Le Mal est immortel et revient quand on s'y attend le moins. Alma, elle, mettait déjà les pendules à l'heure en 2006 en affichant sa volonté de réduire le monde à l'état de cendres. Cinq ans plus tard, la turbulente fillette n'a pas lâché un pouce de terrain et se montre même plus véhémente que jamais. L'ambiance devient dès lors apocalyptique tout en étant synonyme de troisième épisode plus énergique. Pour autant, John Carpenter est là pour assurer une certaine respectabilité au scénario mais le résultat est-il finalement à la hauteur ? Les lignes ci-dessous vous livrent quelques clés pour vous permettre d'y voir plus clair.
A la base, F.E.A.R. fut pensé comme un juste équilibre entre survival-horror et FPS pur et dur. Sur ce plan, les p'tits gars de Monolith s'en étaient brillamment sortis et ce malgré les quelques défauts émaillant l'oeuvre. Une fois mis en place les protagonistes, l'intrigue et les enjeux, les équipes de production purent faire parler leurs bas instincts via un deuxième épisode bien plus orienté action. Nerveuse, rythmée et s'appuyant sur une mise en scène efficace, la franchise vécut de beaux jours à l'inverse des personnages de l'histoire condamnés à courir encore et encore pour arrêter Alma et les équipes d'Armacham. Fort logiquement, F.3.A.R. emprunte un chemin similaire en maximisant sur le gore et les gunfights plus musclés que jamais. Si on déplorera que Day : 1 : Studios ait quelque peu occulté ce qui faisait de F.E.A.R. une série si atypique, le résultat se montre néanmoins à la hauteur de ses aïeuls sur bien des points et ce grâce à plusieurs ajouts.
Toutefois, il convient d'entrée de jeu de minimiser l'apport du génial John Carpenter. En effet, si le célèbre metteur en scène a apposé son nom sur le produit, il est frustrant, très frustrant même, de constater que son ombre ne plane pas vraiment au-dessus de nos têtes. Les fans y trouveront bien quelques clins d'oeil à certains de ses films ou des sonorités renvoyant aux musiques de ses oeuvres mais on ne sent pas véritablement, à quelque moment que ce soit, sa patte scénaristique ou son influence en termes de mise en scène. Pire, le jeu déçoit à ce niveau puisqu'Alma reste cette fois en retrait tout en étant bien évidemment toujours au centre de l'intrigue en grande inquisitrice de l'Armageddon à venir. A côté de ça, la relation entre Fettel et Point Man ne fait finalement pas vraiment avancer l'histoire. Au final, les liens du sang sont davantage mis en avant via le gameplay et les divers modes de jeu que par le biais de l'histoire.
En effet, si la campagne solo est une fois encore découpée en plusieurs chapitres (demandant chacun entre 30 et 50 minutes pour être bouclés), vous pourrez, une fois terminé l'un d'entre eux, le reprendre en incarnant Paxton Fettel. Précisons qu'il sera également possible de diriger le frangin dans le mode Coopératif. Mieux, il sera même possible de parcourir l'intégralité de la campagne avec un ami en online ou écran splitté. Dans ce cas, un joueur devra incarner Point Man alors que l'autre investira le corps de Paxton. En parlant de ça, sachez que les deux hommes disposeront de pouvoirs complémentaires. Ainsi, Point Man pourra ralentir le temps pendant que Fettel aura la possibilité de bloquer ses adversaires et de leur balancer des ondes de choc. Retenez toutefois que ce dernier ne disposera d'aucune arme. Pour pallier cette petite faiblesse, il devra alors grièvement blesser l'ennemi puis investir son corps afin de profiter de l'armement de son réceptacle. Enfin, si par malheur, le corps occupé venait à tomber, vous retrouveriez instantanément votre forme spectrale (elle-même vulnérable) et devriez recommencer la manoeuvre décrite plus avant. En somme, si l'idée de reprendre un niveau déjà terminé avec Fettel présente peu d'intérêt, on appréciera énormément la complémentarité des frérots en coop. D'autant plus vrai que l'IA se montre à la hauteur de celle des précédents opus et nous offre des scènes d'action pour le moins éprouvantes.
Il est d'ailleurs indéniable que la difficulté a été revue à la hausse pour ce F.3.A.R. et qu'elle dénote clairement d'une volonté de Day : 1 : Studios de mettre en avant leur mode coopératif. En effet, vous devrez cette fois être beaucoup plus prudent tant les ennemis font preuve de logique en campant sur leurs positions, en essayant de vous contourner ou de vous déloger en balançant des grenades à la pelle. On appréciera en sus le suivi sonore de nos déplacements par les soldats, ceci permettant une plus grande immersion. En effet, nos adversaires ne se priveront pas de faire moult commentaires sur leurs blessures, l'état de leur escadron ou de commenter la situation en criant à leurs camarades où l'on se trouve exactement. Bref, un gros travail a été effectué là-dessus et le résultat s'avère délectable. Ce qui l'est moins en revanche tient aux innombrables défis qu'on devra remplir durant les missions. Dans l'idée, une fois que vous en réussirez un (en faisant plusieurs headshots, en utilisant une arme bien précise...) ou établirez un lien psychique avec un cadavre, vous gagnerez des points. Ensuite, en atteignant des paliers, vous serez promu et obtiendrez des bonus de santé, un coup de pied glissé, etc. Intéressant sauf que tout ceci sera synthétisé à l'écran par des apparitions parasites sous forme d'informations nous renseignant sur notre avancée. Un peu agaçant à la longue surtout pour un jeu d'ambiance comme F.E.A.R.. Il convient cependant de minimiser cette gêne dans le sens où cet épisode assume complètement son aspect rentre-dedans dont le multijoueur se fait aussi le porte-parole.
Ceci se caractérise par deux modes de base et six maps fortement inspirées des environnements du mode solo. A ceci, vous pourrez rajouter six autres maps et deux modes supplémentaires sous forme de contenu téléchargeable offert avec chaque version packagée. Si d'emblée, on pourra être surpris que le tout ne supporte que 4 joueurs, on retombe assez vite sur nos pieds grâce à l'originalité (toute proportions mises à part) du tout. Ainsi, si Contractions n'est rien d'autre qu'un mode Survie dans lequel vous devrez éliminer des vagues d'ennemis tout en érigeant des barricades de fortune, Roi des âmes vous demandera quant à lui d'éliminer le plus d'ennemis possible, une fois incarné l'un d'entre eux, afin de récupérer des âmes, chaque mort vous enlevant la moitié de votre pécule. Restent Course Démente et Survivant d'âmes. Le premier vous demandera de rallier deux points en un temps limité en dessoudant des ennemis tout en faisant attention à la santé de vos compagnons, la mort de l'un d'entre-eux étant synonyme de game over. Survivant d'âmes permettra quant à lui d'incarner un membre de l'équipe F.E.A.R. qui, une fois décédé, renaîtra sous forme de spectre. Vous pourrez alors investir le corps d'un soldat d'Armacham et tenter d'éliminer vos propres camarades. Complémentaires, les modes ont aussi l'avantage de profiter de maps bien agencées permettant une action soutenue. Si on ne criera pas au génie, on ne pourra que saluer l'aspect multi du jeu accentuant un peu plus la dimension bourrine et dynamique du soft au détriment des frayeurs générées ou des sursauts pointant aux abonnés absents. Un peu paradoxal quand on songe à l'implication de Carpenter même si cet état de fait ne fera pas oublier les qualités intrinsèques de ce F.3.A.R.. Fils légitime de ses proches parents mais cherchant avant tout un moyen de s'émanciper en oubliant l'héritage légué, on peut toutefois se dire que la franchise n'aura jamais aussi mal porté son nom. Est-ce un bien ou un mal ? A vous de voir...
- Graphismes15/20
Techniquement parlant, F.3.A.R. accuse un peu le coup, du moins si on le compare aux grosses productions actuelles. Néanmoins, le titre compense ses carences visuelles grâce à des décors bien plus variés que dans les précédents opus, sa pléthore d'effets spéciaux (ralentis, sfx de particules, etc.), son aspect gore et ses plans apocalyptiques. En somme, l'action est tellement frénétique qu'on ne fera pas vraiment attention à ces textures un peu baveuses ou ce manque de finitions.
- Jouabilité16/20
Dans l'absolu, le gameplay de cet opus ne fait pas vraiment évoluer la série. Néanmoins, les développeurs ont tenté d'y apporter un peu de sang neuf (sans mauvais jeu de mots) en affublant cet épisode d'un aspect plus orienté «scoring» synonyme d'une kyrielle de défis à remplir durant les missions. Dommage que ça ne sied pas du tout à un jeu comme F.E.A.R., ceci rompant d'autant plus l'immersion. A côté de ça, les gunfights sont toujours aussi nerveux, l'IA est à nouveau à la hauteur et l'introduction d'un mode Coop, tout comme la possibilité d'incarner un Fettel, apportent un peu d'air frais à la franchise.
- Durée de vie14/20
La campagne solo est plus courte que celle de ses prédécesseurs mais le niveau de difficulté a été revu à la hausse. Notons également que le fait de débloquer Fettel, en tant que personnage jouable, ou d'opter pour le mode Coop (splitté ou online) augmente la longévité de l'ensemble. Enfin, les développeurs ont pris le temps de peaufiner leur multi et s'il n'est possible que d'y jouer à 4, les différents modes sont plus ou moins intéressants et ont le mérite d'être bien plus originaux que les sempiternels CTF ou King of the hill.
- Bande son16/20
Le doublage français est d'excellente facture et les nombreux commentaires des soldats lors des scènes d'action renforcent d'autant plus l'immersion. Il est tout de même regrettable et étrange que les séquences d'entre-missions aient simplement été sous-titrées. Les musiques restent un peu en retrait mais les amateurs de John Carpenter pourront reconnaître à certains moments son influence via des sonorités typiques de l'homme.
- Scénario11/20
Au vu de la participation de l'immense John Carpenter, on pouvait s'attendre à quelque chose de bien meilleur en termes de scénario ou de mise en scène. Le tout se contente malheureusement de suivre sans génie le synopsis des précédents volets en accentuant la dimension apocalyptique. Paradoxalement, si la «gamine» démoniaque reste plus que jamais au centre des événements, elle n'a jamais été autant en retrait que dans ce volet.
Si F.3.A.R. injecte un peu d'originalité dans la façon d'aborder la franchise, certaines idées tombent à plat. En effet, en ayant capitalisé sur un aspect «scoring», les développeurs ont d'autant plus atténué l'aspect viscéral propre au premier épisode. Cette évolution, dans la droite lignée de celle de F.E.A.R. 2 et couplée à une IA toujours aussi bonne, a tout de même le mérite d'apporter beaucoup de dynamisme aux gunfights. De plus, son mode Coop et son multi., limité à 4 joueurs mais plutôt original, finiront de rallonger la durée de vie. En définitive, on perd en immersion ce qu'on gagne en intensité. Certains aimeront, d'autres non, mais difficile de pointer du doigt le résultat final uniquement sur les bases d'un premier, et dans une certaine mesure d'un deuxième épisode, pensés différemment.