Tapie au fin fond d'un placard sombre et poussiéreux, elle est là, calme et patiente, toujours prête à reprendre du service et à se pavaner devant nos yeux ébahis. Mais depuis quelques temps, quelque chose a changé. Elle appelle, gratte à la porte, veut reprendre sa liberté. Oui, nous sommes le 21 décembre 2010 et l'increvable Dreamcast sait pertinemment qu'un tout nouveau jeu vient de sortir. Regardez-la saliver, écoutez son estomac gargouiller et humez le doux parfum de nostalgie qui flotte autour d'elle. Honnêtement, comment oserions-nous lui refuser ce nouvel amuse-bouche ? Pour tous les joueurs intéressés, votre prochain achat a un nom : Fast Striker.
Veuillez excuser cette introduction un tantinet mouvementée, mais la sortie d'un nouveau titre pour Dreamcast est toujours un moment d'allégresse pour tous les fans de Sega qui se respectent. Le dernier OVNI en date nous vient ainsi de la NG:DEV.TEAM, une équipe composée de deux frères allemands friands de programmation. Ces deux gaillards ne sont pas en terrain inconnu puisqu'ils ont déjà à leur actif deux productions pour Dreamcast : Last Hope et sa version retravaillée Last Hope Pink Bullets. Fast Striker, quant à lui, est disponible en trois packages différents. Il y a l'édition régulière (32 €), l'édition limitée (45 €) qui comprend, en plus du jeu, un CD reprenant sa bande-son, et le Double Bundle (68 €) regroupant ces deux éditions. À noter que Fast Striker est d'abord sorti sur Neo Geo, à la différence près que la bête allait chercher dans les 500 € (non ce n'est pas une faute de frappe, c'est bien un cinq suivi de deux zéros). Préférez donc la version Dreamcast qui, à cause de son prix plus abordable, est évidemment celle que l'on conseillera.
Alors que Last Hope se présentait ouvertement comme un shoot'em up à checkpoints où il fallait retenir pratiquement chaque passage par cœur pour espérer survivre, Fast Striker appartient à la famille des manic shooters. Un manic shooter ? C'est quoi ça ? Eh bien, c'est un type de shoot qui demande au joueur énormément de calme, et dans une certaine mesure des bons réflexes, pour échapper au déluge de tirs qui l'assaillent en recouvrant une bonne partie de l'écran. Les motifs que forment ces boulettes (les bullet patterns) sont généralement très élaborés et recherchés de façon à être aussi jolis à regarder qu'intéressants à aborder. Il est cependant important de préciser que Fast Striker s'éloigne parfois de ses aspirations d'origine en proposant également des passages que l'on croirait issus d'un shoot'em up à réflexes, comme Aleste ou Star Soldier. Soyez donc prêt à vous faufiler au milieu d'une flotte adverse ou encore à esquiver au dernier moment des vaisseaux qui viennent se saborder sur vous. Un petit mélange des genres qui apporte un peu d'air frais, et franchement, on ne s'en plaindra pas.
Pour ce qui est des commandes, Fast Striker s'inspire des grands classiques du genre. On retrouve ainsi le tir principal, exécutable en tapotant frénétiquement un bouton et dont le champ de portée est plutôt large. Pour les plus fainéants, une touche de tir automatique est également de la partie, même si la cadence ne sera pas optimale. Ensuite, en laissant le bouton de tir principal enfoncé, votre appareil attaquera à l'aide d'un laser plus ou moins continu concentré sur une petite zone de l'écran. Grâce à sa puissance de frappe accrue, il sera parfait pour abattre des gros vaisseaux adverses ou encore des groupes de zincs positionnés en file indienne. Notons qu'une fois cette arme enclenchée, votre vitesse de déplacement sera grandement diminuée, une caractéristique qui sera en fait à la fois un défaut et un avantage. En effet, vous ne pourrez par exemple plus pratiquer une esquive de dernière minute, mais vous gagnerez en précision et pourrez progresser plus facilement dans des situations où les projectiles ennemis sont nombreux et se déplacent lentement à l'écran. La dernière action consiste à faire feu vers l'arrière pour réduire au silence les petits filous qui essaieraient de se glisser avec désinvolture dans votre dos.
Petite différence par rapport à la majorité des manic shooters, vous ne disposez pas de smart bombs, ces bombes qui annihilent toute forme de vie à l'écran à l'exception de votre vaisseau, c'est d'ailleurs pour cela qu'elles sont dites « intelligentes ». Cette arme était idéale pour les passages désespérés où l'on était sûr de laisser des plumes, le joueur pouvant l'enclencher pour faire le ménage à l'écran. Pas de panique toutefois, les concepteurs ont eu recours à une autre manœuvre pour vous tirer des situations perdues d'avance : le bouclier. Ce dernier peut être activé à n'importe quel moment et, comme on peut s'en douter, il immunisera votre vaisseau contre tous dommages pendant un court laps de temps. Il est possible d'accumuler des shields supplémentaires en récoltant les items appropriés et, à chaque perte de vie, vous réapparaîtrez automatiquement avec deux de ces items en réserve. Autrement dit, il est vivement conseillé de les utiliser le moment venu, sans quoi ils seront perdus à jamais. Petit problème tout de même, le sprite de votre vaisseau n'est pas représentatif de la taille de votre boîte de collision, cette dernière étant beaucoup plus petite. Par conséquent, il est très fréquent de se tirer indemne d'une situation à première vue désespérée alors que l'on était sûr et certain d'y rester. Alors que cela aurait été une aubaine dans n'importe quel autre jeu, dans Fast Striker, cela se révèlera plutôt frustrant, le joueur ne sachant jamais à quel moment enclencher son bouclier. Le fait que votre survie dépende davantage de Dame la chance que de vos capacités personnelles peut se révéler vraiment perturbant.
Si le jeu ne comporte que six niveaux de longueur moyenne débouchant à chaque fois sur un affrontement contre un boss, les trois différents modes de difficulté augmentent sensiblement la durée de vie du soft. Ainsi, le mode original se distingue du mode novice par un plus grand nombre d'ennemis, de tirs ennemis et par des bullet patterns plus élaborés. En maniac, non seulement le challenge proposé sera plus épicé, mais la progression se caractérisera également par un système de scoring beaucoup plus complexe. Quand vous abattez rapidement des ennemis, vous enclenchez un système de chaîne qui multipliera votre score à chaque nouvelle victime, mais qui retombera à zéro si vous n'avez aligné personne à votre tableau de chasse depuis trop longtemps. Le jeu, à la manière d'un Border Down sur Dreamcast ou d'un Radiant Silvergun sur Saturn, récompense les prises de risques. Ainsi, plus vous êtes proche d'un adversaire, et donc susceptible de mourir car ayant moins de temps pour éviter ses projectiles, plus vous gagnerez de points en le dégommant. De la même façon, le fait de frôler les tirs adverses permet d'augmenter votre score, c'est ce qu'on appelle le « scratching ». Signalons aussi que vos propres motifs de tir changeront en fonction du mode de difficulté sélectionné. En définitive, même s'il ne va pas révolutionner le petit monde du shoot'em up, Fast Striker a au moins le mérite de s'adresser tant aux néophytes qu'aux habitués grâce à ses différents modes de difficulté assez bien dosés.
Images fournies par l'éditeur.
- Graphismes13/20
Monochromes, sombres et tristes, les décors du jeu ont de quoi rendre dépressif le plus joyeux des lurons. D'un autre côté, les projectiles ennemis étant de couleur très vive, ils ressortent d'autant mieux et on ne pourra à aucun moment se plaindre d'un manque de lisibilité. Dans un shoot'em up, c'est sans doute ce qui est le plus important, devant la finesse des graphismes ou le design des ennemis. Les arrière-plans sont quant à eux d'une répétitivité sans pareil et défilent à une vitesse supersonique. Fixez-les du regard quelques secondes et c'est le mal de tête assuré.
- Jouabilité16/20
Reprenant à bon compte les caractéristiques de tout manic shooter qui se respecte, Fast Striker ne risque pas de surprendre les habitués du genre. Les motifs de tir sont sympathiques et certains passages font penser à des jeux plus nerveux comme Aleste. On appréciera que les projectiles adverses répondent à un code de couleur conservé tout au long du jeu. Les roses sont par exemple lents mais dirigés sur vous, tandis que les rouges sont beaucoup plus rapides mais tirés dans des directions aléatoires. Dommage que la boîte de collision du vaisseau soit beaucoup plus petite que son sprite, le joueur ne sachant alors jamais quand il est en danger et s’il doit activer son bouclier.
- Durée de vie12/20
Avec ses six petits niveaux, Fast Striker ne devrait pas tenir en haleine bien longtemps les joueurs les plus occasionnels. Pour les mordus de scoring par contre, les choses sérieuses commencent maintenant. Scratching, chaînes, combos sont autant de techniques qu'il faudra maîtriser sur le bout des doigts et dont l'apprentissage demandera de recommencer le jeu à de nombreuses reprises. Comme dans de nombreux manic, les boss peuvent être abordés de plusieurs façons. On peut soit les attaquer directement et mettre un terme au combat, soit s'amuser à détruire les modules qui viennent leur prêter main forte, les obligeant à changer de mode d'attaque, rallongeant la durée des combats et maximisant votre score. Rendez-vous sur le site officiel du jeu pour découvrir le classement des meilleurs joueurs.
- Bande son11/20
La techno est le seul et unique style musical que vous entendrez. Si la musique d'introduction s'en sort encore bien, les autres compositions brilleront par leur médiocrité. Au mieux, elles passeront inaperçues et au pire, elles seront agaçantes. Il n'y a vraiment rien d'autre à dire sur la bande-son à part que l'on vous déconseillera évidemment d'acheter le pack contenant l'OST du jeu.
- Scénario/
Doté de graphismes peu folichons et d'une bande-son imbuvable, Fast Striker est sauvé par la qualité de son gameplay qui, malgré quelques imprécisions, reprend les codes du manic shooter tout en les pimentant via un rythme d'action davantage soutenu qu'à l'accoutumée. On appréciera la présence de trois modes de difficulté différents qui ont de réels impacts sur le déroulement des parties et qui rendent le soft accessible à tous. Pas de quoi s'enflammer cependant, car on est loin, vraiment très loin d'égaler les grands noms du genre, comme DonPachi pour ne citer que lui. Mais de toute façon, le public visé par Fast Striker est composé essentiellement de nostalgiques qui cherchent juste une excuse pour ressortir leur Dreamcast du placard. Et Dieu sait qu'il y en a !