Dans cet impitoyable monde vidéoludique, on a pour habitude d'attendre des lunes entre l'annonce d'un gros jeu et sa disponibilité. Bien sûr, on excuse sans mal les créateurs, les grosses productions demandant souvent un long développement. Mais il faut croire que ce n'est pas le cas pour Square Enix, qui nous fournit Final Fantasy XIV à peine plus d'un an après son annonce officielle ! C'est rapide... peut-être trop.
Annonce surprise de l'E3 2009, Final Fantasy XIV a laissé cois de nombreux joueurs. Il faut dire qu'il y avait de quoi. Alors que nous attendions encore le treizième épisode depuis belle lurette, voilà que Square Enix nous colle devant les yeux un nouveau jeu grâce à une bande-annonce magnifique témoignant de l'ambition de ce nouveau MMORPG. Bien sûr, on sait que la boîte japonaise n'en est pas à son coup d'essai en la matière car Final Fantasy XI était déjà exclusivement online. On peut donc se dire que Final Fantasy XIV a bénéficié de cette précédente expérience. Mais est-ce à raison ?
Tout d'abord, comme tout jeu de rôle online ou non, FF XIV dispose d'un univers unique : Eorzea. Dans les landes de cette région, douze dieux bâtirent douze cités-états afin de peupler ces magnifiques terres. Bien sûr, qui dit humanité dit guerre, et il n'aura pas fallu longtemps aux mortels pour se désunir les uns les autres afin de faire couler le sang. Mais après la terrible attaque de l'empire de Garlemald, le peuple comprit qu'il fallait se rassembler qu'importe les races ou la politique afin de combattre cet ennemi commun. Pour cela, il était nécessaire de construire des armées constituées de talentueux aventuriers afin de leur apprendre à se battre pour défendre les terres d'Eorzea. Et voilà que vous entrez en jeu...
Premier passage obligé, la création du personnage. Vous avez le choix entre différentes races allant des Miqo'tes, sortent de femmes-chats, aux Lalafells, mignons lilliputiens, en passant par des êtres plus standards comme les Hyurs. Bien que la taille et le physique diffèrent grandement entre les races, cela n'aura strictement aucune influence sur le gameplay, que vous fassiez 50cm ou 2m70. La création du personnage se veut plutôt permissive puisqu'on peut modifier pas mal de détails du visage ainsi que certains signes distinctifs, même si les changements sont souvent mineurs. Enfin, vous pourrez choisir un métier parmi un éventail assez large. Si dans la plupart des MMO ce dernier choix est le plus important, sachez qu'ici il sera presque anecdotique dans Final Fantasy XIV. Mais comment est-ce possible ? Explications...
Que vous choisissiez gladiateur, archer ou élémentaliste, rien ne vous empêchera d'aller voir dans les autres jobs si l'herbe est plus verte. A vrai dire, dans Final Fantasy XIV, c'est l'outil qui fait le métier. Quel que soit votre choix de départ, il vous suffit de prendre un marteau pour devenir forgeron, ou encore un poing américain pour devenir pugiliste ! Bien sûr, apprendre tous les jobs prendrait trop de temps, et vous devrez sans doute vous spécialiser dans quelques branches pour être efficace. L'avantage, c'est que vous pouvez garder la plupart des compétences gagnées dans une classe pour les utiliser lorsque vous en jouez une autre ! Un gladiateur qui lance des magies ? C'est possible ! De ce fait, façonner un personnage selon ses envies devient un jeu d'enfant et l'expérimentation sera primordiale pour trouver sa voie. Attention toutefois à ne pas trop s'éparpiller. Si vous mettez principalement vos points dans la force, il est évident que vos magies seront inefficaces, causant ainsi les railleries de vos partenaires ou leur courroux s'ils sont moins patients.
Mais si une bonne partie des jobs vous enverra face à de vils êtres maléfiques, sachez que les plus pacifistes d'entre vous peuvent aussi opter pour un métier d'artisanat, comme par exemple forgeron ou cuisinier. Ici, vos talents seront utilisés pour le crafting, vous permettant de créer des outils, armures, armes, plats, bref tout ce qui peut aider vos compagnons à survivre dans les zones dangereuses d'Eorzea. Chaque tentative sera récompensée d'expérience vous permettant de développer vos compétences, exactement comme les combats des métiers offensifs. Enfin, il reste trois autres métiers, dit de "récolte" qui consistent à se promener dans les plaines et autres zones parfois mal habitées pour trouver des matériaux et denrées rares. Ces trois spécialités sont botaniste, mineur et pêcheur, mais nous reviendrons dessus dans quelques instants...
Vous l'aurez compris, Final Fantasy XIV semble avoir du potentiel, laissant le joueur libre de faire évoluer son personnage dans la branche souhaitée, et lui permettant même d'être totalement pacifiste s'il le souhaite. Mais la théorie ne vaudra jamais la pratique, et qui dit pratique dit gameplay... Et c'est là que le tableau se noircit. Autant le dire tout de suite, les doutes posés au début de cet article se vérifient d'eux-mêmes dès les premiers instants : Final Fantasy XIV est sorti bien trop vite. Avant même d'avoir l'occasion de taper son premier monstre ou de faire sa première épée, on est choqué par le manque total d'ergonomie du titre. Que ce soit au combo clavier/souris ou à la manette, impossible de trouver une configuration convenable qui permette de s'y retrouver aisément. Le problème arrive surtout dès que l'on veut faire un tour dans les menus. Rien que pour vérifier les objets à notre disposition, modifier ses raccourcis de compétences ou encore changer d'équipement, c'est vite la croix et la bannière. Le temps que l'on perd à faire des actions pourtant simples est forcément rageant, surtout quand cela a lieu en combat.
Les combats, parlons-en justement. Dans l'idée, la possibilité de tourner autour de l'ennemi pour l'attaquer sur le flanc ou dans le dos est plutôt intéressante. Certes, on est dans un jeu de rôle et vous ne pouvez pas esquiver les attaques adverses manuellement, mais l'ensemble reste dynamique... en théorie. Car en fait, un sacré temps de latence sanctionne toutes vos actions, parfois bien au delà de ce que l'on a l'habitude de voir dans le genre. Si cela risque de vous perturber au corps à corps, autant dire que vous risquez de piquer quelques crises si vous jouez des classes à distance, comme les classes de magies ou les archers. Parfois, les ennemis auront débarqué sur vous alors qu'ils semblaient pourtant bien éloignés et sans que vous ayez eu le temps de décocher votre deuxième flèche. De plus, en groupe, la gestion étonnante de l'aggro enverra souvent les monstres attaquer directement votre magicien, alors que le tank fait tout le nécessaire pour attirer l'attention de l'ennemi, comme jongler avec des tronçonneuses par exemple.
Concernant les jobs de récoltes, seul un être doté d'une patience extraterrestre pourra y trouver un quelconque intérêt. En fait, les trois jobs fonctionnent à peu près de la même façon. Tout d'abord, vous utilisez un pouvoir pour trouver l'endroit idéal. Ensuite, une fois sur place, vous passerez par un mini-jeu, un peu sur le principe du chaud-froid, où il faudra appuyer au bon moment pour réussir votre coup, en sachant que vous avez peu d'essais et que la chance rentre dans le calcul. Le problème, c'est que chacune des phases du mini-jeu, quel que soit le métier, est d'une lenteur absolument abominable ! Par exemple, pour la pêche. Il faut attendre de longues secondes avant de choisir la profondeur de l'hameçon, d'attendre une prise, ou encore de tenter de la remonter, en sachant qu'il peut y avoir plusieurs essais. En tout, c'est bien une minute et demie qu'il vous faudra pour chaque tentative. Quand on sait à quel point les échecs sont nombreux... Bref, il semble évident que ce genre d'élément n'a pas encore été travaillé de façon complète par Square Enix...
On en arrive à la question que tout le monde se pose : et les quêtes alors ? Dès le début de l'aventure, vous aurez accès à des mandats disponibles selon votre job. Si une partie vous demandera d'aller basher du streu-mon à gauche et à droite, d'autres vous demanderont d'utiliser vos talents de récolteur ou d'artisan à bon escient, dans le but de gagner des gils, voire quelques items bienvenus en relation avec la branche de métier concernée par le mandat. Autant le dire, c'est du grand classique, bien qu'ils doivent être réalisés en un temps limité. L'originalité vient sans doute du fait qu'il vous est possible d'échanger vos mandats finis par d'autres mandats afin d'augmenter la récompense de ces derniers. Du coup, plus vous faites de mandats, plus les suivants vous rapporteront. Bien que ce ne soit pas la grande révolution, c'est un point plutôt appréciable. Outre les mandats, vous aurez accès à des quêtes bien plus longues et scénarisées vous demandant d'effectuer des tâches spécifiques comme par exemple escorter un NPC. Pour une fois qu'un MMO laisse un peu place à l'histoire, on ne s'en plaindra pas, même s'il faut bien avouer que la mise en scène de ces passages est tellement molle que les plus nerveux d'entre nous auront du mal à les supporter. Que voulez-vous, on ne peut pas tout avoir.
Reste alors la réalisation, qui sort du lot, notamment d'un point de vue technique. Les environnements en plein air en jettent pour peu que l'on ait un PC qui tienne la route. Oui car il faut le dire, Final Fantasy XIV est tout de même bien gourmand. Peu importe, le résultat est là, et même si on ne prend pas non plus une claque à chaque image, les textures sont vraiment appréciables. En ville les décors sont plutôt détaillés même si le choix de faire des rues aussi larges donne des impressions de vide. D'ailleurs, les cités auraient sans doute gagné à être plus petites car l'éloignement de chaque bâtiment peut lasser à la longue. Du côté de la bande-son, c'est du Square Enix tout craché. Entendez par là que vous trouverez quelques thèmes grandioses, notamment le thème principal, même si les habitués des épisodes offline risquent d'avoir quelques impressions de déjà-vu. Pour finir, Final Fantasy XIV est un titre qui possède un potentiel indéniable, notamment grâce à la liberté laissée au joueur, sa réalisation artistique et son côté scénarisé. Malheureusement, en l'état, le gameplay est lassant au mieux et rageant dans la plupart des cas, sans compter une ergonomie indigne d'une production de cet acabit. Espérons que Square Enix rectifie le tir dans le futur...
- Graphismes16/20
Techniquement, et en restant dans le contexte d'un MMORPG, Final Fantasy est une belle réussite. Les plaines ouvertes à perte de vue donnent vraiment envie de courir vers l'horizon pour découvrir de nouvelles contrées. Les villes bénéficient en général du même travail. Seul problème, dans les deux cas, une sensation de vide risque de vous prendre à la gorge. Côté personnages, entre les différentes races, les personnalisations et les équipements, dur de trouver deux joueurs qui se ressemblent ce qui est toujours un bon point. Le bestiaire est tout aussi inspiré.
- Jouabilité10/20
Difficile de mettre une note à ce critère. Si les idées sont bonnes et si les combats sont dynamiques, les latences et l'ergonomie totalement inadaptée sont bien trop importantes pour passer inaperçues. Pire encore, ces deux défauts sont omniprésents, rendant certaines classes pratiquement injouables en l'état. Les phases de récoltes sont affreusement rébarbatives bien qu'agréables dans l'idée. Il ne fait nul doute que ces éléments seront modifiés par la suite, mais le jeu étant déjà sorti...
- Durée de vie13/20
Les possibilités offertes par le système de jobs sont pratiquement infinies, et il ne fait aucun doute que des joueurs les expérimenteront pendant fort longtemps. De leur côté malheureusement, les mandats ne sont pas très originaux et il faudra espérer plus de quêtes différentes par la suite pour tenir en haleine les joueurs. Il faudra aussi espérer une refonte de quelques phases, comme la récolte citée plus haut, pour le moment lassante à en mourir.
- Bande son16/20
Plus que de simples compositions orchestrales, Final Fantasy XIV peut se targuer de quelques mélodies diablement accrocheuses, qui vous restent dans la tête bien longtemps après avoir quitter votre écran. Certes, cela est aussi dû au genre du jeu, qui vous colle souvent dans la même zone avec la même musique, mais en général, quand vous n'avez pas couper le son au bout de trois heures de jeu, c'est plutôt bon signe.
- Scénario13/20
Partant d'une trame plutôt classique, Final Fantasy XIV propose des quêtes scénarisées qui permettent de poursuivre l'histoire une fois la partie lancée. Certes, vous n'aurez pas besoin de reprendre vos Kefka pour comprendre ce qu'il se passe, mais on ne peut pas dire que ce soit le cas de tous les jeux du genre. Par contre, il faudra faire avec une mise en scène parfois un peu maladroite et mollassonne, mais rien de bien grave.
Final Fantasy XIV aurait pu être le rêve de tout joueur de MMORPG. Un jeu qui laisse libre cours à l'imagination du joueur pour cumuler les métiers et faire le personnage qu'il veut des pieds à la tête. Malheureusement, au jour de sa sortie, le titre souffre d'un effroyable manque de finition et d'ergonomie causant des problèmes de parité évidents entre les classes, et rendant certains combats pénibles. Si Square Enix peut sans doute modifier la donne pour le futur, nous ne pouvons que constater que le résultat à l'heure actuelle est loin d'être satisfaisant, comme le font déjà remarquer les joueurs d'ailleurs.