Après avoir réservé la primeur et l'exclusivité du premier contenu téléchargeable de Mafia II aux joueurs PS3, 2K Games livre l'histoire de Jimmy à tous les possesseurs du jeu, sans exception. Doit-on craquer pour ce DLC ? Quelle est sa réelle fonction ?
Le côté désagréable des exclusivités négociées (souvent à prix d'or) pour certains contenus téléchargeables de jeux populaires comme Mafia II, c'est que le contrat en question se moque bien de donner naissance à des grosses incohérences. Jimmy's Vendetta en est la preuve puisqu'il est une sorte de suite à Betrayal of Jimmy, le fameux contenu additionnel inclus dans la version PS3 mais absent des disques 360 et PC. En s'offrant cette seconde partie pour un peu moins de 8€, deux tiers des joueurs se voient donc propulsés dans la peau d'un type dont ils ignorent tout et qui possède un passé qu'ils ne découvriront de facto jamais. En effet, Jimmy n'a pas le moindre rapport avec Vito et l'histoire principale de Mafia II, il est donc indispensable de l'avoir côtoyé dans Betrayal of Jimmy pour situer l'état d'esprit du bonhomme et savoir pourquoi il veut nettoyer Empire Bay tout entier à coups de fusil à pompe. Mais après avoir réalisé les fantasmes à caractère génocidaire de Jimmy, on réalise que la personnalité du "héros" n'a pas le moindre intérêt, pas plus que les ersatz de missions qu'on nous impose ici cinq heures durant.
Jimmy's Vendetta est un contenu honteusement massacré, bâclé, creux, délié qui, au lieu d'apporter une valeur ajoutée à Mafia II, en fait ressortir tous les défauts. Si la première cinématique (la seule, jusqu'au dénouement) a le mérite d'introduire Jimmy assez explicitement, la suite n'est qu'une succession de missions de vols de voitures et de gunfights grotesques. Esseulé, passif, le joueur enquille bêtement les objectifs sans qu'il n'en retire la moindre satisfaction, le moindre avantage, si ce n'est de garnir son compte en banque pour aller tout dépenser en armement. Imaginez qu'il n'y a pas l'ombre d'une cut-scene durant toute l'aventure et que le seul lien entre les missions est un écran habité par un artwork et un texte de trois lignes ! Le plus succinctement du monde, on nous résume en quelques mots les conséquences qu'a eu notre dernière sortie et la réaction qu'elle nécessite chez Jimmy. Autrement dit, le contenu a été allégé en cinématiques, n'est pas mis en scène, est dénué de toute narration, fonce en ligne droite, sous-exploite le personnage et oublie tout ce qui rend Mafia II séduisant au point d'être un contre-pied parfait du jeu original ! Jimmy's Vendetta ou comment renier sa propre œuvre pour récolter quelques deniers supplémentaires...
Certes, il existe un contre-argument qui dit que Jimmy's Vendetta, c'est du scoring bête et méchant assumé, en témoignent les tableaux post-mission qui attribuent une note à votre prestation. Privilégier la performance dans des missions flashs est une chose, saquer l'univers Mafia II à ce point en est une autre. Pressé par le chrono, le joueur doit donc voler des caisses, exploser des stations-service et taper sur la tronche de tout ce qui a deux bras et deux jambes en soignant son skill, en roulant à toute berzingue et en se prenant pour un pilote de rallye passé maître en l'art du dérapage. Si vous combinez tous ces talents, si vous tracez et augmentez la difficulté, vous décrocherez un A comme à l'école et pourrez bomber le torse online en comparant vos résultats à ceux des autres joueurs qui ne savaient pas quoi faire de 8€. Un système de multiplicateur permet d'atteindre de meilleurs scores et chaque frag est remarqué par un affichage dynamique de points, comme dans The Club. Idem en ce qui concerne la conduite, une fois les 100 mp/h dépassés, un compteur de points apparaît et grimpe proportionnellement à la vitesse atteinte. Chic alors, mais le mécanisme fait quelque peu doublon avec le chrono qui impose déjà de ne pas flâner en route.
Mafia II est un bon jeu mais quelques sales tics et défauts l'ont empêché de briller totalement sur le marché du jeu d'action. Inspirés comme jamais, les développeurs se sont appuyés sur ces mêmes tares, les ont accentuées et ont fait en sorte qu'elles pourrissent toute l'extension. En tête de liste, la difficulté mal dosée a été transformée en IA d'une rare idiotie mais redoutable au point qu'on progresse par l'échec, frustré par certaines situations burlesques. Ainsi, le joueur doit se coltiner une présence assidue et obsessionnelle de la police, pas dérangée par des coups de feu de la pègre d'Empire Bay mais excitée par la moindre balle tirée par Jimmy. La conséquence c'est que la mission la plus insignifiante et moins risquée du monde tourne à l'arrachage de cheveux, Jimmy luttant simultanément face à des gorilles armés jusqu'aux dents et les forces de l'ordre qui l'ont pris en grippe. C'est moins le cas durant un vol de voiture mais ce type de mission, bien trop fréquent (un tiers du total), ne sert qu'à meubler l'"aventure". Les véhicules tant convoités se situent systématiquement à proximité de la position du joueur qui n'a même pas d'investigation à faire, la tâche lui étant mâchée d'avance.
- Graphismes18/20
Le moteur et la technique de Mafia II sont les seuls à échapper au massacre dans ce DLC. Évidemment, toute remarque effectuée sur le jeu original vaut pour l'extension. Toutefois, il faut composer sans mise en scène, sans cinématique, carrément boudée dans ce contenu téléchargeable. Du coup, l'ambiance n'y est plus, la personnalité des protagonistes non plus.
- Jouabilité9/20
Les défauts de Mafia II sont plus que jamais mis en avant dans Jimmy's Vendetta, une vraie compilation de tout ce qui nous a irrités dans l'aventure de Vito. Difficulté mal dosée, police surexcitée, progression par l'échec, missions plates, sans intérêt et répétitives... Le principe de scoring peut justifier certains choix mais certainement pas une telle auto-flagélation.
- Durée de vie10/20
La trentaine de missions qu'on nous promettait n'est en fait qu'une succession d'objectifs basiques à accomplir le plus rapidement possible. Comptez 5 heures pour en faire le tour, ce qui aurait pu suffire si le plaisir était au rendez-vous. Ce n'est pas le cas et pour couronner le tout, Empire Bay ne propose rien de plus ou d'original, en rapport ou non avec le personnage de Jimmy.
- Bande son15/20
Comme pour l'aspect graphique, l'ambiance sonore est une rescapée. Toutefois, comment évaluer des doublages qui n'existent pas ? En pointant simplement du doigt les interventions risibles de la radio de la police.
- Scénario4/20
Jimmy est un gros bourrin écervelé sans charisme. Ça, c'est une chose. Le plus ennuyeux, c'est l'absence inexplicable de cinématiques et de lien scénaristique, le bâclage sans nom du background et l'insulte que le DLC peut faire au jeu original.
Jimmy's Vendetta est à éviter, à tout prix. Mixant tous les défauts de Mafia II, il n'apporte strictement rien d'intéressant, que ce soit en termes de gameplay ou d'ambiance, inexistante. Répétitif, honteusement bâclé, ce contenu téléchargeable est l'exemple-type du DLC imaginé pour engranger des recettes faciles, profitant des joueurs qui ne veulent rien manquer de l'offre globale Mafia II. Le personnage de Jimmy est transparent, les missions couillonnes, le gameplay à s'arracher les cheveux... Comme il n'y a pas de petites économies, gardez vos 8€.