Indiana Jones et Le Temple Maudit. Harry Potter et La Chambre des Secrets. Le Seigneur des Anneaux : Les Deux Tours. Il semble qu'une bonne suite est une suite qui parvient à donner un gros coup de charbon à l'histoire initiale pour l'assombrir drastiquement. Prince of Persia suit à la lettre ce précepte. Fini les contes des mille et une nuits des Sables du Temps, place à un Prince gothique tout de cuir vêtu dans L'Ame du Guerrier. Plus dark, les bonnes suites sont aussi celles qui ne dénaturent pas le matériel initial. C'est là où Prince of Persia : L'Ame du Guerrier divise les joueurs.
Sorti un an après Les Sables du Temps, Prince of Persia : L'Ame du Guerrier se propose d'en poursuivre l'histoire. Sept années ont passé depuis l'incident des Sables, mais le Prince n'a toujours pas trouvé le repos. Il est dit que celui qui ouvre les Sables doit obligatoirement mourir. Or, le Prince est toujours en vie, bouleversant du coup l'ordre des choses. Depuis sept ans, une bête est aux trousses du Prince et le traque sans relâche pour lui imposer le sort qui lui était dû. Une seule solution semble s'offrir au Prince, trouver un moyen d'empêcher la création des Sables. Le raisonnement est simple : sans les Sables, pas de sablier. Sans sablier, pas de malédiction et donc pas de bête non plus. L'Ame du Guerrier nous entraîne alors sur l'Ile du Temps, là où l'Impératrice du Temps a jadis créé les Sables. Par plusieurs systèmes de téléporteurs temporels, le Prince pourra naviguer entre présent et passé et ultimement remplir son objectif.
Dès la première séquence de jeu, les changements apportés à cette suite sont flagrants. Même s'il n'a pas cassé de miroir, le Prince vient littéralement de passer sept ans de malheur, et ce laps de temps lui a permis d'aiguiser son côté guerrier. Bien moins naïf qu'auparavant, le héros est méconnaissable. Il se bat avec une rage et une violence plutôt déconcertante et c'est avec grande surprise que le joueur non averti verra rapidement voler la tête de l'un des ennemis – première décapitation d'une longue série. A la critique faite aux Sables du Temps sur la longueur excessive de ses combats, les développeurs tentent de répondre avec un système de jeu plus complet, mais aussi plus complexe. Tout un arbre de combos fait ici son apparition pour réaliser moult enchaînements dévastateurs et sanglants. Certaines combinaisons se montrent plus efficaces que d'autres, c'est vrai, mais au final, le nombre d'ennemis et leur résistance étirent toujours les affrontements plus que de raison. Toujours dans un esprit guerrier, cette suite introduit également un système d'arme secondaire à renouveler régulièrement au fur et à mesure de l'usure.
En combat, le Prince nous fait toujours profiter de ses talents d'acrobates, mais c'est lors des séquences de galipettes murales qu'il brille le plus. La composante plates-formes de la série est bien entendu de retour à un niveau probablement supérieur à celui du premier opus. Aux premier abord, l'Ile du Temps apparaît comme un immense dédale de couloirs et de pièges, mais par la magie d'un level design impeccable, chaque bout de décor trouve une raison d'être. Chaque corniche, chaque échelle, chaque pilier sert à quelque chose et si leur utilité n'est pas évidente au premier passage, elle le deviendra par la suite. En effet, contrairement au premier jeu où le Prince voyageait globalement d'un point A à un point B, le parcours imposé dans cette suite est bien plus torturé. On passera de multiples fois dans les mêmes pièces, mais rarement par les mêmes chemins. Un coup ce sera pour rejoindre cette fenêtre, un autre pour filer par cette porte. Dans ce grand labyrinthe, on sent constamment une maîtrise des développeurs pour nous guider là où on le souhaite. Seule la caméra, par moment assez capricieuse, pourra à de rares moments nous induire en erreur en visant à contre champs vers la porte que l'on vient pourtant déjà de franchir. Un problème rare, heureusement. Au milieu de cette grande leçon de level design, le Prince évolue toujours avec la grâce qu'on lui connaît. Il profite même de cet épisode pour introduire quelques nouveaux mouvements, comme le fait de se servir d'une corde comme d'un balancier pour courir contre un mur.
Si vous avez bien suivi jusque là, une question doit certainement vous tarauder l'esprit. Quid de la bête qui traque le Prince ? Vous l'avez devinez, le Dahaka, c'est le nom de l'abomination, échoue aussi sur l'Ile du Temps et viendra régulièrement faire monter la pression. A certains moments, le monstre apparaîtra et obligera le Prince à filer sans se poser de questions. Ces séquences de jeux sont pour la plupart de purs moments de plates-formes où il faudra mettre en avant de nombreuses acrobaties pour suivre un véritable parcours du combattant. Avec le Dahaka aux trousses, la tension est à son maximum.
Comme pour Les Sables du Temps, ce remake HD d'un jeu sorti en 2004 ne parvient pas à gommer l'aspect technique vieillissant. D'autant plus que L'Ame du Guerrier tentait à l'époque d'adopter un style graphique plus réaliste (toute proportions gardées) que son prédécesseur. Le lissage HD est effectivement plus propre que le jeu d'origine, mais c'est à peu près tout. Et puis, sans le charme envoûtant de l'ambiance mille et une nuits du premier épisode, on se retrouve avec un titre plutôt sombre et sans réel éclat. L'aspect gothique plaira tout de même à certains joueurs, mais pas forcément aux fans du premier volume. Le son suit le même mouvement que les graphismes et s'enfonce dans un style métal bien éloigné des douces musiques des Sables du Temps. Le choix était audacieux, mais, selon nous, pas forcément payant. Bien sûr, ce n'est qu'une question de goût.
- Graphismes13/20
L'aspect visuel de L'Ame du Guerrier pose problème. En soi, les graphismes sont plus détaillés que dans le premier volet, mais la direction artistique, plus sombre, plombe un peu l'ambiance. Le jeu est plus "fin" que le premier, mais aussi moins immersif et ce lissage HD ne change donc pas vraiment la donne. En parlant d'immersion, l'option de 3D stéréoscopique est appréciable, même si l'ensemble devient alors encore un cran plus sombre (lunettes obligent).
- Jouabilité16/20
Le Prince gagne quelques mouvements dans cette suite afin de diversifier les séquences de haute voltige. Mais le gros morceau reste la refonte, ou plutôt, la complexification du système de combat avec de très nombreux combos à réaliser du bout de l'épée. Le level design force le respect en nous offrant de vraies séquences d'anthologie. A ce titre, les apparitions du Dahaka sont toujours bien vues et donnent un coup de fouet à l'aventure.
- Durée de vie16/20
Non seulement le jeu est plus difficile que le premier, mais il est aussi plus long ! Comptez une quinzaine d'heures de combats et de galipettes, ce qui est plus qu'honorable pour un jeu de genre.
- Bande son14/20
Changement de registre non seulement pour la musique qui troque ses instrumentations orientales pour des sonorités métal, mais aussi pour le Prince dont la voix devient bien plus grave et à la limite du mauvais nanard. Les cris et les râles des ennemis sont aussi bien envahissants.
- Scénario15/20
Bien plus complexe que le premier volet, le scénario de l'Ame du Guerrier joue avec les paradoxes temporels. L'histoire aurait cependant méritée un meilleur déroulement et un développement des personnages un peu plus poussé.
Moins immersif que le premier volet, L'Ame du Guerrier se distingue surtout par le level design de son terrain de jeu. Le parcours du Prince est parfaitement ciselé pour offrir des séquences de plates-formes grisantes régulièrement entrecoupées par d'intenses combats. Le changement d'ambiance interpelle mais ne plaira pas forcément aux fans de la première heure. L'épisode reste tout de même indispensable pour suivre la trilogie des Sables du Temps dans son ensemble. A ce titre, plutôt que de télécharger ce volet individuellement, nous vous conseillons d'investir directement dans le coffret Prince of Persia Trilogy regroupant sur un seul et même disque les trois épisodes en version HD.