Passé maître dans l'art de décliner ses licences à toutes les sauces et sur tous les supports, Maxis nous offre aujourd'hui Darkspore, la rencontre improbable entre Spore et Diablo. Improbable ? Pas tant que ça si l'on considère que l'un et l'autre sont basés sur le même concept : l'évolution. Les Darwin en herbe vont pouvoir exercer la sélection naturelle à grands coups de Hache à Deux Mains Rutilante du Corbeau + 4.
Contrairement à ce que voudrait vous faire croire l'intelligence artificielle à la voix féminine qui vous sort de votre sommeil cryogénique et vous expose la situation, le scénario de Darkspore tient sur un timbre-poste. Alors que différentes espèces vivaient plus ou moins en harmonie dans la galaxie, les Crogéniteurs, un peuple rompu aux modifications génétiques, a eu l'idée géniale de se livrer à d'audacieuses manipulations sur un ADN plus évolué découvert par hasard : l'ADN exponentiel ou E-ADN. Et comme de bien entendu, les joyeusetés issues de ces expérimentations se sont retournées contre leur créateurs, qui ont préféré prendre la tangente quand ça a mal tourné, laissant leurs abominations infester les planètes alentour. Le Crogéniteur repenti que vous êtes, qui se réveille sur un vaisseau spatial des siècles après la catastrophe, se fixe pour but de reconquérir ces territoires en mettant au point des Héros Génétiques, des créatures modulables et évolutives.
Il y a 100 héros à débloquer dans Darkspore au fil de votre progression, qui sont tous issus de l'un des cinq génotypes suivants : Bio (élevés en plein air au bon grain, ils tirent leur force de la nature), Cyber (des cousins d'ED-209 qui profitent d'une technologie avancée), Nécro (ceux qui ont une sale tronche et des pouvoirs "tro d4rk"), Plasma (les bourrins de la bande, à l'allure bestiale) et Quantum (une espèce évoluée capable de manipuler l'espace-temps). Au-delà de son type génétique, chaque créature appartient également à l'une des trois classes du jeu : les sentinelles, qui sont les tanks du jeu, les nuisibles qui jouent le rôle de DPS au corps-à-corps et les tempêtes qui font à la fois office de DPS à distance, de soigneur et de classe à familier. A l'instar d'un DOTA, Darkspore propose donc des héros aux profils très typés dont il faut parfaitement connaître les aptitudes, aussi bien pour pouvoir les incarner que pour pouvoir les affronter efficacement.
Le jeu reste malgré tout fidèle à la philosophie de sa licence en vous donnant l'occasion de les personnaliser suffisamment pour affiner vos builds comme vous le souhaitez. Grâce à l'ADN récolté dans les niveaux, un éditeur proche de celui de Spore vous permet d'équiper vos créatures des éléments lootés par vos ennemis : armes, protections, pieds, griffes et améliorations diverses et variées, certaines n'ayant qu'une fonction cosmétique. Toute votre collection d'objets ne peut pas être attribuée à n'importe quel héros puisque la plupart des équipements sont réservés à un génotype donné : inutile de chercher à affubler votre héros Bio d'un lance-missiles ! Les items disponibles au magasin (moyennant quelques points d'ADN) sont même réservés à un héros précis. C'est logique, même si certains fans de Spore regretteront que ça limite les fantaisies, tout comme l'impossibilité de modifier la morphologie de votre créature (seule la taille des équipements est malléable).
Darkspore vous invite ensuite à composer une escouade en piochant parmi tous les héros activés. C'est là l'originalité de ce hack'n slash, qui vous met aux commandes d'un groupe de trois créatures que vous ne contrôlez pas simultanément mais entre lesquelles vous pouvez switcher à tout moment (sous réserve d'un petit cooldown qui évite tout abus en PvP). Aux prises avec une horde d'ennemis peu puissants, vous préférerez sans doute opter pour votre tank, mais face à un adversaire résistant et isolé (comme un boss), votre DPS vous semblera peut-être la meilleure option. Vous veillerez donc à constituer une escouade de héros complémentaires, d'autant que vos opposants infligent le double des dégâts à une créature du même génotype qu'eux. Outre ses compétences propres, chaque héros dispose d'une capacité dont il fait profiter le groupe entier tant qu'il n'a pas été mis hors de combat. Darkspore est donc doté d'une bonne dimension stratégique.
Et heureusement, parce qu'il faut bien avouer que le gameplay se révèle tout de même quelque peu ennuyeux à la longue, la faute à une absence totale de quêtes. Votre seul et unique objectif consiste à éradiquer tous les monstres sur votre chemin jusqu'à parvenir au boss de fin. Du coup, si l'action devient plus dynamique après quelques premiers niveaux franchement mous, elle reste tout de même sacrément redondante. Les graphistes ont fait ce qu'ils pouvaient pour varier agréablement les décors et les level designers ont multiplié les éléments destructibles (des pylônes qui entravent le mouvement des héros ou drainent leur énergie) ainsi que les obélisques auprès desquels il est possible de récupérer améliorations et bonus. Mais cela ne suffit pas à rompre la monotonie qui s'installe. Seul le challenge, bien réel, vous sortira de votre torpeur, qu'il s'agisse d'un boss coriace ou de l'apparition d'une horde d'adversaires consécutive à la chute (aléatoire) d'un météore infecté.
Du challenge, Darkspore n'en manque pas, d'autant qu'après avoir bouclé les 24 missions du jeu, vous avez la possibilité de les parcourir à nouveau dans deux modes de difficulté plus élevés (ce qui n'est pas gênant dans la mesure où certaines de leurs caractéristiques sont aléatoires). Si vous vous attaquez à des missions d'un niveau supérieur à celui de votre escouade, vous risquez d'en baver, à moins d'opter pour le jeu en coopération. Il est toujours profitable de grouper, même si la difficulté est sensiblement relevée pour s'adapter au nombre de joueurs (2 à 4). A plusieurs, l'aspect tactique est encore plus prononcé puisque plusieurs héros évoluent simultanément et peuvent donc tirer au mieux parti de leur complémentarité. Qui plus est, certaines situations nécessitent de synchroniser ses efforts, comme quand un joueur se fait immobiliser par une créature adverse. Bref, le multijoueur est déjà plus convaincant, d'autant que les récompenses sont aussi plus intéressantes.
L'ingénieux système de récompenses de Darkspore rend d'ailleurs la progression assez amusante, que ce soit en solo ou en multi. A défaut d'objectifs à remplir, vous avez la possibilité de débloquer des accomplissements : boucler le niveau sans utiliser de pylône d'énergie, en détruisant toutes les créatures, en récupérant un nombre donné de cristaux etc. Cela augmente votre chance d'obtenir un item rare lors du tirage au sort qui clôt chaque mission. Mieux : on vous laisse le choix entre récupérer immédiatement votre gain ou enchaîner les niveaux afin d'obtenir une récompense plus intéressante (au risque de tout perdre en cas d'échec). Bref, Darkspore ne manque pas de bonnes idées pour essayer d'étoffer son principe redondant. Le mode PvP, déblocable au niveau 10, se résume à des oppositions en 1 contre 1 ou 2 contre 2 dans de petites arènes. Il manque un peu d'équilibrage et se révèle surtout bien trop limité pour représenter une véritable valeur ajoutée.
- Graphismes15/20
Un peu ternes, les décors des premiers niveaux laissent progressivement la place à de jolis environnements variés. Relevées d'une touche de cel shading, les créatures sont bien modélisées. Le sang gicle généreusement et l'utilisation des compétences provoque un déluge d'effets visuels.
- Jouabilité14/20
La prise en main est parfaite, même pour qui n'a jamais touché à un hack'n slash. L'interface est stylée et pratique. Le gameplay parvient à concilier simplicité et potentiel stratégique. Quel dommage que les missions, toujours architecturées de la même façon, soient aussi répétitives !
- Durée de vie12/20
Que vous la meniez seul ou à plusieurs, la campagne ne vous mobilisera guère plus d'une douzaine d'heures (qui plus est assez redondantes) même si elle peut être rejouée dans des niveaux de difficulté supérieurs. Le mode PvP se montre trop anecdotique pour constituer un vrai plus.
- Bande son16/20
La bande-son New Age, assez réussie, pourrait avoir été composée par un Vangelis au meilleur de sa forme. Qui plus est, les bruitages sont efficaces et la voix robotique suave et féminine qui vous guide bénéficie d'un doublage en français de qualité.
- Scénario7/20
Il n'y a aucune histoire digne de ce nom dans Darkspore, et si le jeu ne vous infligeait pas quelques cut-scenes ennuyeuses, il aurait pu éviter d'être jugé sur ce critère. Parce que du coup, on s'attend à une légère scénarisation et à quelques quêtes qui, hélas, n'arriveront jamais.
Darkspore est un hack'n slash sympathique qui, passé un début un peu mou, devient à la fois plus dynamique et plus stratégique. A l'instar d'un DOTA, il propose une pléiade de héros aux profils très typés dont il faut bien connaître les aptitudes pour les incarner ou les affronter efficacement. Qui plus est, ces créatures peuvent être customisées, comme le veut l'esprit de la licence. Hélas, la progression souffre de missions dénuées d'objectifs et toutes architecturées de la même façon, qui accentuent la redondance de l'action propre au genre. Peu convaincant voire parfois ennuyeux en solo, Darkspore s'avère déjà beaucoup plus sympa à pratiquer jusqu'à 4 en coopération, mais son intérêt est condamné à s'émousser sur le long terme. C'est d'autant plus dommage qu'il est pourvu de bonnes idées qu'on aimerait voir reprises par d'autres jeux du genre.