autre aventurier. Ce qui signifie donc de doubler le temps de jeu pour gagner un niveau chacun, facteur qui peut vite devenir rédhibitoire vu les longues phases de leveling par lesquelles vous devrez passer. Sachez toutefois que même en prenant le temps de monter le niveau de son ou ses personnages, le jeu reste toujours aussi difficile lors des affrontements. Pesez donc le pour et le contre avant d'enrôler un équipier car vous ne pourrez pas vous séparer d'un acolyte une fois recruté. Au mieux, vous pourrez juste le remplacer. Evidemment, il est préférable d'en choisir un dont les aptitudes complémentent les vôtres.
Pour en revenir aux runes, celles-ci ne possèdent pas seulement un rôle purement scénaristique, elles influent également sur le gameplay et peuvent être utilisées comme objets une fois acquises. La toute première rune permet par exemple de se téléporter dans les villes déjà visitées, ce qui est très utile durant tout le jeu. Pour les autres, elles apportent différents bonus défensifs ou offensifs une fois activées en combat. Loin d'être un quelconque gadget, vous comprendrez très vite leur importance face aux différents ennemis rencontrés. Chaque affrontement dans The 7th saga est en effet comparable à un calvaire sans nom. Au début, cette difficulté ne se ressent pas énormément. Il suffit de prendre quelques niveaux, et ça passe à peu près correctement. Mais le tout se corse très vite, surtout que chaque nouvelle zone tranche radicalement avec l'ancienne en termes de difficulté. Les ennemis tapent extrêmement forts, et surtout esquivent à tour de bras vos attaques et même vos magies. Et si vous croyez que posséder un équipement optimal limite la casse, ce n'est que pure utopie ! Même en possédant la dernière arme ou armure en vogue et en affichant un niveau plus que décent, vous mangerez très cher. Et ne comptez pas sur la fuite pour vous en sortir, elle ne marche que très rarement du premier coup. Alors dit ainsi, ça semble simplement frustrant. Mais en jeu il n'y a rien de plus rageant que de terminer enfin une zone, arriver dans une nouvelle dix fois plus dure et se faire battre juste devant la prochaine ville. Ce qui équivaut à un retour direct dans la précédente cité, avec tout le chemin à refaire et son argent divisé par 2. Voilà qui fait tout de suite moins sourire, surtout que les distances sont parfois très longues entre deux destinations. Le constat est encore pire au sein des donjons, puisque le level design est tortueux à souhait. A tel point qu'il est inutile d'essayer d'éviter les ennemis sur le radar. On se contente donc d'avancer péniblement en priant avoir suffisamment de consommables en stock. On passera sur le fait que les ennemis ne se privent pas non plus de vous empoisonner ou de vous pétrifier à l'envi, quand ils ne s'amusent pas à pomper votre vie ou votre magie, ou carrément de se soigner presque entièrement, voire même de ranimer un allié mort.
Fort heureusement, certaines idées de gameplay contrebalancent très légèrement cette difficulté. Les développeurs ont eu la brillante idée de redonner de l'intérêt à la notion de parer/défendre que l'on retrouve dans de nombreux jeux de rôle. Une commande trop peu utilisée en général vu qu'elle fait logiquement perdre un tour pour rien. Ici, le fait de se défendre durant un tour maximise la puissance d'attaque du tour suivant. En plus de ce bonus de dégâts, il faut impérativement et constamment porter sur soi des objets boostant la défense et l'attaque. C'est d'autant plus obligatoire pour venir à bout d'un Boss ou d'un ennemi très coriace. Ce sont pour ainsi dire les règles de survie du jeu, sans quoi il est impossible d'avancer. Il est en outre possible de remplacer ces objets par les runes une fois celles-ci acquises, très utiles lorsque l'on sait qu'on ne peut porter que 9 exemplaires d'un même objet, là où les runes s'utilisent à l'infini. De même, il ne faut pas hésiter à se munir d'un maximum de potions de magie et de soin. Les donjons sont réellement des dédales aux innombrables combats, la moindre faute se paye très lourdement. On mentionnera également que vos personnages sont capables d'esquiver les attaques par moments, ou de lancer des doubles attaques. La magie n'est en revanche que peu utilisée en dehors des sorts de soin. Les sorts offensifs ne font quant à eux que peu de dégâts en général. Résultat des comptes, on ne se risque pas à perdre bêtement un tour vu qu'il vaut mieux concentrer ses attaques en des coups ponctuels et ravageurs. Au jeu du quitte ou double, The 7th Saga fait très fort et le moindre faux pas durant un combat est clairement synonyme de retour à la case départ.
- Graphismes13/20
C'est quand même assez pauvre graphiquement, à la fois très cubique, flashy et sans réels jeux de lumière. Les sprites restent néanmoins très bien reproduits, même si les animations ne sont de leur côté pas transcendantes. Le mode 7 est également utilisé de façon intelligente, mais il a tendance à provoquer des ralentissements par moments.
- Jouabilité13/20
The 7th Saga souffre de sa difficulté complètement aberrante. Même le plus acharné des joueurs ne peut réellement éprouver de plaisir à enchaîner des combats aussi contraignants. Au niveau de l'interface, elle est reprise des Dragon Quest. Il faut donc passer par un menu pour effectuer toutes les actions, ce qui reste très fastidieux. Néanmoins, le fait de voir les ennemis sur un radar reste quand même la petite innovation intéressante du titre.
- Durée de vie12/20
Théoriquement, l'aventure se termine en une quinzaine d'heures. Mais en pratique, vous pouvez aisément multiplier par quatre cette durée de vie vu le leveling obligatoire que vous êtes amené à faire. Sous réserve évidemment que vous n'abandonniez pas avant. Pour le reste, c'est très classique. Vous alternez votre quête entre villes, donjons et exploration. On ne dénombre aucune quête annexe à côté, mais il y a quand même certaines zones optionnelles à dénicher.
- Bande son14/20
Les musiques sont tout à fait correctes mais n'ont rien d'extraordinaire. Elles parviennent quand même à donner un côté épique et prenant aux combats les plus ardus. Certains bruitages sont par contre assez énervants.
- Scénario14/20
Le jeu est très linéaire durant une grosse partie de l'aventure. Votre but est de débusquer les sept runes, et mis à part la surprise de croiser les autres aventuriers au gré de votre périple, il n'y a rien de franchement palpitant dans cette quête. Il faut attendre la moitié du jeu pour voir surgir quelques petits rebondissements fort sympathiques, et quasiment la fin pour de plus grosses révélations.
The 7th Saga est un jeu de rôle on ne peut plus classique. Le titre possède cependant une certaine âme grâce à des idées propres et un monde vraiment cohérent. Malheureusement, de par sa difficulté exacerbée et son manque de rythme, le jeu devient vite lassant. Au point qu'on préfère largement jeter l'éponge par manque d'intérêt en dépit d'un final pourtant réussi.