Bien que Hokuto no Ken ait connu quelques adaptations de qualité, peu d'entre elles ont dépassé les frontières japonaises. Ainsi, si on pleure encore l'absence de Hokuto no Ken Fighting sur le vieux continent, on remerciera comme il se doit Koei de nous avoir servi sur un plateau d'argent ce Fist of the North Star. Doté d'un scénario en béton, de plusieurs personnages jouables sous couvert d'un véritable respect de l'oeuvre originale, Ken's Rage semble être l'oeuvre que tous les fans attendaient. Toutefois, n'envoyez pas tout de suite vos lettres de remerciement à la société japonaise car il arrive parfois que sous des couches de maquillage se cache une laideur sans nom...
Développer un Hokuto no Ken sous forme de beat'em all de masse est en soi une très bonne idée. En effet, le manga de Buronson et Hara nous assénant déjà des combats à 1 contre 50, il semblait judicieux d'opter pour un genre ayant déjà fait ses preuves à l'aide de séries comme Sengoku Basara ou bien encore Dynasty Warriors. Ca tombe bien puisque derrière ce Ken's Rage se cache Koei, spécialiste du genre dont le beat'em all XXL est le fond de commerce depuis des années. Le hic est que ce Fist of the North Star n'est pas du ressort d'OMEGA Force, développeur attitré des Dynasty Warriors, mais de celui d'équipes internes qui semblent encore avoir tout à prouver tant le résultat s'avère désastreux. Pour autant, avant de s'attaquer aux «détails» qui fâchent, penchons-nous sur les maigres qualités du soft à commencer par son scénario ou plutôt ses scenarii.
Sur le plan scénaristique, il est indéniable que Koei a respecté à la lettre l'oeuvre originale. Ainsi, il sera possible de revivre la saga, du moins toute la première partie, en incarnant divers personnages comme Ken, Rei ou bien encore Mamiya, chacun ayant droit à son histoire se déroulant en parallèle des autres. En gros, on profitera d'une soixante de niveaux, tous personnages confondus, durant lesquels on retrouvera avec bonheur l'ensemble des personnages de l'oeuvre originale à l'image de Raoh, Toki, Ryuga, etc. Mieux encore, il sera permis d'en incarner certains par le biais du mode Fiction. Kezako ? Il s'agit tout simplement de nouvelles aventures qui nous permettront de diriger Jagi, Shin, Souther et bien plus encore. Jusque-là, tout va bien d'autant qu'il est permis de jouer avec un ami en splitté dans le dernier mode cité. Ok, il n'est pas possible de jouer online ou d'opter pour une scission horizontale de l'écran mais dans l'absolu, tout ceci rallonge d'autant plus la durée de vie. A contrario, on se félicitera de pouvoir profiter des doublages japonais bien meilleurs que leurs ignobles homologues américains eux aussi disponibles. Voilà, passons maintenant si vous le voulez bien au reste qui représente plus ou moins le degré zéro du jeu vidéo.
Ainsi, bien qu'on ne puisse pas en vouloir à Koei d'avoir repris la formule de ses précédents jeux, on émettra moult réserves dont le tout est exploité. De fait, chaque chapitre du jeu vous obligera à traverser de vastes étendues dont l'ambiance apocalyptique ne masque en rien la pauvreté graphique. Vous devrez alors jeter un oeil à la mini-map en haut de l'écran pour savoir où vous rendre. Bien entendu, de très nombreux ennemis viendront vous mettre des bâtons dans les roues, ceci vous permettant de gagner des points de karma puis des points de talent. Cette manne vous servira ensuite à obtenir de nouvelles techniques spéciales (8 en règle générale) et autres talents synonymes d'une plus grande jauge de vie, d'une défense accrue ou de meilleurs dégâts à distance. Avouons que l'évolution est bien pensée, celle-ci renvoyant énormément au Sphérier de Final Fantasy X en cela qu'il vous faudra débloquer un des talents disposés sur un damier pour pouvoir accéder à un autre et ainsi de suite. Bref, le tout permet d'obtenir de façon assez précise le type de combattant qu'on désire. L'embêtant est qu'au bout du compte, cette évolution ne permet pas assez de variations dans notre façon d'aborder les combats.
En effet, s'il est possible de choisir quatre techniques spéciales, associées à la croix de direction, d'utiliser des armes de fortune ou de concentrer certaines attaques, les rixes tournent vite en rond à cause du nombre d'assaillants. En somme, on choisira à chaque fois les attaques proposant un large rayon d'action pour faire exploser trois ou quatre bad-guys en même temps vu que les coups portés sont d'une mollesse sans nom. C'est bien simple, chaque coup porté profite d'un magnifique temps de latence, les choppes devant également composer avec ce défaut ! On se retrouve alors avec une jouabilité d'une lourdeur sans nom à laquelle on rajoutera des soucis de visibilité et de précision. A ce sujet, les développeurs ont également eu la bonne idée d'injecter quelques phases «originales» qui prêtent toutes à sourire. Entre les phases d'escalade inutiles, les endroits où on nous demande de pousser des caisses ou les objectifs nous intimant de détruire 18 statues pour ouvrir une porte (help !), on a parfois l'impression d'assister aux premiers balbutiements du jeu vidéo. On pouffera également devant le fait que Ken ne puisse sauter au-dessus d'une grille qu'il vient de plier en deux, ceci l'obligeant alors à faire de longs détours pour se retrouver de l'autre côté de ladite grille. Ri-di-cu-le ! Autant que le fait d'être obligé de dénicher des lances pour aligner deux gardes perchés sur un container qu'on ne peut bien évidemment pas atteindre, afin d'ouvrir une porte qu'on ne peut bien évidemment pas détruire !
Mais comme on dit, le ridicule ne tue pas même si dans le cas de Ken's Rage, les ennemis ne seront pas vraiment de cet avis tant l'hémoglobine coule à flots. Il faut dire qu'avec l'Aura spirituelle, technique nous permettant de gagner en puissance pendant un court laps de temps, les ennemis ne pourront plus bloquer nos coups. Cela dit, si l'ensemble des personnages dispose de ladite technique, on regrette amèrement qu'il y ait un tel déséquilibre entre les fighters ou que la puissance des coups spéciaux ne soit pas totalement prise en compte. Ainsi, les adeptes du Nanto se montrent beaucoup plus puissants que ceux du Hokuto car profitant d'une vitesse et d'une puissance supérieures. Un peu illogique pour un jeu dédié à l'héritier du Hokuto Shinken. Cependant, face à un boss, l'une comme l'autre école seront au même niveau. Cependant, et au risque de nous répéter, ces combats traînent en longueur à l'image des niveaux désarmant de banalité et profitant d'un level design catastrophique. Au final, la technique pour battre le big boss sera toujours la même : casser sa garde en utilisant un combo spécifique, utiliser l'Aura Spirituelle et ce jusqu'à ce qu'on puisse placer un coup de grâce synonyme de plusieurs QTE pour l'achever. Et attention car si jamais vous vous loupez, le bougre récupérera pas mal de vie du moins en mode Normal ou Difficile. D'ailleurs, on conseillera à tous de jouer dès le départ en Facile histoire de profiter un tant soit peu de l'aventure. Dans tous les cas, il vous faudra vous armer de beaucoup de patience et être extrêmement indulgent pour pardonner tous les écueils énoncés plus haut. Qu'on soit fan ou non de l'oeuvre originale, on aura également du mal à accepter un prix de vente bien trop élevé nullement représentatif d'une qualité qui semble s'être fait la malle avant même le début du projet. Autant garder ses deniers pour se replonger dans le manga ou la série TV actuellement rééditée.
- Graphismes9/20
S'il est aisé de nous balancer des décors minimalistes grâce à l'univers post-apocalyptique de Hokuto no Ken, il faut avouer que Tecmo Koei fait fort puisque Ken's Rage jeu aligne les environnements sans saveur aux textures baveuses du début à la fin. On évitera également de trop s'étendre sur le clipping ou les effets spéciaux liés aux explosions de corps passablement médiocres. Heureusement, le character design est fidèle au travail de Tetsuo Hara, ceci nous permettant de retrouver l'ensemble des personnages du manga ainsi que leurs nombreux adversaires. Les techniques spéciales, elles, sont mi-figue mi-raisin mais s'avèrent pour la plupart réussies car une fois encore très respectueuses de celles de l'oeuvre originale.
- Jouabilité8/20
Ok, ce n'est pas OMEGA Force qui est à la barre mais comment diable une société spécialisée dans le genre depuis des années peut nous pondre un gameplay d'une telle pauvreté ? Si l'évolution du personnage, rappelant celle de Final Fantasy X, est intéressante via l'attribution de points de talents qu'on utilisera pour augmenter nos caractéristiques, tout le reste est d'une affligeante nullité. Les combats sont mous, lents et extrêmement laborieux malgré l'utilisation de combos bien sanglants et autres techniques spéciales. L'ensemble manque de précision, la difficulté est mal gérée, les sauts sont pitoyables et l'IA est inexistante. Certes, le tout deviendra un peu plus abordable à mesure qu'on gagnera en puissance et en technique mais comment pardonner à Koei cet énorme «je-m'en- foustime» synonyme de jouabilité aux ras des pâquerettes vieille d'une dizaine d'années.
- Durée de vie14/20
Le mode Légende permet de jouer avec plusieurs personnages (Ken, Rei, Mamiya...) afin de revivre de façon très respectueuse le scénario du manga. Au final, on profitera d'une soixantaine de niveaux tous personnages confondus. Le problème vient du fait que chaque chapitre est d'une longueur affligeante et nous achève dès les premières minutes à cause d'une absence totale de dynamisme. Ceci étant dit, vous aurez la possibilité de jouer avec davantage de personnages (dont certains méchants garçons comme Shin ou Raoh) dans le mode Fiction, seul ou avec un ami en splitté. L'embêtant est que le tout est aussi nul que le mode Légende et qu'on enchaîne les combats inintéressants pendant de très (trop) longues minutes. Même constat pour le mode Défi vous permettant d'affronter les boss afin d'être classé en ligne.
- Bande son14/20
Oubliez les doublages américains et optez dès le départ pour les voix japonaises bien plus percutantes. Si on retrouve des thèmes aux accents hard-rocks convenant parfaitement à l'esprit hard-boiled de la saga, les musiques demeurent moins saisissantes que celles de l'anime.
- Scénario16/20
Sans aucun doute, l'élément le plus probant de Fist of the North Star. Le mode Légende nous propose de revivre l'histoire de Ken et ce de façon très fidèle. On pourra même incarner d'autres personnages dont le traitement est aussi respectueux. Une excellente nouvelle donc pour un résultat très probant.
Au delà de l'immense respect de l'oeuvre originale, Fist of the North Star : Ken's Rage n'en reste pas moins un mauvais titre. Blindé de défauts, lent, mou et totalement inintéressant du début à la fin, le titre de Koei stigmatise à lui tout seul ce que peut donner un magnifique ratage basé sur une franchise malheureusement sous-exploitée. Dommage d'autant que l'idée de départ était parfaitement adaptée au manga original. On pourra toujours se satisfaire de la bonne durée de vie, des nombreux personnages à incarner et des débordements gore mais il va sans dire que cela ne sauvera pas notre pauvre Kenshiro du naufrage. Comme dirait l'autre, tu ne le sais pas encore mais tu es déjà has-been.