Après avoir habilement relancé la série Need for Speed grâce à Hot Pursuit, EA remet le couvert douze mois plus tard avec The Run, qui emboîte son pas. Si l'opposition avec la police est moins frontale dans cet opus, les courses clandestines sont toujours au programme...
Need for Speed : The Run propose au joueur d'incarner un certain Jack Rourke, citoyen américain, qui, pour échapper à un destin de fugitif éternel, accepte de participer à une course sauvage balayant les Etats-Unis d'ouest en est. Nous vous laisserons d'ailleurs découvrir les tenants et les aboutissants de sa situation par vous-même bien que le scénario assez convenu n'a finalement que très peu d'importance ! Le principe est d'autant plus original qu'il entame l'épreuve au-delà de la 200ème position et doit dépasser les autres prétendants un à un, entre San Francisco et New York. L'architecture du "run" est donc assez singulière tout en demeurant dans les codes du genre puisqu'on retrouve des courses à checkpoints, des duels, des poursuites avec les forces de l'ordre, des remontées fantastiques, bref, tout ce qui fait le charme d'un NFS en bonne et due forme. Réutiliser une recette populaire en l'épiçant avec une quête aussi intense qu'improbable, tel est le credo d'EA Black Box avec Need For Speed : The Run. Alors, que doit-on retenir des 4 000 kilomètres de route à avaler goulûment dans ce nouvel opus ?
Tout d'abord que l'"aventure" est très linéaire. Votre place au classement général n'est en fait qu'un repère temporel puisqu'il est impossible d'aller plus vite que la musique. En effet, avant chaque étape, votre mission est d'atteindre un rang donné et même en allant très vite, vous ne pourrez grappiller deux ou trois places supplémentaires, scripts obligent. D'ailleurs, si quelque chose nous irrite particulièrement dans The Run, c'est cette impression d'être parfois plus spectateur qu'acteur de la course, soumis que nous sommes à l'évolution rigide du scénario. Ces scripts peuvent même finir par pourrir certains passages dont le duel final malheureusement. En soi, ce point noir ne nuit pas énormément à Need for Speed The Run qui, ne l'oublions pas, est avant tout un jeu de courses sans les prétentions de liberté qu'ont eu jadis les épisodes Underground ou Most Wanted pour ne citer qu'eux. The Run joue dans une autre cour, celle du grand spectacle et de la mise en scène avec des décors parfois interactifs et des environnements particulièrement variés, du centre-ville clinquant de Las Vegas au froid glacial des rocheuses en passant par la poussière de Desert Hills ou les autoroutes de Chicago. De toute évidence, cet épisode est le plus varié de la série en termes de lieux et univers visités. Ce qui ne veut pas pour autant dire que le profil des courses s'en ressent puisque The Run, de par son côté arcade, propose un gameplay uniforme, qu'importe le temps ou la surface.
Need for Speed The Run est un jeu extrêmement intense durant les 5 à 7 heures qu'il nécessite pour être bouclé, c'est court... Une impression de brièveté accentuée par l'affichage du temps total de votre run, ne dépassant pas 3 heures, ce qui exclut tous les moments morts ou les re-tentatives. Certaines mauvaises langues seront donc tentées de clamer haut et fort avoir terminé le titre en 2 heures et demie, ce qui sera inexact. Pour en revenir au gameplay, The Run joue beaucoup sur votre capacité d'adaptation, entre d'interminables voies rapides, piégées par un trafic qu'on aperçoit souvent au dernier moment, et des courses de côtes durant lesquelles la moindre erreur est fatale, le tout ponctué par des raccourcis indiqués sur la map à gauche de l'écran. The Run va donc parfois très vite, au-delà des 300 km, la sensation de vitesse étant d'ailleurs assez grisante, sans qu'on constate de perte de fluidité, exception faite de passages très isolés. Mais il peut devenir plus technique sur des routes sinueuses en montagne, conférant à la nitro un rôle insolite, celui qui permet à la voiture de conserver un maximum d'appui et de motricité en sortie de virage. Ces phases sont sans doute les plus sympas du jeu et on regrette qu'elles ne soient pas plus nombreuses. Comme on regrette que l'étape des rocheuses soit la seule à voir le décor se muer en immense piège, d'innombrables avalanches modifiant le tracé en continu jusqu'à ce que vous ayez atteint la ligne d'arrivée. Jouissif mais beaucoup trop court encore une fois !
Si votre mission est généralement de remonter une file de huit pilotes, d'en dépasser trois qui conduisent en équipe ou encore de remporter un duel face à l'un des favoris du run, le meilleur moyen de la réussir est de prendre tous les risques. Conduire à contresens, frôler le trafic, drifter ou enchaîner des sauts improbables permet en effet de gonfler la jauge de nitro pour ensuite en user et en abuser à chaque fois que l'occasion se présente. Le mécanisme est très classique mais somme toute efficace. En revanche, bien que présente à des moments clés du run, la police est une parodie de celle qui nous a bluffés dans Hot Pursuit. Non seulement les forces de l'ordre manquent d'agressivité mais surtout, se contentent de vulgaires barrages avec d'immenses trous et interviennent de façon beaucoup trop scriptée. On préfère largement les sprints nous opposant à d'autres prétendants bien qu'eux aussi soient parfois gâchés par un système de flash-back et de respawn totalement buggé. En effet, s'il est logique qu'un accident vous contraigne à utiliser un flash-back, sorte de joker qui vous permet de recommencer depuis le checkpoint précédent, on accepte mal qu'une petite embardée dans le bas-côté ou un virage un peu trop pris à la corde soient considérés comme des échecs déclenchant automatiquement un flash-back ! Le joueur est alors frustré par un mécanisme inhérent au jeu et de toute évidence complètement déséquilibré ! Garder vos quatre roues sur la route devient alors une obsession. Un véritable comble pour un titre aussi arcade.
The Run n'est donc pas parfait mais étrangement, tous ces petits problèmes ne suffisent pas à ce qu'on tourne le dos à un jeu qui remplit parallèlement tout à fait son rôle, celui d'enivrer le joueur, stimulé par des musiques qui finissent de vous presser, comme si votre vie en dépendait. Certes, il est souvent question de progression par l'échec mais la rejouabilité de The Run n'est pas contestable. Rien ne vous empêche alors d'améliorer vos temps ou de relever la cinquantaine de défis qui, il faut l'avouer, s'inspire un peu trop des étapes du run. Enfin, et même si ce n'est pas non plus une réussite, The Run comporte quelques phases d'action qui se concrétisent soit par des cinématiques interactives bourrées de QTE à la Heavy Rain, soit par des poursuites avec des hélico et des 4x4 blindés armés jusqu'aux dents. Dans les deux cas, on devine la volonté de dynamiser un peu la fuite de Jack mais le résultat n'est pas fameux, surtout dans le second cas.
En revanche, le multijoueur qui permet de son côté de défier jusqu'à sept autres humains est une véritable déception. Si trouver une partie est simple comme bonjour, c'est la pauvreté de l'offre qui pose problème. En effet, seules des séries de runs sans exotisme sont proposées ! Pas de modes dédiés, pas de police donc pas de duels entre fuyards et flics et au final, aucune différence de gameplay avec le solo. On est très loin de l'exhaustivité d'un Hot Pursuit. Certes, Autolog fait habilement le lien entre vous et vos amis, entraînant une sorte de chasse aux records permanente. Mais voilà, six séries de quelques courses c'est trop peu pour qu'une communauté s'emballe sur le long terme et on voit mal comment ce multijoueur pourra survivre à deux ou trois mois d'activité. Il comporte pourtant une originalité : la roue des bonus. Avant chaque session, celle-ci est lancée automatiquement et annonce aux participants la récompense que recevra le vainqueur du mini-championnat. Cela peut aller d'un simple pack d'images de profil à un énorme gain d'XP en passant par une nouvelle voiture. Evidemment, le vainqueur n'est pas le seul à être récompensé, tout un tas d'XP est distribuée selon vos performances, qu'elles aient un rapport ou non avec la liste d'objectifs qui vous sont fixés (par exemple, dépasser 3 pilotes en utilisant la nitro). Enfin, notez qu'il est possible de débloquer des objectifs de groupe en invitant des amis à rouler en coopération avec vous. Sympa mais pas suffisant à notre goût.
- Graphismes16/20
Malgré l'absence assez inexplicable d'une vue intérieure, The Run ne déçoit pas visuellement parlant. Le moteur Frosbite 2 remplit bien son rôle, le jeu étant quasiment toujours fluide en solo. La variété des décors est un plus indéniable, chose qu'on ne retrouve pas dans tous les Need for Speed.
- Jouabilité14/20
Le gameplay hyper arcade conviendra sans doute à ceux qui ont aimé Hot Pursuit. Toutefois, la police n'est pas au niveau et les flash-back, franchement pas au point, ne sont pas une trouvaille. Reste qu'on prend beaucoup de plaisir à conduire des voitures surpuissantes, que ce soit sur voies rapides ou sur routes sinueuses.
- Durée de vie12/20
Comptez entre 5 et 7 heures pour terminer le run. Ajoutez-y une cinquantaine de défis un peu redondants et un multijoueur assez succinct et vous obtenez une durée de vie n'excédant pas la dizaine d'heures de jeu. C'est une déception, malgré l'intensité évidente du soft et sa grosse rejouabilité.
- Bande son16/20
C'est sans doute l'un des points forts du titre puisque les musiques accompagnent magistralement la progression du pilote, lui-même au volant de bijoux rugissant avec une certaine crédibilité.
- Scénario/
Need for Speed : The Run est en quelque sorte le Battlefield des jeux de courses. Beau, spectaculaire, grisant par moments, il est plaisant à jouer et laisse un souvenir assez intense de courses plus variées que prévues. Malgré une frustrante linéarité et des scripts un peu trop nombreux, en dépit d'une police très timide et du système de flash-back peu convaincant, le jeu d'EA Black Box est une très bonne distraction pour les amateurs de courses arcades.