Depuis sa première apparition dans Plane Crazy en 1928, mais surtout depuis Steamboat Willie la même année, Mickey Mouse est devenu l'icône incontournable de Disney. Plus de 80 ans à faire rêver les gamins du monde entier avec des dessins animés entrés dans la légende grâce à leur univers enfantin et coloré. Pourtant, la souris la plus connue de la planète revient aujourd'hui dans Disney Epic Mickey, un titre interdit aux moins de sept ans et au style graphique et scénaristique plutôt sombre... Ca c'est du challenge !
Tout le monde a eu la même réaction devant les premières images d'Epic Mickey... Mais que fait notre héros aux grandes oreilles dans un soft pareil ? Où est passée l'idole des plus jeunes, son ambiance gnangnan et ses couleurs vives ? La patte de Warren Spector les aurait-elles souillées à jamais ? Non, ne vous inquiétez pas, si l'univers pourra sembler quelque peu déroutant de prime abord, il s'agit bien plus d'un coup de génie que d'un coup de folie. Mais pour mieux être au fait du contenu, commençons par vous conter l'histoire.
Mickey, toujours aussi curieux, va se retrouver bien involontairement dans le labo du magicien Yen Sid, qui travaille sur ce qui ressemble à une maquette proche de DisneyLand. Par accident, la souris va renverser une bouteille de dissolvant dans la maquette, à l'insu du magicien. Repartant comme il est venu (au travers d'un miroir), il va oublier ce petit incident et continuer sa paisible vie de héros de cartoons. Mais des années plus tard, comme quoi le karma est tenace, un terrifiant fantôme va happer Mickey via le miroir vers un autre univers, celui de la « maquette». Il se retrouve en fait dans le Monde de la Désolation, où sont réunis tous les personnages de Disney tombés dans l'oubli dont Oswald le Lapin Chanceux, chassé d'une route pleine de gloire suite à la création de Mickey. La souris va comprendre les terrifiantes répercussions qu'a eues la bouteille de dissolvant sur ce monde, et va tout faire pour réparer ses erreurs, grâce à votre aide.
Pour cela, vous n'avez que deux armes, votre pinceau et du dissolvant. Avec ces accessoires, vous pouvez à loisir peindre et diluer une grande partie de l'environnement qui vous entoure. Créer des plates-formes ou des coffres, dissoudre un engrenage pour stopper le fonctionnement d'une machine, tout est possible tant que l'on reste dans les limites imposées. D'ailleurs, en parlant de limite, sachez que vous avez une jauge pour chacun de vos deux pouvoirs. Mais là où Disney Epic Mickey devient vraiment intéressant, c'est dans la dualité entre le dissolvant et la peinture, transposition du Mal et du Bien, respectivement. En effet, si l'utilisation du dissolvant permet d'éliminer vos ennemis, la peinture permet de vous en faire des amis, prêts à vous défendre. Cette dichotomie s'élève à un autre niveau lorsqu'il s'agit des quêtes. Si rien ne vous oblige à faire les nombreuses quêtes annexes qui jonchent votre chemin, ne pas aider votre prochain vous donnera mauvaise réputation, et les personnages que vous croiserez vous le feront clairement savoir. Ceci a une incidence directe sur le gameplay car certaines quêtes ne vous seront pas accessibles, sans compter qu'il y a quatre fins possibles selon vos actions.
Concernant le gameplay justement, vous oscillez entre l'aventure, l'action et la plate-forme. Malheureusement, car il fallait bien y venir un jour, Disney Epic Mickey est bafoué par un très gros défaut. Sa caméra. C'est bien malheureux à dire, mais cette dernière réussit à se placer systématiquement là où il ne faut pas. Que ce soit pour les phases de sauts ou pour les combats, c'est parfois un véritable calvaire. Et pourtant, tout avait été fait pour que l'on puisse la recadrer nous-mêmes : vue à la première personne, déplacement à la croix directionnelle ou encore un bouton pour la placer derrière le personnage, rien n'y fait. Du coup, certains passages peuvent s'avérer pénibles, sortant un peu le joueur de l'univers pourtant si profond, grandement basé sur la nostalgie. Car Epic Mickey est un vrai plaidoyer pour les vieux cartoons d'antan, comme en témoignent ses nombreux passages en 2D dans les environnements de dessins animés connus de la souris ou d'autres personnages marquants signés Disney. De Steamboat Willie à Oh, What a Knight, c'est plus d'une trentaine de ces mini-niveaux qui ponctueront votre aventure. Certes, vu qu'ils gardent chacun leur style, la qualité artistique oscille entre l'excellent et le douteux (Plutonia, même avec du recul, ça passe moyen), mais le résultat est plus qu'appréciable.
En ce qui concerne l'aventure, vous repassez très souvent par Mean Street, où il vous est possible d'effectuer des achats grâce aux E-Tickets récupérés pendant l'aventure. De nombreuses quêtes partent de cet endroit qui semble être la plaque tournante pendant une bonne partie de l'histoire. De temps en temps, il faudra faire des petites enquêtes pour Horace par exemple, nous sortant ainsi des sentiers battus pour nous proposer un autre style de gameplay. Lors de vos voyages dans des zones plus hostiles, Disney Epic Mickey propose un savant mélange de recherche, d'action et de plates-formes, parfaitement dosé pour ne pas lasser le joueur. Certes, tous les passages ne sont pas des plus originaux, mais peu importe, la diversité des situations se suffit à elle-même.
Enfin, finissons par le véritable tour de force d'Epic Mickey, sa réalisation exemplaire. Les environnements, bien que volontairement sombres et perturbants, ont bénéficié d'un travail d'inspiration incroyable, digne des productions Disney. Le tout est d'ailleurs porté par une des meilleures bandes-son de l'année, accompagnant chaque univers visuel d'un thème musical approprié, vibrant souvent entre le joyeux et le mélancolique. D'ailleurs, la mélancolie est sans aucun doute l'un des sujets principaux de l'histoire, Epic Mickey étant aussi porté par un scénario bien plus profond que l'on pouvait penser. Oswald est un être touchant, mis à l'écart de l'esprit de tous, qui ne recherche que l'affection et l'amour d'autrui. Il en va de même pour de nombreux personnages rencontrés au fil de l'aventure, essayant de rappeler à la souris leurs rôles ensemble dans des cartoons vieux de 80 ans... Bref, Disney Epic Mickey est un véritable voyage plein de surprises, qui aurait vraiment pu être un hit en puissance sans ses problèmes de caméras récurrents. Toutefois, nous le conseillons sans hésiter à tout possesseur de Wii, tant il serait blasphématoire de laisser passer une aventure aussi prenante.
- Graphismes18/20
Cette version « dark » de DisneyLand qu'est le Monde de la Désolation est un véritable univers à lui tout seul. Si à l'origine, les environnements sont inspirés, vos coups de pinceaux et de bombe diluante peuvent modifier une partie de ces décors pour les voir sous un jour nouveau. Peu importe si certaines zones sont moins jolies que d'autres (DiscoveryLand par exemple), on est transporté de bout en bout.
- Jouabilité13/20
Bien que l'idée de base du gameplay qu'est cette dualité peinture/dissolvant n'est pas remise en cause, les déplacements de la caméra sont véritablement catastrophiques pour un jeu de cette trempe. Alliés à une gestion des sauts quelque peu hasardeuse, cela nuit malheureusement au plaisir de jeu. Vraiment dommage car la plupart des phases de plates-formes, mettant en scène vos pouvoirs, sont plutôt réussies, même si certains principes se répètent de temps en temps. Mention spéciale pour l'étonnant combat contre Electro-Pat et les passages en 2D. Petit point noir par contre, quelques allers-retours superflus...
- Durée de vie15/20
Finir l'histoire une première fois vous prendra entre quinze et vingt heures selon votre façon de jouer. Toutefois, vous ne verrez qu'une des quatre fins disponibles, et vous devrez recommencer le titre en faisant de nouveaux choix pour obtenir les autres, tout en découvrant ainsi des quêtes inédites. Certes, dire que cela multiplie la durée de vie par quatre serait de trop, mais des tas de bonus cachés ponctuent aussi l'aventure, et même lors de la première partie, il y a souvent plusieurs façons différentes de passer une zone.
- Bande son18/20
Du grand art à tous les niveaux, la bande originale de Disney Epic Mickey est largement à la hauteur et souligne avec grâce l'aventure et la narration. Chaque morceau est parfaitement adapté à l'environnement qu'il habille, distillant des notes souvent sombres. Les passages en 2D bénéficient du même travail, d'autant que les musiques y sont souvent d'époque. Une merveille.
- Scénario15/20
Vous vous attendiez à une histoire pastel pleine de pies qui chantent et de chevaux qui jouent du violon ? Raté ! Bien que l'on reste dans un Disney, l'histoire contée dans Epic Mickey est empreinte de nostalgie et de mélancolie, celles des stars oubliées qui tentent tant bien que mal de retrouver une notoriété éteinte. Le comportement d'Oswald et sa façon de copier Mickey sont le témoignage d'un manque d'amour évident, et on ne peut que fondre pour le personnage.
Disney Epic Mickey est bel et bien la réussite artistique annoncée. Des environnements travaillés et cohérents et une bande-son digne des plus grandes productions soulignent avec brio un univers ténébreux et pénétrant. De plus, le gameplay semblait bien parti avec son principe de peinture et de dissolvant découlant sur plein d'idées ingénieuses que ce soit au niveau de la plate-forme, de l'action ou de l'aventure. Toutes ces qualités nous font d'autant plus regretter la gestion de la caméra navrante menant à des passages vraiment chaotiques, et éloignant le titre du statut de chef-d'oeuvre auquel il semblait destiné. Néanmoins, l'achat de Disney Epic Mickey vous est fortement conseillé, nul doute que vous ne le regretterez pas.