Des jeux de gestion, il y en a eu de tout temps portant sur à peu près tous les sujets possibles et imaginables, sur consoles ou PC. Un seul regard à la série des Tycoon et à ses myriades d'itérations dans tous les domaines possibles suffira à nous en convaincre. En fait jusqu'ici, un des seuls domaines qui n'avait jamais été abordé, et il faut bien avouer que c'est un comble, c'était le développement de jeux vidéo. Et c'est Kairosoft, studio japonais encore méconnu chez nous, qui s'est lancé dans cette grande aventure. Si vous rêviez de pouvoir créer vos propres jeux, d'être confrontés à la critique féroce des journaux spécialisés et de participer à des salons, alors Game Dev Story est sans aucun doute fait pour vous.
La première leçon que le jeu vous enseigne, c'est qu'être patron d'un studio de développement n'est pas chose aisée. Votre première tâche, et pas des moindres, sera de gérer les membres de votre équipe. Il faudra en effet choisir selon vos besoins qui embaucher, parmi toute une liste de personnages, ayant chacun des professions différentes (graphiste, ingénieur du son, scénariste, programmeur, etc.). Chaque personnage possède différentes caractéristiques qui influeront directement sur la qualité du jeu en développement. De plus, au fil du temps, vous aurez la possibilité de faire évoluer votre équipe en dépensant de l'argent et de la Recherche (que l'on récupère lors du développement d'un titre) ; ainsi votre staff sera capable de créer de meilleurs jeux, mais cela vous permettra aussi de débloquer de nouveaux genres ou types de softs.
Une fois l'équipe prête, le véritable travail commence : pour développer un titre, il faudra d'abord choisir sa plate-forme (PC ou console), son genre (RPG, simulation…) , et son type (robots, ninjas, pirates…). On remarque d'ailleurs que Game Dev Story possède une certaine logique : il est peu probable qu'un puzzle-game à base de Sumos soit très populaire en face d'un RPG fantasy. Une fois ces choix faits, c'est parti. Au fil du temps, et en fonction des compétences de vos employés, quatre jauges se remplissent, correspondant aux caractéristiques du jeu : fun, créativité, graphismes et son. Tout au long du processus, vous aurez plusieurs choix à effectuer : si un membre de l'équipe veut prendre des initiatives, le laisserez vous faire au risque d'augmenter le nombre de bugs ? Et qui s'occupera du scénario, du graphisme et du son ? Tous ces choix auront de l'influence sur l'avancement des quatre jauges, qui à leur tour, détermineront les notes que le jeu recevra de la part des critiques.
Les notes influent sur les ventes, mais permettent surtout au titre d'accéder au Hall of Fame si la moyenne globale atteint le 32/40. Vous aurez ainsi la possibilité de créer une suite à votre jeu, qui bénéficiant d'une célébrité certaine se vendra beaucoup plus. Car oui, faire de l'argent, c'est quand même le but, surtout que les occasions de le dépenser sont assez nombreuses : outre le coût de développement et les salaires de vos employés, on pourra citer l'achat de licences pour consoles, la publicité, l'achat de boosts divers ou le stand à la Gamedex (le salon qui permettra de faire votre promotion). La vie du studio sera rythmée par divers évènements réguliers - comme la paye des employés à la fin du mois de mars - ou aléatoires, comme la sortie d'un jeu concurrençant les ventes du vôtre. Il y a donc toujours un danger pour que l'on se retrouve à court d'argent, et dans l'obligation d'annuler un soft et d'accepter des contrats extérieurs pour renflouer les caisses.
Du moins au début, car une fois les premières difficultés passées, on se retrouve vite avec une caisse assez grosse pour se permettre pas mal de folie, comme engager une star pour faire de la promo ou s'offrir une publicité sur la lune. A partir de ce moment là, la plupart des jeux iront tout droit dans la Hall of Fame, et seront tous des million-sellers. Game Dev Story perd donc une partie de son challenge au bout de quelques heures, mais un défi supplémentaire rallonge sa durée de vie : chaque année, vos meilleurs jeux sont mis en compétition avec d'autres titres pour remporter diverses récompenses comme la meilleure musique, le jeu le plus beau, mais surtout le Saint-Graal du Jeu Vidéo : Le prix du jeu de l'année. Pour y arriver, il faudra créer des jeux d'une qualité exceptionnelle, et il n'est pas rare que des titres pourtant très bien notés se fassent voler la vedette par The Legend of Helga ou Last Fantasy, dont on reconnaît immédiatement les inspirations.
Des petits clins d'œil et traits d'humour de ce genre, on en retrouve disséminés un peu partout. On se retrouve donc à sourire bêtement devant son écran lorsqu'on découvre comment les développeurs de Kairosoft ont renommé les consoles et les jeux, ou lorsqu'un singe ou un roi du pétrole se présente à l'entretien d'embauche. Les noms des employés prêtent aussi à sourire, contenant souvent des jeux de mots assez peu subtils tels Ann Deroid ou Walt Sidney.
L'ambiance du jeu est donc un peu déjantée, et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela colle bien avec l'esthétique globale. Graphiquement, on se trouve en plein dans l'ère du 8-bit, avec une ambiance pixel art très colorée. Les seuls environnements que l'on voit en règle générale sont ceux des locaux du studio, assez grands pour tenir sur un écran : on voit donc les personnages travailler sur leurs ordinateurs et s'enflammer quand l'inspiration leur vient, bailler, et se lever pour discuter ou rentrer chez eux. Le tout donne une impression de vie au studio, ce qui au final est extrêmement plaisant. Côté musique, là aussi, on donne dans le 8-bit. Cependant, si les graphismes simples rendent Game Dev Story agréable et fluide, les rares thèmes musicaux présents, bien que très sympathiques les premières minutes, ont une fâcheuse tendance à se répéter et à se mêler avec les quelques bruitages du jeu. Le résultat est rapidement très crispant, et on choisira le plus souvent de couper la musique, et d'utiliser sa propre bibliothèque si l'on veut une ambiance sonore.
En conclusion, Game Dev Story se révèle être extrêmement addictif, avec des mécanismes de gameplay nombreux, sans être forcément essentiels. On se surprend à s'investir dans le jeu, à se demander si « Love Pirate 4 » se vendra bien, ou si « Samurai Racing 2» remportera le prix du jeu de l'année. Ainsi il est fortement déconseillé de s'y essayer au bureau, sous peine de voir sa productivité réduite à néant au bout de quelques minutes seulement. Malgré les quelques défauts que présente le titre, et si les quelques euros demandés par Kairosoft peuvent rebuter au début, on se rend vite compte que Game Dev Story est un incontournable de l'App Store. Au final on ne peut se dire qu'une seule chose : vivement le 2.
- Graphismes14/20
Game Dev Story fait dans le simple et mignon. Les personnages sont tous différents et agréables à regarder, bien que peu détaillés, et les environnements sont décorés sans être trop surchargés. Au final, le rendu visuel est des plus plaisants. L'interface pour choisir ses actions est limpide, et permet de trouver ce que l'on veut en quelques secondes à peine.
- Jouabilité17/20
Un des points forts du titre. Le gameplay est accessible sans pour autant être simpliste, et il est possible d'accomplir des dizaines d'actions différentes, dont on peut dans certains cas ignorer l'existence pour plus de facilité. Le jeu souffre cependant d'un petit problème de répétitivité, puisqu'on ne fait qu'enchaîner les développements, mais on prend un certain plaisir à y revenir de temps en temps.
- Durée de vie15/20
Parcourir les 20 ans que dure une partie prend environ 7 ou 8 heures, mais le titre invite le joueur à continuer, pour tenter de créer de meilleurs jeux et d'en vendre toujours plus, malgré le fait qu'il n'y ait plus aucune sortie de console après cette date. Le classement en ligne incite aussi à recommencer plusieurs fois une partie pour tenter de battre les records de ses amis. Finalement, la durée de vie s'élève bien au dessus de ces 7 ou 8 heures.
- Bande son11/20
L'ensemble des musiques et autres sons est réalisé à partir de bruitages datant de l'ère du 8-bit. Si le résultat est agréable les premières minutes, la répétitivité des thèmes, leur faible nombre, et l'addition des bruitages produits par les personnages en travaillant rendent le tout un peu crispant. En bref, la bande- son est sympathique à faible dose.
- Scénario/
Un petit studio se lance dans le marché du jeu vidéo. C'est tout.
Game Dev Story est avant tout un jeu accessible à tous, que l'on soit néophyte ou professionnel du jeu de gestion. Avec son gameplay plus technique que les premiers instants de jeu le laissent paraître, et son faible prix, le titre de Kairosoft est une des pépites de l'App Store, dans la mesure où l'absence de version française n'est pas rédhibitoire.