Qu’est-ce qui est rond, qui se balade dans le ciel, et qui peut rouler sur les murs ? Si vous ne trouvez pas, c’est que vous êtes sûrement passé à côté du petit phénomène de Kula World. Sorti en 1998 sur Playstation 1, ce puzzle-game original est depuis tombé dans l’oubli le plus complet. Pourtant, il constitue toujours une expérience rafraîchissante et un véritable défi, qui s’adresse aux plus nostalgiques comme aux amateurs de casse-tête.
Le principe de Kula World est très simple : ramasser des clés dans un labyrinthe en 3D pour débloquer la sortie, et ainsi accéder au prochain tableau. Rien de plus classique. Oui, mais le ballon que nous incarnons a une particularité. Il est capable de se déplacer sur n'importe quelle surface des blocs qui constituent le labyrinthe : sol, mur ou plafond. En fait, rien ne distingue le haut du bas dans Kula World. Par exemple, si la balle roule en direction d'un « cul-de-sac » qui donne sur le vide, elle se déplacera désormais sur la face en contrebas, au mépris des lois de la gravité. Maintenant, imaginez à quoi peuvent bien ressembler les niveaux : des cuboïdes, autrement dit des assemblages de blocs qu'il semble impossible de parcourir. Mais ici, tout est possible, et un simple renversement de la gravité peut résoudre tous les problèmes. Que faire lorsque la sortie se trouve sur une plate-forme qui flotte dans les airs à quelques dizaines de mètres au loin ? Facile, il suffit de jouer avec l'optique et faire en sorte que la plate-forme soit « en dessous » de nous, avant de se laisser tomber.
Avec un concept pareil, il y a largement de quoi faire un jeu de réflexion passionnant, et force est de constater que le level design de ce Kula World est particulièrement réussi. Les niveaux s'enchaînent sans se répéter, la difficulté va crescendo, les solutions s'avèrent parfois très subtiles. De nouveaux éléments de gameplay viennent de temps en temps varier les tableaux. Au menu : des pièges de pointes, des plates-formes invisibles, des bumpers, des téléporteurs, des surfaces gelées, etc. Il serait trop long de tous les citer tant il en vient régulièrement tout au long des cent cinquante niveaux du mode principal. Ajoutons également que notre ballon est capable de sauter. Mais le titre n'est pas un jeu de plates-formes pour autant : chaque saut équivaut systématiquement à une distance de deux blocs, ce qui le rend facile à anticiper. Car Kula World est un jeu de réflexion pure, malgré les quelques passages basés sur le timing et les réflexes.
Graphiquement parlant, difficile de trouver le jeu vraiment « moche », même plus de dix ans après sa sortie. Il faut dire que les graphismes sont plutôt épurés. Des blocs lisses, un arrière-plan céleste, aucun détail pour fatiguer la rétine. On a tout de même droit à plusieurs environnements différents, synonymes de changement de textures, de bande sonore, et donc d'ambiance. Globalement, Kula World nous maintient dans une ambiance calme et envoûtante. Les tons changent, les couleurs sont variées, mais on reste dans le même registre simple et reposant tout au long du jeu. C'est ce qui fait tout le charme du titre : rien de bien transcendant certes, juste de quoi rendre l'aventure agréable, mais ça suffit amplement.
Enfin, ne vous attendez pas non plus à pouvoir jouer en dormant : les dédales de Kula World mettront votre sens de l'orientation à rude épreuve. Et même si les premiers niveaux sont une balade de santé, la difficulté s'envole rapidement. Pour cause : la caméra suivant le ballon, la perspective est renversée en même temps que la gravité, dès lors il suffit qu'un niveau soit un peu complexe pour qu'il soit extrêmement difficile de s'y repérer. La plupart du temps on se retrouve donc à avancer au hasard, à la recherche des clés nécessaires à notre victoire. Ce n'est pas un défaut, il faut seulement du temps pour comprendre comment appréhender correctement chaque niveau. Du temps justement, c'est précisément ce qui vous fera défaut, car chaque seconde qui passe vous rapproche de la fin du délai imparti. Le sablier qui fait office de timer vous le rappellera bien souvent… Eh oui, Kula World est un jeu parfois très frustrant. D'autant plus que les échecs sont souvent dus à une simple erreur de manipulation, un mauvais réflexe, ou un piège fourbe quasiment impossible à anticiper. Heureusement, dans ces cas-là, le jeu nous demandera seulement de reprendre au début du niveau.
Pour finir, parlons un peu des différents modes de jeu. Le mode Arcade est celui sur lequel vous passerez certainement le plus de temps. À la manière d'un jeu d'arcade, il s'agira d'enchaîner les niveaux tout en essayant d'accumuler le plus de points possibles. Car oui, on ne l'a pas encore abordé, mais Kula World est très orienté scoring : tout au long du jeu vous n'arrêterez pas de ramasser des pièces, des gemmes ou d'autres items comme des fruits. Dans chaque niveau est caché un fruit, une fois qu'on en a trouvé cinq, on accède à un niveau bonus, histoire de grappiller toujours plus de points. Outre le mode principal, il est également possible de s'essayer au mode Time Trial qui consiste à battre un certain temps global sur chaque monde (quinze niveaux) afin d'accéder au suivant. Ce mode est finalement moins contraignant, car il est possible de choisir le niveau et de le refaire autant que l'on veut jusqu'à le maîtriser suffisamment, là où le mode Arcade nous imposait un ordre dans le passage des niveaux. Puis enfin viennent les modes deux joueurs. L'un est basé sur le principe du Simon : le premier joueur effectue deux mouvements (avancer, sauter, pivoter…), puis le deuxième répète ces mouvements et en rajoute deux à la chorégraphie, et ainsi de suite jusqu'à ce que l'un des deux fasse une erreur. Le second mode est un Time Trial dans lequel chacun des deux joueurs jouent le même niveau l'un après l'autre pour que leurs temps soient comparés.
Que dire pour conclure ? Kula World est un jeu qui mérite qu'on s'y intéresse, que ce soit pour son concept original et ses dédales tortueux, ou tout simplement pour passer un moment reposant. Et bien que beaucoup de joueurs ne verront sans doute jamais la fin, il est toujours agréable de se replonger dans cette ambiance envoûtante, même après plusieurs mois voire plusieurs années d'oubli.
- Graphismes15/20
N’oublions pas qu’il s’agit d’un jeu de PS1. De toute façon il y a peu à contempler à part l’arrière-plan représentant le ciel et les blocs qui constituent le labyrinthe. Les cent cinquante niveaux du mode Arcade sont divisés en mondes, chaque monde proposant une texture de blocs différente, un ciel différent et une apparence différente pour le ballon. Il faut tout de même reconnaître que ces changements permettent de varier l’ambiance et l’expérience de jeu.
- Jouabilité18/20
Le concept est original, la prise en main immédiate. What else ? Évoluer à travers ces dédales géométriques où les lois terrestres n’ont pas cours est un vrai plaisir. Les déplacements peuvent peut-être paraître lourds (on pivote de quatre-vingt-dix degrés, on avance de case en case…), mais ils conviennent tout à fait à un jeu de pure réflexion. Soulignons aussi le level design très réussi, qui se renouvelle sans cesse sur les deux centaines de niveaux proposés.
- Durée de vie17/20
En additionnant les niveaux classiques, les niveaux bonus et quelques niveaux secrets bien cachés, on atteint le nombre stratosphérique de deux cent dix niveaux au total. Finir l’intégralité du jeu n’est clairement pas à la portée de tous. On pourra tout de même regretter qu’il soit impossible de choisir son niveau parmi ceux visités, le mode Arcade nous forçant à les enchaîner selon un ordre prédéterminé. Peut-être faut-il voir Kula World comme un jeu d’arcade, puisque c’est un peu comme ça qu’il se présente. Au final, le côté scoring du titre lui confère une certaine rejouabilité. Le mode Time Trial est également intéressant pour qui souhaite aller plus loin. Par contre les modes deux joueurs (Copycat et Time Trial) sont plutôt inutiles, au mieux sympathiques pour quelques minutes.
- Bande son15/20
La bande-son est à l’image des graphismes du jeu : agréable, mais sans plus. La musique aussi change entre les mondes, mais reste toujours assez discrète pour laisser le joueur concentré, et assez présente pour rendre l’expérience plaisante.
- Scénario/
Kula World est une petite perle d’inventivité, capable d’accrocher les joueurs les plus occasionnels, et de torturer l’esprit des plus doués. Si vous cherchez un jeu de réflexion addictif, ou si vous connaissiez le jeu sur Playstation et que la physique renversante de Kula World vous manque, sachez que le soft est désormais disponible sur le PSN pour moins de 5 €. Un prix généreux pour un jeu intelligent et enchanteur.