Odin, Loki ou encore les Valkyries. Des noms parfois croisés au détour de différents jeux mais aux origines souvent méconnues. C'est dans des contrées enneigées, au cœur d'une mythologie peu répandue, que Valkyrie Profile vous invite alors. Vous allez vivre un destin incroyable, un destin qui décidera du sort des hommes et des dieux. Vous allez vivre... le Ragnarok !
Bien plus qu'un simple jeu de rôle, Valkyrie Profile est avant tout un voyage initiatique au cœur de la mythologie nordique. Cette dernière reste assez méconnue du grand public, mais n'en demeure pas moins d'une incroyable richesse et réellement passionnante. Vous allez ici vivre un passage marquant de cette mythologie, à savoir le Ragnarok, la fameuse bataille de la fin du monde à laquelle aucun homme ni dieu ne peut échapper. Cette guerre se déroulera à Asgard, la terre des dieux, et opposera les Aesirs aux Vanirs. Afin de se préparer, Odin le principal membre des Aesirs, ordonne à la déesse Freya de réveiller Lenneth la Valkyrie. Vous incarnez ce mystérieux personnage et votre mission sera de séjourner sur Midgard, le monde d'en bas, afin de chercher des âmes humaines qui conviendraient pour la bataille finale. Après diverses recommandations, Freya se joint brièvement à vous pour vous expliquer comment dénicher ces futurs héros humains, appelés plus communément des Einherjars.
Le jeu conserve par la suite la même structure globale tout le long de votre aventure. Chacun des huit chapitres est introduit par Freya qui vous explique le type de guerriers dont Odin a besoin et les compétences qu'il doit posséder. Une fois noté, l'écran revient à Lenneth planant au-dessus du monde. De cette mappemonde, vous avez accès à la Concentration Spirituelle qui vous permet de localiser les villes où trouver vos futurs héros, ainsi que divers donjons alentours. La particularité majeure, c'est qu'il y a un facteur temps à prendre en compte durant votre périple. En effet, chaque chapitre se décompose en 24 périodes. Chaque fois que vous entreprenez une action sur la mappemonde (concentration spirituelle, entrer dans une ville, etc.), un certain nombre de périodes est décompté. Le chapitre se termine lorsque vous n'avez plus de périodes, ce qui sonne alors l'arrivée de Freya et l'annonce du chapitre suivant. Mais dans la majorité des cas et même en visitant toutes les villes et donjons du chapitre, il vous reste suffisamment de périodes pour parcourir de nouveaux les lieux de votre choix. Ce qui s'avère assez pratique si l'on désire retourner dans un donjon pour renforcer son équipe.
Présenté ainsi, le jeu semble très répétitif et ancré dans une certaine routine. Or, nous n'avons pas encore traité un point essentiel de Valkyrie Profile, à savoir sa scénarisation et tout le travail de narration réalisé autour. En effet, vos Einherjars ne sont pas de banals figurants dénués de personnalité que l'on va simplement croiser au détour d'une ruelle. Au contraire chaque arrivée en ville déclenche une mise en scène où l'on suit la vie de nos futurs héros, le joueur endossant alors le rôle de spectateur de leur funeste destinée. Leurs peurs, leurs espoirs, leur passé révélés au travers de nombreux flash-back amenant sur de nombreux regrets, ces Einherjars sont tout simplement dotés d'une humanité débordante de sincérité. De plus, beaucoup de liens existent entre eux durant leur vie de mortel, et celui qui semblait être un simple personnage annexe durant un chapitre n'est autre qu'une future âme à recruter quelques chapitres après. Tout cela forme un tout, une sorte de destinée commune empruntant d'innombrables chemins mais à l'arrivée identique. L'histoire en devient passionnante, car on finit par s'attacher à ces guerriers qui acceptent de suivre Lenneth motivés par le désir de rédemption ou par le rachat de leur honneur. De même, les donjons ne sont pas que de simples endroits où entrainer vos troupes. Soin leur a ainsi été apporté afin de donner de la vie à ces bâtisses délabrées, silencieuses et regorgeant de mystères. Même la présence d'un Boss en ces lieux est expliquée par quelques mises en scène, brèves mais à l'intérêt certain. Finalement, même si la structure répétitive du jeu est plus que perceptible, l'aventure prend une tournure tellement envoûtante qu'on se laisse tout simplement vivre aux côtés de Lenneth et de sa divine quête.
Lenneth, parlons-en. On nous la présente comme une juge des âmes dont la mission est de recruter des âmes courageuses, mais aussi de purifier des esprits corrompus au fin fond de divers donjons. En somme une banale servante d'Odin que l'on contrôle et qui nous sert de personnage principal. Mais au fur et à mesure de l'aventure, Lenneth révélera petit à petit sa véritable nature et son passé mis sous silence. Votre périple prend ainsi une nouvelle tournure, puisque l'intérêt du joueur n'est plus simplement accaparé par les Einherjars mais bien par les mystérieuses origines de la Valkyrie. Au même titre que le reste du jeu, le tout est superbement mis en scène pour un final grandiose. Du moins, si vous parvenez à débloquer la meilleure des fins car il existe en effet trois dénouements différents. Le premier, que l'on peut qualifier de « Game Over », se déroule si vous ne respectez pas les exigences de Freya en lui envoyant des recrues à chaque chapitre. La seconde fin, la fin normale, a lieu si vous terminez simplement le jeu. La dernière, et donc la meilleure des trois, se débloque en fonction de divers choix à faire à des moments clés de votre aventure. Soyons honnête, à part par le plus grand des hasards, vous pourrez difficilement deviner tout seul quelles actions sont à réaliser et surtout à quel moment. Néanmoins, une petite recherche sur le net vous permettra d'y remédier sans problèmes.
La scénarisation et la narration restent donc les atouts majeurs de Valkyrie Profile, mais elles ne s'arrêtent pas là. En effet, ne pensez pas ne plus avoir de nouvelles de vos Einherjars une fois envoyés auprès de Freya. Au contraire, cette dernière vous donne l'occasion de suivre leur pérégrination auprès des autres dieux, et cela via un écran relatant divers évènements se déroulant sur Asgard. Comparable à une fiche de suivi, vous pouvez ainsi sélectionner un des évènements et déclencher une séquence de dialogues ou bien un récapitulatif de bataille. Le côté jeu de rôle est ainsi on ne peut plus présent, et il est plaisant de pouvoir suivre nos héros alors même que nous ne pouvons plus interagir avec eux. Leurs actes sur Asgard durant le Ragnarok dépendent d'ailleurs du soin que vous avez accordé à leur évolution. En effet, comme vous le savez, Freya vous donne différents critères en chaque début de chapitre concernant le type de Einherjars qu'elle souhaite avoir, le but étant de coller au plus près possible à ses exigences. Si vous envoyez un héros qui n'a rien à voir avec ses souhaits, vous perdrez de l'influence auprès de la déesse ce qui peut à long terme vous amener sur la mauvaise fin du jeu. De même, un Einherjar mal évolué ne s'entendra pas forcément avec les dieux sur Asgard et pourra mourir durant une bataille.
La façon dont vous faites évoluer vos personnages joue donc un rôle très important. Son fonctionnement est d'ailleurs atypique dans le sens où la montée de votre niveau et de vos statistiques ne joue qu'un rôle secondaire. Tout l'intérêt est en fait porté sur l'apprentissage de différentes capacités nommés Skills. Elles sont globales à tous vos personnages et classées en différentes catégories. La majorité est à débusquer dans les donjons, et une fois en poche il suffit de les activer à partir de votre inventaire pour que tous vos personnages en bénéficient. Il ne reste plus après qu'à attribuer à vos skills des points de compétences que vous obtenez à chaque montée de niveau. Le principal intérêt étant ensuite de monter une certaine catégorie de skills en fonction des attentes de notre chère Freya qui ne cessera de vous chaperonner tout le long du jeu. Notez que vos points de capacités servent également à augmenter différents traits de personnalité qui ont aussi leur importance auprès de la déesse. Au final, cette gestion s'avère très intéressante dans le sens où on participe activement à l'évolution de nos recrues tout en veillant à combler du mieux possible les attentes des dieux.
Ces skills ont bien sûr aussi leur importance pendant les combats. Ces derniers se font au tour par tour en temps réel, simplement en pressant quatre touches de la manette qui renvoient chacune à l'un des quatre personnages de votre équipe. Le tout consiste à réaliser le meilleur enchainement d'attaque en pressant ses touches au bon moment. Vous allez ainsi remplir une jauge, qui une fois pleine permet de lancer une attaque surpuissante propre à chaque Einherjar. Si celle-ci remplit de nouveau la jauge, vous pouvez lancer à nouveau un super pouvoir avec le héros suivant et ainsi de suite. En outre, sachez que de l'arme équipée par vos personnages dépend le nombre d'attaque qu'il peut lancer. En d'autres termes, si une arme permet de lancer trois attaques, vous pouvez appuyer trois fois sur la touche du personnage concerné durant le même tour. Cela débouche sur des affrontements très excitants et assez nerveux, car le timing est très important. Et on se rend compte ainsi que marteler simplement les quatre touches sans se soucier des effets à l'écran est tout sauf pertinent. L'apprentissage des skills permet aussi d'agrémenter vos attaques de différents effets néfastes oude lancer automatiquement des compétences en début de chaque tour. Bon nombres de subtilités sont encore de la partie, comme les notions de contre ou de blocage pour ne citer qu'elles. A vous de découvrir et tester ensuite tout ceci en cours de jeu.
Les combats se déroulent exclusivement dans les donjons, et débutent lorsque vous entrez en contact avec un ennemi. Si vous préférez esquiver les affrontements, Lenneth possède un pouvoir spécial créant des blocs de glace et gelant vos adversaires quelques instants. Ces blocs possèdent d'ailleurs diverses propriétés, vous permettant par exemple d'atteindre des endroits inaccessibles ou de vous propulser dans les airs. En soi un accessoire on ne peut plus utile mais dont on se sert finalement trop peu. Les déplacements s'effectuent sur un décor en 2D mais la carte a été pensée pour des déplacements sur plusieurs plans, avec des portes accessibles d'une simple pression vers le haut ou le bas de votre manette. Cette impression de profondeur rend l'exploration vraiment plaisante, avec de nombreux coffres et monstres disséminés un peu partout sur votre chemin. Notez qu'il n'existe aucun magasin dans Valkyrie Profile, l'équipement et les objets se créent via un système de points. Ces derniers s'acquièrent principalement à la fin de chaque chapitre par le biais de Freya, ou en échange d'objets que vous possédez déjà. Au final, cette rareté de points combinée au nombre conséquent d'items que vous débloquez au fur et à mesure de votre avancée ne font que rendre la gestion de vos Einherjars encore plus complexe, réfléchie et surtout intéressante. Des adjectifs qui qualifient d'ailleurs Valkyrie Profile dans sa globalité.
- Graphismes18/20
Difficile de reprocher quoi que se soit sur le plan visuel. Le jeu se veut en 2D, mais quelques plans ou cinématiques en 3D viennent subtilement s'incorporer à l'univers déjà somptueux. Souvent sur trois plans, les décors eux ne cessent d'impressionner de par leur architecture et leur profondeur. Quant aux animations des personnages, elles sont un régal pour les yeux et participent pleinement à l'immersion durant les combats.
- Jouabilité17/20
Quatre touches d'actions, chacune exclusive à un personnage de votre équipe, et pourtant des possibilités de gameplay vraiment étonnantes. Ce qui s'annonce comme un simple bourrinage de touches se transforme bien vite en des phases de combat où le timing de vos attaques joue un rôle primordial. Le but est donc de réaliser des combos, et les différents skills qui s'apprennent à côté diversifient suffisamment l'approche des affrontements. En outre, les donjons apportent un réel défi sans pour autant lasser le joueur au travers d'innombrables combats ou d'énigmes trop tordues.
- Durée de vie16/20
La notion de durée de vie dans Valkyrie Profile reste assez subtile, puisque la majorité du jeu se compose de narration où le joueur est spectateur. Disons simplement que 20 à 30 heures sont nécessaires pour parcourir d'un bout à l'autre le soft, tentant de trouver un juste milieu entre les phases de narration et les phases actives dans les donjons. Niveau rejouabilité, l'envie de se replonger dans l'aventure reste bel et bien présente, que cela soit pour mieux cerner les relations entre les différents protagonistes ou tout simplement pour découvrir la seconde et vraie fin du jeu. Un donjon optionnel se débloque également une fois le jeu terminé.
- Bande son17/20
Composée par Motoi Sakuraba, à qui l'on doit notamment les musiques de Baten Kaitos et bien d'autres jeux encore, la bande-son est une nouvelle fois pleine de justesse et enivrante à souhait. L'immersion est totale, même si finalement il n'y pas tant de thèmes que cela et qu'ils reviennent donc assez souvent.
- Scénario18/20
Ancrer son récit dans la mythologie nordique est déjà un très gros travail en soi, tant celle-ci semble complexe et surtout assez méconnue du grand public. Mais la réelle force du jeu tient finalement dans le personnage de Lenneth, dont l'histoire personnelle est à même de susciter un réel émoi chez le joueur. Même si recruter des héros charismatiques pour le Ragnarok est vraiment une quête passionnante et prenante, connaître le passé de Lenneth reste le point d'orgue du jeu. Passer à côté serait tout bonnement un sacrilège.
Riche, beau, enivrant. Tellement de qualificatifs envisageables pour décrire un jeu comme Valkyrie Profile. Cependant, ne perdons pas de vue qu'il cible finalement une catégorie bien précise de joueurs. En effet, la narration tient une place énorme dans l'intérêt porté au jeu et les phases de gameplay se font souvent attendre. Le prologue par exemple dure une éternité, ce qui est un pur bonheur pour l'immersion mais risque de décourager les joueurs les moins patients. Il faut cependant être extrêmement difficile pour trouver de réels défauts à ce petit bijou.