Sorti en 1989, porté sur plusieurs supports et jouissant d'un succès certain, le premier Sim City s'est longtemps suffi à lui-même. Mais les échecs relatifs des autres créations de Maxis, le studio de Will Wright, entraînent en 1995 la sortie d'une nouvelle version du plus célèbre city-builder de l'histoire du jeu vidéo. Une version fortement modernisée qui conserve cependant toutes les qualités de son aîné.
On pourrait croire, à première vue, que le principe de Sim City est tout simple : être le maire d'une ville, la créer, la gérer, la développer. Et pourtant, il s'agit là d'un des concepts les plus addictifs jamais vus dans un jeu vidéo. C'est d'ailleurs pour cela que le premier Sim City s'est si longtemps suffi à lui-même : son aspect extérieur était secondaire, ce sont ses mécanismes de jeu qui importaient. Pour autant, la cure de jouvence apportée par ce Sim City 2000 apparaît indispensable après coup.
Ne serait-ce que visuellement, le contraste est saisissant. D'une 2D en vue de dessus, on est passé à une 3D isométrique, et c'est donc désormais en relief qu'apparaissent la carte et la ville qu'on construit. Conséquence directe, il est désormais possible de faire tourner la carte sur elle-même pour admirer ses créations sous plusieurs angles, et trois niveaux de zoom sont disponibles. Cela se révélera particulièrement précieux lors de la création des cartes avec l'éditeur, très complet, ou lors de la construction de routes ou de réseaux. En effet, pour tracer une route bien droite, mieux vaut ne pas avoir la vue bouchée par une montagne... De plus, les bâtiments, bien détaillés, sont suffisamment variés, tandis que le trafic automobile se trouve astucieusement représenté par des pointillés mouvants plus ou moins proches et rapides selon sa densité. Si bien que quelle que soit la manière dont on la regarde, sa ville semble toujours fourmiller de vie.
Pour peu que vous soyez un bon gestionnaire, cela va de soi. En tout cas, si vous éprouvez des difficultés ce ne sera pas à cause de l'ergonomie du soft. Seul le clic gauche de la souris est requis, et l'ensemble du menu est accessible en permanence à l'écran, regroupé en une seule barre. Il suffit donc de quelques clics pour choisir un outil d'information, de création, une zone, un réseau ou un bâtiment quelconque, et l'utiliser sur la carte, de manière très précise grâce au quadrillage de celle-ci. Une vue souterraine fait par ailleurs son apparition pour faciliter la création du réseau d'approvisionnement en eau ou la construction des lignes de métro. Bref, Sim City 2000 est un jeu maniable et accessible, et créer une carte unique sur laquelle on construit une petite bourgade se révèle très facile.
Mais alors, aurait-on affaire à un jeu simpliste ? Pas du tout, c'est là qu'entre en jeu la spécificité de gameplay, déjà présente dans le premier opus : Sim City est un jeu maniable, mais difficile. Il est aisé de créer une route ou une gigantesque zone commerciale. Il est difficile de faire en sorte que cela ne vous fasse pas perdre d'argent. D'une manière plus générale, il est facile de débuter la construction d'une ville, mais il est difficile de la gérer sur le long terme. La gestion de vos ressources est l'élément clé : si vous dépensez trop et trop vite, la partie tournera court, puisqu'à partir d'un certain endettement, c'est le game over. Il va donc falloir trouver le bon équilibre entre recettes et dépenses, pour pouvoir développer votre ville sans risquer de tout perdre, et pour cela repérer quels sont vos réels besoins et ajuster vos budgets en conséquence. Ainsi, dans Sim City, l'erreur la plus courante est de vouloir trop en faire pour ses administrés.
Cependant, il ne s'agit pas uniquement ici d'un jeu de gestion économique. On retrouve, certes de manière simplifiée, tout ce qui fait l'essence du métier de maire : la prise d'information sur les besoins des citoyens, l'action pour y répondre, l'investissement pour l'avenir, le tout en évitant la banqueroute. Pour vous aider à prendre les meilleures décisions, une batterie d'outils est à votre disposition. Des cartes et des graphiques détaillent par exemple la densité de population dans une zone, le trafic sur une route, la pollution, l'approvisionnement en eau ou en électricité, la demande en industrie ou en commerce, l'âge et la santé des habitants, leur nombre, et ainsi de suite. Il y en a beaucoup, mais tout est encore une fois parfaitement accessible, clair et lisible. Un modèle du genre.
Mais même en maîtrisant ces aspects-là, vous n'êtes jamais à l'abri d'une catastrophe. Manifestation, tremblement de terre, tornade, inondation, incendie et même invasion d'aliens, il va falloir développer des talents de gestionnaire de crise pour gérer ces situations dantesques, et ne pas mettre en péril votre développement à long terme. On précisera enfin qu'au fil du temps vous accéderez à de nouvelles technologies et que l'aspect extérieur de votre ville se modifie lui aussi. Ainsi, même s'il n'est pas rare de devoir attendre plusieurs heures de jeu avant d'avoir une ville bien développée, elles ne seront pas monotones.
- Graphismes16/20
Il ne faut pas se fier à l'aspect presque sommaire du jeu, rappelons que le premier opus était en vue de dessus alors que celui-ci offre une belle 3D isométrique. Peu à peu, chaque ville devient vivante sous nos yeux et prend un aspect unique, grâce à une multitude de petits détails. On peut d'ailleurs zoomer et tourner la carte pour apprécier nos créations sous tous les angles. Une vue souterraine fait même son apparition. Les catastrophes donnent lieu à de petites animations sympathiques et bien réalisées.
- Jouabilité18/20
Tout se joue à la souris, les menus sont clairs et accessibles en permanence. Le quadrillage de la carte et la vue souterraine rendent la création des zones et des réseaux très intuitive. Un temps d'adaptation est toutefois nécessaire pour les novices des jeux de gestion-simulation, notamment à cause de la précision des mécanismes de jeu, et il faut de la patience pour réussir à progresser. Mais c'est un tel plaisir de se plonger dans des menus si réalistes, et de voir les conséquences de nos choix se matérialiser avec autant de cohérence, qu'on ne demande qu'à passer encore plus de temps à développer notre ville.
- Durée de vie20/20
Les scénarios sont d'un intérêt limité, mais le jeu prend tout son sens lorsque vous créez librement une ville. Chaque nouvelle ville est une nouvelle expérience, puisqu'il existe une multitude de façons de la développer. De plus, avant d'en créer une nouvelle, vous pouvez modeler la carte et le terrain comme bon vous semble, en modifiant le relief, les arbres, l'eau, les combinaisons de choix étant presque infinies. Tout ça sans compter que Sim City 2000 est tellement addictif que vous pourrez passer des heures sur la même ville. Enfin, si vous accrochez au concept, bien sûr.
- Bande son14/20
Les thèmes midi ont bien vieilli, mais restent très sympathiques et arrivent à créer une ambiance particulière. Ça n'est pas pour rien qu'ils ont été partiellement repris dans les opus suivants. Quant aux bruitages, ils sont plutôt amusants, même s'ils risquent de lasser à la longue car ils ne sont pas assez diversifiés.
- Scénario/
Sim City 2000 fait partie de ces jeux qui n'ont pas besoin de scénario. Bien sûr, les quelques missions sont vaguement scénarisées, mais le principal intérêt du jeu reste la création libre et le développement d'une ville, qui d'ailleurs ne se finit jamais vraiment tout à fait.
Si le premier opus avait posé les bases, Sim City 2000 améliore grandement l'aspect visuel, sonore, et surtout la profondeur du gameplay. La maniabilité est simple et intuitive, et tout est fait pour vous mettre dans l'ambiance. Pour peu que vous accrochiez ne serait-ce qu'un tout petit peu au concept du city-builder, et que vous preniez le temps nécessaire pour progresser dans le jeu, vous vous trouverez en face d'un des jeux les plus réalistes, les plus immersifs et les plus addictifs qui soient.