Les adorateurs du Monopoly en sont ravis : Course à la Fortune vous permet de jouer les fous de l'immobilier en pariant à tout-va sur l'inflation des prix. Ruiner vos adversaires et vous remplir les poches avec un rire démoniaque fait partie de vos lubies ? Voilà une bonne occasion de frimer.
Si le nom Course à la Fortune ne vous dit rien, sachez pourtant que nous sommes devant le septième épisode d'une série très connue au Japon (en content l'opus mobile). Le premier "Itadaki Street", nom original, était sorti sur Famicom en 1991 ! Il aura donc fallu plus de 20 ans pour voir le concept traverser les frontières et atterrir dans nos doux logis. Le concept justement, parlons-en. Quatre personnages se déplacent sur un plateau grâce à un vulgaire lancer de dé. En s'arrêtant sur les bonnes cases, le joueur peut acheter des boutiques, obligeant ceux qui tombent dessus à lui payer des sous. Et là, vous vous dites : "Diantre, mais c'est le Monopoly !". Vous n'avez pas totalement tort.
En effet, Course à la Fortune s'inspire énormément du maître des jeux de société. Mais ce n'est pas pour autant qu'il ne possède pas ses propres caractéristiques. Car bien qu'il soit aussi possible d'investir dans les propriétés acquises pour faire monter les factures des adversaires, tout se complique quand on découvre le système d'action, et donc, de spéculation. Pour faire simple, le plateau est divisé en quartiers pour lesquels vous pouvez acheter des actions. Plus les joueurs investissent dans les boutiques de la zone, plus le prix de l'action grimpe, parfois de façon exponentielle. Donc, pour les plus malins, si vous avez acheté 40 actions à 10 Ors l'unité et que l'action en vaut maintenant 30, vous avez triplé vos bénéfices. Malheureusement, tout n'est pas toujours si simple, et vous pouvez très bien mettre toutes vos billes dans un quartier qui va ensuite être dévalué, perdant ainsi beaucoup d'argent. A vous de faire les bons choix, en sachant que vous ne pouvez acheter des actions qu'en passant à la banque ou sur des cases bien précises.
Car l'un des principes de base des jeux de plateau, c'est que le hasard se mêle souvent des affaires. En effet, en plus des boutiques, d'autres cases viennent jouer avec votre portefeuille. Par exemple, vous avez les cases Couleur (Trèfle, Carreau, Pique, Coeur) qui ont une grosse importance pour vos finances. Si vous passez par les quatre, il vous suffit de revenir à la banque (vous ne devez pas nécessairement vous y arrêter) pour toucher un salaire fort bienvenu. La banque, justement, est un passage obligé pour gagner la partie. Car outre le salaire et la possibilité d'y acheter des actions, c'est ici que vous devrez vous rendre une fois les prérequis de victoire atteints. Les prérequis en question sont plutôt faciles à comprendre puisqu'il suffit d'obtenir une somme de biens indiquée en début de partie, ce qui inclut vos liquidités, et la valeur de vos actions et de vos boutiques. Pour revenir aux cases présentes sur tous les plateaux, vous avez accès à divers jeux de chances qui auront souvent une répercussion directe sur votre capital. Ca peut être un gain de quelques Ors comme une baisse de la valeur des boutiques d'un quartier, des actions offertes ou encore la possibilité d'acheter la propriété d'un autre joueur à bas prix, mais aussi quelques malus sournois. Les cas divers sont trop nombreux pour être cités de façon exhaustive.
Dès votre première partie, vous comprendrez rapidement que l'un des points primordiaux d'Itadaki Street consiste à acheter plusieurs boutiques dans un même quartier. En effet, si vous faites ainsi, non seulement vous augmentez la valeur de chacune des boutiques, mais vous boostez aussi le montant que vous pouvez investir dans chacune d'elles pour faire exploser les compteurs. Si vous avez été assez malin pour acheter des actions dans le quartier en question, c'est tout simplement le jackpot. Ainsi, avoir quatre boutiques dans un même quartier peut faire monter les prix de façon exponentielle, obligeant un joueur à payer 4000 Ors s'il s'arrête sur une de vos cases là où il n'aurait payer que 100 Ors en début de partie. Quand on sait qu'une action à 7 Ors peut parfois monter à 60 Ors en quelques tours si tout s'agence bien, vous comprenez soudain l'importance d'un bon investissement. Puisqu'il est possible à chaque début de tour d'essayer d'acheter (ou d'échanger) les boutiques de vos adverses via négociations, vous pouvez toujours tenter de réunir vos acquisitions. Toutefois, la chance a toujours son mot à dire puisque le seul moyen d'investir dans la boutique de votre choix et de tomber sur un de vos établissements (n'importe lequel), après un lancer de dé. Et vu le nombre de cases annexes, ce n'est pas toujours facile, et ceci malgré les nombreux embranchements qui laissent le choix entre deux directions.
Justement, puisqu'on en parle, ce facteur chance est un élément important de Course à la Fortune qu'il va falloir aborder, et pas nécessairement en bien. Car si le principe de base laisse entrevoir énormément de stratégie, on se rend vite compte que même le plus grand des promoteurs immobiliers a autant de chance de se faire plumer de façon sévère par Anaïs, sa petite cousine de 7 ans. Déjà, en début de partie, vous croiserez les doigts en espérant tomber sur les boutiques, et si possible, bien placée. Car une fois qu'un adversaire a mis la main dessus, il n'est pas près de vous lâcher la poule aux oeufs d'or aussi facilement. Même si vous pouvez forcer la vente en tombant sur sa case (après avoir payé la facture habituelle), il faudra toutefois débourser cinq fois la valeur du bâtiment pour y parvenir, ce qui est très compliqué à financer. Quand au système d'actions, même le plus brutal des primates comprend rapidement qu'il faut mettre ses deniers dans les quartiers bien placés (souvent près des banques, même si ce n'est pas toujours le cas), ou dans un coin ou un même joueur possède plusieurs boutiques, décuplant ainsi l'effet de ses futurs investissements. Du coup, si tout le monde devine ce qu'il faut faire pour gagner, Course à la Fortune devient un simple jeu de "qui le fera en premier ?", ce qui dépendra presque exclusivement de vos coups de dés.
Malheureusement, si ce côté aléatoire aurait pu sembler assez inhérent au genre, il devient rapidement dramatique dans Course à la Fortune. Quand tout l'intérêt tourne autour de la spéculation, se retrouver dans l'incapacité de faire quoi que ce soit parce que les dés en ont décidé autrement a de quoi en exaspérer plus d'un. A l'inverse, lorsque par chance, vous obtenez trois des quatre boutiques d'un même quartier dès le début, vous voilà en route vers une victoire quasiment assurée et sans aucune saveur, d'autant plus dommage quand on sait qu'il faut plus de deux heures pour finir une partie ! D'ailleurs, il s'agit là d'un autre écueil que l'on pourrait imputer à cet épisode, qui navre par sa lenteur même en réglant la vitesse au maximum dans les options. Il aurait fallu virer à la truelle les nombreuses bulles de confirmation à chaque tour freinant énormément la cadence d'un jeu qui possédait déjà des tendances à la répétitivité inévitables de par la nature de son concept. Quand on vous demande si vous voulez investir dans une de vos boutiques pour finalement vous dire que vous ne pouvez pas, vous riez jaune. Surtout que ces bêtises sont bien trop présentes.
D'ailleurs, ce manque nuisible de fignolage se ressent aussi d'un point de vue visuel. On veut bien que le genre ne se prête pas à l'éblouissement, mais cela reste moche, et l'un des seuls intérêts pour nos yeux tient en la présence des personnages des séries Mario et Dragon Quest et de leur univers respectif. Autrement, on s'en sort avec un plateau bien mal représenté qui manque cruellement de lisibilité, surtout quand on veut différencier les quartiers ou les appartenances de chaque boutique en un coup d'oeil. Cela n'est pas nécessairement mieux d'un point de vue sonore puisque chaque plateau vous lance son thème en boucle pendant toute la partie. Oh, excusez-moi, vous ai-je dit qu'une partie durait souvent plus de deux heures ? Enfin, sachez que Course à la Fortune n'a absolument aucun intérêt si vous jouez contre l'ordinateur, l'IA ayant une forte tendance à tricher honteusement et ceci quasiment à chaque tour, une drôle de façon de gérer la difficulté. Si le multi en ligne est alors bienvenu, il va falloir prier très fort pour que la partie arrive à son terme sans qu'aucun des joueurs ne se fasse déconnecter (ou décide de se barrer parce qu'il sent venir la défaite), ruinant ainsi tous vos efforts. Oh, excusez-moi, vous ai-je dit qu'une partie durait souvent... Ah oui, je vous l'ai dit.
Nous voilà donc forcément navrés devant Course à la Fortune, qui faisait aussi l'effort de proposer un mode multi jouable à quatre avec une seule Wiimote ainsi qu'un mode Circuit où l'on pouvait débloquer des personnages, des plateaux, mais aussi tout un tas de goodies sympas. Par contre, on oubliera vite le mode "Règles faciles" qui enlève tout l'intérêt du titre en virant l'aspect spéculation. Au final, on se retrouve en face d'un soft au potentiel énorme mais qui reste inexploité à cause d'un aspect trop aléatoire, de la lenteur (et longueur) de ses parties et d'un mode en ligne bien trop précaire pour s'assurer de trouver régulièrement de vrais adversaires, autres que ceux gérés par une intelligence artificielle complètement bidon. Les plus patients et les moins nerveux peuvent tout de même s'y essayer.
- Graphismes8/20
Le strict minimum. On veut bien être sur un jeu de plateau, mais on aurait aimés quelques animations supplémentaires, ou un réel impact de l'environnement sur ce qui se passe dans la partie. Là, on nous colle de l'univers Mario et Dragon Quest par-ci par-là, mais surtout en fond, ainsi qu'une lisibilité loin d'être optimale.
- Jouabilité13/20
Il n'y a rien à dire sur le concept de base, alléchant. La gestion des actions et des investissements est un petit régal et parvenir à ses fins contre l'adversité a ses petits côtés grisants. Malheureusement, il est parfois très difficile de déjouer l'aspect aléatoire et les parties manquent de pêche, principalement à cause de la réalisation. Proposer une IA convenable n'aurait pas été un luxe non plus, d'autant que les parties en ligne se soldent très souvent par une déconnexion...
- Durée de vie14/20
Le principe des jeux de plateau, c'est qu'ils sont addictifs. En cela, Course à la Fortune n'est pas vraiment une surprise et vu la durée des parties, il vous faudra du temps pour terminer les 12 plateaux initiaux et ainsi débloquer le mode Special Tour. Comptez toutefois sur une famille (ou des amis) plutôt assidue(s) et une patience à toute épreuve pour tenir sur le très long terme.
- Bande son10/20
Si la qualité des thèmes n'est pas à remettre en cause, proposer une seule et même musique par plateau quand on sait qu'une partie dure souvent deux heures est tout simplement suicidaire.
- Scénario/
De prime abord, Course à la Fortune ressemble à une version hardcore du Monopoly. L'aspect spéculation a une très grande influence sur la partie, pouvant faire de vous un prince ou un mendiant en quelques tours. Malheureusement, les dés ont visiblement encore plus d'impact sur ce que vous faites et vous êtes régulièrement réduit à un rôle de spectateur de votre fulgurante victoire ou défaite. De plus, les parties auraient gagnées à être plus courtes en retirant les nombreuses bulles informatives (ou de confirmation) qui vous ralentissent. Bref, s'il est possible de s'y amuser, le titre de Square Enix rate un peu le coche.