Alors que la NG : Dev.Team vient d'annoncer Gun Lord, un run and gun dont la sortie est prévue dans le courant de l'année 2011 pour Dreamcast et Neo Geo, il semble opportun de revenir dans le passé pour se pencher sur leur toute première production, le bien nommé Last Hope. Enfin, ne vous attendez pas à faire un énorme bond dans le passé car c'est en 2006 que Last Hope a vu le jour sur Neo Geo (pour la coquette somme de 700 euros et des poussières !), avant d'être porté sur Dreamcast un an plus tard au prix déjà plus abordable de 40 euros. Voici donc un petit article destiné à vous faire découvrir une production pour le moins atypique puisque ayant vu le jour sur des machines cliniquement mortes depuis un paquet d'années.
Et justement, vous en connaissez beaucoup, vous, des gens qui se lèvent un beau matin en se disant qu'ils vont travailler d'arrache-pied à ressusciter des machines qui ont fait leur temps, brisant le repos bien mérité dont elles jouissent désormais dans leur cimetière vidéoludique ? Si Freud était encore dans le coin, nul doute qu'il aurait décelé chez ces développeurs Dieu sait quel genre de troubles psychiques et aurait été jusqu'à comparer leur démarche à de la profanation de sépulture. Eh bien, nos amis nécrophiles sont en fait deux frères allemands, René et Timm Hellwig. Fans absolus de titres arcades à la sauce Thunder Force ou Contra, ils développeront au cours de leur enfance une véritable passion pour ce style, passion qui les poussera en 1999 à se lancer dans la programmation et à entamer la création de leur premier jeu. Last Hope était né... enfin, pas tout à fait. Travaillant pendant leur temps libre et n'ayant au départ que de piètres connaissances du monde de la conception de jeux, ils devront attendre jusqu'en 2006 pour que leurs efforts soient récompensés et que leur bébé soit finalisé. C'est bien beau tout ça mais voyons à présent quel genre de jeu est finalement ce Last Hope.
Vous ne serez pas surpris d'apprendre que les frères Hellwig se sont largement inspirés d'un titre qui a marqué leur enfance et auquel ils ont voulu rendre hommage : le mythique R-Type, un shoot'em up à checkpoints qui est sorti dans les années quatre-vingt. « Shoot'em up à checkpoints », quelques mots à première vue anodins pour les néophytes mais qui auront suffi à paralyser de peur certains initiés. Leurs pupilles se rétractent, leur gorge se serre et les souvenirs resurgissent. Oh non, ils ne les ont pas oubliées, ces sueurs froides, ces crises de nerfs et ces nuits blanches passées sur un jeu qui ne voulait décidément pas se laisser apprivoiser. Oubliez le fun immédiat et même le fun tout court, ici votre progression sera sans arrêt interrompue par la perte inopinée d'une vie et un retour au checkpoint précédent, vous obligeant à recommencer maintes et maintes fois le même passage jusqu'à le connaître sur le bout des doigts. Vos réflexes exacerbés n'y feront strictement rien et votre mémoire sera votre plus fidèle atout.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que Last Hope est un fidèle représentant de R-Type en matière de difficulté extrême et de prise de tête. Si de rares passages peuvent être traversés dès la première tentative sous réserve d'avoir un peu (voire même beaucoup) de chance, les autres seront de véritables abominations à tendance masochiste. Et pour cause, votre vaisseau est terriblement lent en comparaison aux adversaires et à leurs tirs. Il est dès lors plus que fréquent de se faire pulvériser en voyant pertinemment d'où venait le danger, le joueur n'ayant tout simplement pas le temps de l'esquiver. Bien sûr, il est possible – et même vivement conseillé – de ramasser des items de façon à augmenter votre vitesse de déplacement, mais votre engin recouvrera ses caractéristiques initiales à chaque perte de vie ! Et étant donné que votre temps de survie moyen dans cet environnement hostile est d'environ 15 secondes, vous ne pourrez pas franchement en profiter.
Si tous les passages s'avèrent être scandaleux de difficulté, c'est quand même le cinquième niveau qui remporte la palme. En fait, certains adversaires kamikazes sont si rapides qu'il faut tirer avant même qu'ils n'apparaissent sur l'écran pour espérer les détruire. A ce niveau-là, nous n'avons même plus affaire à un jeu doté d'une difficulté old-school, mais à un joyeux n'importe quoi ! Ces petits sadiques de développeurs se sont même amusés à ne pas mettre de checkpoint juste avant les affrontements face aux boss. Résultat des courses : il faut retraverser de terribles embûches dont on n'est jamais sûr de sortir indemne pour finalement se faire dégommer en trois secondes par le boss de fin de niveau, étant donné que l'on ne connaît pas encore par cœur ses méthodes d'attaque. Pour couronner le tout, Last Hope est d'une précision maladive et chaque pixel a son importance. Votre zinc est par exemple surmonté d'un minuscule aileron dorsal et si par malheur ce dernier venait à rentrer en contact avec quoi que ce soit, ce serait la mort assurée.
Question arsenal, vous n'allez pas franchement être gâté. En effet, le tir principal brille par son manque de puissance et sa cadence mollassonne. Le tir chargé est plus dévastateur, mais étant donné qu'il demande, comme son nom l'indique, un temps de chargement, on ne peut pas l'utiliser aussi librement qu'on le voudrait. Des power-up sont aussi de la partie et consisteront en trois types de missiles au champ de dispersion unique : certains attaquent horizontalement, d'autres verticalement et les derniers sont à tête chercheuse. Mais une fois encore, votre arsenal retombera à son point de départ à chaque perte de vie, vous condamnant à utiliser votre minable tir principal comme seul moyen offensif. Vous n'imaginez même pas le nombre de passages où l'on en vient à se dire : « Donnez-moi le vaisseau de Thunder Force IV, bon sang ! Donnez-le-moi et je le finirai, votre satané jeu ! »
Pour finir, et de façon à s'inspirer encore une fois de R-Type, un module est à votre disposition. En plus de bloquer les boulettes adverses (mais pas les ennemis, faut pas rêver), il a l'agréable particularité d'offrir une puissance de tir supplémentaire. De plus, libre à vous de le faire tourner à 360° autour du vaisseau, une bonne idée permettant entre autres de dégommer les petits malins qui essaieraient de vous prendre à revers. Mais ne vous méprenez pas, Last Hope reste un jeu à déconseiller aux plus soupe au lait des joueurs, et ce ne sont pas les cinq différents modes de difficulté qui y changeront quoi que ce soit. Impossible également de conclure ce test sans évoquer deux immondes et impardonnables bugs qui viennent ternir ce titre. En effet, le simple fait de mettre le jeu en pause peut vous faire perdre, sans aucune raison, un crédit. De plus, certains tirs ennemis deviennent parfois invisibles ! Il est assez honteux de voir ça dans un jeu commercial digne de ce nom.
- Graphismes14/20
On ne peut qu'être en admiration devant la quantité de travail qui a été fournie de ce côté-là. Les environnements sont très différents et un nombre phénoménal de détails s'accumulent à l'écran sans jamais provoquer le moindre ralentissement. Revers de la médaille, il est régulièrement impossible de discerner les éléments « juste là pour décorer » des tirs ennemis, ce qui peut donner lieu à pas mal de prises de tête. La palette de couleurs limitée et les graphismes très ternes ne sont pas non plus là pour arranger ce problème de lisibilité. La 2D n'égale pas les meilleures productions Neo Geo et encore moins Dreamcast.
- Jouabilité14/20
Tir principal et chargé, module et power-up pour améliorer votre vitesse ainsi que votre arsenal. Aucun doute, Last Hope est bien inspiré de R-Type. Il n'oubliera d'ailleurs pas de lui faire de nombreux clins d'œil (ennemis ou passages présentant des similitudes) et surtout de lui emprunter sa difficulté sans pareil. Le plus étonnant, c'est que même en connaissant le jeu par cœur, le joueur parviendra encore à perdre de nombreuses vies. Pourquoi ? Parce que les deux frères allemands à l'origine du soft sont de vrais petits sadiques et que chaque contact (mur, ennemi, projectile ennemi) sera synonyme de mort et de retour au checkpoint précédent. Le jeu étant exigeant au pixel près, la progression relève (et c'est voulu) plus du calvaire que d'autre chose.
- Durée de vie12/20
Avec ses six petits niveaux d'environ quatre minutes chacun, Last Hope devrait se boucler en moins d'une demi-heure. La bonne blague ! En réalité, une demi-heure, c'est le temps qu'il vous faudra consacrer pour traverser en un seul morceau les passages les plus ardus. Un joueur occasionnel ne prendra pas cette peine et lâchera le jeu après deux minutes et ceux qui refusent d'abandonner y passeront d'inoubliables nuits blanches. La durée de vie est donc très variable et dépend de votre motivation. Soulignons que la version Dreamcast possède un mode de jeu supplémentaire qui se caractérise par une difficulté légèrement moins élevée. Pas de quoi rajouter beaucoup d'intérêt au soft.
- Bande son15/20
Calme, douce et mélancolique, la bande-son reposante ravira vos oreilles et vous transportera sur un petit nuage. En même temps, il fallait bien ça pour éviter que le joueur sombre définitivement dans la crise de nerfs après avoir recommencé maintes fois le même niveau. Petit problème également : les musiques bouclent depuis le début à chaque perte de vie. En d'autres termes, on connaît les 30 premières secondes par cœur sans jamais entendre la suite. Rendez-vous donc dans le sound test pour découvrir ces compositions de qualité et pour les vrais fans, on ne saurait que vous conseiller d'acheter l'édition limitée qui renferme l'OST du titre.
- Scénario/
L'empire du mal se dirige vers la terre, détruisant sur son passage des colonies spatiales et assassinant des millions d'innocents. Les armes traditionnelles sont inefficaces et le dernier espoir (d'où le titre, Last Hope) de l'humanité repose sur le vaisseau Z-42 Warpstar à la pointe de la technologie et dont vous prendrez bien sûr les commandes. Bon d'accord, impossible de rendre ce scénario-ticket-de-métro très accrocheur. De toute façon, il est uniquement présent dans le manuel du jeu.
Beaucoup des personnes qui ont essayé Last Hope ne « tarissent pas de critiques » pour décrire ce qu'ils qualifieraient de daube sans nom. La raison principale ? Sa difficulté hors norme qui transformerait une séance de torture à coups de fouet en moment de détente. Oui mais voilà, c'est justement le but et on ne pourra pas en tenir rigueur au moment d'attribuer une note. S'il fallait vraiment émettre une critique objective, on dirait que les développeurs auraient pu faire preuve de davantage d'assiduité lors de leur travail pour corriger les deux gros bugs bien énervants que nous avons évoqués dans cet article. Car de l'assiduité, le joueur devra en faire preuve pour venir à bout de cet ovni vidéoludique sorti, rappelons-le, sur Neo Geo et Dreamcast à une époque où l'on croyait ces consoles enterrées depuis belle lurette.