Personne ne dira le contraire, la ludothèque de la Megadrive est connue pour regorger d’une quantité innombrable de jeux de plates-formes. C’est évidemment une bénédiction pour les aficionados du genre même si, c’est le revers de la médaille, ils ne sont pas tous de qualité irréprochable. Il convient donc de faire le tri et parfois, perdu au milieu de la médiocrité ambiante, un jeu méconnu parvient à sortir du lot. C’est le cas de Capt’n Havoc qui, même s’il n’est pas exempt de tout défaut, est un jeu sympathique dans un univers de piraterie maritime qui rappelle sur certains points Sonic the Hedgehog. Un nouveau vent d’aventure souffle sur la Megadrive, fermez les yeux et laissez-vous emporter.
Havoc, capitaine de navire au grand cœur écoulait des jours heureux avec Tide, son fidèle ami d'enfance. Leur journée type ? Sillonner les océans le visage au vent pour combattre les infâmes pirates qui répandent chaos et destruction aux quatre coins du globe. Leur quotidien sera bouleversé un beau matin, lors de la découverte d'une jeune fille (Bridget) inconsciente échouée au bord de la mer. Cette dernière reprendra vite du poil de la bête et vous confiera son lourd secret : elle détient une carte au trésor qui marque l'emplacement d'une émeraude aux pouvoirs extraordinaires. Toute personne en possession de ce trésor mystique se verra conférer une force herculéenne, lui permettant de mettre à mal la plus grande des flottes navales et de conquérir le Monde. Comme on pouvait s'en douter, un vil pirate va pointer le bout de son nez et voler la carte ; ou devrait-on dire son museau puisqu'il s'agit du terrible Bernardo : un crocodile-pirate animé de sombres intentions. Comme un malheur n'arrive jamais seul, un de ses sous-fifres va kidnapper Tide et Bridget. Larguez les amarres et dressez fièrement l'étendard, il est temps de secourir la belle, corriger le méchant et sauver le Monde tout entier tant qu'on y est !
Capt'n Havoc se présente sous la forme d'un jeu de plates-formes tout à fait classique puisqu'il se décompose en sept niveaux à l'univers bien particulier divisés chacun en deux zones. Vous serez ainsi transporté dans des décors divers et variés qui abordent chacun un thème unique : la ville incendiée, le monde sous-marin, la montagne enneigée et bien plus encore. Au niveau des graphismes, il faut dire que les capacités de la machine de Sega sont plutôt bien exploitées. Les couleurs sont vives et chatoyantes, les animations du héros sont irréprochables et de magnifiques effets de distorsion sont aussi de la partie. Les concepteurs ont accordé une attention toute particulière aux expressions faciales de Havoc. Ils doivent d'ailleurs être un petit peu sadiques puisque notre héros dispose d'une dizaine d'animations différentes selon le mauvais coup qu'il se prend : il peut être carbonisé, gelé, électrocuté, écrabouillé par un rocher et subir encore d'autres sévices corporels. L'ambiance sonore n'est pas non plus en reste et propose de nombreuses mélodies entraînantes dotées d'un petit côté orchestral pas vilain du tout.
Abordons à présent ce qui définit si un jeu de plates-formes entre dans la légende ou sombre dans l'anonymat : le gameplay. Ici, l'accent est clairement mis sur la simplicité puisque l'on se dirige à la croix directionnelle et que tous les boutons servent à effectuer l'action de saut. Une fois dans les airs, il faut presser à nouveau cette touche pour que Havoc fasse un cumulet avant et inflige un coup de pied vertical à ses ennemis. Il faudra d'ailleurs du temps pour que le joueur s'habitue à ce système d'attaque, toutefois indispensable pour progresser dans le jeu. En effet, le timing devra être extrêmement précis si vous voulez faire mouche. Il n'est pas rare de se ruer sur un adversaire et de se prendre une bonne correction à cause d'un timing défectueux. Au début, on se tâte, on retient sa respiration et on hésite avant d'oser se lancer dans cette attaque qui peut donc souvent s'avérer suicidaire. Mais avec le temps, vous prendrez vos marques et les ennemis n'auront plus qu'à trembler quand ils vous entendront approcher. Il est finalement possible d'effectuer une roulade pour éviter les coups au dernier moment, et une fois encore, une période d'adaptation sera essentielle avant d'avoir le réflexe d'utiliser cette esquive.
Du côté du level design et de la construction des niveaux, le jeu présente un paradoxe plutôt intrigant. Quand il se déplace, le personnage accélère brutalement et atteint une vitesse de pointe plutôt élevée. Cependant, les niveaux regorgent de phases de plates-formes millimétrées qui demanderont de progresser avec une prudence extrême. De la même façon, il n'est pas rare que des ennemis (en particulier ces satanés oiseaux) sortent de nulle part et vous tombent directement dessus. Il convient donc encore une fois d'avancer à tâtons. Des éléments de décor sont également inspirés de Sonic the Hedgehog : c'est par exemple le cas des ressorts pour prendre de la hauteur, des plates-formes qui se balancent de droite à gauche et de certaines pentes abruptes. On se souvient que la vitesse du célèbre hérisson bleu est en grande partie influencée par l'inclinaison du sol ; et dans Capt'n Havoc, on sent aussi cette volonté de la part des concepteurs. A la différence près que le moteur physique du jeu n'est pas aussi poussé que chez la célèbre mascotte de Sega.
La difficulté du jeu, quant à elle, va crescendo. Si les premiers niveaux sont une véritable promenade de santé, les derniers sont à proscrire pour les plus irritables d'entre vous. L'accélération brutale et imprévue de Havoc quand il est dans les airs rend les phases de plates-formes vraiment délicates. Les concepteurs seront d'ailleurs un peu sévères dans certains niveaux où la moindre chute sera directement accompagnée par la perte d'une vie et un retour au checkpoint précédent. Plus fort encore : des piques qui provoquent une mort instantanée sont aussi dispersées sur les plafonds et les murs. Contre les boss, même vos réflexes les plus exacerbés ne vous permettront pas d'en sortir en un seul morceau. Il faudra apprendre par cœur les mouvements du vil envoyé des enfers pour les éviter et d'un autre côté, il faudra trouver à quel moment il est vulnérable pour pouvoir lui infliger des dégâts. Malgré une difficulté qui devient assez vite élevée, Capt'n Havoc est sans conteste un jeu de qualité qu'il convient de conseiller à tous les amateurs du genre.
- Graphismes16/20
Les couleurs sont vives, les sprites sont grands, les animations qui composent le héros sont nombreuses et détaillées, la fluidité est exemplaire (même quand l’écran est rempli d’ennemis) et les effets de distorsions sont splendides. Si on voulait se faire l’avocat du diable, on pourrait dire que les décors sont un tantinet répétitifs et que les ennemis ne sont pas aussi bien animés que le personnage principal. Enfin, on est vraiment en train de chercher la petite bête. Pour faire court : le jeu est beau, tout simplement.
- Jouabilité14/20
Le gameplay joue la carte de la simplicité mais il faudra tout de même un temps d’adaptation pour en apprécier toute la subtilité. Le héros a tendance à accélérer brutalement (que ce soit sur le sol ou dans les airs) et le coup de pied aérien ressemble plus à une attaque suicide qu’à autre chose s’il n’est pas maîtrisé à fond. Le level design, quant à lui, est de temps à autre inspiré des versions Megadrive de Sonic the Hedgehog, sauf que la physique est vraiment moins bien retranscrite que chez ce très cher hérisson bleu. La conséquence est que l’on a parfois la sensation que Havoc s’immisce dans l’univers d’un autre héros et qu’il n’évolue pas dans un environnement adapté à ses propres capacités physiques.
- Durée de vie13/20
Les sept niveaux possèdent chacun un univers différent et se décomposent tous de deux sous-étapes. On est dans la moyenne des jeux du genre. A cause d’une difficulté qui devient relativement élevée, le jeu ne se finira pas à la première partie (loin de là) et il faudra notamment apprendre par cœur les mouvements des boss. On notera finalement que les concepteurs ont artificiellement gonflé la durée de vie en créant des passages où l’on peut perdre une vie à la moindre erreur ou en proposant des niveaux de plus en plus longs qui deviendront vite répétitifs.
- Bande son16/20
Un petit tour dans le sound test (qui est plutôt original puisqu’il mettra en scène un orchestre dirigé par le héros du jeu), suffira à convaincre les plus sceptiques qu’une attention toute particulière a été accordée aux musiques. Elles sont nombreuses, parfois douces, parfois entraînantes et même si elles ne sont pas inoubliables, on se surprend à les fredonner en balançant la tête de gauche à droite. Les bruitages sont volontairement simplistes et contribuent à l’ambiance générale bon enfant du jeu.
- Scénario/
Les illustrations qui accompagnent la brève histoire du jeu sont réussies mais ce n’est qu’un prétexte pour se jeter dans l’aventure !
Les vents marins nous apportent là un jeu de plates-formes fort sympathique qui, à défaut de faire trembler les classiques du genre, parvient tout de même à sortir du lot pour proposer une expérience honorable. Ce qui frappe avant tout, c’est qu’aucun aspect du jeu n’a été bâclé : graphismes somptueux, musiques envoûtantes et gameplay intéressant qui demande tout de même un temps d’adaptation. Côté construction des niveaux, les concepteurs se sont allègrement inspirés de l’excellentissime Sonic the Hedgehog. Et s’inspirer, c’est bien, mais il faudrait faire attention à ne pas perdre son âme en chemin. Soyons clairs : Capt’n Havoc est un bon jeu mais il avait le potentiel d’être tout simplement excellent.